23 mars, 2015

TDAH suite et fin, j'espère !


Récemment, je parlais du TDAH. Après moultes lectures, il apparait que le concept est plus que flou.Si les critères énoncés par le DSM sont assez stricts, les sites traitant de cette pathologie le sont moins. Ainsi, on admet qu'il puisse y avoir de l'hyperactivité mais pas toujours. De même, si elle existe, cette hyperactivité pourrait n'être que psychologique, le cerveau tournant à cent à l'heure, sautant d'une idée à une autre, et non motrice. Bref, le TDAH est pour moi, sauf dans sa forme classique du gamin ne tenant pas en place, un grand mystère.

Il existe d'ailleurs une très très grande variation des chiffres de prévalence de ce syndrome selon les pays ou l'époque étudiée, variant entre moins de 1 % (Hong-Kong) jusqu'à 25 % (États-Unis). L'explication de ces disparités est impossible à opérer : on pourra ainsi bien parler de critères d'évaluation différents ou de facteurs culturels, les petits occidentaux étant pas nature peut-être plus remuants que les petits asiatiques. 

On note que certains estiment que cette prévalence semble parfois être corrélée à la politique marketing du principal traitement, la Ritaline (méthylphénidate) du laboratoire pharmaceutique Lilly. Effectivement, les critères américains de ce que doit être un enfant parfait sont sans doute curieux. Peut-être ont-ils des attentes démesurées de leurs progénitures qui font qu'un enfant trop remuant serait alors classé comme un cas psychiatrique.  Dès lors, tandis que hausser la voix semble improbable et que donner une fessée serait considérée comme un mauvais traitement, il est possible que bien des couples ait décidé de confier leur tranquillité à une nounou chimique nommée Ritaline.

De même les causes exactes du trouble du déficit de l'attention ne sont pas bien déterminées, mais des recherches ont porté sur les facteurs neurobiologiques où les causes génétiques liées à ce trouble sont considérées comme importantes pour expliquer son apparition. Neurobiologiquement, il existerait un déficit de dopamine, un neurotransmetteur, qui déterminerait l'apparition du TDAH. Tout ceci dépasse de très loin mes compétences.

Aujourd'hui, j'ai adressé deux de mes patients à des psychiatres pour qu'ils puissent diagnostiquer un tel trouble. Tandis que l'un m'a expliqué qu'il fallait un courrier pour qu'il soit reçu en consultation hospitalière, l'autre a été mis sous Dépakine, un antiépileptique parfois prescrit pour un trouble bipolaire. Il est d'ailleurs fort possible qu'en voyant mon patient, le psychiatre ait immédiatement songé à un trouble bipolaire. Toujours est-il qu'au bout d'une semaine, le traitement n'agit pas encore. 

Connaissant parfaitement ce patient, je sais qu'il n'est pas bipolaire mais qu'il souffre bien d'un TDAH avec les troubles classiquement associés (dysphorie, toxicomanie, etc.). Il m'est pour le moment impossible de constater un progrès. Mais il faut laisser le temps au traitement d'agir ou le cas échéant en changer. D'ailleurs mon auguste confrère n'a pas établi de diagnostic précis parlant juste de troubles de l'humeur. Mon patient est lui, suffisamment intelligent pour donner son avis concernant les effets de ce qu'on lui prescrit.

S'agissant du lien entre douance et TDAH, des pistes intéressantes existent sans doute et seront explorées dans l'avenir. J'ai ainsi pu constater dans ma clientèle que les plus doués avaient effectivement des comportements qui m'apparaissent à moi parfaitement normaux mais pourraient sembler totalement incongrus à quelqu'un de plus orthodoxe que je ne le suis. Il y a tout d'abord cette rapidité à comprendre les choses. Les avoir en thérapie c'est jouer au squash durant une heure. 

Ils sont rapides et précis et pourvu que leur attention soit mobilisée, on sent que les informations sont parfaitement traitées. En revanche, chez chacun d'eux je distingue des particularités qui n'en font pas des scientifiques parfaits lorsqu'ils sont ingénieurs ou bien l'inverse. Je reste assez stupéfait par le nombre de sujets qui peuvent les passionner. Dans le même temps, je cesse d'être une énigme à mes propres yeux dans la mesure où ils sont tout autant "lubiques" que je le suis.

J'ai aussi noté dans certains cas une comorbidité avec une dysphorie, ou une cyclothymie, qui persévère. Je ne pense pas qu'elle puisse se "soigner" mais qu'elle est inhérente à cette manière de fonctionner et donc à la douance. D'ailleurs, relisant récemment un vieux Harry Dickson retrouvé curieusement derrière un meuble j'ai été très amusé quand l'auteur, Jean Ray, parlant d'un savant disparu que le célèbre vient de retrouver mort écrit :
"Newton Stonebridge avait en effet disparu depuis quelques semaines mais on ne s'en alarmait pas outre mesure dans son entourage où l'on était habitué aux fugues soudaines de ce savant misanthrope et original".

C'est l'image même du professeur Nimbus, aussi intelligent que curieux et vivant un peu dans son monde, personnalité singulière que Hergé immortalise à travers le professeur Tournesol, que l'on a souvent attribué aux gens géniaux quelle que soit la discipline dans laquelle ils excellaient. Certes, notre époque de concours en tous genre, sélectionnant plus les plus soumis que les plus malins, ce type de "savant" semble un peu disparaitre.

Il semble donc qu'il puisse coexister avec la douance tout un tas de comportements passablement étranges au regard des autres. Le problème vient que la gestion des hauts potentiels en entreprise reste une arnaque dans la mesure où ces derniers sont souvent uniquement assimilés aux X et HEC, produits pourtant terriblement standardisés malgré leur intelligence.

Je ne pense pas qu'il faille toucher à ces traits de caractères singuliers, qui ne sont que la partie émergente d'un esprit affuté tournant à son rythme. De même je ne suis pas sur que la dysphorie souvent associée à la douance puisse véritablement être guérie à moins d'aller vers une normalisation du comportement, mais surtout des cognitions, impossible à obtenir. Tout au plus peut-on admettre que cette dysphorie ne soit pas si grave qu'elle puisse apparaitre. Bien souvent, quand le ciel se couvre et que les idées noires apparaissent, il suffit de sortir ou de se livrer à une quelconque activité pour les chasser.

Bref, mes lectures concernant le TDAH, hormis les cas classiques, me laisse perplexe quand à la possibilité de toujours bien le diagnostiquer. Mes questions ont cédé la place à d'autres questions auxquelles il m'est impossible de répondre. Le point positif est de pouvoir offrir une alternative à tous ceux qui ne sont ni dépressif, ni anxieux, tout en l'étant, qui ne sont pas bipolaires, tout en connaissant des hauts et des bas. A tous ceux là, les damnés de la psychiatrie à qui on n'offrira rien, peut-être que le TDAH est une option possible et honorable pour tenter de se comprendre et cesser d'être une énigme. Ne pas savoir et courir d'un diagnostic à l'autre est en effet générateur d'angoisse et de dépression.

Un des sites que j'ai consulté, parle lui de "zappeurs" pour désigner les personnes atteintes de TDAH et en fait cette description assez amusante et fidèle :

Chacun d’entre-nous porte en lui une part de zappeur, mais ceux qui ce trait de caractère est intense ont vraiment un cerveau particulier. Leur esprit en perpétuelle agitation peine à se concentrer durablement dès que leur excitation mentale s’émousse. La courbe de leur attention ressemble à des montagnes russes : tantôt intense (devant un jeu vidéo), tantôt nulle (face à la routine). Leur distraction légendaire leur fait perdre régulièrement leurs objets personnels et oublier la moitié des tâches qu’on leur confie. Leur faible tolérance à la contrainte et aux hiérarchies en fait des employés ingérables ou des travailleurs solitaires. Leur patience face aux tâches répétitives est quasi nulle.

Irritants mais épatants, insupportables mais jamais ennuyeux, fatigants mais stimulants, les zappeurs constituent le principal moteur de l’innovation pour l’espèce humaine. Malheureusement, leur comportement impulsif et leur inconstance dans l’effort les conduit le plus souvent vers l’isolement, la frustration et l’échec.

Je n'aurais pas mieux décrit ce que je ressens des gens atteints de TDAH ! Quant au traitement, c'est uen autre histoire, celle des neurologues ou des psychiatres.

3 Comments:

Blogger E-S said...

Pour comprendre les causes du TDAH je suggère les travaux du dr Amy Yasko sur les mutations génétiques courantes affectant la chaîne enzymatique de méthylation des neurotransmetteurs (MTHFR).

Pour simplifier, si on accumule ces mutations on peut avoir des niveaux de dopamine plus importants, mais qui s'épuisent avec l'effort intellectuel. Cela rend plus intelligent et dépressif, capable de réflexion intense sur tout ce qui est immédiatement gratifiant pour le cerveau mais vite ennuyé par ce qui ne l'est pas (ou moins).

Vivre avec ce genre de combinaison de mutations c'est apprendre à ménager ses capacités de reconstruction des niveaux de dopamine, ce qui implique d'aller contre sa nature en limitant (dans le temps) strictement la part qu'on consacre à ce qui nous plaît sous peine de perdre la capacité à faire face au reste...

26/3/15 8:22 AM  
Blogger Le Touffier said...

Cher Monsieur Philippe,

Toujours avide d'informations, j'ai suivi les recommandations de E-S et je me suis documenté sur Amy Yasko.

Je vous la fait courte : escroc.

Si vous avez du temps à perdre, voici un de ses livres disponible en ligne : http://www.holisticheal.com/media/downloads/autism-pathways-to-recovery-book.pdf

Ses publications listées dans PubMed :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/?term=Yasko+AW[Author]
Que des publications où elle n'apparait jamais en tête de liste des auteurs. Que des cas isolés de sarcomes osseux dont les auteurs utilisent la technique de publication dite "de la grosse feignasse" : A propos d'un cas, revue de la littérature.

Son site pour vendre sa soupe :
http://www.dramyyasko.com/resume/

La page consacrée au Clayton college, d'où viennent ses diplômes bidons, sur le site Quackwatch (Your Guide to Quackery, Health Fraud, and Intelligent Decisions) :
http://www.quackwatch.org/04ConsumerEducation/Nonrecorg/clayton.html

La page qui résume mes impressions sous la plume d'un certain GlenW :
http://www.adhdnews.com/forum/showthread.php?12527-ADHD-is-no-longer-Valid/page3

J'ai cherché la traduction scientifique de sa "neurological inflammation", je risquais éventuellement un faux-ami dans la traduction : tout est bidon.

De là à penser que sa théorie pour ventre des herbes de Provence et des magnets n'est qu'une utilisation frauduleuse et incohérente de la méthylation qui régule l'expression des chaines d'ADN, je m'autorise à le penser.

Quand à la théorie du niveau de Dopamine, elle m'avait parue séduisante à la lecture de E-S.

Dommage.

Sorry - but this Ph.D. holder (not a medical doctor of any kind remember that) is a shyster who wants your money and nothing else. GlenW.

Suivant.

28/3/15 5:10 PM  
Anonymous Anonyme said...

« Le TDAH est un excellent exemple de maladie fictive » - Dr Leon Eisenberg - !

Le TDAH existe parce que la Ritaline existe, le tout prescrit à forte dose par les charlatans de la psy normative !

27/7/16 2:35 PM  

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