Grippe A ! suite et fin

Le génie français : Taxi de la Marne

Cela fait une semaine que j'ai reçu mon "bon de vaccination". Curieusement il m'a été envoyé à mon adresse professionnelle. En revanche, je n'ai rien eu dans la boîte aux lettres de mon domicile. Mon épouse non plus d'ailleurs mais elle n'a pas trouvé de bon à son adresse professionnelle pour autant, alors que son cabinet est dans l'arrondissement à côté du mien.

Laurence qui vit à Nancy, une grande métropole de province a reçu le sien voici deux jours tandis que sa mère qui vit à Foug , un endroit que l'on ne connait que par mon blog, l'a reçu deux jours avant. Décidément, il y a dans l'envoi de ces "bons de vaccination", une logique que j'ai du mal à comprendre. Et puis dans l'angle supérieur gauche de ce bon, la mention infantile et incantatoire "Stop au virus de la grippe" m'a bien fait rire.

Je note que la presse jadis servile comme à son habitude et si prompte à relayer les informations dramatiques à propos de la pandémie, n'a pas de mots assez durs ni de sarcasmes assez fort pour se moquer de la pauvre Roselyne Bachelot. Un des rares qui s'en sortent assez bien sera le professeur Debré qui n'a jamais vraiment cru à cette pandémie.

Hier soir, j'ai entendu un médecin du réseau sentinel nous expliquer que l'épidémie était terminée. Toutefois précisait-il, on pouvait craindre un rebond, même si ce dernier n'avait pas été observé dans les pays de l'hémisphère sud. Il semblait ne pas y croire mais a tout de même précisé que même l'épidémie terminée, il fallait tout de même en profiter pour se faire vacciner. Moi qui suis idiot, j'ai eu l'impression qu'on m'expliquait qu'il fallait prendre de l'aspirine une fois le mal de tête terminé. C'est peut-être un acte de foi ?

Après coup, j'ai aussi du mal à m'expliquer pourquoi la France voulait tous nous vacciner, tandis que certains pays, comme la Pologne, n'y croyaient pas, que la Grande-Bretagne n'avait prévu de vacciner la moitié de sa population ou l'Allemagne seulement quinze pour cent. Je n'ai pas d'explications à cela. J'ai aussi entendu dire que notre pays possédait le tiers du stock mondial de Tamiflu et plus d'un milliard de masques. N'étant pas épidémiologiste, je me garderai bien de donner le moindre conseil. Je note simplement que d'autres pays développés n'avaient pas les mêmes points de vue que nous et cela me rend simplement perplexe.

Je pourrais effectivement imaginer qu'il y a eu un complot et que certains ont touché de grasses commissions sur chacun des lots de vaccins achetés mais je n'en ai aucune preuve. Finalement l'explication rationnelle vient peut-être de l'irrationalité de nos élus et de notre administration. Voici presque cent ans alors que tout le monde la sentait venir, la grande guerre fut mal préparée. On proposait de superbes pantalons d'uniforme rouge garance qui faisaient de nos soldats des cibles idéales pour l'adversaire et la mitrailleuse était presque inconnue tandis que la charge à la baïonnette encore enseignée à l'École de guerre faisait l'unanimité du commandement. Quant à l'artillerie, tandis que de l'autre côté du Rhin, Krupps vomissait des canons de tous calibres dont certains énormes, chez nous on se fiait à la polyvalence du brave canon de 75 ! Toutefois, personne n'avait songé qu'il faudrait un paquet de chevaux pour tirer les batteries.

Au milieu de tout cela, le brave Joseph Joffre, tapotant de la main son annuaire des anciens de l'Ecole polytechnique, y choisissait ses généraux en expliquant qu'il savait que ce ne serait pas forcément les meilleurs mais qu'au moins avec eux, les trains arriveraient à l'heure. Tandis qu'il possède les plans de Shlieffen donnés par un officier allemand félon, il préfère ne pas y croire et engager les opérations comme il le souhaite en ourdissant un plan machiavélique dont il n'a pas les moyens. Fort heureusement, Gallieni sauvera la situation en envoyant une division d'infanterie en taxi pour gagner la bataille de la Marne.

Voilà tout le génie français, opposer le système D à la logique industrielle anglo-saxonne. C'est amusant puisque cent ans après, on nous refait le coup avec Quaero, le machin qui devait concurrencer Google. Décidément nos polytechniciens et autres énarques sont toujours d'aussi brillants stratèges. Quant aux élus, quand ils ne s'entre-déchirent pas dans leurs guerres pichrocolines pour devenir chefs d'un micro-courant de leurs partis insignifiants, on les voit serviles et pressés d'obéir à l'administration. Il s'agit donc toujours d'élire un toquard ivre de gloire qui face à un problème n'aura pas la moindre once de pertinence ou de solution personnelle, préférant se ranger derrière les avis d'experts. A ce propos, si vous avez des velléités d'élection, entraînez vous sur ce site, cela devrait suffire à vous fournir les armes de base de tout élu de la république : discours vide et creux où fleurissent quelques mots clés.

Cette fois-ci face à la grippe A, nous étions surarmés. Des millions de vaccins attendaient sagement dans des entrepôts avec des centaines de millions de masques tandis qu'on réquisitionnait des médecins pour organiser une vaste campagne de vaccination. Mais l'ennemi redouté n'est pas venu. Et heureusement parce que compte-tenu de la date d'envoi tardive des bons de vaccination, nous aurions eu le temps de mourir si la pandémie avait été aussi atroce qu'annoncée.

Aujourd'hui, je ne sais toujours pas si j'ai eu à faire à des escrocs ou à des incapables. Je garde mon bon de vaccination vierge comme un souvenir de guerre. On a alerté la population en disant que l'ennemi terrible et implacable serait bientôt là et on a organisé une grande campagne de mobilisation pour se faire vacciner.

Globalement, si l'on en croit les chiffres du nombre de personnes vaccinées, tout le monde ou presque s'en est fichu. On avait d'autres chats à fouetter. Cette guerre là, nos chères élites l'auront faite sans nous.