20 novembre, 2011

Rallye touristique !

Avec un con au volant, toutes les belles choses deviennent assommantes !

Depuis que la pratique religieuse est en baisse, j'ai l'impression qu'il n'y a plus que les crétins pour se lever le dimanche matin : les sportifs, les cyclistes et les amateurs de véhicules anciens ! Aujourd'hui dimanche, j'ai fait partie des troisièmes.

Alors qu'habituellement, j'aurais fait une grasse matinée bien mérités, je me suis levé à 8h00. Pour vous, j'imagine que ce n'est rien mais pour moi, couche-tard par habitude, goût et constitution physiologique sans doute, me lever aussi tôt est un exploit que vous devriez applaudir !

L'ami qui m'avait accompagné acheter ma chère Visa en avait en effet parlé à une relation trempant dans le VEC (véhicules d'époque et de collection). Aussi ai-je été invité à participer à un rallye touristique en vallée de Chevreuse puisque c'est dans cet endroit bucolique que tous les cyclistes, motards ou automobilistes forcenés se donnent rendez-vous le dimanche matin pour organiser leurs pauvres processions d'obsessionnels du jarret musclé, de la Harley suréquipée ou de la bagnole d'époque en état-concours.

J'ai eu beau dire que ma pauvre Visa, bien qu'elle soit administrativement âgée de trente et un ans et puisse donc prétendre à la catégorie collection, elle n'était somme toute qu'une pauvre daube que plus personne ne voulait utiliser même au fin fond de la Meurthe-et-Moselle ou de l'Indre, rien n'y a fait, j'ai été sommé de participer. Et puis, comme j'aime bien le type qui me le proposait, j'ai cédé et j'ai accepté pour lui faire plaisir : le syndrome du chic type m'avait frappé !

Ayant peur de m'ennuyer dans ce genre de manifestation, je me suis adjoint les services de Lapinou comme copilote lui mentant éhontément en lui faisant croire que ce serait le plus beau jour de sa vie. Convaincu par mes mensonges, Lapinou est venu dans la galère avec moi. Quant à mon pote Olive, celui qui est riche et roule en Ferrari, je n'ai pas eu besoin de mentir puisque l'idée de passer une journée en bagnole à faire feuler son V8 l'a immédiatement enthousiasmé. C'est ainsi qu'au volant de nos voitures de 1980, une Visa club et une 308 GTS, nous nous sommes fondus dans un cortège de véhicules anciens.

Après avoir galéré une heure et demie à rouler à 70km/h, nous sommes arrivés à une première halte. Et là, il a fallu exposer sa voiture. Lapinou a saisi que la passion des gens présents était surtout de contempler des moteurs et de vérifier si le boulon de 12 monté sur la MG A était bien le même que celui indiqué par la revue technique d'époque. Le fin du fin étant d'avoir le boulon de douze optionnel n'étant apparu que sur une infime quantité de modèles. Bref bien qu'il y ait eu de fort belles voitures, c'était aussi chiant qu'une réunion de philatélistes. J'ai du expliquer à Lapinou qu'à partir d'aujourd'hui, nous devenions frères d'armes puisqu'il avait accepté cette galère pour me faire plaisir.

Pour faire plaisir, j'y susi tout de même allé de mon petit commentaire autorisé sur deux ou trois moteurs. Bon, ils étaient propres et refait à neuf mais un quatre-cylindres fut-il coiffé d'un double carburateur SU reste modérément passionnant. On regarde quelques minutes, on fait "oooh la belle durit", puis "ahhh la belle peinture" ou encore "wow super le chromage" puis on s'en va. Et puis c'est chiant parce que personne n'est venu admirer ma belle Visa pourtant "dans son jus" comme on dit dans le milieu de la bagnole ancienne ais elle était sans doute trop acratopège pour eux.. Heureusement, après avoir avalé un gobelet de café, nous sommes partis.

Encore une heure et demie après s'être trainé la bite sur de petites routes bucoliques à la queue-leu-leu, on a eu le droit à un second arrêt. Bis repetita placent ! On a encore exposé nos voiture et moi pour m'amuser j'ai collé ma pauvre voiture entre deux Ferraris. Là, on a bu un coup, même qu'il a fallu que je prouve que j'étais exposant véhicule ancien à une vieille rombière pour avoir le droit à un malheureux gobelet de rosé !

J'ai alors sorti mon porte-clefs Citroën d'époque pour la convaincre et j'ai pu boire pour oublier que je m'étais levé si tôt pour cela. Elle m'a dit que j'aurais du demandé à boire avec le sourire. J'ai juste répondu qu'avec le soleil rasant dans la gueule j'étais plus occupé à plisser les yeux qu'à me marrer sans préciser qu'en plus la situation n'avait rien de drôle parce que se lever tôt pour boire du rosé sur un parking n'était forcément l'éclate la plus totale. Non que je sois bégueule et que je ne sache pas m'amuser mais que faire ce genre de choses en compagnie de sexagénaires obsessionnels devient ennuyeux.

Il y avait là des gens manifestement très riches et qui l'assumaient sans complexe, certains affichant une pédanterie assez comique au volant de leur bolide à deux-cent-mille euros. C'est ainsi qu'une Jaguar de toute beauté est partie à fond dans le rugissement de son six en ligne. Je n'ai pas pu me retenir de faire pareil en lançant mon bicylindre à air pour finir avec un virage au frein à main. Séguéla avait raison : la Visa ça décoiffe !

D'autres étaient beaucoup moins riches comme ce possesseur du moins cher des modèles de Ferrari d'occasion qui s'obstinait à saouler mon pote Olive en lui expliquant que sa pauvre voiture était bourrée de pièces de F355. Je suis resté gentil et n'ai rien dit. Je suis persuadé que le pauvre s'était saigné aux quatre veines pour s'offrir la voiture de ses rêves, persuadé que si on n'avait pas de Ferrari avant cinquante ans on était un raté. J'ai admiré le calme de mon pote Olive parvenant à répondre "oui" en feignant de se montrer intéressé par le babil de ce fâcheux personnage.

Lapinou me faisait un cirque infernal, exigeant que je lui remette les clés de ma Visa pour rentrer chez lui en m’expliquant que je n'aurais qu'à rentrer avec Olive, le cul collé dans le baquet de la belle italienne. Ce n'est pas que j'aie manqué de confiance en ses capacités de jeune conducteur mais j'ai refusé tout net. D'une part, il devait m'accompagner dans cette galère jusqu’au bout, sous peine d'être un déserteur. Enfin, venu pour la première fois à une concentration de voitures anciennes, je n'allais pas me séparer aussi rapidement de mon véhicule d'époque.

On a un peu trainé sur ce maudit parking durant encore une heure, lorsqu'on nous a annoncé qu'on filait déjeuner et que les tables étaient réservées. Encore des petits virolos à soixante à l'heure et nous voici parvenus dans un trou. Le restaurant nous avait aimablement réservé une arrière salle sordide où l'on était censé s'entasser à quarante. Dehors un joli soleil d'automne dardait ses rayons tièdes et j'aurais bien mangé en terrasse moi.

Prétextant un manque de place, Olive, Lapinou et moi nous sommes barrés à l'anglaise dans nos voitures pour aller déjeuner à une terrasse que nous avions croisées à deux kilomètres de là. Le filet de bœuf Rossini était excellent et le vin aussi. Durant près de deux heures, on n'a pas parlé de bagnoles et c'était vraiment reposant.

Je regrette sincèrement d'avoir dit du mal des sportifs parce que sincèrement ils n'ont pas le monopole de la connerie. Je crois que tout ceux qui s'engagent dans une activité sans aucun recul m'ennuient profondément.  Ils sont pénibles, lourdauds, maladroits, obsessionnels, productivistes, inélégants au possible et tout ce qu'ils touchent devient assommant.  En revanche, je leurs reconnais le droit de penser du mal de moi, je suis beau joueur. Mais muré dans mon orgueil, je doute que leurs attaques puissent m'atteindre.

Finalement,  bien que je n'en aie pas le physique, un dandy doit sommeiller en moi. Peut être que rouler en Visa dans une concentration de véhicules ancien où le plus nul vaut au bas mot trente-mille euros est le comble du dandysme ?

« Le dandysme est un soleil couchant; comme l’astre qui décline, il est superbe, sans chaleur et plein de mélancolie. Mais, hélas! la marée montante de la démocratie, qui envahit tout et qui nivelle tout, noie jour à jour ces derniers représentants de l’orgueil humain et verse des flots d’oubli sur les traces de ces prodigieux myrmidons. »
Charles Baudelaire


« Aucun crime n'est vulgaire, mais la vulgarité est un crime. La vulgarité, c'est ce que font les autres. »
Oscar Wilde

6 Comments:

Blogger Lucie Trier said...

Alors là, si j'avais vraiment pris la mesure de ton sens de l'abnégation, je t'aurais demandé de venir jouer au tennis en fumant et en mangeant du tourteau le dimanche avec moi. J'y ai pensé mais n'ai pas osé et je le regrette maintenant. J'espère que toi aussi parce que tu sais, ce serait le plus beau jour de ta vie.

22/11/11 7:45 AM  
Blogger Stephanie P. said...

Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

23/11/11 1:17 AM  
Blogger LE JEUNE J said...

Tous les premiers dimanches du mois, il y a un rassemblement de voitures anciennes et de collection au château de Vincennes, ça vaut de détour :)

23/11/11 1:47 AM  
Blogger El Gringo said...

Ce qu'il y a de bien, avec le navigateur Google Chrome, c'est qu'on peut surligner un mot et faire une recherche directe sur Google.
Très pratique...


Sinon, vous saviez ce que ça veut dire, "acratopège"?

23/11/11 7:07 PM  
Blogger yan.M said...

J'ai eu une tripotée de véhicules anciens(rien hors de prix)mais je n'ai jamais mis les pieds dans ce genre de piège.Une ancienne c'est fait pour rouler.Les Anglais le savent bien , eux chez qui on peut voir ces vénérables véhicules dans la rue,tous les jours de la semaine,et dans tous les états imaginables...quant aux dandys je suis d'accord sur toute la ligne...(que d'ailleurs Barbey d'Aurevilly n'avait pas ,étant sur la fin assez obèse,comme quoi).S'il avait vécu en nos âges terminaux,il aurait choisi un véhicule modeste mais plein de charme qu'il aurait couvé de son affection:l'équivalent du cheval en somme...

30/11/11 10:06 PM  
Blogger yan.M said...

Au fait,la Visa ,si elle ne fait pas partie à proprement parler des" véhicules de collection",appartient par contre à cette catégorie des années 80 que l'on nomme des "old timers"...Voilà!

30/11/11 10:09 PM  

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