26 février, 2024

Judith Godrèche et les autres ...

 

"Bonne renommés vaut mieux que ceinture dorée"

  "Même si plus personne ne regarde cette cérémonie, réduite à un entre-soi associant le consensus le plus mou à la gêne la plus extrême, celle-ci reste un magnifique objet d’étude sociologique de notre époque. Raout mondain jubilatoire comme l’orchestre du Titanic pour le philosophe maîtrisant l’Ironie, ou triste à mourir pour le dépressif, c’est selon. Et, dans tous les cas, cette purge devient chaque année plus apocalyptique que la précédente, dans son sens terminal comme dans le sens de ce qu’elle révèle à nos yeux."

Voilà comment un site bien connu qui sent le souffre, décrivait cette navrante fête du cinéma. Je n'aurais pu écrire mieux. Il faut dire que je ne suis pas plus amateur de cinéma que des manifestations bruyantes de vertu au cours desquelles des victimes ou prétendues telles viennent dénoncer des coupables désignés d'avance. 

Cette année c'était au tour de Judith Godrèche de dénoncer le gars qui lui a servi de Pygmalion quand elle avait quatorze ans et qu'elle a débuté comme actrice. Alors, qu'il faille être un curieux personnage voire carrément un gros porc pour e taper une gamine de quatorze ans quand on en a quarante ne fait aucun doute. Mais bon, il s'agit de cette fameuse grande famille du cinéma et franchement doit-on, peut-on, attendre un comportement correct d'une industrie ayant pour fondements la séduction et le mensonge.  

En revanche, je reste toujours étonné que des parents, puisqu'ils existent, puisent tolérer que leur fille de quatorze ans vive en couple avec un quadragénaire. Mais personne ne parle jamais de ces gens là. On pourrait arguer qu'il s'agit de pauvres gens sans malice n'ayant rien compris à la situation mais non, j'ai vérifié : le père est psychanalyste et la mère psychomotricienne et donc à priori suffisamment intelligents pour apprécier une situation.

Personnellement, je me refuse à ce qu'on fasse le procès de Benoit Jacquot ou de Jacques Doillon, si les parents Godrèche ne sont pas eux aussi sur les bancs des prévenus. Parce que c'est un système qu'il faut condamner, celui où des parents suffisamment pervers et narcissiques sont prêt à tout pour voir le nom de leur progéniture briller sur les frontons des cinémas.

Nous avions eu un peu le même genre d'histoire lorsqu'il s'était agi de chasser en meute le vieux Gabriel Matzneff, star des lettres germanopratines finissante. Non que je veuille à tout prix défendre ce vieux pédophile mais simplement qu'il fut le témoin d'une époque, celle où des gens biens nés, habitant dans de jolis endroits, s'estimaient en droit de bafouer les conventions, quitte à mépriser le droit qu'ont les enfants à ce que de vieux dégueulasses leurs foutent la paix.

Chacun se souviendra à titre d'exemple, de l'ignoble papier de Libération prônant la pédophilie comme s'il s'agissait d'un chose légitime, d'un choix aussi prosaïque que de préférer les brunes aux blondes, les petites rond aux grandes minces. On se souviendra aussi de cet ambiance de connivence durant un Bouillon de culture durant lequel, le vieux Matzenff parlait de ses déviances face à un auditoire riant avec des attitudes de voyeurs conscients que tout cela n'était pas très bien sans pour autant être capable de condamner les propos.

Encore une fois, s'agissant des victimes de ce vieux Gabriel Matzneff, il y eu celles qu’il trouva par lui même parfois dans des pays lointains et pus les autres, garçons ou filles qu'il eut en France. Encore une fois, je m'étonne toujours du silence des parents. Certes certains ne l'ont pas su mais dans l'affaire Vanessa Springora, qui expliqua qu'elle débuta une liaison quand elle n'avait que treize ans et lui quarante-neuf, la mère qui toléra la relation puisque la jeune fille vivait carrément  l’hôtel avec son vieil amant aux yeux de tous.

Je me souviens que voici dix ans environ j'ai eu un jeune home dont la famille était particulièrement bien établie dans l'industrie des l'édition. Particulièrement brillant, il m'avait confié combien ce milieu le répugnait, rempli de mères maquerelles prête à tout pour que leur adorable petit fille tellement brillante, diplômée de l'IEP Paris ou de l'ENS soit un jour éditées. Et face à ce bétail livré par les mères, attendaient des gens peu fréquentables, écrivains connus, éditeurs réputés, journalistes en vogue, prêts à tout pour se taper de a chair fraîche. Comment refuser quand on a cinquante balai voire soixante un joli petit lot de vingt printemps ? Les chinois ne disent-ils pas qu'une très jeune femme est la meilleure médecine pour une vieil homme ?

Je veux bien admettre que ces jeunes femmes, qu'elles soient actrices ou débutant une carrière dans les lettres soient de vraies victimes dans la mesure où leur jeune âge ne permettait pas un consentement avisé mais j'exige alors qu'on fasse le procès de toute la chaine de responsabilités sinon c'est trop face : l'homme devient le bouc émissaire facile et les parents s'en sortent à bon compte.

Si l'on a pu dire à une époque qu'il existait des mères à schizophrènes, ce que l'on sait aujourd’hui être faux, on doit savoir qu'il existe des mères prêtes à tout pour que leur progéniture tutoie les étoiles et accède à la gloire. On les trouve chez les gens bien dans l'industrie du cinéma ou des lettre mais aussi chez les prolos dans les concours de mini miss aux USA.

Quand un garçon ou votre fille devient une extension ou une prothèse narcissique d'un parent, le pire est à prévoir !


14 février, 2024

L'emprise !

 

Voici des mois, voire peut-être des années qu'on nous saoule avec l'emprise, comme si cet état psychologique était une pathologie terrible, une souffrance atroce ne concernant que quelques personnes. Or, et je vous l’affirme à moins d'être une brute, une sorte de babouin décérébré; pn a tus été sous emprise  un moment ou à un autre à des degrés divers.

Tenez moi qui vous parle, voici bien des années, je sortais avec une demoiselle adorant l'astrologie. Voyant que j'avais Vénus en  Verseau, elle s'écria : o toi tu es plus amoureux du genre humain que d'une seule personne. Ça lui avait fait peur ; la choupette rêvait de romantisme et elle se retrouvait avec un mec qui pense tout le temps. Ceci dit, je ne regrette pas que ça n'ait pas marché, parce que c'était une emmerdeuse redoutable. 

C'est pour cela que j'ai toujours trouvé étrange ces mecs qui se transforment en soumis grotesques pour leur gonzesse. Je le comprends intellectuellement suis bien incapable d'éprouver ce qu'ils éprouvent. Et puis, tant qu'on est à croire en l'astrologie, cette position de Vénus en Verseau est utile dans la pratique de ma profession, ça me permet d'avoir de l'affection pour ma patientèle en général plutôt que de me focaliser sur une seule personne. 

Pour le reste, l'emprise est pour moi non pas un mystère mais quelque chose de compliqué parce que je suis un esprit très indépendant. C'est pour cela que je me suis toujours déclaré anarchiste de droite. Tenez une fois, à la demande de sa mère, j'étais allé dans une sorte de secte voir un ami qui s'y était fourvoyé. J'avais passé le weekend avec eux. Je devais avoir vingt ans. Au bout de deux heures, la femme qui leur servait de gourou m'avait détesté car elle avait compris que jamais je ne tomberais dans ses rets. Non, secte ou parti politique, ce n'est pas mon truc, pas plus que les vaccins bidons ou le réchauffisme. 

Pour autant j'ai mes failles. Comme me le dit souvent, un de mes anciens patients avec qui j'ai gardé des liens amicaux lorsqu'il me voit avec ma chienne : tu lui passes tout ! Et c'est vrai, qu'en l'absence de toutes contraintes, j'ai sans doute le chien le plus mal éduqué du monde. Mais que je tente de sévir et il suffit qu'elle me regarde et je fonds. Moi, le dur, l'inflexible, le stoïque, je fais les quatre volontés d'un klebs de dix kilos parce que c'est mon oursonne rien qu'à moi !

Alors l'emprise c'est quoi finalement ? L'emprise est une domination intellectuelle, affective, psychologique qu'exerce une personne sur une autre. Elle peut se retrouver dans toutes les sphères de la vie, professionnelle, amoureuse, amicale et/ou familiale.

Bref, l'emprise c'est un lien très fort qui unissent de manière asymétrique deux personnes voire une personne et un système. Certain(e)s vont être fous amoureux d'autrui, d'autres admiratifs d'un professeur et d'autres encore fiers d'appartenir à tel ou tel groupe. L'emprise, c'est juste un lien très fort et c'est humain. Ce n'est ni bon, ni mauvais, c’est humain. Et quand on vit cette emprise et bien on est heureux et ça suffit pour illuminer nos vies. Si vous n'êtes pas des bêtes mais êtes capables d'aimer, souvenez-vous de votre premier amour, le cœur battant, la possibilité de décrocher la lune pour elle ou lui. Vous étiez sous emprise et qu'est ce que c'était bon.

Quand on est sous emprise, on secrète de la dopamine, de la sérotonine, de l’endorphine et de l'ocytocine et qu'est-ce qu'on se sent bien quand on a cette came dans le cerveau. C’est quand l’emprise cesse que tout va mal que le sevrage est brutal. C'est pour cela qu'un chagrin d'amour ou un deuil font si mal. L’emprise cesse et tout devient sombre.

Du moins c'est ce qu'on disait avant mais maintenant, plutôt que d'avouer qu'on a aimé, qu'on a été enchaîné, on vient parler d'emprise comme si c’était une faute, une faiblesse dont autrui aurait abusé. Quand ils se sont trompés, qu'ils vivent une rupture, les hommes se mettent à la picole ou à la misogynie idiote et les femmes vont se raconter aux Césars ou chez Faustine Bollaert l'après-midi.

Est-c que l'emprise est une violence ? Oui sitôt qu'elle cesse, sinon c'est quelque chose qu'on s’inflige avec plaisir. Qui n'aime pas être amoureux ? Ceux qui ont trop souffert à cause de l'amour ? Peut-être.

Bref, l'emprise ce n'est pas mal, ce n'est pas négatif. Tout dépend des situations. Il existe des amours impossibles et des amours interdits. Certains tenteront quand même malgré les conseils avisés. Il y a ceux qui croient à l'amour à distance et échouent et les jeunes femmes qui se croyant plus mures qu’elles ne sont, confondant leurs élans biologiques et leur raison, tombent dans les filets de types plus vieux, les candides qui se font escroquer par des salauds, j'en passe et des meilleurs. 

Mais qu'est ce que c'est compliqué l'emprise et donc l’amour parce que justement c'est irrationnel et qu'on a beau savoir, se méfier on se dit que ça pourrait peut-être marcher parce que justement, sil y a bien un truc dont la totalité est largement supérieure à la somme des parties, c'est l'amour. En 1936, Fréhel chantait "Tel qu'il est, il me plait", décrivant ce qui nous apparait comme un vrai toquard, trois ans plus tard Rina Ketty chantait "J'attendrai jour et nuit". Plus tard, en 1946, Edith Piaf entonnait son célèbre  La vie en rose où elle décrit avec extase l'emprise ! 

Et évidemment, ce n'est pas l'apanage des femmes puisqu'il n'y a qu'à songer qu'à l'inoubliable Jacques Brel qui entre son célèbre "Madeleine" ou "Ne me quitte pas" nous décrit lui aussi les affres d'une emprise. Et puisqu'on en est aux chanteurs décédés, n'oublions pas Gilbert Bécaud et son terrible Et maintenant, au mythe obsédant de boléro dont on dit qu'elle lui fut inspirée par une rupture, autrement appelle fin d'une emprise. Toutes les chansons d'amour ne parlent que d'emprise !

Alors chers lecteurs, pourvu que ce ne soit pas d'individus malsains ou de groupes nocifs, je vous souhaite à tous de vivre très belles emprises et qu'elle durent le plus tard possible !

12 février, 2024

Où je joue le beau et suis pris à mon propre piège !

 

 Gérard de Nerval (1808-1855)

Il m'arrive de plus en plus souvent, moi qui suis de la génération X de pester contre les générations suivantes, la Y bien sur mais encore plus la Z, ces petits incultes nés avec une tablette entre les mains et n'ayant jamais connu un monde sans internet. Bien sur, mes récriminations ne parviennent qu'à grand mal à masquer la rage que j'ai de vieillir. Moi qui naguère était aussi leste qu'un jeune mouflon, aussi gracile qu'un petit faon et athlétique qu'un jeune jaguar, voici que j'ai mal aux genoux.J'ai beau avoir lu dans tous les manuels d'astrologie que les genoux étaient le point faible des capricornes, il m’apparait particulièrement cruel de considérer que je vieillis inexorablement et ce d'autant  plus que mon esprit, vous en conviendrez, reste alerte et primesautier.

Peut-être jalousè-je secrètement ces joues roses et ces articulations parfaites que cette jeunesse ose brandir face à moi qui ne serai bientôt qu'un sépulcre blanchi. Mais quitte à partir, quitte à être ainsi la proie de l'âge, il ne sera pas dit que je me départirai de mon panache. Jeunes, très jeunes ou pas, ils vont voir que j'ai de beaux restes. Tel un vieux cabot qui n'en finit pas de jouer le rôle qui l'a fait connaitre, je persiste à rester au centre la scène.

C'est ainsi que voici quinze jours alors j'étais face à une jeune et jolie patiente particulièrement brillante, une petite diplômée de Sciences-Po, je me mis à faire la roue. Oh ne vous méprenez pas, je suis resté très correct et infiniment respectueux ; ce n'est pas parce que j'ai le même signe astrologique que Depardieu que j'agis comme lui. Pas de ça chez moi ! 

Tandis que nous devisions aimablement, sans me souvenir de la raison qui m'a poussée vers les rivages sombres de la poésie, voici que je me mis à déclamer les vers suivants :

Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Etoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Voyant le visage stupéfait de ma patiente, je compris qu'elle ne connaissait pas ces vers. Alors gonflé de mon importance, de ma culture et n'hésitant pas à sombrer dans le narcissisme le plus éhonté et la grotesquerie, je lui expliquai qu'il m'apparaissait incroyable d'avoir fait une préparation IEP puis Sciences-Po sans connaitre ces vers de Lautréamont qui me semblaient comme faisant partie d'un vade-mecum basique d'un étudiant raisonnablement cultivé.

N'ayant pas sa langue dans la poche, la jeunette me répondit sans détours que d'une part, elle n’était pas là pour se faire engueuler, ce en quoi elle avait raison. J'avais failli mais bon, cette inculture crasse me semblait si terrible que les digues avaient cédé ! Ce n'était pas le psy qui avait parlé mais l'honnête homme, l'ancien sorbonnard, le souvenir du jeune que j'avais été lisant ces vers magnifiques à la lueur d'une mauvaise chandelle de suif dans une mansarde, les yeux brouillés par les larmes, ému par tant de beauté (j'espère ne pas en faire trop ?).

Enfin, me décochant la flèche du Parthe, la donzelle m'acheva en me disant que si je la trouvais ainsi inculte, c’était sans doute du au fait que des enseignants sans doute issus de ma génération, la X, n'avaient pas fait leur travail correctement. Ma génération avait donc failli à transmettre l'immense culture française aux étudiants ! J'étais abasourdi.

Certes elle n'avait pas tort mais j'aurais aimé lui rétorquer qu’apprendre que des trucs du programme ou que le professeur enseignant était bien une attitude féminine et que parfois la simple et saine curiosité permettent d'aborder des tas de choses ailleurs qu'à l'école et que c’était bien une réponse de fille qu'elle m'avait faite. J'ai préféré me taire parce qu'étant un peu féministe et dotée d'un fort caractère, elle n'aurait pas apprécié. Je suis un gars prudent !

La fin des consultations arrivant, je sortis du cabinet non sans avoir fermé la porte à clé et m'être demandé si je l’avais bien fermée à clé. Je pris ensuite mon métro puis mon RER comme n'importe quel prolétaire ordinaire car oui, je partage la vie et les vicissitudes du peuple ! Et une fois assis sur la banquette, mon cerveau ne s'arrêtant jamais, je repensai à cette scène et fus pris d'effroi ! Le doute devenu insupportable devient vérité : je m'étais grossièrement trompé. Ayant sombré dans l'orgueil le plus sot, quelque esprit diabolique s'était emparé de moi et m'avait amené à me fourvoyer plus que grossièrement : j'avais attribua des vers du poème El desdichado de Gérard de Nerval au Comte de Lautréamont !

Que faire ? M'enrôler dans la légion étrangère sous un faux nom afin d'épargner à ma famille la honte d'avoir pour parent quelqu'un confondant Nerval et Lautréamont ? Hélas comme je le disais en préambule, mes genoux ne me permettraient plus de crapahuter. Ou alors, m'enrôler comme matelot sur un cargo battant pavillon panaméen et parcourir les océans jusqu'à ce qu'une vague scélérate ait raison de moi et que le benthos soit à jamais le cimetière de ma fatuité ? Prendre une bible et tenter d'évangéliser une tribu des iles Andaman au risque d'y laisser ma vie transpercé de flèches puis dévoré tel un porcelet ?

Non, me dis-je. J'ai fauté et cela me servira de leçon. Je présenterai mes excuses les plus sincères à ma jeune patiente. La semaine suivante, à genoux, pantelant, le visage baigné de larmes et me flagellant, je lui dirai que je n'ai été qu'une outre pleine de vente, un idiot doublé d’un narcissique stupide et j'implorerai son pardon. (j'espère ne pas en faire trop ?).

Voilà qui fut fait la semaine suivante. Il est à noter que ma jeune patiente ne s'était rendu compte de rien. Mais je m'étais promis de la faire et je le fis ; tel un Zeus débonnaire descendu sans artifices de son Olympe parmi les hommes pour recevoir son juste châtiment, je présentai mes excuses, lesquelles furent acceptées. « Tout homme qui s'élève sera abaissé et celui qui s'abaisse sera élevé » écrit Saint Luc dans son évangile (Luc 14-11) ! J'en fis l'amère expérience !

Je m'arrêterai là, ne désirant pas en faire trop de peur de manquer d’humilité ce qui ne me ressemblerait pas !

Peine de mort !

 


Comme vous le savez, j'adore regarder sur YouTube les procès américains que les chaines retransmettent. J'ai toujours du mal avec la sévérité des verdicts car même si je n'ignore pas le droit des victimes, de leurs proches ou de la société à se protéger des prédateurs et à exiger qu'ils soient punis, je ne considère pas pour autant que la justice soit une affaire de vengeance. Le "œil pour œil, dent pour dent" me semble stupide. Étant catholique et non adepte d'une quelconque secte protestante adoratrice des principes babyloniens comme bon nombre d'américains, la justice barbare me révolte.

Récemment, je parlais du cas Christa Pike, la plus jeune femme à avoir été condamnée à mort aux États-Unis, en 1996 pour un meurtre qu'elle a commis âgée de dix neuf ans. Elle avait 20 ans lorsqu'elle a été reconnue coupable du meurtre par torture d'une camarade de classe, commis à l'âge de ses 18 ans, notamment en la battant à mort, en la mutilant des centaines de fois avec la pointe d'un couteau à viande et en lui gravant un pentagramme sur la poitrine avec un cutter, avant de l'achever en lui fracassant le crâne avec un morceau d'asphalte.

A l'origine de ce crime affreux, il 'y a qu'une affaire de jalousie, Christa Pike ayant voulu, à l'aide de complices, se débarrasser d'une autre jeune femme qu'elle estimait être sa rivale. C'est ridicule et sordide. Aussi sordide qu'a pu être l'enfance et la jeunesse de Christa, enfant maltraitée et sans doute violentée et peut-être violée. On ne développe jamais une telle personnalité limite par hasard. Et, la traiter de sociopathe n'arrange rien à l'affaire. Le fait est que Christa n'est pas issue d'un foyer uni et aimant mais au contraire de la lie de la société, de ces endroits où prospèrent tant la misère matérielle, humaine et spirituelle. Un tel terreau à moins d'un sacré coup de chance ne donne jamais de beaux arbres vigoureux ; il n'y à qu'à regarder les statistiques des personnes incarcérées. Ce qui ne veut évidemment pas dire que l'on ne puisse pas s'en sortir et que tous les enfants ayant connu de telles difficultés finiront pas devenir des assassins. Disons, et c'est une litote, que ce sera plus dur !

Je parlais donc, par le plus grand des hasards de ce cas avec une presque consœur, c'est à dire quelqu'un qui a étudié la psychologie sans pratiquer. Elle a généralement un bon diagnostic et je la sais extrêmement intelligente. Elle trouvait normal que Christa Pike ait été condamnée à mort compte tenu de la gravité de ses actes et du fait qu'elle soit, pour elle, irrécupérable.

Toutefois, rien ne remplace la bonne vieille clinique. Parce qu'à la différence de mon aimable consœur, j'entends moi les histoires dans mon cabinet et dès lors il ne s'agit plus d'un simple récit. Comme je l'ai souvent expliqué ici, ma pratique professionnelle m'a rendu moins bête, moins capable de juger sans appel comme si tout était réductible  mon expérience. J'ai appris la nuance en écoutant les gens et leurs histoires pas toujours très drôles voire franchement dramatiques. Bien souvent, je me suis demandé, ce que moi, issu d'un milieu aisé sans problèmes, je serais devenu à la place d'un tel ou d'une telle parce que vu d'Assas ou de la Sorbonne, la vie est plus simple que quand on patauge dans la fange depuis toujours.

Je ne suis pas devenu un neuneu lénifiant pour autant et bon nombre de patients savent que je peux me montrer femme si nécessaire et que je prendrai pas pour parole d’évangile absolument tout ce qu’ils me disent. J'ai juste tenté depuis vingt sept ans que j'exerce de me montrer juste et équitable et digne de a confiance que l'on m'accorde.

C'est la raison pour laquelle, j'ai trouvé ignoble de condamner quelqu'un d'aussi jeune à la peine de mort. C'est cruel et stupide. D’une part parce qu'il existe des circonstance atténuantes dans la mesure ou Christa est manifestement victime d'une personnalité limite, pathologie qui prend généralement naissance dans un parcours de vie fait de très mauvais traitement, le viol n’étant pas à exclure. Enfin, on sait que le cerveau n'atteint as sa maturité avant l'âge d'au moins 25 ans et certains auteurs avancent même qu'il pourrait parfois n'être définitivement formé qu'à l'âge de 30ans ! Alors, certes même si les notions de bien et de mal existent, les réponses à apporter ne sont pas toujours les plus idoines.

Ce qui ne signifie pas qu'une sanction sévère ne doive pas être appliquée et non pas une tape sur la main comme savent si bien le faire nos juges gauchistes. Personnellement, je lui aurais mis une peine de prison à perpétuité avec une sureté de 25 ans. On la met à l'ombre et dans deux décennies et demie, on voit l'évolution et on avise. Soit elle sort, soit elle termine sa vie derrière les barreaux. Mais je me refuse à électrocuter une gamine de 19 ans.

Ma consœur m'a alors dit que je prenait un sacré risque et que c'était un pari su l'avenir, parce qu'à peine sortie elle pourrait tuer de nouveau. "Ou pas" ai je répondu en lui répétant que dans mon boulot justement je passe ma vie à objectiver du subjectif et à faire des plans sur la comète en calculant les risques et en prenant des paris.

Tenez voici plus de vingt ans, un médecin m'avait envoyé un jeune vingtenaire, polytoxicomane, qui en plus avait frappé son psychanalyste précédent. Au bout de la première séance, j'ai appelé son médecin pour lui dire que j'avais très bon espoir et ce dernier m'a dit que c'était impossible parce que ce jeune souffrait d'une "névrose d'échec". Aujourd'hui, le jeune en question approche de la cinquantaine, est marié et père de famille et à la tête d'une entreprise très prospère et m'invite à déjeuner chaque fois qu'il passe me voir parce que j'avais pris à l'époque des honoraires plus que légers puisqu'il n'avait pas de fric.

Alors j'aurais aussi pris le risque avec Christa même si je sais qu'un tel niveau de pathologie a peu de chance d'être traité un jour. Peu de chance signifie qu'il en existe peut-être une et il faut la tenter. Je préfère me planter et reconnaitre qu'un cas était trop compliqué pour mioi que de m'en débarasser sur une chaise électrique.

Voilà ce sont mes principes de psy gentil un peu neuneu ! C'est mon côté mec absolument de droite mais aussi gentil qu'une nana gauchiste !

Merci de m'avoir lu !

Addendum : sinon je ne suis pas opposé à la peine de mort et je n'ai pas pleuré la disparition de Badinter !