20 novembre, 2010

Les histoires d'amour ...


Contrairement à ce que chantaient les Rita Mitsouko, emblématique de mon époque, les histoires d'amour ne finissent pas mal en général. Mais quand elles finissent, cela se passe toujours mal. D'ailleurs, j'ai toujours eu du mal à comprendre les gens qui pouvaient revoir leur ex et déjeuner et rigoler. Il faut soit avoir laissé coulé beaucoup d'eau sous les ponts soit ne pas avoir aimé. Ou alors être fichu de telle manière qu'un "clou chasse l'autre" et que le temps fasse rapidement son oeuvre. Moi, en tout cas, j'ai bien trop de mémoire pour oublier.
C'est une épreuve que de recevoir des patients qui viennent me raconter leurs tourments amoureux. ; j'en ai régulièrement et encore la semaine passée. L'expérience et les connaissances faisant, je me rends très vite compte si une histoire d'amour est morte ou mérite d'être sauvée. Je suis comme le médecin du SAMU arrivant sur les lieux d'un accident de la route qui ne prend même pas la peine de se pencher sur une victime en sachant que le temps qu'il va perdre à tenter de sauver quelqu'un qui est déjà presque mort, sera autant de temps perdu pour tenter de sauver quelqu'un qui peut l'être. 

Mais bon, comme il n'est ni dans mes principes, ni souhaitable de dire à la personne venue consulter que tout est fini, je me montre patient et j'écoute. On tente des choses, on échauffaude des hypothèses et des stratégies qui bien sur ne marcheront pas ou seulement un bref instant comme si on réanimait quelqu'un, qu'on se réjouisse que le coeur reparte et que tout s'arrête dans la seconde d'après. Quand c'est mort, c'est mort, et les histoires d'amour sont comme les personnes, avant de mourir, elles portent en elles tous les stigmates de la fin prochaine et inéluctable.

D'ailleurs les gens qui me consultent, hommes comme femmes, le savent déjà que tout est fini. Ils me consultent comme on viendrait voir une sorte de gourou après que la médecine officielle n'ait rien pu faire, en attendant un miracle. On mise sur la psy, comme si nous avions dans nos boîtes à outils des recettes fantastiques concoctées à base de "prises de conscience", de "compréhension", sans oublier un zeste de "lâcher prise" sans quoi le plat serait raté. 

A force de regarder Confessions intimes sur TF1, les gens en viennent à imaginer que l'on sera comme ces confrères médiatisés, qui n'ont qu'à pointer le bout de leur nez, visionner un bout de séquence vidéo, pour trouver ce qui n'allait pas, en faire prendre conscience aux gens, et repartir ensuite vers d'autres aventures. En vérité je vous le dis (pff je parle comme le Christ mais bon je suis capricorne aussi), en vérité donc je vous le dis, ces émissions sont bidons et scénarisées et je sais que 95% des cas présentés sont soit faux soit se termineront mal devant un JAF pour s'engueuler à propos de garde des enfants et de pensions alimentaires.

Les gens le savent mais préfèrent rêver et je crois que je serais un peu comme eux, parce que c'est plus sympa de sembler de croire au père Noël même quand on sait qu'il n'existe pas. C'est sympa de garder un biais d'inférence positif. C'est génial de regarder sa jambe pourrie par un cancer des os, un vilain ostéosarcome, et de se dire que non, l'amputation peut être évitée malgré la tête dépitée de l'oncologue qui sait lui que vous n'avez plus aucune chance de la garder. On a tous besoin de croire en quelque chose. C'est peut être l'opium du peuple mais l'opium c'est bon sinon personne n'en prendrait.

Et puis les histoires finissent par mourir alors mon seul travail consiste à ramasser les morceaux de la personne qui est en face de moi et à les recoller. Et si je le peux à faire en sorte qu'elle sorte grandie de cette histoire, que cet échec ne soit pas une fin mais un point de recommencement. C'est vraiment la seule prestation que je puisse offrir. 

Vraiment, je déteste ces histoires d'amour qui se meurent, quand on sait que la relation est morte mais que l'on continue à lutter en faisant semblant d'y croire : ce sont vraiment les heures les plus sombres et les plus dures. Comme disent les ricains :" Life is what happens when we have made other plans."

22 Comments:

Blogger Epicier vénéneux said...

C'est génial de regarder sa jambe pourrie par un cancer des os, un vilain ostéosarcome, et de se dire que non, l'amputation peut être évitée malgré la tête dépitée de l'oncologue qui sait lui que vous n'avez plus aucune chance de la garder.

Z'allez pas encore remettre cette histoire sur le tapis !!!

20/11/10 8:39 PM  
Blogger V. said...

Très bel article.
Je m'étonne en revanche que des adultes consultent un psy quand une histoire d'amour se barre en sucette.
Avoir besoin de parler, je comprends.
Mais espérer qu'une thérapie puisse changer quoi que se soit à la mort de quoi que se soit, hormis d'apprendre à l'accepter, ça me semble grandement immature.

... "un clou chasse l'autre". Oui il y a des gens comme ça. Nombre de ceux qui répondaient à cette légèreté affective étaient d'ailleurs capricornes. Ils devaient avoir un ascendant pourri, c'est pas possible !!

20/11/10 10:25 PM  
Blogger El Gringo said...

Je pataugeais dans ce cauchemar qui allait se terminer en divorce quand mon meilleur ami m'a dit: "un pot cassé reste un pot cassé, même après en avoir recollé les morceaux".
Ça m'a fait mal et je lui en ai presque voulu, à l'époque, mais avec le recul, je doit bien admettre qu'il avait raison.

21/11/10 1:14 PM  
Anonymous Anonyme said...

@Gringo : il a raison.
Mais il ne vous a pas dit aussi qu'un pot dont les morceaux avaient été recollés pouvaient avoir plus de valeur et être plus solide qu'un pot qui n'avait jamais été cassé ?

@Philippe : L'amour, ce n'est pas une question de mémoire ou d'ego.
On souffre comme des chiens quand ça se finit et il reste toujours comme une fêlure au fond.
Il faut savoir aimer vraiment l'autre pour être capable d'avoir mal, de pardonner pourtant et de rester amis malgré tout.
Mes ex sont devenus souvent des amis proches que je revois très régulièrement.
L'intimité partagée, les épreuves traversées, ont rendu nos liens indestructibles.
Nous avons été des amoureux lamentables mais nous sommes de formidables amis !

22/11/10 2:42 AM  
Blogger philippe psy said...

@Alice : je suis bien d'accord avec vous. Cependant pour faire ce constat, il faut être deux or je n'ai souvent qu'un des membres du couples. Et enfin, il faut s'être mis ensembles pour de bonnes raisons. Or la plupart du temps, les gens qui ne s'aiment plus s'aperçoivent qu'au fond ils n'avaient pas de raisons de s'aimer, du moins l'un de deux.

22/11/10 10:34 AM  
Blogger V. said...

Les propos d'Alice me font penser à ceux de mon ex.
L'amouuuuuuuuuuuur, le pardon, l'ââââââmitié, restons zunis à jamais, les bizounours.
Ce corporatisme affectif insupportable ou personne n'est plus capable d'absolu.
Moi je ne pardonne pas et je déteste à mort.
Et putain ce que je préfère être comme ça plutôt que consensuelle (en un seul mot).

:o)

22/11/10 12:10 PM  
Anonymous Anonyme said...

@V : Heu ... comment vous dire ...
Vous regrettez qu'il n'y ait plus personne capable d'absolu mais refusez l'idée que l'on puisse aimer de manière absolue pourtant ...

Mon idée est qu'il faut aimer de manière absolue pour être capable d'aimer toujours l'autre envers et contre tout.
Il faut également l'aimer pour de bonnes raisons, l'aimer pour ce qu'il est vraiment.
Cet autre doit être par dessus tout votre meilleur ami avant d'être votre amant.

Enfin moi, je suis pleine d'immaturité affective, très naïve et pleine de bons sentiments stupides ...
Mais franchement, je préfére être comme je suis, consensuelle (en un seul mot, sourire), que pleine de rage et de colère.
Il n'y a pas de raison de brûler ce que l'on a réellement aimé.
On peut juste décider que l'amour n'était pas la solution et en trouver une autre qui soit :
1- ou de devenir amis
2- ou de ne pas conserver contact
mais sans pourtant conserver un ressentiment inutile.
Disons que je suis sûre de souffrir moins ainsi et je suis sûre de ne pas imposer à celui qui suit des blessures non cicatrisées.

C'est que je ne vois pas comment on peut reconstruire autre chose en continuant de s'attarder avec autant de douleur sur son passé.

Puis, je m'interroge ... détester l'aute c'est une manière bien étrange de ne pas l'oublier, de se punir toujours et surtout de continuer de l'aimer, non ?

Un goût prononcé pour le masochisme V ?

22/11/10 7:28 PM  
Anonymous Anonyme said...

@Philippe : La liberté est le coeur du problème, c'est toujours le coeur de tous les problèmes d'ailleurd.
Les gens oublient souvent qu'ils sont libres et que les autres le sont aussi.
Ils sont libres d'aimer ou pas ceux qui les aiment.
Les autres sont libres également d'être différents de l'image que ceux qui croient les aimer projettent sur eux ...
C'est un monde bien étrange que le notre !

22/11/10 7:35 PM  
Anonymous Anonyme said...

V, Pour cela encore faut-il également définir ce qu’est une amitié pour un(e) bizounours comme vous dites. Croire que l'on puisse en vivre de vraies, au delà d’un certain nombre dans une vie. C’est être au choix soit une femme, soit immature, soit Alice au pays des merveilles…

22/11/10 8:34 PM  
Blogger V. said...

@Alice : oui je sais, mon goût pour le "pan dans la g' "peut déplaire et je ne critiquais pas votre point de vue.
J'ignore si vous êtes consensuelle, je ne m'appuyais que sur votre dire qui m'évoquait une attitude qui, pour ma part, ne me convient pas et me rappelait quelqu'un (qui n'est pas vous).

Ensuite, libre à vous d'être telle que vous êtes bien entendu. Vous semblez d'ailleurs tout à fait sympathique.

Mais j'aime bien m'énerver et faire de grands moulinets avec les bras :o)
J'adore m'engueuler avec les gens par exemple.
Je ne suis pas du tout du tout comme il faut pour faire bien sur la photo.
Et je suis terriblement rancunière, parfois. Je vous l'accorde, moi la première je trouve que c'est du temps de perdu. Mais bon... On ne se refait pas et même j'aime bien cet aspect antipathique (ou qui passe pour l'être).

Quant à l'amour, vaste sujet.
Je crois que c'est chacun pour soi. Je veux dire, chacun voit le truc selon ses aspirations.


Masochiste ? Oui, comme n'importe qui. Voire comme n'importe quelle femme :o)
C'est curieux ce besoin de considérer le masochisme comme un truc honteux. Alors qu'on est tous tricoté avec ! (Je ne parle pas de folklore "kinky" évidemment, ni de la classification de Krafft-Ebbing. Juste la dose normale en tout un chacun).

"Plutôt souffrir que mourir, c'est la devise des hommes" (Une fable, en CM2 à peu près...)

22/11/10 9:14 PM  
Blogger V. said...

Enfin Alice... Personne n'est libre...
Essayer de cesser de respirer.
Vous verrez, vous n'en n'aurez pas la liberté :o)

Ombre, pardonnez moi, mais je n'ai rien compris à ce que vous "m'" avez écrit ! je ne saurais donc pouvoir vous répondre (si tant est que vous le souhaitiez).

22/11/10 9:26 PM  
Blogger El Gringo said...

@Alice
Bin non, un pot recollé, ça vaut que dalle.

@V.
Commentaire tranchant comme une lame... mais tellement vrai!

23/11/10 1:14 AM  
Blogger Thomas said...

Est ce que Alice aurait remplacé Caro ???

23/11/10 11:47 AM  
Anonymous Anonyme said...

@Alice : moi je suis OK avec vous !!! sourire
Et sur tout en plus y compris la liberté !!!

23/11/10 12:49 PM  
Anonymous Anonyme said...

@V : bien sûr que je peux cesser de respirer si je le souhaite.
Je peux décider d'arrêter de vivre si je le veux.
Maintenant être libre ne veut pas dire vouloir des choses aussi ridicules forcément.
Je peux aussi décider de continuer de respirer et de vivre.

@Gringo : Donc pour vous on aime qu'une fois et que l'on est bon à jeter ensuite ...
Drôle d'idée !
Ca ferait un monde terrible ... tous un tas de célibataires désespérés ...

@Thomas : qui est Caroline ?

23/11/10 1:00 PM  
Anonymous Anonyme said...

@V&Gringo&Thomas : je me suis bien amusée quand même ;-).
Ca m'a fait beaucoup rire cette montée à l'assaut du Gringo !
Il y avait forcément un truc, trop facile de le faire plonger cet homme-là ... !
J'ai perdu mon pari mais pas grave, j'ai vraiment ri.
Mdr !

Ceci dit, je maintiens chacun de mes propos sur le blog du psy.

Vous faites une sacrée bande de joyeux lurons !!!

23/11/10 1:43 PM  
Anonymous Anonyme said...

@Alice : Ca c'est trop cool !
Ils vous ont laminées !
Ca sert à rien de vous débattre !
Samedi soir, la tournée est pour vous !

@Gringo : pardon pour elles.
Elles ne savent pas ce qu'elles font ... elles sont immatures !
Tout est parti d'un pari stupide.

23/11/10 1:52 PM  
Anonymous Anonyme said...

Eh bien, parce que V n'a pas assez de comprenette pour saisir les élucubrations d'une ombre orientale...
Et d'ailleurs, d'ailleurs, pour tout avouer, je n’ai, moi-même, à peu près rien compris à ce que j'ai écrit :o enfin bon !

Néanmoins, entre le caractére entier de la lettre et la sensibilité d’Alice, généreusement offerte à ses nombreuses amitiés formidables, mon choix est déjà fait !

23/11/10 3:33 PM  
Blogger Thomas said...

Putain ça m'énerve, je comprends rien !
Est ce que Alice et V. veulent le corps du Gringeot ???
Bordel, c'est chiant de pas se voir...on peut pas se retrouver et se coller une cuite tous ensemble ?

23/11/10 8:15 PM  
Blogger V. said...

@Thomas : En fait je convoite son matelas pneumatique.
(j'ai déjà la piscine)
j'aime bien votre troisième phrase.

:o)

24/11/10 11:21 AM  
Blogger V. said...

@Alice : si respirer est ridicule, vivre ne doit pas l'être moins.

24/11/10 1:52 PM  
Blogger Lucie Trier said...

@ Robert et Eugène : Je crois que le Gringeot parlait d'accepter la condition du pot cassé quand le pot est cassé, et que c'est une gangrène de suer à le polisser et le repolisser, à part pour entretenir la douloureuse illusion dont il est si difficile de se défaire. C'est un deuil bien empêtrant. Alice parle plutôt de pot fêlé, qu'il est possible en effet de réparer.

Pour la cuite, Thomas, croyez le ou non, mais elle aura lieu.

-c-

25/11/10 9:16 PM  

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