29 avril, 2010

Derrières les coulisses !


C'est une amie, allons disons une relation, qui vit dans le quartier qui me parle de cet ami à elle. Elle me le présente comme un type proche du suicide, ayant plusieurs TS à son actif. Pas de diagnostic psychiatrique plus précis : à priori il s'agit d'une banale dépression un peu costaude. Je lui dis que c'est ok, qu'elle peut lui donner mon adresse. Tandis qu'elle me le décrit, je repense à un type avec qui je l'avais déjà vue. Oui, c'est bien lui. Je lui dis qu'à mon avis ce type est tout simplement homo et qu'il ne s'accepte pas. Curieusement, elle pense la même chose. Chez elle comme chez moi, ça a été très intuitif.

Comme le jeune homme a peur, je le vois débarquer accompagné de sa mère et de cette amie ! J'ai en face de moi, une vraie pleureuse, un type de trente ans dont le comportement émotionnel serait celui d'une gamine de huit ans. Le problème est qu'il a trente ans. Tout aussi intuitivement, je trouve qu'il en fait un peu trop. Je ne nie pas ses problèmes mais je suspecte une mise en scène. On sent du maniérisme, trop d'affectation dans la manière de raconter les choses. La belle sensibilité qui s'accompagnerait d'une forme de retenue sombre dans une sensiblerie dérangeante, une débauche émotionnelle pénible.

Enfin seul avec lui dans mon cabinet, le type change. La gamine de huit ans fait place à un type cultivé qui tient à me faire savoir haut et fort que son doctorat de philo le tient à distance des pratiques mécanistes et idiotes que sont pour lui les thérapies cognitives et comportementales. Il est juste venu pour voir, encouragé par son amie qui a confiance en moi.

Je le calme tout de suite en lui expliquant que je ne suis pas là pour me battre avec lui et encore moins pour vendre ma camelote. En gros, même si je ne lui demande pas une adhésion de cent pour cent au concept, j'exige de sa part un minimum d'engagement et à défaut de respect, une forme de doute constructif. Dans tous les cas, je n'ai pas de temps à perdre avec un intello vain qui ne s'engagera pas à fond.

Premièrement, vu son état je lui recommande de prendre un traitement. Je lui indique des médecins. J'entends évidemment ses arguments contre les médicaments qui seraient dangereux et un énième réquisitoire contre ces "salauds de laboratoires pharmaceutiques". Ce type me saoule. C'est très rare mais c'est ainsi. Je clos net l'entretien en lui disait que s'il ne prend pas un traitement, je ne le recevrai pas, parce que les risques de suicide sont trop importants. Accessoirement, ses symptômes dépressifs sont aussi trop importants pour que l'on puisse vraiment échanger. La séance est finie. Je lui demande s'il veut reprendre rendez-vous. Contre toute attente, il accepte. Mais bien sur, il me fait savoir que pour lui ma pratique thérapeutique est trop basique et ne prend pas en compte l'immensité de son mal-être. En gros, la bouche en cœur, il accepte de goûter du bout des lèvres la cuisine que je lui sers, comme un habitué des 3* Michelin accepterait de diner dans un restau routier.

Il reviendra une fois. Il me raconte ce qui le préoccupe. Rien de bien grave. C'est tout à fait le genre de trucs que je pourrais "bâcher" en trois mois avec n'importe quel individu moins pédant. Il reprend un troisième rendez-vous qu'il décommande trois jours avant fort aimablement non sans me faire comprendre que ce que je lui propose n'est décidément pas sa tasse de thé. Il est tellement spécial qu'il doute que je puisse jamais le comprendre, voire que jamais quiconque ne puisse jamais appréhender correctement sa mystérieuse psyché.

Je déjeune ensuite avec le médecin à qui je l'ai adressé. J'apprends encore une fois qu'il est venu avec maman. Qu'il n'a cessé de pleurnicher durant tout le rendez-vous. Qu'il n'a cessé de parler de suicide tout en refusant d'être hospitalisé. Que toutes ses réactions sonnaient faux, comme s'il se mettait en scène. Et que malgré notre empathie et notre vocation, c'est tout à fait le genre de type à qu'on a envie de secouer voire de claquer. Je sais : c'est très mal.

Le médecin et moi sommes d'accord : voici de jolis traits hystériques. Le type même de patient gonflant, qui va se mettre en scène sans vraiment vouloir s'en sortir. Le chieur type pour qui une thérapie doit absolument devenir une sorte de miroir grossissant dans lequel il va pouvoir se regarder, s'admirer et même se dire combien son malheur est différent de celui des autres, combien sa peine est immense, combien son chagrin est si spécial que nul ne pourra jamais le comprendre.

Pronostic : 50% de survie à trois mois. Tiens en septembre, je demanderai à cette amie s'il est toujours en vie.

Bon, on ne peut pas toujours être plein d'empathie ! On a aussi nos têtes !

23 avril, 2010

Saura-t-on jamais ?


Allez hop, tels des bandits préparant un mauvais coup, nos ministres se réunissent en secret. Parce que vous comprenez bien qu'il ne faudrait surtout pas qu'un simple citoyen, autant dire un abruti sous tutelle, sache ce qui se trame. Leur chef annonce alors l'ouverture d'un couloir aérien vers d'autres aéroports afin d'apaiser la crise du transport aérien du aux cendres du volcan islandais.

Mais cela ne suffit pas. Pris entre le marteau des braves français bloqués à l'étranger et l'enclume de toutes les compagnies aériennes qui n'en peuvent plus de perdre de l'argent, il faut se décider. Et ce d'autant plus que des vols tests, revenus sains et saufs, semblent prouver que le principe de précaution se base sur une estimation du risque fantaisiste.

Alors, d'un coup d'un seul, tous les aéroports ouvrent de nouveau leurs pistes aux Airbus et autres Boeings. Tout repart au bout de six jours de paralysie totale. Et le plus incroyable, c'est que le nuage, sans doute lasse de stagner par chez nous, semble aller voir ailleurs si le ciel est plus beau.

Incroyable non ? Il suffit que les avions redécollent pour que le nuage se dissipe. Hasard ou coïncidence, coup monté, manipulation pour se sortir d'une situation ridicule la tête haute, nul ne saura jamais. Bug de l'an 2000, vache folle, SRAS, grippe aviaire, grippe porcine, depuis dix ans, la population affolée par les médias survit malgré tout à toutes les catastrophes annoncées.

Alors quid du fameux principe de précaution maintenant inscrit dans notre constitution ? Qui pourrait être contre ce principe ? Aujourd'hui, ses défenseurs ont beau jeu de dire que si la chute d'un avion avait entrainé le décès de quatre-cents passagers, tout le monde aurait hurlé. C'est sans doute très vrai.

Le principe de précaution est pourtant un paradoxe puisqu'il revient dans un univers complexe à approcher du risque zéro. Tout ceci dénote le côté faillible et la rationalité limitée de l'être humain. En termes de décisions, ces errements sont illustrés par le paradoxe d'Ellsberg qui stipule que placés face à l'incertitude, les gens choisissent généralement la solution dans laquelle le risque est connu et appréhendé. Or vous admettrez que dans les autres choix, les risques auraient pu être moindres.

Le principe de précaution n'est donc finalement qu'une vaste fumisterie ne reposant sur rien de précis et surtout pas sur une sorte de rationalité mathématique. Dans le cadre de la récente crise du transport aérien, la prise en compte du pire scénario, cet effet a été net.

En effet c'est la précocité de la prise en compte du risque - alors qu'aucun avion n'était tombé - qui a provoqué par elle-même une aggravation du risque perçu et a exigé une extrême sévérité des mesures de précaution.

La limite du principe de précaution est donc patente puisque plus on approche de l'ignorance, plus tout devient possible, dont les pires scénarios catastrophes, et il faudrait systématiquement s’abstenir de tout faire. Ainsi, à l'extrême, toute innovation, considérée de façon précoce, devrait être écartée. C'est ainsi qu'aux débuts de la voiture, des médecins se proclamant experts prédisaient que passé cent kilomètres à l'heure, un individu mourrait forcément, son cerveau subissant une pression contre sa boîte crânienne. On a vu qu'ils avaient tort.

L'appréhension du risque est donc fondamentale. Or on constate par exemple lors de la dernière crise de la grippe H1N1 que celui-ci n'est jamais évalué correctement. La seule parade tendant à justifier ce principe de précaution sera donc de dire que si rien ne s'est produit, quelque chose de grave aurait tout de même pu se produire et qu'il fallait être prêt et qu'il est facile de jouer les malins une fois la catastrophe écartée. La politique actuelle de prévention du risque est donc menée à la manière du lieutenant Drogo attendant les tartares qui n'arriveront jamais. Le principe de précaution est donc peut être basé sur de bonnes intentions mais peut aussi reposer sur la couardise de gouvernants n'osant plus prendre de risques ou encore sur la volonté de groupes divers ayant un intérêt à lancer de folles rumeurs alarmistes.

Ceci étant dit, et la rationalité extrêmement limitée de nos comportements dument établie, il n'est pas pour autant dit que j'aurais pris l'avion moi-même.

19 avril, 2010

Essai réussi !


Ce matin, fi des messages apocalyptiques et des principes de précaution ! N'écoutant que mon courage, j'enfourche mon scooter pour me rendre à la gare ! Comme d'habitude la mise en route au démarreur électrique s'avère problématique. Il faut dire que j'ai payé on scooter 700 euros sur Ebay voici déjà pas mal d'années ! Je kicke énergiquement et le monocylindre 125cm3 2 temps s'emballe et monte dans les tours !

Je vais ouvrir la grille, je reviens sur le scooter, je mets mon casque, je sors de chez moi, je béquille mon scooter, je remonte sur mon scooter et enfin ... je m'élance ! Bien à l'abri derrière ma bulle, je ne sens pas le vent fouetter mon visage. Comme chaque matin, je remonte le sens interdit parce que cela m'ennuie prodigieusement de faire le tour. C'est mal, je sais mais je suis un outlaw. Je n'ai déposé aucun plan de route et j'ai négligé les appels de la tour de contrôle.

Ensuite une série de virages à droite puis à gauche et j'aborde un autre serré sur la droite et hop j'accélère un peu. Au bout c'est un autre virage serré à droite qui m'attend puis je coupe enfin une grande route encombrée. Je m'insère dans le trafic et je mets les gaz. Je grimpe facilement à 80 km/h en doublant tout le monde à droite sur la piste cyclable. Dans les bons jours, le soir quand je rentre tard, c'est une route que je peux enquiller à 100/110 km/h : c'est vous dire si je suis sage ce matin.

Pourtant, l'ivresse de la vitesse ne me détourne pas de ma mission. C'est ainsi que l'oeil braqué sur la route tel un chasseur des âges farouches guettant sa proie, je tends tout de même l'oreille pour écouter le bruit du moteur. Le brave pépère qui accuse près de 35 000 kms monte correctement dans les tours. Aucun bruit suspect, aucune perte de régime à déplorer, tout va pour le mieux.

Ensuite, d'un geste expert je lâche la poignée gauche pour essuyer mon pare-brise d'un revers de mon gant. Rapidement, je regarde ma paume et ne détecte aucune poussière suspecte. Je poursuis donc mon chemin.

Feu rouge et je repars d'un seul coup, grillant tous ces caisseux minables. Le dos d'âne est avalé au prix de ma suspension qui gémit et raquette mais je m'en fous. Mon scooter et moi décollons d'au moins vingt centimètres d'altitude sur une distance d'environ un mètre cinquante : ça y est je vole ! J'ai soudainement peur mais je reste stoïque. J'atterris sans avoir noté le moindre changement notable : mon scooter semble parfaitement fonctionner.

Virage à droite, encore à droite, un rond point et me voici tout prêt de la gare. Enfin arrivé, je freine et je constate qu'aussi bien le disque avant que le tambour arrière répondent bien à mes sollicitations.

Négligeant le parking à deux-roues, je me gare enfin le long d'une rambarde, je béquille mon scoot' et je l'attache. Je donne un coup d'œil général au véhicule et ne déplore aucun dégât notoire. Tel un chevalier de l'asphalte, j'ôte mon heaume que je range dans le coffre arrière.

J'en déduis donc que je suis plus courageux que tous ces pilotes cloués au sol à cause d'un gros nuage et que mon vieux Piaggio est plus fiable que les F18 de l'armée de l'air finlandaise. Ha-ha, je me gausse des frilosités de vieille fille de l'aviation civile !

Tiens si l'Islande n'était pas une île si lointaine où l'on bouffe si mal, je serais bien allé faire le con avec mon Piaggio sur les versants du volcan Eyjafjöll.

18 avril, 2010

Indisponible pour cause de nuage de cendres !


Désolé, j'avais plein d'articles à publier mais le nuage de cendres projeté par le volcan Eyjafjöll (putain de nom islandais à la con) m'oblige à reporter mes contributions sine die ! Je suis cloué au sol comme un gros mollusque. Mon esprit généralement enclin à s'élever au-delà des cimes est aujourd'hui à raz de terre. Si je me mets à trop penser, je risque la rupture d'anévrisme.

Pourtant, ayant lu des tas de commentaires publiés à la suite d'articles sur ce fameux nuage, je me rends compte que des tas de gens pensent. En premier lieu, nos amis écologistes et gauchistes parmi les plus durs sont les premiers à s'épancher sur le sujet en une sorte de paranoïa gratuite, folle et parfois très méchante.

C'est ainsi que certains "écologistes" se réjouissent de ce tour joué par la terre pour donner une leçon aux petits hommes en leur rappelant qu'elle peut quand elle le souhaite ruiner leurs projets prométhéens. Ils se réjouissent à l'idée que grâce à cette éruption volcanique, de gros avions pollueurs doivent rester au sol. Les plus versés en économie rajoutent que grâce à cette crise, on n'aura plus de produits en provenance d'autres pays comme les fraises du Chili ou que sais-je encore, ce qui permettra aux solidarités locales de fonctionner de nouveau. On sombre en plein animisme, en pleine hystérie collective au cours de laquelle des fous mystiques voient en de simples caprices naturels une volonté supra-humaine. En se radicalisant, la protection de l'environnement a ouvert les vannes aux délires les plus déments.

Du côté des gauchistes ultras, pas de pitié pour nos concitoyens bloqués à l'étranger ou pour tous ceux qui voient leurs vacances gâchées par cet événement. L'argument principal serait que l'on n'a pas à plaindre des gens qui partent en vacances mais que notre pitié doit être avant tout mobilisée pour ceux qui dorment dans la rue ou l'ouvrier qui lutte pour conserver son emploi devenu précaire. Tant pis pour l'humble, le courageux qui s'offrait des vacances ou encore celui obligé de par ses fonctions à voyager, ils n'ont qu'à crever la gueule ouverte. Seule l'icône du SDF mérite encore de l'intérêt. Emprisonnées dans une sorte de christianisme dévoyé, nos belles âmes aveuglées de jalousie se donnent des airs supérieurs en s'instituant juges afin d'énoncer qui doit mériter ou non notre compassion.

Décidément la lecture de ces commentaires m'indiquent qu'il n'y a pas que les avions qui sont cloués au sol au raz des pâquerettes ! Encore ces fameux avions reprendront-ils l'air dans quelques jours, ce qui n'est pas le cas de ces fumeux paranoïaques. Quant aux fous mystiques de l'écologie, ce n'est pas dans quelques jours non plus qu'ils remettront les pieds sur terre !

Au-delà de tous ces commentaires accablants, j'en ai perçu quelques autres plus amusants. En effet, certains s'étonnent de cette fermeture soudaine de l'espace européen. Certes cela aura fourni une belle excuse pour certains chefs d'état de ne pas se rendre aux obsèques du président polonais récemment décédé. Mais qu'en est-il de la réalité ?

Je suis toujours circonspect quand dans un bel essor de solidarité, tous les pays adoptent les mêmes mesures. Je pourrais en effet me demander si ces précautions sont nécessaires ou si elles n'obéissent encore qu'à un principe de précaution devenu totalement fou. Il me semble que ce n'est pas la première éruption volcanique qui s'est produite. D'un autre côté n'étant pas spécialiste en vulcanologie pas plus qu'en réacteurs, je ne peux avoir d'avis tranché : tout au plus un vague sentiment. J'ai beau eu traîner sur tous les blogs mal-pensants que je connaisse, personne n'aborde cette question.

Alors ce sentiment qu'on se ficherait un peu de nous et qu'on en fait encore trop persiste en moi. Tout ceci a des relents de H1N1, de SRAS, et autres quenelles qu'on a bien voulu nous enfoncer dans le fondement depuis quelques années.

Mais bon, peut-être qu'à l'instar des écolo-mystiques et des ultra-gauchistes, je deviens moi aussi paranoïaque ? A force de baigner dans le libertarianisme, il serait bien possible que j'en sois venu à douter de TOUT ce qui émane des états et de leurs canaux de communication.

Les jours à venir nous diront ce qu'il en était. Pour le moment, moi aussi je reste cloué au sol.

08 avril, 2010

Mickey killed me !




Je connais bien Mickey. D'une part, parce que j'ai été abonné durant des tas d'années à son journal éponyme. D'autre part, parce que Mickey est le grand copain de mon père, puisqu'ils sont nés la même année. Autant vous dire que pour moi, la souris à quatre doigts est plus qu'une amie, c'est une partie de moi et de ma vie. Chez nous, on ne déconne pas avec Mickey !

Or qu'apprends-je dans le Parisien de l'éditions d'aujourd'hui ? Rien moins que Mickey aurait pu tuer un des salariés qui œuvre pour sa plus grande gloire à Marne-la-Vallée ! Allez hop, j'ouvre les guillemets et je cite :

"Quelques mots gravés au canif, pour dire son calvaire avant de mourir. Selon sa famille, Franck Claret, le chef de cuisine de Disneyland qui s'est pendu à son domicile à la fin du mois dernier, aurait désigné son employeur avant de se donner la . Selon Pierre-Louis Neu, beau-père de la victime, le salarié en souffrance a laissé ce message sur un mur à l'attention de sa femme juste avant son : «Je ne veux plus retourner chez Mickey, je t'aime» Franck Claret devait reprendre son travail de manager dans les cuisines du Disneyland le jour de sa mort. Selon ce même témoin, le salarié avait également écrit un SMS impliquant Disneyland peu avant de commettre l'irréparable. "

L'inlassable psy que je suis est immédiatement en alerte. Après tout, le suicide c'est un peu pour métier. Et je me demande aussitôt ce qui a pu se passer pour chez l'ami Mickey pour qu'un salarié ait décidé d'en finir. L'an dernier, avec mon père, nous y étions allés chez Mickey. Même que nous avions tout fait : de Space mountain, l'attraction idiote qui vous pète les cervicales, à It's a small world, le truc pour nourrissons avec des petits automates qui gigotent et une musique qui vous prend la tête ! Moi, j'avais trouvé ça propre et bien fait et on avait bien mangé en plus. Les salariés ne m'avaient pas donné l'image de grands dépressifs au bord du suicide. Alors je me demande aussitôt ce qui a pu se passer pour qu'un chef cuisinier décide d'en finir à cause de Mickey ! Heureusement, le fin limier qui signe le papier du Parisien répond aussitôt à mon interrogation :

"Selon ce même témoin, le salarié avait également écrit un SMS impliquant Disneyland peu avant de commettre l'irréparable.

«Il ne l'a finalement pas envoyé, mais nous l'avons retrouvé dans les brouillons de son téléphone portable», précise Pierre-Louis Neu... L'homme, qui avait reçu son gendre dans son domicile des Cévennes pendant une dizaine de jours peu avant son suicide, est convaincu que «le travail de Franck est à l'origine» de son geste. «Tous les soirs, il me disait qu'il était venu chez Disney pour faire de la grande gastronomie, et qu'il en avait marre qu'on l'oblige à cuisiner de la m...», affirme le beau-père. "

Bon, même si j'ai bien bouffé chez Mickey, je ne peux pas dire que ce fut merveilleux mais j'ai pu bénéficier d'un concert de blue grass en plein air joué par des musiciens d'excellent niveau. Cependant, il parait que la restauration puisse être de meilleur niveau dans d'autres établissements du parc d'attraction voire dans certains des hôtels accueillant les touristes.

Et puis même si l'on admet que Mickey voulait faire cuisiner de la merde à Franck, Claret, où est le problème ? J'ai eu plusieurs fois des cuisiniers dans ma clientèle. Sincèrement, en région parisienne, un bon cuisinier n'est pas le plus à plaindre et leurs patrons le savent bien. Ils sont généralement bien payés et bien traités et en cas de problèmes, savent rendre immédiatement leur tablier pour aller proposer leurs services ailleurs. Et si cela se passe mal en France, la réputation de notre cuisine est telle, que c'est bien l'une des rares professions qui peut aller n'importe où dans le monde et trouver du boulot. Alors, même si je ne remets pas en cause les propos du beau-père, pourquoi son gendre a-t-il préféré se suicider plutôt que de rendre son tablier ? Pour nous éclairer, le plumitif du Parisien poursuit :

"Chargé de l'enquête sur les circonstances de ce drame, le groupement de gendarmerie de Seine-et-Marne se refusait mardi à tout commentaire sur cette affaire sensible. Après deux autres suicides de salariés à Disneyland et une tentative de suicide en février dernier, ces nouvelles révélations mettent le géant des loisirs dans une position délicate."

Bon, statistiquement, pour une entreprise qui compte près de quinze mille salariés, cela ne semble pas révélateur de quoi que ce soit. Au cas où notre ami journaliste du Parisien ne le saurait pas, on est souvent salarié d'une entreprise, en même temps que parent, ami et être humain de manière générale. Donc, un mari plaqué peut devenir un salarié suicidé par exemple sans que la responsabilité de l'employeur ne puisse être mise en œuvre.

C'est un peu toute l'ambiguïté de ces suicides mettant en cause l'employeur. Certes, des conditions de travail déplorables peuvent entrainer de telles issues notamment lorsqu'il s'agit d'individus fragilisés (âge, manque de formation, région fortement touchée par le chômage, etc.). Mais dans le cas qui nous préoccupe, nous sommes loin de tout cela.

En effet, au risque de me répéter : pourquoi se suicider plutôt que de rendre son tablier pour aller travailler ailleurs ? L'employeur bourreau face au pauvre petit salarié qui n'a rien fait, me semble être un raccourci étonnant. On manque toujours de recul sur ces affaires. Qu'il s'agisse de France Télécom ou de Disney, il semblerait que les journalistes prompts à sauter sur le sensationnalisme autant qu'à taper sur le vilain employeur (et dans ce cas il est même américain quelle chance !) en oublie toute déontologie !

Nulle enquête, on ne fait que rapporter des faits en les orientant astucieusement. Le titre même "Eurodisney : le cuisinier avait laissé un SMS avant son suicide" est une superbe manipulation. Pour le quidam, l'association Eurodisney et suicide fait mouche : ça y est encore un drame lié aux conditions de travail. Dans un des cas liés à France Télécom, on avait ainsi omis d'expliquer que la jeune femme s'étant jetée par la fenêtre était par ailleurs psychiatrisée depuis des années pour une dépression chronique.

Dans ce cas, si l'entreprise ne doit certes pas être un lieu inhumain, elle n'est pas pour autant une structure adaptée à la prise en charge de cas pathologiques. Certaines personnes sont parfois tellement fragilisées que la plus petite frustration, la plus simple contrariété peut prendre des proportions dramatiques et entrainer des conséquences terribles.

L'article du Parisien explique d'ailleurs que : "La semaine dernière, des sources proches de la direction mettaient en avant les «problèmes personnels» de Franck Claret." Mais bon, c'est trop tard, le mal est fait. En faisant un article à partir d'un simple non événement, un journaliste qui n'a pas enquêté mais ne fait que relater des impressions et des ouï-dires jette un voile de suspicion sur une entreprise qui n'est peut être pour rien dans ce drame.

En revanche, ce qui aurait été intéressant de savoir c'est qu'en France en 2008, selon les sources, le taux de suicide est de 16,2 pour 100 000 habitants ou bien exprimé de la façon suivante par l'OMS : 26,4 pour les hommes et 7,2 pour les femmes. Les hommes se suicident donc plus massivement que les femmes, même si ces dernières sont toujours présentées comme d'éternelles victimes.

Rappelons en outre que parmi les pays de l'OCDE, les taux de suicide sont les plus forts au Japon et en France (de 15 à 20 pour 100 000) et les plus faibles en Italie, Grande-Bretagne et aux États-Unis.

N'oublions pas que le suicide est un phénomène simple à comprendre mais relativement complexe à analyser. Il existe une typologie de facteurs de risques de suicide que l'on peut classer en trois catégories :

Les facteurs primaires sont des facteurs sur lesquels on peut agir, ils ont une valeur d'« alerte ». Ce sont les antécédents personnels (tentatives de suicide précédentes, troubles de l'humeur), les antécédents familiaux (si des proches se sont suicidés, cela peut prendre une valeur d'« exemple ») et les troubles psychiatriques avérés (Schizophrénie,toxicomanie, alcoolisme). Ce sont ces facteurs qui sont toujours ignorés par la presse, qui se préfère se focaliser sur les rapports salariés/employeurs sans doute plus proches de leurs préoccupations.

Les facteurs secondaires : les facteurs secondaires sont des facteurs sur lesquels on peut faiblement agir, et qui n'ont en soi qu'une faible valeur prédictive, sauf associés à des facteurs primaires. Il s'agit essentiellement de la situation sociale (isolement, solitude, chômage) et d'événements passés traumatisants (deuil, abus sexuel, séparation, maltraitance). Les maladies chroniques sont peu suicidogènes, mis à part pour les personnes âgées.

Les facteurs tertiaires : ce sont des facteurs sur lesquels on ne peut que difficilement agir, et qui n'ont de valeur prédictive qu'en présence de facteurs primaires ou secondaires. C'est par exemple l'âge (la probabilité la plus forte est entre 35 et 54 ans, et au-delà de 70 ans) ou l'appartenance au sexe masculin ). C'est aussi parfois la difficulté d'accepter son orientation sexuelle mais aussi l'époque de l'année car il existe des pointes en fonction des moments.

Enfin, rappelons aussi à toutes fins utiles, qu'avant de commettre l'irréparable, que l'on peut commencer à en parler à son médecin généraliste, lequel possède déjà une batterie de psychotropes efficaces pour réguler l'humeur. Et si les troubles persistent, ce dernier pourra aussi orienter son patient vers un psychiatre ou un psychologue.

En décembre dernier, j'ai reçu un faire part m'annonçant la naissance du fils d'un patient que j'avais reçu deux ans auparavant. A l'époque, son médecin me l'avait adressé parce qu'il était gravement suicidaire et songeait un peu trop à la pendaison. Sa petite amie l'avait quitté et bien sûr le monde était dépeuplé comme disait ce brave Lamartine.

Comme quoi, la vie change : on veut mourir et puis on fait un gosse deux ans après. Ce qui ne change pas : c'est la presse !

03 avril, 2010

Se souvenir !


Les bobos m'ennuient terriblement. Quand je les entends parler de la fracture nord-sud ou de la peine des "petites mains surexploitées", j'ai toujours l'impression en tant qu'occidental, d'être cloué au pilori et condamné pour une richesse indument gagnée.

Les bobos qui méprisent l'histoire et restent persuadés que celle-ci commence en 1981 avec l'élection de François Mitterrand, adorent aboyer avec les loups et conspuer le confort dans lequel ils se vautrent pourtant avec délectation grâce aux sacrifices des générations qui les ont précédés.

Sans doute que l'argent mal gagné, au prix de la sueur des autres, (les parents, les autres en général) ou de la pratique d'activités douteuses (secteur culturo-communicationnel), doit rendre coupable et dans ces cas là, on préfère externaliser politiquement un conflit intrapsychique potentiellement dévastateur. En ce sens, parce que le travail est une vertu, je crois que j'aurai toujours plus de respect pour un vrai prolo communiste que pour un bobo.

Bien qu'il soit étiqueté socialiste, j'aime aussi beaucoup Jack London. Le fait qu'il soit né un douze janvier, comme moi, y est sans doute pour quelque chose. Je lui pardonne donc bien volontiers son étiquette socialiste comme je la pardonne à Victor Hugo aussi. J'ai beaucoup aimé lorsque je l'ai lu, son ouvrage Le peuple de l'abîme. Sa description du petit peuple de l'East End londonien possède une précision clinique et dénuée de passion que seul un sombre capricorne pouvait décrire. Certaines scènes ne sont pas sans rappeler ce qui existe aujourd'hui dans certains pays en voie de développement.

Et quand l'on songe que tout ceci ne date que d'il y a cent ans, on est forcé de se féliciter du chemin parcouru mais aussi de remercier les ainés qui nous ont précédés et pour qui tout ne fut pas aussi facile que ne le clament les bobos. A force de vouloir éduquer ses enfants en se promettant qu'ils ne connaitront jamais les difficultés que l'on a connues, on en fait de petites choses inadaptées ou encore des héritiers coupables. Dans tous les cas, on transforme les gens en inadaptés sociaux ou en névrosés déniant le réel. C'est certes profitable pour ma profession mais c'est dramatique pour la société.

J'ai toujours pensé que pour rendre la vie plus facile et plus agréable, il fallait la rendre un peu plus dure. Non que je regrette le temps décrit pas London : surtout pas. Il est cependant prouvé que les difficultés rendent plus courageux et plus réaliste. D'ailleurs une étude en psychologie prouva voici quelques années, que les personnes ayant perdu un de leurs parents avant l'âge de quinze ans, réussissaient mieux dans la vie que les autres. N'est ce pas un constat terrible que d'admettre que se prendre en pleine figure le réel rend plus enclin à réussir ?

En dix ou quinze ans, j'ai vu la Chine se construire. J'ai pu voir les buildings de Shanghai s'ériger en lieu et place de quartiers insalubres. Dans le même temps, dans le pays où je vis, j'ai vu la désertification s'installer dans des régions prospères, et des gens trop bien nourris se mobiliser pour des enjeux sans conséquence. Le système social en mutualisant les risques a permis d'adoucir la vie mais depuis que certains ont voulu faire croire qu'il n'y aurait plus ni souffrances ni difficultés, il est devenu l'instrument ouvrant la voie à une déresponsabilisation dramatique.

Je pense que de temps à autre, il faudrait lire ou relire des livres tels que Le peuple de l'abîme afin de ne pas oublier d'où l'on vient.

L'air du temps !

Cette année le M16 se porte haut sur la poitrine.

Les gens très cultivés sont toujours de gros lecteurs. Je n'échappe pas à cette règle. C'est pourquoi, si vous étiez passé en début d'après midi chez moi, vous m'auriez trouvé dignement assis dans mon canapé lisant studieusement le Télé7jours de la semaine en cours (27 mars ou 2 avril). Tandis que je parcourais ce summum de la pensée, j'arrivai à la page 90 où je pris connaissance des derniers potins concernant Christine Bravo, la gracieuse animatrice que tout le monde connait. Et là, l'opuscule imprimé en quadrichromie manqua de me tomber des mains.

En effet, je venais de lire, et je cite in extenso :
"Christine styliste
En 2008, grand-mère à 52 ans, d'un peti Felipe, et lasse de voir les bébés en bleu ou en rose, elle crée avec son amie styliste Françoise Villeneuve une collection de vêtements de bébés, Bravollywood. Des matières luxueuses, des prix chics, un stylisme choc, : des tee-shirts imprimés avec le visage du Che ou des phrases : Vient de paraître ou Attention, futur ado !


A vrai dire que Christine Bravo se lance dans la vente de vêtements pour bébés, je m'en moque éperdument : elle fait ce qu'elle veut. Elle aurait tout aussi bien pu lancer une marque de bière, qu'une gamme d'outils de jardin, je m'en serais tout autant fichu.

De la même manière, que je me moque qu'elle nous apprenne " Vous ne trouverez pas chez nous d'articles "Made in China". J'ai en effet rejeté la notion de fabrication massive, forcément plus rentable, effectuée par des "petites mains" surexploitées". Tant pis si elle n'a pas compris que même en Chine, les gens ont besoin de manger fut-ce en étant surexploités. C'est un peu idiot de dire cela surtout quand comme elle, on se targue d'avoir des origines espagnoles modestes. Parce que si à une certaine époque, des bobos au grand cœur avaient décrété qu'il ne fallait pas utiliser de main d'œuvre étrangère surexploitée, sa famille aurait eu le droit de crever de faim. Parfois, on fait ce qu'on peut avec ce que l'on a, simplement parce que "nécessité fait loi" et qu'il faudra patienter pour bénéficier d'une convention collective ultra-protectrice.

Même si je pense qu'un enfant devrait pouvoir aller à l'école, je préfère tout de même un enfant qui travaille et mange que le même qui crève de faim. Il est toujours dangereux d'être occidentalocentré. Chez nous aussi, à une époque pas si ancienne, les petites mains furent exploitées, et ce n'est qu'avec la richesse induite par le système capitaliste qu'on put préserver nos chers petits des galeries de mines ou des filatures. Si je ne connais rien à la mode enfantine, je voulais juste rappeler à cette dame que la bonne conscience et les postures outrageusement moralistes n'ont jamais créé de richesses à partager.

Mais, sitôt passée cette entrée en matière bien digne d'une journaliste et chroniqueuse de gauche - après tout chacun ses idées - le fin du fin arrive lorsque l'on consulte la boutique en ligne. C'est ainsi qu'en fonction du profil psychologique que vous pensez observer chez votre bébé, vous aurez le choix entre "bébé cool", "bébé hype" ou encore "bébé mystique".

Au rayon "bébé cool", dans la section t-shirts et marcels, vous aurez ainsi le droit de faire arborer par votre enfant soit le célèbre sigle Peace and love créé par Bertrand Russel ou encore une superbe feuille de cannabis rose stylisée. Rappelons, même si je suis loin d'être un père la morale, que le cannabis est un produit stupéfiant. Ensuite, on passe aux "bébés hypes", lesquels pourront arborer de jolis slogans tels que "Ni Dieu, ni maître" avec le logo anarchiste à moins que ce ne soit "I love my uncle gay". Pauvres bébés, obligés dès leur plus jeune âge d'affirmer des opinions politiques auxquelles ils ne comprennent rien. Et dire qu'ensuite on se plaint de l'enrôlement des gamins dans les guérillas du monde entier ! Quant au second, on peut se demander en quoi l'orientation sexuelle de leur oncle est importante dans le fait qu'ils l'aiment. Espérons seulement que le tonton ait fait son coming out !

Mais, last but not least, la page des nouveautés nous montre le même t-shirt arborant fièrement la tête de l'humaniste Che Guevara immortalisé le 5 mars 1960 par korda. C'est vrai que la photo est réussie et que le Che a une belle gueule comme ça, le regard tourné vers l'avenir, sa virilité rehaussée par cette barbe mal taillée de baroudeur. Pour le reste, bien sur madame Bravo se fiche de savoir ce que cet étudiant en médecine, fils de bonne famille et icône des jeunes filles tout juste pubères en mal d'amour, a bien pu faire. L'important c'est l'esthétisme.

On peut être ignoble avoir une démarche ignoble, pourvu que ce soit joli et correctement marketé, tout passe : le bourreau sanguinaire peut devenir un pur jeune homme idéaliste. Concernant les faits d'armes du bel Ernesto, vous pouvez en voir un bref aperçu sur l'article ce blog, glané au hasard d'une recherche google "Che Guevara camps de concentration". Bien entendu, au delà des réactions partisanes, on peut aujourd'hui affirmer qu'il existe une controverse entre historiens sérieux à propos du Che, lequel aurait eu la main lourde lorsqu'il rendait justice. Mais comme bébé n'en sait pas plus que madame Bravo à propos du Che, il arborera candidement la photo d'un criminel sur son joli petit t-shirt. Dommage que Pol Pot n'ait pas eu une jolie gueule, il aurait pu figurer sur des t-shirts.

Au-delà de ces choix esthétiques plus que moralement discutables, ce qui est terrible c'est que des parents puissent ainsi bafouer l'innocence des petits enfants. Le rose pour les filles et le bleu pour les garçons vous ennuient ? Cassez les codes des couleurs et choisissez du fuchsia ou du parme mais de grâce laissez les encore quelques années ignorants des vicissitudes du monde. Laissez les arborer des nounours ou autres petites animaux stylisés un peu niais parce que c'est de leur âge. Si j'étais moins soucieux de ma prose, j'aurais envie de hurler : bande de bobos de merde, cessez de vous plaindre parce qu'il existe de par le monde des enfants soldats si c'est pour habiller des nourrissons avec des slogans politiques, parce que les enfants soldats ne sont justement à la solde que de courants politiques". Dans les stades moraux de Kohlberg auxquels j'avais consacré un article voici déjà longtemps, ces gens là en sont restés au stade pré-conventionnel, ne valant sans doute pas les nourrissons qu'ils habillent.

Mercredi soir, je dinais avec un ami qui revenait d'un long séjour de huit mois en Amérique du sud. A Paris depuis quelques jours seulement, il me disait qu'alors que notre vin et notre bonne chère lui manquaient tellement dans la jungle, il lui suffisait de quelques jours en France pour être déprimé et se dire qu'on avait vraiment un pays de merde. J'ai d'ailleurs assisté ce soir là à une violente altercation avec un bobo assis à côté de nous, lequel est reparti la queue entre les jambes, ayant compris qu'être un baroudeur ce n'était pas allez glander sur une plage du Costa Rica en n'ayant de contact avec l'autochtone qu'au travers du larbin qui vient vous servir votre cocktail.

Paraphrasant mon confrère H16, je peux vraiment dire que ce pays est foutu.


Fessebouc !

Je reste toujours surpris de l'importance que certaines personnes accordent au réseau social Facebook. Facebook est un réseau social créé par Mark Zuckerberg et destiné à rassembler des personnes proches ou inconnues. Depuis décembre 2009, il rassemble plus de 400 millions de membres à travers la planète. Facebook est né : il était, à l'origine, le réseau social fermé des étudiants de cette université avant de devenir accessible aux autres universités américaines. La vérification de la provenance de l'utilisateur se faisait alors par une vérification du mél de l'étudiant. Le site est ouvert à tous depuis septembre 2006.

En bref, depuis cette année, n'importe qui put accéder à ce réseau social sans qu'aucune vérification ne soit effectuée. C'est ainsi que si l'on tape "Nicolas Sarkozy" dans la recherche d'amis, on peut trouver 326 résultats. De la même manière, Cary Grant, acteur disparu en 1986, possède 255 profils. C'est vous dire si le réseau est fiable. De toute manière, il ne fut à l'origine établi que pour des étudiants, et non des professionnels. Ce n'est qu'une version électronique de la "bande de potes" des adolescents aujourd'hui prisée par des adulescents.

Soutenu par un engouement médiatique incroyable, Facebook a connu de beaux jours. Tout le monde a voulu y avoir son profil parce que, parce que quoi d'ailleurs.? Sans doute parce qu'il fallait y avoir son profil : c'est tout. C'était un "must have" comme disent ou disaient nos amis anglosaxons. Une fois entré son profil, que se passaient-il ? Tout d'abord, chacun cherchait ses amis. La logique mnémonique de base, faisait qu'on entrait d'abord dans la recherche les noms évidents, à savoir de vrais amis dont on se souvient immédiatement. C'est ainsi qu'un réseau Facebook était d'abord constitué de gens que vous auriez pu voir dix fois dans la semaine et dont vous possédiez le numéro de téléphone. Quel intérêt de les retrouver sur ce médium ?

Puis, passé la fièvre des amis proches, chacun de nous a voulu savoir ce qu'était devenu untel ou unetelle. Parfois, et cela m'est arrivé, on a du se creuser la cervelle pour se souvenir du nom de cette jolie petite blonde que l'on matait discrètement en classe de terminale ou en licence de droit. Une fois le nom trouvé, le profil était rarement accessible. Alors que faire ? Lui écrire ? Oui mais pour lui dire quoi ?

Il y avait les gens comme moi qui se trouvaient un peu glands de demander "comment vas-tu ?" à quelqu'un qu'on n'avait pas vu depuis vingt ans. Parce que la logique est implacable, globalement si vous n'avez pas vu quelqu'un depuis vingt ans, il y a de très fortes chances, sauf cas extrêmes de disparitions inexpliquées, que vous ayez eu de bonnes raisons de ne pas lui donner de vos nouvelles ou elle de ne pas vous donner des siennes.

En revanche d'autres personnes n'ont pas eu ces pudeurs envers moi et se sont proposés de devenir mes amis. Je possède ainsi sur mon "facebook" des "amis" que je n'ai pas vu depuis vingt-cinq ans et que je ne verrai jamais. J'en ai un avec qui j'étais au cours préparatoire en 1971 et que je n'avais pas vu depuis 1973. Je sais qu'il est marié, père de deux enfants, vit dans le sud mais je ne lui ai jamais parlé. D'ailleurs, à part cliquer sur "accepter" à la demande "voulez vous être mon ami", nous n'avons eu aucun autre échange. Ce que nous savons l'un de l'autre, c'est que nous sommes vivants. Et encore ! Sachant que les profils ne sont pas validés, il se peut que ce ne soit pas les vrais amis d'il y a vingt ans de la même manière que je pourrais ne pas être le vrai Philippe. Souvenons-nous que nous naviguons dans un monde virtuel où un loup peut se dissimuler sous une peau d'agneau et une jolie blonde accorte n'être qu'un gros barbu quinquagénaire.

Viennent ensuite une autre catégorie d'amis consistant en tous ces gens que vous connaissez vaguement sans vraiment échanger plus qu'un "bonjour-bonsoir" et qui sont ravis de vous avoir dans leur réseau Facebook. Si comme moi, vous êtes polis, vous acceptez, et vous avez alors des nouvelles de vagues relations, telles que votre boucher, charcutier ou voisin de palier. Vous assistez alors à l'anniversaire du petit dernier ou à leurs vacances sur la Costa Brava. Parce que Facebook, c'est avant tout cela : dévoiler son intimité à des gens qui s'en foutent la plupart du temps.

Et si vous n'étiez pas sérieux, Facebook, ce moteur de recherche amical vous proposera bientôt de devenir l'ami des amis de vos amis et vous trouverez surchargés de relations que vous ne connaitrez ni d'Eve ni d'Adam. Tant et si bien, qu'à de rares exceptions près, tout le monde finit par se lasser de Facebook. Au début, tout nouveau tout beau, on va regarder et bien vite on n'y fiche plus les pieds et son profil devient aussi peu fréquenté que celui que l'on avait laissé sur Copainsd'avant, l'ersatz français. J'ai d'ailleurs un profil sur ce site que je ne consulte jamais. Lassé des mails m'indiquant qu'aujourd'hui c'était la fête d'untel ou d'unetelle, j'ai même classé ce site sous la rubrique spam dans mon mail.

Si vous ne prenez pas garde, vous aurez vite deux-cents amis. Certains se livrent d'ailleurs à une compétition liée au nombre de contacts sur leur profil. On n'a les mérites que l'on peut ... C'est ainsi qu'un ami mien, musicien professionnel, s'amuse toujours de savoir qu'il a Jimmy Page comme ami. Ce nombre d'amis a d'ailleurs suscité bon nombre d'études et de recherches. C'est ainsi qu'est né le "nombre de Dunbar qui est le le nombre d'amis avec lesquels une personne peut entretenir une relation stable à un moment donné de sa vie. Cette limite est inhérente à la taille de notre néocortex. On l'estime à 148 personnes.

Alors qui reste-t-il sur Facebook ? A vrai dire pas grand monde ou pas grand chose devrais-je dire.

  • Les nouveaux arrivants qui débarquent et se font avoir comme indique ci-dessus.

  • Les gens comme moi qui gardent un profil sur lequel ils ne vont jamais mais n'osent le fermer de peur de heurter la sensibilité de toutes ces gentilles personnes qui les ont demandés comme ami. En revanche, j'ai pu constater que passée l'euphorie des premiers temps, des gens qui publiaient beaucoup ne publient plus. Même le petit Thomas âgé de vingt-et-un ans ne se montre plus guère.

  • Quelques retardataires qui ont lu de vieux magazines de communication datant d'il y a trois ans dans la salle d'attente de leur dentistes d'une quelconque sous-préfecture et se sont dit "Ouah c'est génial ce nouveau média !" et vont vite réaliser comme les autres, que "non ce n'est pas génial" mais "plutôt inutile et gavant". Je ne les blâme pas puisque de même que les choses mettent un certain temps avant de venir de New-York à Paris, elles mettront aussi du temps, peut-être même plus, à passer de la capitale à nos belles provinces. Ces personnes n'auront alors de cesse de mettre en place leur profil ou mieux, celui de leur boutique (Quincaillerie Chopineau à Montluçon) si elles ont un profil d'entrepreneur du XXI ième siècle

  • Les adolescents et les post-adolescents pour qui les groupes et jeux de Facebook restent des gadgets amusants et ont du temps à perdre sur cet outil de la même manière qu'ils en ont à perdre en s'échangeant des SMS pour ne rien dire. Nous avons tous été jeunes. Dès lors, Facebook devient le prolongement naturel des célèbres Skyblogs dans lesquels des ados se racontent.

  • Les gens dont le métier est de chercher : services secrets, policiers, enquêteurs, etc. Sachant que s'agissant de professionnels, ils ont vite fait de savoir si un profil est réel ou si c'est un fake, une blague montée par un copain (mais certainement pas une usurpation d'identité laquelle en droit est caractérisée par le fait de vouloir nuire). De fait, une de mes patientes exerçant la profession de recruteur pour cadres de haut niveau m'expliquait qu'elle ne consultait plus Facebook car rien n'était authentifié de manière certaine et que c'était une perte de temps. De fait les professionnels du renseignement savent discriminer les informations, c'est là le propre de leur profession.

  • Les dragueurs à deux balles, qui se croyant sur un bon vieux 3615 Ulla de la bonne époque, brancheront dix mille femmes en leur proposant une rencontre coquine de manière plus ou moins agréable allant de "Comme vous êtes jolie !" à "JH 20X6 pour éjac. faciale".

  • Les cambrioleurs qui seront ravis de savoir que vous partez demain pour une semaine pour aller voir votre mémé à Limoges en laissant votre maison vide.

  • Les personnes possédant de grosses tendances hystériques et adorant livrer leur intimité à des inconnus.

  • Papi et mamie qui trouvent cela bien pratique pour rester proches de leurs enfants et de leurs petits-enfants !

  • Et bien sûr tous les libertaires qui ont hurlé après le fichier Edvige mais qui vont se raconter en public. Encore une fois, la soumission librement consentie est la forme la plus aboutie de manipulation.


En bref, il me semble, mais je ne suis pas le seul, que Facebook, comme la plupart des réseaux sociaux, soit une simple mode, un épiphénomène qui retombera tel un soufflé pour ronronner gentiment. Sans doute cela perdurera-t-il mais d'une manière plus modérée en proposant à ceux qui le veulent de fédérer une petite communauté d'amis et de proches autour d'eux (Kevin et ses copains, papi et mamie et leurs petits-enfants, un directeur commercial et ses vendeurs, etc.) car l'outil est pratique pour échanger des données comme des photos de vacances, des textes ou des informations brèves. Dans peu de temps, l'outil jadis merveilleux ne sera plus qu'une sorte de PICASA ou de FLICKR un peu amélioré mais rien d'autre.

Dans les faits, baser une quelconque stratégie professionnelle de communication globale et grand public, sur ce médium me semble ahurissant. Facebook perdurera sans doute en tant qu'outil communautaire destiné à un partage interne de données dans un climat de détente aux visées très limitées à moins d'employer des méthodes publicitaires proposées par le site. Que vous soyez BMW ou la Quincaillerie Chopineau à Montluçon (Allier), vous ne fidéliserez personne sur le long terme à moins de ne vouloir que d'une bande de blaireaux ayant du temps à perdre que vous aurez recruté à grand renfort d'outils marketing en alimentant un buzz perpétuel.

Évidemment tous les abrutis, spécialistes de la communication ou se présentant comme tels, ne comprennent rien à tout cela, se bornant à considérer le nombre de profils sans savoir en analyser le contenu. Comme je l'avais appris en école de commerce, le marketing, avant même d'être une technique, reste un état d'esprit, un don pour sentir, ressentir et deviner. C'est ainsi que les mêmes spécialistes n'avaient pas parié un cent sur la réussite d'Apple sur le marché de la téléphonie portable alors occupé par des mastodontes comme Nokia ou Sony-Ericsson.

Facebook, c'est comme Second Life, il fallait y être mais je ne crois pas qu'il faille y rester. Il n'y a rien de nouveau sur les mondes virtuels qui finissent toujours par partir en vrille. Dans tous les cas, Facebook vous remercie pour tous les renseignements collectés de manière spontanée et sans aucun doute revendus sous forme de fichiers à des entreprises.

Quoiqu'on fasse, que l'on en dise, Internet sera et restera toujours une sorte de marigot infâme, une pierre moussue sous laquelle grouillent des choses pas jolies. Et donc, à moins d'utiliser intelligemment internet en choisissant les sites que l'on visite, et en ayant soi même la possibilité de discriminer les informations fournies, le Net ne sera jamais qu'un outil technique pour le pire comme pour le meilleur. Que tous ceux qui ont vu dans Facebook, quelque chose qui rapprocherait les hommes se souviennent : il n'y a rien de nouveau sous le soleil ! La vraie communication, ce sera toujours parler, dire bonjour, prendre soin de quelqu'un et savoir que quelqu'un pense aussi à vous mais certainement pas ces bidonnages informatiques.

Et pour clore ce long article, voici l'adresse d'un lien où vous pourrez vous amuser des perles que recèle ce médium encore récemment à la mode. un exemple ci-dessous :)