29 septembre, 2014

Faut pas se jeter sur les patients comme un crevard !

Le Touffier, Le Gringeot et un de leur pote en Corée en 1951 !

Suite à mon dernier article, Le Touffier qui n'est pas la moitié d'un con puisqu'il est médecin, voui carrément et même chirurgien de temps en temps, ce qui le place à la droite du Mère voire sur ses genoux, m'adresse le commentaire suivant :

J'ai souvenir d'une dépression apparue au décours d'une prise en charge d'un cancer du sein, une athymie sévère, une sorte de distanciation catatonique.
Les trois psychologues se sont succédés pour remplir leur mission sur cette dépression réactionnelle sévère, sans beaucoup de succès. Mais comme il n'en avait jamais, de succès, cela ne constituait pas une information pertinente.
Personne ne pouvait soupçonner la présence du malin ou une schizophrénie, la dame n'était plus toute jeune et originaire du Berry.
Le psychiatre et le prêtre remplirent leurs fonctions sans plus de succès.
C'est une infirmière qui constata cette fâcheuse tendance à danser la gigue dés que la dame se levait, ce qui est très inhabituel chez les berrichonnes.

En ces temps reculés où unE IRM n'était pas disponible, nous nous contentâmes d'un bon vieux scanner pour repérer les métastases cérébrales.

Un simple examen clinique complet aurait permis de faire le diagnostic plus tôt, ce qui n'aurait pas changé le pronostic, mais aurait éviter aux trois psychologues de se livrer à leur activité favorite : se croire utiles.

Mais qui sait encore faire et prendre le temps d'un examen neurologique complet ? Quel neurologue connait encore le réflexe polico-mentonnier, pourtant si distrayant dans les cas de lésions supra-médullaires, puisque qu'en percutant la paume de la main on obtient la contraction des muscles de la houppe du menton. Ce n'est pas spectaculaire, mais c'est distrayant.

Si l'IRM confirme l'envoutement, on pourra passer Rehumanize Yoursel de l'album Ghost in the machine du groupe Police pendant l'examen. Les radiologues ont bien droit eux aussi à quelques distractions.

Tout d'abord vous noterez que Le Touffier, tout chirurgien qu'il soit, n'en oublie pas d'avoir la rock'n'roll attitude prônée par Johnny Halliday puisqu'il cite carrément le deuxième titre de la face B du quatrième album du groupe The Police.  Ce mec vous fend en deux d'un coup de scalpel affuté tout en chantant ; ce n'est pas rien ! Et en plus il a une énorme moto.

Ça vous change des chirs à grosses têtes chauves et culs de bouteille sur le nez, qui roulent en BMW boite auto et dont on sait qu'ils se repaissent uniquement de trucs gnangnans joués par un putain de quatuor à cordes ou d'une obscure sonate interprétée par un non-moins obscur pianiste moldo-valaque connu des seuls initiés. Mettez le en tandem avec Le Gringeot et ils formeront une équipe aussi forte que les mecs de Mash. On s'en fout que Le Gringeot ne soit pas chir, quand on voit la dextérité avec laquelle il vous dépouille une Benelli Sei, on se dit qu'il est habile de ses doigts le bougre !

Alors que nous apprend-t-il ce brave Touffier ? Qu'une fois au moins au cours d'un cancer du sein, une patiente a eu des symptômes psychologiques et qu'il a demandé aux psychologues de se pencher sur le cas. Et bien sur ce gros boucher, se fout de la gueule des psys, être fins et délicats, arguant du fait qu'ils n'ont pas eu plus de succès qu'à l'accoutumée. Ceci dit le psychiatre en prend lui aussi plein la tête puisqu'il semble qu'il ne fut pas plus efficace que les psychologues. Ce qui nous amène à penser qu'il existe une putain de ségrégation chez les médecins où out ne haut, le chir qui a eu de bonnes notes à l'internat peut se permettre de prendre de haut le pauvre psy qui fut moins doué et a du se contenter d'une spécialité non médicale tout juste plus cotée que médecin généraliste.

Mais au-delà de l'aspect polémique dans lequel je ne renterai pas, étant entendu qu emoi j'aime tout le monde parce que je suis un bon gars, cette anecdote illustre bien la manière dont nous sommes traités, nous autres pauvres psys. Combin de fois n'ai-je pas eu de ces cas, pourtant envoyés par des médecins qui n'avaient rien à faire dans mon cabinet s'ils avaient été correctement diagnostiqué.

Dans ces cas là, je me borne juste à constater les symptômes, à tenter de voir ce qu'ils expriment d'une manière psycho-dynamique et le cas échéant, si cela ne me dit rie, ne me raconte rien, je me contente de dire que je ne suis pas compétent en adressant ces patients à des médecins qui les prendront mieux en charge que ceux qui s'en sont débarrassés chez moi. Parce que faites l'expérience chez vous, bourrez-vous la gueule et vous verrez que vous vous mettrez à raconter des conneries et que votre état émotionnel sera fortement altéré. Par exemple, moi même pourtant buveur modéré, je me souviens d'une soirée ou j'ai pu parler durant une heure de pneus, oui de pneus, avec un pote à l'époque trader au Crédit agricole alors qu'habituellement, c'est à dire à jeun, ni lui ni moi n'éprouvions la moindre passion pour les pneus fussent-ils taille basse et en dix-huit pouces et très chers. Y'avait aucune symbolique particulière dans le pneu, ni indice permettant de sonder notre putain d'inconscient. On était bourré et on a parlé de pneus, c'est tout.

Dans ce cas, on parlera d'intoxication alcoolique. Alors d'un point de vue psychologique, si vous vous bourrez souvent la gueule, on pourra soupçonner des problèmes chez vous mais en aucun cas la cuite en elle-même et les conneries que vous aurez racontées n'auront valeur diagnostique.Être bourré, c'est juste avoir fait le trop-plein d'une molécule dénommée éthanol (formule CH3CH2OH). 

Celle ci se diffuse alors à travers la paroi de l'estomac, passe dans le sang et ensuite se propage au cerveau. Là, elle perturbe les échanges chimiques entre synapses et les ennuis commencent, on titube et on dit des conneries. Par exemple on peut parler de pneus durant une heure. Bref, c'est une intoxication, c'est chimique et c'est pas psychologique.

Et il y a plein de trucs de ce genre dont les symptômes apparaissent psychologiques alors que c'est purement physiologiques. Ça peut être neurologique, ophtalmologique, viral, etc., mais pas du tout psychologique. Par exemple, la dépression pourtant bien connue peut être la voie inaugurale d'une maladie de Parkinson.

C'est pour cela qu'il faut toujours faire l'anamnèse du cas, c'est à dire tenter de retracer les antécédents durant lesquels sont survenus les symptômes pour voir si c'est psy ou non. Parfois ce n'est pas si simple notamment dans les cas d'angoisse. Car si celle-ci est toujours un phénomène actuel, elle peut être réactivée à partir d'un traumatisme ancien oublié ! La psychologie justement ça concerne l'âme, c'est à dire le vécu de la personne. Si rien dans l'environnement, c'est à dire le vécu de la personne n'explique ce qui se passe, il faut savoir passer la main et demander, que dis-je exiger un diagnostic différentiel à un médecin dont c'est le boulot et principalement à un spécialiste de médecin interne dont c'est précisément le job comme le Dr House dans la série éponyme.

Çà ne sert à rien de se jeter sur un patient comme un crevard en se disant que si on vous l'a envoyé, c'est que c'est psy ! Justement il faut se dire que si on vous l'a envoyé c'est qu'on pense que vous êtes un peu spécialisé dans votre job et que vous aurez un avis pertinent et que vous ne vous jetterez pas sur le cas comme un mort-de-faim qui pense que parce-que-c'est-un-médecin-qui-l'a-dit-alors-il-a forcément-raison. Parfois le médecin, surtout s'il est spécialiste et que le cas sort de sa spécialité, il peut aussi douter ou ne pas savoir et demander un avis. 

Il m'est arrivé plusieurs fois de renvoyer des patients à leurs médecins parce que je ne m'estimais pas compétent en leur expliquant pourquoi et aucun d'eux ne m'en a voulu ni ne s'est senti atteint dans sa toute-puissance. La plupart des médecins ne gardent un patient qu'un quart d'heure, voire moins, tandis que je prends une heure de mon temps pour recevoir la personne. Il est normal que je puisse parfois voir des trucs qui sont passés à l'as dans une autre consultation. C'est d'ailleurs pour cela que les médecins sont riches et jouent au golf tandis que je me traine la bite en Citroën Visa et que j'ai du mal à payer une cotisation à un club de boulistes ! Mais bon, la vocation c'est la vocation.

Alors je ne sais pas ce que j'aurais fait de la patiente du Touffier si ce n'est que des symptômes ausis bizarres auraient nécessité une prise en charge plus large. Me connaissant, je pense qu'après l'anamnèse du cas, je me serais dit que ça sentait mauvait et qu'un IRM ou à défaut un scanner à cette époque était nécessaire.

Je ne suis pas la poubelle de la médecine et je dois être l'un des psys qui psychologise le moins au monde. La psy c'est bien mais ça peut être très chiant aussi surtout quand on en fait pour rien. Ça tourne alors à la discussion de salon de coiffure et c'est lourdingue. Je préfère encore parler de pneus.

D'ailleurs pour les pneus, moi j'ai choisi Allopneus.


2 Comments:

Blogger Le Touffier said...

Tout vient d'un malentendu. Lorsque les médecins ne savent pas, ils ont été éduqués à prononcer "c'est psychologique" ou "c'est auto-immun". Chaque fois qu'on dit "je ne sais pas", on reçoit une décharge de 220 volts pendant nos études. Comme personne ne sait ce que peut bien impliquer comme démarche l'auto-immunité, les gens prennent nos propos au premier degré et se rendent chez un psychologue.
En réalité, les touffiers sont totalement incompétents pour les maladies des boyaux de la tête, et faire un vrai diagnostique dans le domaine psychologique nous parait psychédélique comme Atom Heart Mother du Floyd, et formellement tabou. C'est comme un moteur, faut jamais l'ouvrir, c'est plein de trucs vicieux là-dedans. Le cerveau, surtout féminin, c'est une zone totalement interdite, pleine de pièges sournois.

Si j'ai impliqué autant d'intervenants dans mon histoire, c'est parce que je garde cet échec comme un mauvais souvenir, une faute d'attention, qu'une simple infirmière a réussi à corriger par une observation quotidienne basique.

Vous noterez que je n'ai pas eu la bassesse d'impliquer le chef de service, les deux agrégés, les deux chefs de clinique, supérieurs hiérarchiques du Touffier, et qui sont eux aussi passer à coté du problème. Les touffiers ne s'aventurent jamais au-dessus du nombril, mais ils ont le respect des anciens.
D'avoir traité des métastases cérébrales avec du paracétamol, même si ce n'était que pendant deux jours, je me sens encore misérable, parfois c'est pire, je me prend pour un généraliste.

Depuis ce jour, en signe de pénitence, je garde mon cilice sur moi jour et nuit : je m'oblige à écouter les infirmières.

30/9/14 1:40 AM  
Blogger philippe psy said...

@Touffier : dans mon métier, on se souvient du mot du grand Esquirol qui disait "méfiez-vous de la bouffissure doctorale !". Parce que c'est en observant les bignoles de l'hôpital de la Pitié qu'il fit avancer la psychiatrie. En tout cas, merci pour tes longs commentaires.

30/9/14 1:52 AM  

Enregistrer un commentaire

<< Home