09 février, 2015


Je viens de modérer mes commentaires et une de mes lectrices me demande : s’il n'y a pas de transfert en TCC, comment expliquer l'attirance que l'on a pour son psy ? Ben, que répondre à cela ? Déjà, il s'agit de distinguer le transfert de l'attirance.


Le transfert est le moteur, le poitn central de toute psychanalye et repose sur deux grands principes. Premièrement, le patient suppose que le psychanalyse possède un savoir et qu'il connait les réponses aux questiosn qu'il se pose. Dans les faits, même si le psychanalyse ne sait rien, le patient ressent la nécessité de s'appuyer sur la certitude que son analyste sait, pour aller au-devant de son savoir inconscient, y trouver les réponses appropriées. Enfin, un peu comme on le ferait sur un mannequin de couture, le patient accroche à son analyste toutes les défroques des gens qui ont compté dans son histoire. Il va ainsi rejouer avec son analyste les relations qu'il entretenait avec ces personnes puis analyser ces relations pour les comprendre.

On admettra ainsi que, « le transfert en psychanalyse, est essentiellement le déplacement d’une conduite émotionnelle par rapport à un objet infantile, spécialement les parents, à un autre objet ou à une autre personne, spécialement le psychanalyste au cours du traitement ». Au sens large, le transfert est donc : « La reviviscence de désirs, d'affects, de sentiments éprouvés envers les parents dans la prime enfance, et adressés cette fois à un nouvel objet, et non justifiés par l'être et le comportement de celui-ci. ».

En revanche Larousse explique l'attirance est une force qui attire par le plaisir, le charme, le vertige, qu'elle est le sentiment de quelqu'un qui est séduit : Éprouver une forte attirance pour quelqu'un. L'attirance existe donc en tant que telle et ne se justifie pas forcément par l'inconscient. On peut être attiré par une personne, par une marque ou que sais-je encore, sans qu'il ne soit nécessaire de se faire des nœuds au cerveau pour en comprendre les causes. La vie n'est pas une cure analytique, Dieu merci !


Le transfert n'est donc pas une simple attirance mais la projection d'un conflit inconscient sur la personne du psychanalyste. On ne saurait donc voir de transfert partout, dès lorsqu' il existe une attirance entre deux êtres. Confondre transfert et attirance serait le fait  soit d'une personne ne connaissant pas la définition de ces deux mots ou bien d'une personne démarrant une analyse et voyant de la production inconsciente dans les faits les plus anodins de l'existence. Or, même pépé Freud l'a dit : parfois un cigare n'est rien d'autre qu'un cigare !Mais pour compliquer le tout, et pourvu que l'on accorde le moindre crédit à la psychanalyse, attirance et transfert peuvent parfois être mêlés. 

S’agissant des TCC, leur réussite n'est pas axée sur ce fameux transfert que l'on devrait liquider, permettant ainsi au patient de se libérer de ce conflit intrapsychique qu'il projetait sur son analyste. Dans les TCC, il s'agit pour le thérapeute et le patient de former une alliance thérapeutique désireuse de travailler sur les symptômes afin de les éradiquer. Le transfert doit donc être découragé si l'on sent qu'il nait dans la relation afin de ne pas dénaturer la relation thérapeute/patient. On voudrait aussi vivre dans un monde parfait et songer que l'on ne choisit pas son thérapeute en fonction de l'attirance que l'on a pour lui/elle mais uniquement pour ses compétences.

Ce serait bien vain et raisonner comme un ingénieur alors qu'il s'agit d'individus autrement plus complexes. Il est certain que la relation ne peut s'établir que s'il existe de la part du patient une forme d'attirance pour le thérapeute. Je ne parle évidemment pas ici d'attirance sexuelle, mais d'un sentiment plus neutre, que l'on pourrait qualifier de sympathie. On n'imagine pas un patient qui irait consulter quelqu'un qui connaitra toutes ses pensées intimes en pensant que c'est un(e) sale con(ne). 

Une forme d'attirance est donc nécessaire, sans doute que celle se situe au niveau des valeurs que le patient et le thérapeute partagent. Par exemple, en mon jeune temps, j'avais choisi mon analyste, non pas en fonction de ses qualités, dont je ne savais rien, mais simplement parce qu'ayant vu le Figaro posé sur la méridienne, je m'étais dit que c'était sympa de voir un psy qui ne fut pas un gauchiste ! Le pauvre aurait pu faire toutes les publications savantes qu'il voulait, eut-il été lecteur de Libération que je ne l'aurais pas consulté étant entendu que pour moi, âme frustre, être socialiste est une pathologie mentale.

De la même manière, il est possible que dans les TCC puisse exister une forme de transfert latent. C'est souvent lié à l'âge. C'est ainsi que les plus jeunes projettent sur moi l'image du père. Pourvu que cela ne prenne pas de proportion alarmante, je considère que c'est une des composantes de l'alliance thérapeutique que je vais nouer. en revanche, même si je constate que ce transfert existe, je ne l'utilise jamais dans le cadre de la TCC. Certaines jeunes patients en sont frustrés car ils aimeraient que je sois parfois moins stoïque mais que je m'engage dans ce transfert.

Quant à l'attirance proprement dire, le fait de se sentir séduit, il est évident que comme dans toute relation humaine, elle peut exister. Pour autant, il y a ce que l'on nomme un style professionnel à adopter, quelque soit le style personnel que l'on surajoute par la suite. Ce style personnel ne doit jamais entrer en conflit avec le style professionnel qui consiste en des règles strictes liées à l’exercice de la profession. Je tutoie une partie de ma clientèle, je fais parfois la bise à certaines patientes que je connais bien, mais pour autant, je prends toujours garde à ce que ces comportements ne soient jamais assimilables à une quelconque séduction de nature sexuelle. 

Ceci étant dit, compte-tenu de ma profession, je sais avec qui je peux agir ainsi et avec qui je sais que je dois me tenir plus distant. Il existe parfois des pathologies comme l'hystérie, avec son cortège d'émotions incontrôlables, ou encore l'érotomanie, une psychose paranoïaque de la classe des délires passionnels, qui sont à prendre en compte. De la même manière, le thérapeute ne doit jamais oublier que dans les situations de détresse psychologique ou de grande solitude, sa personne, en tant que soignant empathique et aimable, peut susciter si ce n'est de la convoitise, du moins une forme de compensation affective pour certain(e)s patient(e)s. Il s'agit donc de faire attention pour décourager l'attirance comme on le fait du transfert.

Ceci étant dit, on peut donc, à défaut de transfert du type analytique, ressentir une attirance pour la personnalité de son(sa) psy. Soit que celui(celle)-ci soit d'une grande beauté ou possède un magnétisme incroyable, soit que l'on adore sa disponibilité et son amabilité ou encore qu'on le(la) trouve extrêmement brillant(e). L'attirance étant un phénomène complexe, qui sait pourquoi l'on craque pour telle personne plutôt que telle autre ! On sait aussi que certaines professions (militaires, pompiers, médecins, infirmières, élus, musiciens, etc.) sont de nature à polariser la passion amoureuse plus que d'autres (syndic de copropriété, militant socialiste, comptable, chômeur, etc.).

En cas d'attirance manifeste du patient pour son thérapeute, ce dernier devra donc décourager toute ambiguité afin de ne pas polluer le processus thérapeutique. S'il advient que cela s'avère impossible, le thérapeute sérieux devra s'en ouvrir et adresser le patient à un confrère. La thérapie, n'est pas une pratique médicale mais un mécanisme complexe dans lequel on traite par la parole et de ce fait, il est bien sur très fortement déconseillé d'y entretenir des liaisons sentimentales ou sexuelles !

C'est comme cela qu ça marche. Et souvenons-nous que transfert et attirance ne sont pas identiques, enfin pas toujours. Mais vous m'avez compris !

3 Comments:

Blogger Maxime said...

J'aimerai bien avoir ton avis sur ce qu'on appelle l'affaire Jean-Louis Caccomo dans les milieux libéraux français...

http://www.dailymotion.com/video/x2fgszt_jean-louis-caccomo-j-ai-ete-interne-de-force-pendant-2-ans-en-toute-illegalite_news
http://institutdeslibertes.org/jean-louis-caccomo-helas/
http://www.enquete-debat.fr/archives/letrange-silence-des-liberaux-sur-le-cas-de-jean-louis-caccomo-94072

La bien-penséance socialiste en france est-elle vraiment au bout du rouleau ?

12/2/15 12:25 AM  
Blogger Unknown said...

Dites donc Docteur, on s'ennuie ferme ces derniers jours. Trop d'activités je suppose.
Et bien nous attendrons votre retour avec un certaine impatience.

13/2/15 4:59 PM  
Blogger Unknown said...

:) je viens de voir cet article , c'est moi qui avait posé la question . Je pensais qu'il n'existait pas du tout de transfert en TCC mais je vois qu'il peut exister mais n'est pas utilisé dans votre pratique, merci pour l'article .

10/3/15 8:12 PM  

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