20 octobre, 2010

Scène de vie !

Ennemi public numero 1 !

Je revenais de déjeuner vers 14h00, ayant rendez-vous avec le plombier qui devait me refaire la salle de bains du cabinet. Tout à coup, je m'aperçois qu'il n'y a aucune voiture sur la grande avenue. J'avise un groupe d'une dizaine de jeunes. Allez soyons aussi large que les syndicats lorsqu'ils comptent les manifestants, et admettons qu'ils étaient vingt, peut-être vingt-cinq selon Sud.

Je les ai observés. A vue de nez, pas un ne semblait majeur, c'était juste une brochette de petits branleurs adolescents sortis faire du bazar et rien d'autre. Des fils de grand bourgeois allant au lycée dans un quartier où l'immobilier caracole à 12 000€ le mètre carré, le genre de petits mecs que l'on voit affalés en terrasse dès le premiers beaux jours, un Iphone dans une main et un Blackberry dans l'autre. Ils formaient un petit groupe au milieu de la rue. Jusque là, rien de très grave, quelles que soient nos idées politiques ou nos idéaux, personne n'a oublié que l'on peut être jeune et un peu con. Pour d'autres raisons, moi aussi j'ai joué mon branleur quand j'avais seize ans même si un capricorne est toujours moins branleur que les autres. Dans n'importe quel pays du monde, on aurait envoyé un car de flics pour régler le problème posé par ces jeunes.

On les aurait rudoyés gentiment et on leur aurait intimé l'ordre de foutre le camp en leur expliquant tout cela était une affaire de grands. Le leader, ou les récalcitrants auraient simplement été conduits au poste où leurs parents seraient venus les chercher en fin de journée. Une manière simple de régler un problème assez simple consistant à fixer des limites aux adolescents en leurs faisant notamment comprendre que l'occupation de l'espace public obéit à des règles strictes et que le droit s'impose à tous. Et de faire comprendre que la "liberté d'aller et venir" est une liberté publique constitutionnelle.

Mais, comme je vis dans un pays de cons dans lequel la règle de droit ne veut plus dire grand chose depuis longtemps, ce n'est pas ce qui s'est passé. Face à ce groupe d'ados boutonneux, se tenait une jeune commissaire âgée d'une toute petite trentaine d'années, et reconnaissable aux feuilles de chênes qui ornaient son blouson d'uniforme. Le sourire aux lèvres et la voix douce, elle parlementait gentiment avec les jeunes, leur demandant bien poliment de bien vouloir dégager la route.

Juste derrière elle, un mec en civil aussi discret qu'un clown à un enterrement, se baladait l'air de rien en prenant des photos à la dérobée : ce devait être un petit gars des RG essayant de se fondre dans la foule, le genre de mec habillé comme un jeune mais avec vingt ans de plus et avec un air de conspirateur tel que tout le désigne comme LE flic en civil. Lui, il était super rigolo à voir ! Je l'aurais bien pris en photo avec mon Iphone pour illustrer un article sur le camouflage raté. Il me rappelait furieusement Pierre Richard dans Les compères, quand il tente de dialoguer avec les jeunes en se faisant passer pour un jeune et qu'il entre dans le bar en claquant des doigts et en de disant : "ouah cool la rythmique" (désolé pour mes références cinématographiques merdiques).

J'écoutais le dialogue entre le leader des jeunes, un petit blond dégingandé à belle gueule et j'ai trouvé qu'il s'exprimait bien. Mais compte-tenu du quartier où j'étais, je ne doutais pas que cette poignée de révolutionnaires imberbes soient tous issus d'excellents milieux et qu'il se retrouvent dans quelques années dans une grande prépa où ils rigoleraient des leurs conneries d'ados. A côté du bellâtre, un comparse assez laid avec une vilaine peau à tendance acnéique tentait vainement d'avoir sa part de gloire alors que je pense qu'il aurait mieux fait d'aller voir un dermato plutôt que de perdre son temps à tenter de voler la vedette à son beau copain qui de toute manière se fera toujours plus de gonzesses que lui.

En attendant que ces jeunes gens obtempèrent, une centaines de mètres plus loin, quelque flics emmenés eux aussi par un jeune commissaire, un homme cette fois-ci, faisait la circulation déviant cette grande artère vers une totue petite rue adjacente où se formait un monstrueux bouchon.Un taxi klaxonnait pour passer tandis qu'un livreur a envoyé un sonore "j'en ai marre de ce pays de merde" à l'adresse des policiers chargés de faire la circulation. Bien sur l'un d'eux est venu menaçant vers le livreur en lui intimant l'ordre de se calmer. Et comme le mec n'était pas un gosse de riche, qu'il avait un boulot et qu'il n'avait ni envie de se prendre une prune et encore moins de se faire emmener au poste, il a fermé sa gueule.

Mon plombier après avoir fait la queue durant trente minutes pour avoir du gas-oil m'avait averti que les rues étant bouchées, il ne serait pas à l'heure, on a annulé le rendez-vous. Alors comme j'avais du temps à perdre, je me suis assis en terrasse où j'ai bu un café en contemplant cette scène : des voitures bloquées, un embouteillage monstre et des gens stressés. Je me disais en regardant le livreur qui me semblait plutôt du genre balèze, qu'il aurait suffit de l'envoyer lui tout seul dialoguer avec les jeunes et qu'il se serait montré persuasif avec eux.

Mais non, pour régler tout cela, il y avait deux commissaires, une poignée de flics en tenue et bien sur ... du dialogue car il est convenu qu'avec un jeune il faut dialoguer. Je me demandais si ces mêmes fonctionnaires de police seraient autant adeptes du dialogue si ils me prenaient en train de conduire en téléphonant ou avec 0,6g d'alcool dans le sang. Je suppose que non.

Je me suis dit que pour qu'on me foute la paix, j'allais m'acheter un jean slim que je porterais en montrant le haut de mon caleçon, que j'allais avec un feutre rouge me faire de faux boutons d'acné, porter une perruque à cheveux longs et que la prochaine fois qu'un de ces zélés fonctionnaires m'arrêterait, d'une voix de fausset qu'ont souvent les préados en train de muer, je leurs dirais : putain, je suis un jeune en colère et vous zêtes que des fachisses.

Peut-être seront-ils tentés de dialoguer et de me laisser partir ?

6 Comments:

Blogger El Gringo said...

...un jean slim que je porterais en montrant le haut de mon caleçon, que j'allais avec un feutre rouge me faire de faux boutons d'acné, porter une perruque à cheveux longs...

Chiche?

20/10/10 2:05 PM  
Blogger gawin said...

Permettez moi de vous suggerer cette video hilarante concernant le comptage des manifestants a Marseille:
http://www.dailymotion.com/video/xf8lh4_le-petit-journal-comptage-manifesta_news

20/10/10 2:47 PM  
Blogger V. said...

ah merci Philippe pour ce post hilarant (encore un) !
Je vais faire le planton devant chez Nicolas pour vous voir sortir de l'immeuble avec votre jean slim !
J'ai pas d'IPhone. Je promets de ne pas vous prendre en photo.

Merci encore !

20/10/10 4:08 PM  
Blogger L said...

J’aime bien les représentants de l’autorité aux US. Malgré toutes les histoires d’horreur qu’on peut entendre j’ai toujours eu de bonnes expériences avec eux, tandis qu’en France j’ai eu pas mal de merdes dont une séquestration injuste par des abrutis. La grosse différence c’est le professionnalisme.

Contrairement aux idées reçues les flics américains savent se faire respecter sans faire de zèle, car ils n’en ont pas besoin. J’ai tendance à respecter les gens qui font bien leur boulot donc ça se passe bien, et il me semble que l’autorité est au cœur du métier de flic, je vois mal comment un policier peut faire du bon travail s’il n’a pas cette faculté. Il y aura toujours quelques guignols qui voudront faire comme à la TV mais je ne les ai pas encore croisé. Et puis le zèle est un aveu d’incompétence.

Hier je demandais à 2 flics l’autorisation de fumer tandis que je patientais dans l’enceinte d’une école, ils me l’ont gracieusement accordé en vertu du bon sens, m’expliquant qu’ils viendraient juste me voir si un parent se plaignait. En bonus ils étaient aimables, comme presque tous les fonctionnaires que j’ai croisé ici, notamment ceux du Department of Motor Vehicles. Quand je me suis présenté pour obtenir un permis de conduire californien, on m’a demandé une simple pièce d’identité et la modique somme de $31 pour le tout. On m’a expliqué que je pouvais passer le code dans l’instant, je n’en revenais pas. Alors j’ai choppé le Driver Handbook Manual disponible gratuitement au comptoir, je l’ai lu rapidos et j’ai passé l’examen juste après (un simple QCM à cocher au crayon et corrigé en 1 min par un fonctionnaire). Si je le ratais, il me restait 2 essais gratuits. Il ne me reste plus qu’à prendre rendez-vous pour la conduite et le tour est joué. Quel pied ! Seul un français qui est passé par l’enfer du permis républicain peut mesurer son bonheur.

Excellent post, au fait.

21/10/10 7:49 AM  
Blogger GCM said...

@Gringeot : Bah quoi, toi tu l'as bien fait ! (et pire...)

21/10/10 5:35 PM  
Blogger El Gringo said...

@GCM : M'en souviens pas... j'étais bourré?

22/10/10 1:41 AM  

Enregistrer un commentaire

<< Home