30 novembre, 2006

Le repos du guerrier !


Hier soir, je rentre tardivement de mon cabinet et je dîne sur la table basse devant la télévision en papotant avec mon épouse. Machinalement je lui demande s’il y a quelque chose de bien à regarder et elle me dit que non, qu’elle était en train de lire. Je zappe un peu et, quelque soit la chaîne que l’on regarde, notre commentaire est le même : c’est nul.

Sur France 2 quelque chose retient notre attention. Après avoir consulté le programme, nous apprendrons qu’il s’agit de la série « Equipe médicale d’urgence » ! C’est sans doute une série faite pour les femmes dans ce qu'elles ont de pire et de caricatural tant les bons sentiments abondent et suintent formant une indigeste bouillie glissant grassement entre les neurones en finissant par paralyser tout raisonnement logique, par enrayer toute tentative de pensée critique en amenant finalement le téléspectateur en coma dépassé. Alors même que les situations abordées sont dramatiques, la manière dont elles sont traitées par le scénario les rend risibles et grotesques ! Bienvenue dans un monde dichotomique en noir et blanc dans lequel, le mal absolu et le bien absolu s'affrontent sans aucune zone d’ombre entre les deux ! Un monde dans lequel, l’adjectif cornélien, n’existerait plus ! Un monde dans lequel il serait facile à l’individu de faire des choix puisque le mal serait absolument mauvais tandis que le bien serait absolument bon ! Les légumes verts et l’eau minérale auraient bon goût tandis que les aliments gras et le whisky seraient amers !

C’est tellement cousu de fil blanc, qu’on a l’impression que le scénariste a reçu l’aide d’une assistante sociale septuagénaire, de militants associatifs psychorigides, et de représentants de différents ministères avant d’écrire ses épisodes ! Si la télévision avait existé lors de la révolution culturelle en Chine, nul doute que Mao aurait fait exécuter une série dans ce genre pour embrigader les chinois ! Voilà pourtant, ce que la chaîne France2 écrit sur son site pour présenter cette extraordinaire série :


"Au cœur d’un système pionnier que le monde entier nous envie, ces héros de notre époque ne sont pas des cow-boys qui dégainent leur armada médicale sans états d’âme. Premiers spectateurs des maux qui agitent notre société, premiers témoins de nos vérités, de nos peurs et de nos folies, ces urgentistes sont des gens ordinaires amenés à prendre en charge l’extraordinaire. S’ils nous touchent autant c’est peut-être parce qu’ils nous ressemblent et sans doute parce qu’ils ne sont jamais blasés devant l’horreur".


Le texte semble anodin, mais il n’en est rien ! Un, la sécurité sociale et la médecine pour tous forment un système social solidaire que le monde entier nous envie et toute tentative de critique de ces dispositifs sera considérée comme déviante ! Deux, attention : on n’est pas une atroce série américaine du type Urgence. Ici, pas d’effets de stéthoscope, pas de médecin à belle gueule mais des mecs communs dotés d’un physique banal à hurler et d’une sensibilité de jeune fille ! Trois, on vous le répète, ici, vous êtes en France, donc on vous interdit de rêver, vous n’aurez le droit qu’à des gens ordinaires ! Enfin, par contre ce qui est extraordinaire, c’est la maladie ou l‘accident parce qu’il est bien connu que dans le paradis français, on doit vivre mille ans sans problème sérieux, etc. Alors plongeons–nous dans cette merveille qui doit nous ravir !

Par exemple, alors qu’ils interviennent sur un accident de la route, bien sûr le chauffard est ivre et les victimes sont pauvres et innocentes puisqu’il s’agit de la mère et de sa fille, qui, rendez-vous compte venaient de faire huit cents kilomètres de routes pour finalement finir tuées a deux kilomètres de chez elles ! De plus ce salaud de chauffard blesse grièvement sa petite amie qui est non pas paraplégique mais carrément tétraplégique ! De toute manière, ce connard de petit alcoolique ne l’emportera pas au paradis puisqu’il se fait buter par le mari et père des victimes, flic de son état, et arrivé sur les lieux de l’accident après avoir été prévenu par un des as de notre Equipe d’urgence médicale !


Alors, reprenons tous en chœur : boire ou conduire il faut choisir, si on boit on ne prend pas le volant ! C’était un message de la prévention routière ! N’oublions pas aussi qu’un flic est un individu violent qui peut faire n’importe quoi avec son arme. Les armes c’est pas beau !


Enfin, alors qu’il a été sauvé d’une crise cardiaque, par un des médecins du SAMU, un homme se présente audit médecin afin de le remercier tout en lui précisant qu’il aurait mieux valu le laisser mourir ! En effet, il s’est aperçu après qu’on lui ait fait une prise de sang qu’il était séropositif ! Et de raconter qu’étant en tournée en province, il s’est senti seul un soir et qu’il a couché avec une femme, qui était représentant de commerce comme lui ! Attention, précise-t-il, une femme bien, pas une prostituée ! Hélas, avoue-t-il dépité, il a une épouse et deux enfants, comment faire ? Il songe au suicide ! Et là le médecin de le rappeler à ses obligations concernant son épouse qu’il risque de contaminer en précisant que des traitements existent et qu’il serait bien lâche d’envisager le suicide, que ce serait fuir ses obligations ! Et cet homme écoute patiemment et religieusement le médecin lui faire la morale ! Et bien sûr il est immédiatement d’accord avec le médecin et va de ce pas prévenir son épouse de son incartade en l’enjoignant de se faire dépister elle-même au cas ou il l’aurait contaminée ! Et ce brave homme ajoute : « Je n’y crois pas ! Cela m’arrive à moi ? Moi qui pensais que le SIDA était une maladie réservée aux homosexuels et aux toxicomanes ».


Alors reprenons tout en chœur : le SIDA continue à faire des victimes chaque année et il faut se protéger avec un préservatif. Le SIDA touche toutes les catégories de la population et pas seulement les homosexuels et les toxicomanes. C’était un message du Ministère de la santé et d’Act-Up !


Ensuite, le père d’un des médecins du SAMU a une crise cardiaque. Immédiatement, ce médecin interprété par Christian Vadim se rend au chevet de son père. Il le trouve allongé, victime d’un infarctus. C’est la maîtresse de son père, Noire sculpturale, qui a donné l’alerte. Il le réanime et l’envoie à l’hôpital. Nous apprendrons que son père est en fait un grand ponte en cardiologie avec lequel qui lui a toujours reproché de n’être qu’un médiocre petit urgentiste. Mais en attendant, il vient de sauver la vie de son père, comme quoi, médiocre urgentiste peut-être mais bon médecin tout de même !


Alors répétons ensemble : Ce n’est pas la position sociale qui fait l’homme mais ses vertus morales ! C’était un message du ministère de la solidarité et de la cohésion sociale.

Bien sur, je pourrais développer à l’envi, la critique de cette série qui outre son scénario apocalyptique multiplie les poncifs les plus éculés comme dans tout bon nanar qui se respecte ! Et bien sûr les hommes sont représentés soit comme des salauds veules et machos toujours prompt à tromper les autres ou la loi ou des encore fiottes dévirilisées en proie aux doutes mais rassurés par des femmes toutes puissantes. Les Noirs sont soit en fait des femmes, consistant soit en une salope sculpturale instrumentalisée par le mauvais homme blanc ivre de pouvoir ou soit en une grosse et joviale indigène affublée d’un boubou et d’un turban sur la tête, genre de clone du bon Noir rigolard posant sur les boîtes Banania.

Enfin, j’ai beau dire que j’ai trouvé cela nul, cela m’aura tout fait prendre conscience que j’était sur la mauvaise voie, que j’étais un déviant par rapport au catéchisme d’état. C’est décidé, j’arrête mon travail. J’ai pris réalisé hier soir que je ne servais à rien. Je vais dès demain téléphoner à l’ensemble de mes patients pour leur dire que c’est terminé. Je leur expliquerai que je ne les adresse pas à un confrère mais qu’il leur suffira dorénavant pour aller bien, de regarder Equipe médicales d’urgence sur France 2 et que tôt ou tard leur problème sera traité de manière simple et efficace. Je leur dirai que j’ai pleinement conscience de leur avoir nuit en pensant que l’être humain était complexe. Le monde est noir ou blanc, il y a le bien et le mal, les gens bien et les salauds et une bonne prise de conscience permet tout être engagé dans la mauvaise voie, de devenir quelqu’un de bien, il suffit de faire son autocritique comme au temps béni du petit père des peuples.


Mais trêve de plaisanterie, la semaine prochaine, je me retape la suite parce que j’ai vraiment bien rigolé ! Ca vaut presque la série Les dames blanches avec Sandrine Bonnaire que j’avais suivi un été, tellement c’était drôle et délirant. J’adore les nanars. Et la télévision française produit depuis vingt ans un tas de séries nanardes extraordinaires ! Je suis sûr qu'isl feront un épisode sur le cancer du poumon dans lequel on verra un vilain fumeur ! Ayant consulté la lsite des épisodes déjà diffusés, j'ai vu qu'isl avaient déjà traité la violence conjugale. J'imagine qu'il y avait un très vilain monsieur et une pauvre femme totalemetn victime !


Les Etats-Unis n’ont qu’à bien se tenir, ils avaient Urgences avec Clooney et Nip-Tuck, et bien maintenant, nous on a Equipe médicale d’urgence avec le fils Vadim et croyez-moi ça va chier, même le brave Derrick risque d'être détrôné
.


28 novembre, 2006

Défense d'uriner ! Loi de 1881

Dans la série « merveilleux et étranges psychanalystes », que j’avais amorcée dans le post précédent, voici une petite anecdote qui m’est arrivé voici deux ou trois ans.

Une patiente, qui fréquentait mon cabinet depuis quelques mois et je connais donc fort bien, arrive un jour, avec un peu de retard, et à peine son manteau ôté, me demande si j’ai des toilettes. Je lui réponds positivement en lui indiquant la localisation de l’endroit et en précisant, comme à chaque fois, que l’interrupteur est à l’extérieur.

Quelques minutes après, la voici de retour en s’excusant platement de ne pas avoir pris ses dispositions avant et en me remerciant chaleureusement de l’avoir autorisée à utiliser mes toilettes. Son attitude est plutôt amusante si l’on considère que je n’ai décidemment pas fait grand-chose, en lui indiquant le chemin des toilettes, pour mériter de telles marques de reconnaissance ! Mon cabinet est pourvu de toilettes, et les utilise qui en a besoin, point ! Son envie devait être hyper pressante pour que j’aie le droit à de telles effusions !

Comme je connais fort bien cette patiente, par ailleurs dotée d’un caractère de panzer, je suis très étonné par sa réaction. Aussi lui demandé-je pourquoi elle me remercie autant pour quelque chose d’aussi insignifiant ? Elle me compte l’historie suivante :

Voici quelques années, alors qu’elle suivait une psychanalyse, elle arriva avec un peu de retard à sa séance et surtout une envie pressante ! Elle demanda alors à sa psychanalyste si elle disposait de toilettes. Et celle-ci lui expliqua que oui, mais que pour des impératifs analytiques, il était mieux qu’elle redescende utiliser les toilettes du café situé en face de son cabinet. Un peu interloquée, mais intimidée par sa psychanalyste, ma patiente alla donc au café pour uriner et revint pour sa séance. Sa psychanalyste lui expliqua alors tout un tas de trucs, concernant la symbolique des fèces dans le processus analytique, etc. Ma patiente n’ayant pas compris la moitié de la logorrhée de sa psychanalyste ne parvint pas à m’expliquer correctement que cette dernière lui avait avancé comme arguments pour lui démontrer qu’il n’était pas souhaitable thérapeutiquement parlant qu’elle utilise ses toilettes.

Cette histoire me fit sourire parce que je ne voyais pas le lien entre l’utilisation de toilettes et le processus thérapeutique mais, je ne suis pas psychanalyste. Ma patiente me demanda ce que j’en pensais et je lui répondis que je n’en pensais rien et que je n’avais pas la moindre explication psychologique à lui fournir pour l’éclairer sur cette curieuse histoire. Je rajoutai que les psychanalystes avaient leurs raisons que la raison ne connaissait pas mais que d’après moi, la vérité devait être bien plus prosaïque : ses toilettes ne devaient pas être très nettes tout simplement et elle avait eu honte que quelqu’un s’en rende compte. Ca tue le mythe de la psychanalyse toute puissante, des chiottes sales, et ça fout une méchante claque au transfert !

"Attention ! Nuit gravement au transfert positif"

Décidément, je ne comprendrai jamais les psychanalystes ! Mais si quelqu'un veut bien se donner la peine de m'expliquer ?

27 novembre, 2006

Peut-on offrir un café ?

Peut-on offrir le café lorsque l’on reçoit en consultation des patients ? La question vous semblera sans doute nulle, futile et sans intérêt aucun et pourtant, bien des confrères pourraient écrire un livre sur le sujet. Pourquoi me suis-je posé moi-même cette question ?

Voici bien des années, je devais avoir 24 ans à l’époque, je suivais une psychothérapie analytique. La psychothérapie analytique est une psychanalyse à la sauce de Carl Gustav Jung, qui fut un élève de Freud avant de s’en désolidariser, pour des raisons qu’il me serait trop long de relater ici.

Mon analyste était un vieux psychiatre fort sympathique mais extrêmement précautionneux et ne désirant prendre aucun risque par rapport au cadre analytique tel que lui avaient enseigné ses maîtres. L’ayant en face de moi semaine après semaine, je sentais bien à ses réactions, qu’il aurait pu se laisser aller, et devenir un peu plus libre dans sa manière de fonctionner mais il n’osait pas. Ayant passé plusieurs dizaines d’années à l’APHP, je n’ai jamais su, si c’était la fonction publique qui avait gommé toute velléité de liberté chez lui, ou s’il était né, ainsi tatillon et timoré. Un minuscule événement allait me permettre de le connaître un peu plus.


Un soir de juillet, alors qu’il faisait chaud et que je n’avais même pas eu le temps de m’arrêter boire quelque chose au café du coin, j’arrivais en nage chez lui, après avoir gravi les quatre étages en courant. Il me reçut fort aimablement, nous nous nous serrâmes la main et entrâmes dans son cabinet. Ayant terriblement soif, avant de m'assoir, je lui demandai alors si je pourrais avoir un verre d’eau. Il resta une fraction de seconde assez dubitatif, alla farfouiller dans une autre pièce et revint avec un verre et une canette d’Orangina qu’il me proposa. Jusque là, rien à dire, c’était courtois et fort aimable de sa part de m'offir à boire. Ce qui fut beaucoup plus amusant, c’est la phrase qu’il rajouta aussitôt, comme pour se dédouaner immédiatement d'une immense culpabilité :

« Euh, n’imaginez pas que ce soit une habitude. Je ne vous propose à boire que parce que l’on se connaît bien et qu’il n’y a pas de risques. Sinon, je ne le ferais pas bien entendu ». Il m’expliqua cela d’une voix douce et docte en me regardant avec ses yeux bleus en ayant l’air de sous-entendre qu’effectivement il venait de commettre une faute extrêmement grave, qu’il ne l’ignorait pas, mais qu’il était assez ouvert d’esprit et libre pour faire une entorse rien que pour moi et que bien entendu, j'étais moi-même suffisamment ouvert d'esprit pour le comprendre et l'absoudre.

Je ne fus même pas surpris de sa réaction mais plutôt très amusé. Comme j’adorais lui rentrer dedans en remettant en cause ses dogmes que je trouvais étriqués et sans intérêt, je le rassurai de suite en lui promettant que cela resterait entre nous à jamais, et qu’il pouvait me faire confiance, que le fait de m’offrir à boire ne m’inciterait aucunement à l’appeler dorénavant papa ou à vouloir coucher avec lui ! Je le rassurai en lui précisant que, j’avais soif il m’avait offert à boire, point final : le précieux transfert dont il faisait tant de cas n’en serait pas altéré. Je lui rappelai qu'un simple verre d'eau aurait suffit !


Cet épisode m’a toujours amusé et je m’en suis souvenu lorsque je me suis installé quelques années plus tard. Il faut dire que j’aime bien accueillir courtoisement mes patients. La plupart viennent qui avec une histoire difficile, qui avec des symptômes divers et variés. Dans tous les cas, il n’est pas facile de se confier à un type que l’on rencontre la première fois. Et si je ne peux leur éviter de souffrir en quelques minutes et d’éprouver de l’anxiété eu égard à leurs problèmes, je peux au moins leur éviter une anxiété de niveau deux en leur évitant de redouter de venir me consulter. Je suis donc chaleureux et plutôt accueillant. Et donc, je propose toujours soit un thé soit un café à mes chers patients. Je vais même plus loin que cela puisqu’il y a du café ou du décaféiné, et plusieurs sortes de thé et il est possible de fumer dans mon cabinet. L’important est que, lorsqu’il s’asseyent dans le fauteuil pour me parler, ils soient le plus détendus possible pour me faire part de leurs tourments. C’est pour moi une façon d’accueillir chaleureusement autrui et rien d’autre, une manière de mettre à l’aise les gens qui ne nuit en rien à la relation thérapeutique que nous devrons établir.

Or, cela faisait deux ans environ que j’avais ouvert mon cabinet, lorsqu’en visite à mon syndicat professionnel, je me mis à parler avec des confrères psychanalystes de tout et rien. Et naïvement, je leur expliquai que j’offrais un café ou un thé à mes patients. Ils tournèrent tous la tête vers moi et l’un d’eux, un vrai lacanien totalement à la masse, vraisemblablement terrorisé, s’écria : « mais c’est du passage à l’acte ! ». Il précisa sa pensée en se livrant à un exposé théorique et fumeux, dans lequel il cita de nombreux et illustres confrères, que je ne compris pas. Et encore aujourd’hui, je ne comprends toujours pas, en quoi offrir un café serait un passage à l’acte ? Pauvre type, me suis-je dit en mon for intérieur, s’il est aussi peu sûr de lui pour qu’offrir simplement un café le fasse chanceler de son rôle thérapeutique, il ne doit pas aller très bien dans tête.


Décidément, même s’ils m’amusent souvent beaucoup, je ne comprendrai jamais les psychanalystes ! Mais j’offre toujours le café.

26 novembre, 2006

Voir Bitche et mourir !


Dans un post précédent, j'ai imaginé, que Shanice, l'une des tentatrices de l'émission "L'île de la tentation", pouvait présenter ses strip-teases sordides au Macumba Club de Bitche. J'ai reçu un courrier ulcéré d'une habitante de cette charmante bourgade me reprochant de me moquer injustement de sa ville. Je suis profondément peiné d'avoir choqué cette lectrice.

Effectivement, d'une part, je ne suis pas sûr qu'il y ait un Macumba Club à Bitche et enfin, j'aurais pu prendre une ville effectivement médiocre pour illustrer le pathétique parcours artistique de Shanice et non cette sympathique petite ville de Lorraine. En effet, Shanice se produisant à Bitche, c'est un peu comme Georges-Alain (on dit maintenant Georges-alain Jones) de la Star'Ac se produisant au Stade de France, c'est totalement incongru et tout juste digne d'un mauvais roman de science-fiction !

Car, c'est un fait, loin d'être une ville sans intérêt comme je le prétendais abusivement, Bitche est une bourgade charmante et riche d'histoire. La ville est située en Lorraine à l'extrême Nord-Est du département de la Moselle (57), près de la frontière allemande et compte 5751 habitants (dont ma lectrice courroucée). Son histoire mouvementée, puisqu'elle ne fut définitivement rattachée définitivement à la couronne française qu'en 1766, ainsi que la proximité de l'Allemagne en fait un lieu où l'histoire militaire est très présente, comme en attestent les défenses qui la protège et notamment sa citadelle magnifique. Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site, fort bien fait, de cette commune.



Plus récemment, la ville de Bitche inspira le chanteur Frank Alamo, qui l'immortalisa en 1963 dans sa chanson mondialement connue dont le titre est : "Bitche oh ma Bitche". Enfin, après la seconde guerre mondiale, suite à l'implantation des troupes américaines en Lorraine, beaucoup d'enfants de cette ville, conquis par l'american way of life, décidèrent d'émigrer aux Etats-Unis. Prenant, l'habitude de dire qu'ils étaient des fils de Bitche, et donc en anglais des son of Bitche, cette expression mal comprise des américains dégénérera bientôt pour devenir son of bitch, expression qui n'a pas du tout le même sens mais connaîtra un immense succès. Ainsi, si vous êtes vous-même un bitchois (habitant de Bitche) et que vous alliez aux Etats-Unis, expliquez aux américains que vous êtes "a son of the city of Bitche in France" mais ne dites surtout pas que vous êtes un "son of Bitche" pour éviter toute méprise sur la moralité de votre maman ni que vous venez de Bitche-City, ce qui pourrait aussi prêter à confusion.

(Robert De Niro expliquant trivialement qu'il n'est pas un sacré lorrain)

Mais finalement, je boucle la boucle, puisque j'ai commencé par parler de Shanice pour finir par parler de bitch, mot anglais que je vous laisserai le soin de traduire par vous même.


Ceci dit, vous noterez sur l'affiche de Shanice, que je ne m'étais pas trompé totalement puisque la belle s'est produit à l'Oasis Beach de Villeneuve-la-Guyarde dans l'Yonne (89). Beach, bitch, Bitche, mon erreur était prévisible et presque pardonnable.

25 novembre, 2006

Qui pourra l'arrêter ???

Greffe de cerveau ! Mais que fait la recherche ?


Tandis que j'était en train d’illustrer mon précédent post, assis devant mon PC, j’ai mis la télévision. Comme les vieux, je l’écoute à peine, ne la regarde pas, mais cela me fait un bruit de fond, une compagnie. D’un seul coup, je suis tiré de mon activité par les dialogues que je perçois.

Il s’agit de la cultissime émission «C’est quoi l’amour», présentée par Carole Rousseau, illustre animatrice que le monde entier nous envie. Je retourne m’asseoir devant mon bureau et me remet à mon cher blog, en écoutant d'une oreille attentive ce que les gens racontent. Il s’agit d’une spéciale « L’île de la tentation », dans laquelle sont invités les protagonistes de la dernière de la émission. Cela devient passionnant ! On se croirait dans un tribunal correctionnel quand les contradicteurs s'engueulent, les uns jetant à la tête des autres des anathèmes terribles en s'accusant d'avoir gravement manqué d'honneur, un mot dont manifestement aucun des participants ne connait la signification.


Les interventions sont apocalyptiques de connerie, ahurissantes de bêtises, fantastiques de misère intellectuelle, on se croirait dans un sketch des inconnus de la grande époque, sauf que c’est vrai, c’est réel, il s’agit de la vraie vie, avec des vraies gens qui ne jouent pas mais vous racontent sans pudeur et dans toute son ignominie leur misérable petite vie de dépravés amoraux et idiots rêvant de gloire factice, d’argent facile sans efforts en contrepartie. Une illustration cliniquement froide de ce que peut être la sociopathie normale et banale de personnes qu’on croise tous les jours dans la rue, qui n’ont conscience ni du bien ni du mal ou alors très vaguement mais sont prêts à tout pour réussir. Beurk !

Croyez-moi, bien que je sois installé en ville et non praticien dans un hôpital, j’ai eu une clientèle parfois assez gratinée, je ne compte plus les toxicos adeptes de la shooteuse, les paumés, les largués, les laissés pour compte, que j’ai reçus et avec qui j’ai toujours eu et ce, dans une écrasante majorité, les meilleurs rapports. Mais je n’ai jamais reçu le genre d’individus présents dans cette émission.

Si je les avais écoutés tels qu’ils se présentent dans cette émission avec leur cents mots de vocabulaire, leurs idées idiotes sur le monde, leur bêtise crasse, qu’aurais-je pu faire et dire pour les aider ? En bref, comment expliquer à un crétin qu’il doit s’accepter comme tel et cesser de jouer les malins ?

Dans cette émission, une mention spéciale à Harry, à son accent racaille, ses stéréotypes minables et ses cent mots de vocabulaire, dont la bêtise dépasse en intensité celle cumulée de tous les autres participants, tentatrices et tentateurs compris ! A noter, une scène mémorable ou son oncle, lui dit « qu’il devrait faire les cours Florent parce qu’il a du talent et que de toute manière il a déjà fait l’acteur dans l’île de la tentation ». Le neveut répond alors "faire les cours Florian ?" Devant le côté dubitatif de son abruti de neveu, l’oncle idiot qui s’improvise agent, lui dit alors : « ben fais la Star’ac alors ? ». « Ben je sais pas chanter » répond Harry pour une fois réaliste. « Ben y vont t’apprendre tu seras crooner après », lui explique l’oncle débile décidément obstiné. La scène était géante et n’aurait pas démérité dans l’émission Strip-Tease ! Si quelqu’un peut me retrouver cette scène sur Dailymotion ou bien Youtube, je suis preneur.

Une autre mention avec félicitation du jury à Shanyce (un vrai prénom à faire ce genre d'émission), qui nous montre sa désolante vie d’artiste. Ladite vie d’artiste consistant à faire des strip-teases vulgaires dans des boîtes de nuit miteuses du style Macumba Club de Bitche (bonjour la Lorraine) ou encore Star 2000 de Salbris (salut la Sologne) au cours desquels elle va montrer sa raie à des abrutis fêtant leur anniversaire bourrés de mauvais Clan Campbell, la trogne rougeaude et l’œil libidineux, en se frottant à eux. Pathétique… Autant Harry faisait rire, autant elle fait de la peine, pauvre petite pintade blonde qu’elle est, qui pense exploiter son corps alors qu’elle n’est qu’exploitée par un système vicieux et pervers. On aurait eu envie de la prendre par la main et de lui dire : « allez ma jolie, ne perds pas ton temps, trouve toi un taf sérieux et un mec correct et oublie tout çà. ».

Alors que dire, comment conclure après un truc aussi affligeant mais aussi très drôle ? Ben, euh désolé les pouffiasses et les abrutis, on ne fait pas encore de greffe de cerveau, mais ne perdez pas espoir et attendant l’opération magique, trouvez-vous un vrai métier utile à la société et oubliez la gloire comme elle vous oubliera toujours.

Et en tout cas, merci à TF1 d’avoir trouvé une utilité à cette bande de bras cassés, bel exemple d’insertion par le travail. Et en plus, ca fait tourner Skyblog, le service des ados idiots ne sachant ni lire ni écrire, en nous préparant les futurs participants, comme en témoigne ce blog particulièrement croustillant !


24 novembre, 2006

Misère et réalité quotidienne du psy non médiatisé !

Tant que je n’aurai pas écrit un super livre, vantant guérison et bonheur absolu pour tout le monde sans trop d’efforts avec des recettes psy simplistes comme mes illustres confrères David Servan-Schreiber ou encore Marcel Rufo, disponible par piles entières à la FNAC où chez l’hyper le plus proche de chez vous, je ne serai pas mon propre prescripteur. Ce qui signifie, que je nécessiterai de prescripteurs extérieurs pour trouver de nouveaux patients afin de reconstituer ma clientèle.

Certains trouveront l’article très mercantile mais le réel c’est aussi cela. A moins d’œuvrer dans un cadre institutionnel et d’avoir son petit chèque en fin de mois quelque soit le travail et les résultats fournis, on ne peut négliger l’aspect marketing d’une activité. Etre en libéral, c’est se soucier des fins de mois et se souvenir que l’on est chef d’entreprise.

Bon, venons en au fait. Un prescripteur, qu’est ce que c’est ? Alors voici une définition assez exacte de ce terme marketing. Un prescripteur est un leader d’opinion, c’est à dire une personne qui eu égard à sa notoriété, son image, son statut social, sa profession, ses activités et/ou son style de vie, est à même de recommander une entreprise, une marque, un produit, et d’être reconnue pour la valeur de sa recommandation par un nombre plus ou moins important de consommateurs. Son influence sera d’autant plus grande que ses caractéristiques sociodémographiques seront proches des individus à qui il destine son message. Les leaders d’opinion forment un groupe social spécifique qui se caractérise par un haut degré de sociabilité et la prise de conscience de leur influence en tant que guide. Un leader d’opinion est un individu qui influence de façon formelle le comportement d’autres personnes dans une direction souhaitée. Ses avis sont spontanément sollicités par son entourage immédiat (amis, collègues, voisins, relations sociales, etc.) avant ou après l’achat d’un produit ou un service. Tout consommateur peut, potentiellement être considéré comme un leader d’opinion dans l’un ou l’autre des marchés de biens et services.

Finalement, c’est fort simple, un prescripteur efficace pour moi, sera par exemple, le patient qui dit : « ah vous cherchez un psy, allez donc consulter Philippe, c’est le meilleur de la galaxie. Moi il a changé ma vie, avant j’étais un gros nul et maintenant je suis quelqu’un de super que tout le monde adore et je vole de succès en succès », et qui sera écouté. Donc des prescripteurs, c’est capital pour mon boulot si je veux survivre car vous l’imaginez je ne vis pas d’amour et d’eau fraîche mais des honoraires versés par mes chers patients, en échange de mes prestations que tout le monde s’accord à trouver géniales.

Il existe deux types de prescripteurs pour mon activité, pour le moment. Comme je le disais en préambule, trop fainéant ou contemplatif pour écrire un livre alors que certaines personnes m’y encouragent, je n’ai pas de papiers dans la presse et je ne suis pas une star et ne puis donc devenir mon propre prescripteur. Dommage, cela m’arrangerait bien d’avoir des articles de presse, dans lesquels je pourrais astucieusement vanter mes mérites rien qu’à moi en faisant sembler de parler d’un truc plus général. A l’instar de certains confrères que je ne nommerais pas, j’irais gloser sur n’importe quel sujet en faisant le psy de service, celui qui sait, celui sans l’avis duquel les gens vivraient moins bien, aveuglés qu’ils sont par leurs raisonnements abrutis. A ce propos, certains confrères sont devenus des as de la starisation et sont présents sur tant de plateaux de télés et dans tant de journaux, qu’on se demande même comment ils peuvent encore recevoir des patients ! Mais moi, pauvre petit psy sans envergure, être obscur, individu sans grade, tâcheron du bonheur : en termes de prescripteurs, il me faut compter principalement sur mes anciens patients et sur les médecins.


Les anciens patients assurent environ la moitié de mes renouvellements de clientèle. Ce sont d’excellents prescripteurs. Les anciens patients, parce qu’ils ont été satisfaits de mes prestations, ont parfois le zèle des convertis et parlent de moi de manière dithyrambique ce que j’apprécie toujours même si j’ai renoncé, du fait de ma modestie, à me faire appeler Grand Maître de la Galaxie ou Guide suprême de la Pensée. En plus, l’activité anti-secte est tellement importante en France que des associations du type UNADFI, seraient venues m’emmerder si j’avais joué les gourous : j’ai donc renoncé à me vêtir d’un sari orange, à me raser le crâne et à jouer le sages pénétré d’une sagesse séculaire. Il y avait aussi la version à costard blanc et gros médaillon autour du cou, mais le look a déjà été pris par Raël !

Enfin, étant de nature plutôt cool, je suis plutôt accessible et je garde de bons liens avec certains ex-patients avec qui il m’arrive de prendre un café voire de déjeuner aussi ai-je patiemment tissé un réseau important. A ce propos, sur le fait de savoir s’il est possible ou non de voir un patient hors du cabinet, cette question essentielle fera l’objet d’un futur post. Sur ce sujet, et toutes choses égales par ailleurs, j’ai des positions plutôt opposées à celle de mes confrères : oui, on peut prendre un café avec un patient sans pour autant altérer le lien thérapeutique et sans nuire à la thérapie. Et toc !

Ceci dit, le fait d’être cool et sérieux sans avoir pour autant des principes rigides m’a plutôt bien réussi puisque certains patients que je remercie très sincèrement au passage, m’ont vraiment bien aidés à constituer ma clientèle lorsque je m’installais. Je me retrouve aujourd’hui par exemple avec un tiers de ma clientèle issue du secteur de la mode grâce à un seul patient qui oeuvrait dans ce secteur. Le secret professionnel m’empêche bien sûr de citer cette personne mais si d’aventure, elle me lisait par le plus grand des hasards, et que par un hasard encore plus grand, elle se reconnaisse ou imagine se reconnaître, qu’elle sache que je la remercie vivement. De plus, c’est très sympa de m’avoir envoyé tous ces patients car cela me permet, en cultivant mon réseau, de jouer les grands seigneurs avec mon épouse en lui offrant des trucs de marques sur lesquelles j’ai 70% de remise. Si un jour j’en ai marre d’être psy, qu'un beau matin j'ai envie de coller des beignes à mes patients, alors j’ouvrirai une solderie : j’ai suffisamment de contacts dans ce secteur pour achalander la boutique avant l'ouverture voire pour recruter des vendeurs !


Le solde du renouvellement de ma patientèle est assuré par les médecins qui sont donc de précieux auxiliaires qu’il faut soigner, sans jeu de mots ringard. Je travaille avec un certain nombre de généralistes et spécialistes qui me font l’honneur de m’adresser certains de leurs patients. Parmi ces médecins, certains sont très cools, on se tutoie, on déjeune, on boit des coups, on rigole, on fait du bon boulot et tout va bien dans la bonne humeur : comme diraient les jeunes, on ne se prend pas la tête, on fait notre boulot de notre mieux sans se la raconter. Ce sont des médecins à la vocation sans faille qui ont chois leur métier par pure vocation et par amour des gens et/ou de la science et non par passion pour le fric ou pour tenter de compenser des complexes d’infériorité.

D’autres médecins en revanche, investis de la mission que leur donne l’état, boursouflés par une forme de toute-puissance très clairement névrotique, sont nettement moins cools voire carrément très cons. Lorsque je les rencontre une à deux fois par an en faisant la tournée des popotes, je m’assieds bien sagement dans leur cabinet, et j’écoute ce qu’ils ont à me dire. En général, de la part de ces médecins bouffis d’orgueils et de névroses diverses, j’ai le droit à une pièce de théâtre savamment répétée et jouée des centaines de fois, dans laquelle, ils ont le rôle du docte personnage omniscient ayant pour mission d’instruire un pauvre crétin que j’interprète à merveille. En règle générale, j’ai le droit à des considérations oiseuses vaguement psychanalytiques dont le but est de me faire comprendre, qu’au-delà de la médecine, ils connaissent aussi tous les rouages de l’être humain. J’acquiesce à tout ce qu’ils me disent, j’adhère chaudement, et tout dans ma manière laisse entrevoir que je pense sincèrement : « qu’est ce que vous êtes fort chef ! ». Ce type de médecin très cons, ont én général des traits narcissique et/ou paranoïaques prononcés et ne voient dès lors le monde que comme un ensemble d’individus à classer entre dominateurs et soumis.

J’ai parfois envie de me lever et de leur foutre des claques ou du moins de leur faire comprendre que je ne suis pas le crétin qu’ils imaginent mais je m’en abstiens. D’une part, je sais que la colère est mauvaise conseillère et étant moi-même assez orgueilleux, je trouve très formateur de ronger mon frein face à ces charlots en me disant « ta gueule Philippe, laisse les parler, tais-toi, ne réagis pas ». C’est un exercice spirituel stoïcien très profitable qui forge l’âme. D’autre part, je décide aussi de m’adapter pour des motifs moins nobles car, lorsque je vais à ma banque, je connais le bordereau de versement d’espèces ou de chèques mais pas le bordereau de versement d’orgueil. Donc, je m’abstiens et tant qu’ils m’envoient des patients, je me tais et j’endure : c’est aussi cela le monde réel, savoir maîtriser ses émotions pour faire contre mauvaise fortune bon coeur.

En conclusion, se faire une clientèle est une activité plutôt enrichissante. Que l’on rencontre des gens sympas et l’on passera de bons moments, que l’on rencontre des crétins et ce sera l’occasion de travailler sur soi-même. Je ne regrette donc pas d’être en libéral.

Mais parfois, je me plais à rêver que je pourrais moi aussi être sur un plateau de télévision, à pérorer sur n’importe quel sujet. Ou bien, je m’imagine, interviewé dans un magazine people ou un féminin célèbre, donnant mon avis sur tout et n’importe quoi, faisant l’important. Tout cela pour un jour, devenir mon propre prescripteur, l’alpha et l’oméga de ma propre activité. Ensuite, les patients viendraient tout seuls comme des grands, déjà totalement conquis, quelques soient mes mérites véritables par la magie de ma médiatisation unique. J’aurais une attachée de presse super mignonne en petite jupette et talons hauts qui me bookerait des rendez-vous et me ferait un plan de com’ en m’appelant docteur. Elle aurait un prénom composé et un nom à particule, comme les attachées de presse des grandes maisons de couture et je pourrais lui dire entre deux rendez-vous : « Non Marie-Sophie, refusez l’interview de TF1, mais dites oui à CBS. Par contre, dites à mon agent que je suis d’accord pour ce long métrage sur ma vie mais uniquement si Clooney interprète mon rôle et si Spielberg réalise». Je disposerai aussi d’une agence spécialisée qui travaillerait sur mon image, des éditeurs me solliciteraient, etc.


C’est décidé, demain je commence soit à écrire un livre intéressant et surtout très facile à lire, que j’appellerai « Soyez heureux, beaux, riches et en bonne santé, sans faire d’efforts », soit à m’entraîner pour escalader la tour Eiffel à mains nues en ayant mon nom et mon adresse professionnelle écrits en gros dans le dos, moi aussi je veux être célèbre et ne plus rien foutre d’autre ensuite que de jouer le beau. Ou alors, peut-être que je pourrais trouver un truc encore plus simple à faire pour me faire connaître du grand public ? Oui, mais quoi ? Euh, allez je vais participer à une émission débile sur France 2.

22 novembre, 2006

Message sans intérêt voire totalement idiot !


Chose promise, chose dûe, je vous propose une nouvelle commémoration ! Aujourd'hui, le discret mais toujours très élégant petit compteur disposé sur la sidebar de mon blog vient d'afficher le 911ème visiteur sur ce site.

Comme j'en retire une immense joie et une fierté plus que légitime, je tenais à fêter l'évènement en en postant un commentaire sans autre intérêt que de m'autocongratuler. J'avais d'abord imaginé d'organiser une immense soirée dans un endroit branché de Paris avec open-bar et sponsors prestigieux. Soirée à laquelle je serais arrivé, vêtu de blanc et accompagné d'un groupe de Philippe's girls, toutes plus belles les unes que les autres, se déhanchant sur un rythme électro, des admirateurs en délire jetant des pétales de rose sous mes pas et encadré d'une double haie d'honneur de gardes républicains sabres au clair. Mais, je préfère rester simple comme à mon habitude en me contentant de cette modeste annonce.

(Le célèbre constructeur allemand Porsche décide de fêter le 911ème visiteur de mon blog en créant un modèle commémoratif)

Merci aux services de police et de pompiers de la ville de New-York qui semblent fêter aussi mon 911ème visiteur !

21 novembre, 2006

Mon enfant est mort - première partie !

Rassurez-vous, il ne s’agit pas de moi, je n’ai pas de fils, ni d’une autre personne. Non, ce titre mélodramatique et un peu choquant, n’a pour unique but que de vous faire partager la réalité du métier de psychothérapeute. Trop souvent, le public imagine que nos cabinets sont infestés de gens faibles venus pour raconter leurs petits soucis quotidiens ce qui est totalement faux. Pour d’autres encore, être fort serait de s’en sortir seul sans aucune aide quelconque. Et puis il y a la réalité où dans le secret de nos cabinets, certaines personnes viennent chercher de l’aide pour tenter de trouver une solution aux drames qu’elles vivent et qu’elles n’arrivent plus à affronter.

Récemment encore, les pouvoirs publics ont fait une loi, à l’initiative du député Accoyer pour réglementer le titre de psychothérapeute ce qui est impossible comme vous allez le voir.


Ainsi, imaginons qu’une jeune femme prenne rendez-vous, vienne et s’asseye en face de moi et me dise : « voilà, j’ai perdu mon fils récemment et je n’arrive pas à m’en sortir. ».

C’est tout à fait le genre de situation que l’on peut vivre dans ma profession et croyez moi aucune faculté de psychologie, quelque soit le niveau auquel on en soit sorti, ne peut donner les clés pour régler ce genre de drame. Il y a une différence fondamentale entre le fait d’être uniquement psychologue clinicien (ou psychiatre si l’on a fait médecine), et le fait d’être psychothérapeute. Ce ne sont pas les mêmes métiers même s’ils sont connexes. Et vous allez voir pourquoi.

Reprenons notre exemple et imaginons que quelques minutes après qu’elle ait commencé à nous conter son récit, cette jeune femme se mette à pleurer. Tout d’abord, nous proposerons des Kleenex™ car tout bon thérapeute a dans son cabinet des mouchoirs en papier en quantité suffisante de même que tout médecin de film ou série américains se balade toujours avec le stéthoscope autour du cou : c’est une règle absolue ! Lorsque vous entrez dans un cabinet pour la première fois, regardez s’il y a un divan et une boîte de mouchoirs en papier : s’il y a les deux, restez sinon, partez à toutes jambes car vous avez à faire à un sombre charlatant !

Après ce geste d’humanité primaire dont le coût viendra en déduction du chiffre d'affaires s'il a gardé la facture des mouchoirs en papier, le psy va se souvenir de ses cours de psychopathologie et se dire « hmmm, elle pleure et semble abattue. Ma foi, ne serait-ce pas là une bonne petite dépression ? ». Décidemment, qu'attend-t-on là-bas à Stockholm pour célébrer la sagacité de ce psychologue et lui remettre un Nobel ?!

Il n’aura pas tort ! En effet, « perte de l’élan vital » et « humeur triste » sont les deux symptômes évidents de l’état dépressif. Alors, notre psychologue qui est finaud puisqu’il a fait psycho, va poser quelques questions bien senties de derrière les fagots, comme cela, adroitement sans que la patiente ne voie où il veut en venir bien sûr. Sa patiente, entre deux sanglots y répondra sérieusement. Ainsi notre psychologue saura qu’effectivement, elle a des réveils nocturnes et qu’elle ne peut pas se rendormir avant les petites heures du matin, vaincue par la fatigue. Il saura en plus aussi qu’elle a pris ou perdu du poids récemment, etc. « Ca y est, j’en étais sûr, c’est une dépression ». Et là, je m'exclame :"Et le Nobel pour ce psy, c'est pour aujourd'hui ou pour demain les gars ???".

Mais notre psychologue clinicien ira encore plus loin car décidément il est rusé comme un renard. Il va carrément tenter de classer cette dépression car il sait qu’on parle aujourd’hui d’états dépressifs. Muni de divers renseignements, notre psychologue épingle les symptômes comme l’entomologiste les papillons et se dit « mais oui, mais c’est bien sur, une belle dépression réactionnelle ! ». Il est vraiment intelligent, et Dieu qu’il en sait des choses ! Et alors là, moi carrément admiratif devant tant d'intelligenc,e je prends ma plus belle plume pour alerter le comité Nobel que décidémment, ils font une grave erreur en n'honorant pas ce psychologue !

Mais, sous vos yeux esbaudis, le psychologue peut aller encore plus loin, carrément plus loin. Oui mesdames et messieurs, il peut le faire. Devant vos yeux esbaudis, il va carrément définir l’intensité de la dépression ! Roulements de tambour ! Et l’on voit notre psychologue sortir un test, oui vous avez bien lu un test, d’un tiroir de son bureau et le confier à sa patiente. Et toc, celle-ci, va répondre à une série de questions puis tendre sa copie au psychologue. Et celui-ci, après avoir regardé et coté ses réponses d’un air entendu, déclarera qu’elle a une dépression grave. Mais ce n’est pas tout, loin de là.

S’il est sérieux (et notre psychologue l’est assurément parce qu'il a une profession réglementée et que l'état lui fait condiance), il va expliquer à sa patiente que compte tenu de la gravité des symptômes, il serait bienvenu de consulter un médecin qui le cas échéant pourra lui prescrire des antidépresseurs qui l’aideront à lisser son humeur. Il pourra aussi parler de thymie au lieu d’humeur s’il veut vraiment apporter de la valeur ajoutée à son exposé et jargonner un petit peu pour montrer que lui, il a fait psycho putain, et qu'il faut que cela se sache merde quoi ! Déjà qu'il ne peut pas prescrire de médocs parce qu'il n'est même pas médecin, si en plus il ne peut pas jargonner, il est où le prestige de son boulot ? Hein, je vous le demande moi ! Et là, soit la patiente dispose d’un bon médecin, soit le psychologue super sérieux lui explique qu’elle peut aller voir le docteur Machin-Chose de sa part et que c'est un super médecin. Et hop, comme cela il montre qu'il est presque médecin ou enfin un peu scientifique quand même puisqu'il bosse carrément avec des médecins ! Pfff, là, vous serez d'accord avec moi, ce n'est pas un prix Nobel qu'il lui faut, mais au moins deux rien que pour lui, tellement qu'il est futé !

Fin. Voilà le travail du psychologue clinicien tel que l'y a préparé aujourd'hui l'enseignement qu'il a suivi. Loin de moi l'idée d'attaquer les psychologues cliniciens bien sûr car une bonne connaissance de la psychopathologie reste une base évidente du métier mais c'est sans doute la partie émergée de l'iceberg qu'est une psychothérapie.

Ainsi, on pourra applaudir en disant qu’il est vraiment malin notre ami psychologue qui a réussi à mettre des mots là où il n’y en avait pas. Mais bon, certaines mauvaises langues, dont je fais évidemment partie, pourraient aussi dire que la patiente en question, a forcément une bonne copine qui lui a déjà dit qu’elle était en pleine dépression. Soyez aussi assurés chers lecteurs que la patiente en question, savait elle-même qu’elle était en dépression. D’ailleurs quand on perd un enfant, on a de grands risques de faire une dépression plutôt que de sauter de joie.

Ainsi dans les faits, le psychologue clinicien aura apporté bien peu d’aide à la patiente. Ou du moins il aura peut-être précisé certaines choses et aura amenée cette dernière à consulter un médecin pour une prise en charge ce qui n’est déjà pas si mal. Mais bon, soyons réalistes, le bilan est mince. Le vrai travail productif si notre ami en reste là, sera uniquement réalisé par le médecin qui lui au moins apportera une aide précieuse au travers d’un traitement médicamenteux. Le psychologue en recevant la patiente et en l'orientant vers quelqu'un de plus compétent, aura seulement eu un vague rôle paramédical bien moins important par exemple que celui d'une infirmière. Avouez que c’est mince pour cinq années d'étude minimum et que cela ne règle rien. Alors les psychologues ne serviraient ils à rien ?

Les psychologues cliniciens, qui en resteraient là, ne servent à rien affirmons le sans conteste sauf dans le cadre d'institutions où ils feront par exemple passer des tests. Là où au moins, le confrère psychiatre pourrait diagnostiquer et prescrire et donc œuvrer en tant que médecin, le psychologue lui en restera au diagnostic. Et encore, si le psychologue peut diagnostiquer, c’est simplement parce que les médecins sont bienveillants car le code de la santé publique reconnaît explicitement que le diagnostic est de la compétence des seuls médecins !

Le psychologue est donc d’une utilité assez discutable. A moins bien sûr qu’il ne soit aussi psychothérapeute mais ce n’est plus le même métier du tout et cela ne s'enseigne pas en faculté durant le cursus classique. Etre psychologue diplômé d'état ne laisse pas augurer que l'on sera un bon psychothérapeute.

A l’origine, la profession de psychologue était spécifique dans la mesure où elle était placée aux confins des disciplines scientifiques et philosophiques. C’est pour cela que les psychologues n’ont jamais voulu devenir des auxiliaires de santé comme le sont par exemple les kinésithérapeutes. D’ailleurs, psychologue avant d’être une profession réglementée, est avant tout une qualité partagée par bon nombre d’individus indépendamment de leurs formations : n est psychologue ou on ne l'est pas vous diront les bonnes gens.

La scientifisation de la profession et son intervention dans beaucoup d’institutions, a poussé le législateur à réglementer la profession. De ce fait, en sortant de leurs cabinets, les psychologues ont perdu leur liberté. Réglementée sans pour autant être véritablement inscrite dans une politique de santé publique, le psychologue clinicien n’est pas grand-chose. Il a certes des compétences en psychopathologie mais c’est tout puisque la faculté ne lui apprend même pas à traiter ce qu’il diagnostique. Imaginez un avocat qui ne pourrait pas plaider, c’est un peu cela la profession de psychologue clinicien.

Dans notre exemple, il a mis la patiente dans une jolie petite boîte sur laquelle, il a écrit "dépression réactionnelle d’intensité grave" et a refilé le tout à un médecin. Le sujet, ici réduit à un objet d'examen diagnostique et d'expertise pour satisfaire la logique d'un désir institutionnel et administratif de maîtrise, est bel et bien occulté, bâillonné et nié. Sa subjectivité quand à ce qu’il vit, la manière dont il vit cette expérience, n’est pas abordée. Le diagnostic seul, stérilise, enferme et assigne à résidence et ne résout rien.

Si la psychologie se limite à cela, alors je change de métier ou bien je me ferai appeler psychanalystes car même si je ne suis pas un fervent partisan de cette technique au moins, les analystes sont-ils plus fins dans leur approche du symptôme. Ainsi, méfiez-vous donc jeunes étudiants de psycho ou tout jeunes psychologues qui êtes avides de la reconnaissance de l’Etat pour devenir un peu comme des médecins, vous perdrez votre âme.

Dans le prochain post intitulé prosaïquement « mon fils est mort 2 », j’aborderai justement la spécificité du métier de psychothérapeute puisque lui guérit en donnant du sens aux expériences que l’on vit, si dramatiques soient elles. Bien sûr, guérir est un terme impropre car le psychothérapeute ne conduit le patient qu’à un état nouveau de meilleure réalisation subjective comme nous le verrons.