07 mars, 2014

Mon ami Manu et la psychologie sociale !


J'ai vraiment de la peine quand j'apprends, que tel un alpiniste chevronné qui aurait voulu s'attaquer à un sommet difficile sans avoir le niveau nécessaire, Manuel a dévissé dans les sondages. Douze points d'un coup ai-je appris par la presse. Du moins si l'on en croit les sondages qui nous expliquent dans le même temps que Laurent Fabius serait le ministre préféré des français.

Il est certain que Manuel, sans doute saisi d'hubris et se voyant en haut de l'affiche, n'y est pas allé avec le dos de la cuiller en termes de répression. Il n'a pas su tenir compte de la bonne opinion qu'avaient les gens de droite de lui. Il faut dire que quand on voit la différence de traitement entre la Manif pour tous et celle qui a eu lieu à Nantes dernièrement, il n'y a pas photo. Les gardes à vue semblent totalement discrétionnaires et infligée par une police qui tient plus de la milice et sans lien réels avec les troubles à l'ordre public.

Ceci dit, je ne me sens pas visé puisque je n'ai participé à aucune de ces manifestations. Et puis, cela apprendra à ces gens de droite à faire confiance à un socialiste. Si Manu avait été aussi bien que cela, il n'aurait pas adhéré au PS. Si les gens de droite, du moins les électeurs UMP, avaient été intelligents, ils seraient souvenus qu'il n'y a pas plus sectaires ni méchants que les gens de gauche. Grattez la mince couche de vernis droit-de-l'hommiste, tentez de distinguer ce qui se cache derrière les idées à-priori généreuses, et la courtoisie feinte cèdera la place à un taliban prompt à vous dénier tout droit d'être en désaccord avec lui.

J'ai pourtant voté pour Manuel aux primaires socialistes. Mais je dois avouer que cela m'amusait de donner ma voix à un trublion qui ennuyait les éléphants du PS. Et puis, je trouvais amusant que ma voix puisse compter pour l'avenir d'un parti pour lequel je ne voterai jamais. Je n'avais évidemment aucune confiance dans ce type là pas plus, pour être juste, que je n'en ai pour la plupart des élus. Mais bon, Olive et moi, mon ami riche qui a réussi dans la vie et roule en Ferrari, cela nous avait amusé d'aller voter. Le nec plus ultra étant évidemment d'y aller en Ferrari ce qui n'avait choqué personne ce qui prouve que le parti socialiste n'est vraiment pas le parti des pauvres.

Mais bon, jusque là, Manuel tenait plutôt bien la rampe car nul ne peut reprocher à un socialiste d'avoir agi en socialiste en réprimant les manifestations de droite et en faisant preuve de laxisme vis à vis des manifestation émanant de son propre camp. C'est de bonne guerre et c'est humain.

En revanche, quel idiot il a pu être concernant l'affaire Dieudonné. Quels qu'aient été les griefs, justes ou non, qu'il avait à son encontre, je crois avoir rarement vu quelqu'un aussi mal manœuvrer, du moins à ce niveau de responsabilité. Manuel devait s’imaginer premier ministre mais il n'est même pas capable d'être respecté d'un comique. Et pire encore, chaque fois qu'il perd pied, il s'énerve et éructe, montrant ainsi une faiblesse et une susceptibilité qu'on ne soupçonnerait que chez une adolescente. Pensez donc que de l'autre côté, le comique sera ravi d'appuyer là où ça fait mal !

Quel manque de psychologie, quelle bêtise pour avoir ainsi affronté sur le registre du sérieux et presque d'égal à égal un humoriste dont la principale qualité était justement la dérision permanente sur tous les sujets. A le voir s'énerver ainsi, il me rappelait un jeune professeur de lettres que j'avais eu en consultation et qui, incapable de maintenir l'ordre dans sa classe de seconde, en était venu à se faire dominer par deux pauvres gamines de quinze ans. Bien sur, excédé et ayant totalement perdu la face, moqué par l'ensemble de la classe, il avait mal réagi et en avait giflé une violemment. Évidemment, l'inspection académique avait moyennement apprécie cet excès d'autoritarisme.

C'est finalement le pire car si l'on peut, quand on est un simple maire impressionner ses administrés du fait de l'énorme pouvoir dont on jouit et de la capacité de nuisance qu'ils redoutent, il n'en va pas de même avec tous. Lorsqu'il n'y a pas de respect mais juste de la crainte, le risque est de tomber sur des francs tireurs, des gens qui se moquent éperdument des conséquences. Et lorsque l'on est habitué à s'imposer par la crainte, on se trouve fort dépourvu face à quelqu'un qui s'en moque parce qu'il sait qu'il aura tous les rieurs de son côté.

Le rire salit tout, désacralise tout, déboulonne les idoles, alors nul besoin de se draper dans sa dignité ou de se tenir raide comme la justice dans une posture de ministre, sous peine d'être emporté comme le serait un arbre lors d'une crue. Là, où il aurait fallu être souple, malin, madré et retors, Manuel a commis bévue sur bévue. Endossant la tenue du père la morale, il n'aura fait que singer les pires figures caricaturales de l'autorité en jouant l'adjudant de carrière, une grande figure chez les comiques troupies du siècle passé, ou l'institutrice revêche. Il répond à des sketches en jouant lui même un autre sketche mais sans le talent de celui qu'il combat parce que justement il ne joue pas.

A force de trop se prendre au sérieux, il se rigidifie à un tel point qu'il en devient cassant et se brise. Homme d'état jouant les gros bras et souhaitant descendre dans l'arène il se couvre autant de ridicule que Nicolas Sarkozy lorsqu'il lança son "casse toi pauvre con". A un certain niveau de pouvoir, on en oublie que l'homme de la rue, qu'il soit un quidam ou un comique, possède des armes redoutables. Et notamment celle consistant à vous faire perdre toute prestance en vous obligeant à jouer dans son camp et à son niveau, chose pour laquelle l'homme d'état n'est pas plus fait que François Hollande pour le hip-hop !

On avait eu Lionel Jospin chantant les Feuilles mortes dans une émission de Patrick Sébastien, on aura eu un ministre de l'intérieur tenté d'agir comme un voyou, comme un chef de bande. C'est à chaque fois grotesque, autant que le professeur qui incapable d'incarner le pouvoir entre en lutte ouverte avec ses élèves les plus pénibles. Nous avons tous fait l'expérience du jeune professeur peu sur de lui que l'on fait tourner en bourrique. En revanche, nous avons respecté, craint ou tremblé devant un autre qui savait parfaitement incarner sa fonction !

Il s'agit d'incarner l'autorité, quelque chose de transcendant, et non d'en faire une affaire personnelle. Le pouvoir doit être désincarné pour fonctionner ! On obéit à celui qui est chargé d'une fonction, qui la représente totalement et non à un individu. Face à un individu, on jauge les chances que l'on a face à lui et on envisage de lutter. C'est ce qu'apprend tout flic de base faisant de la VP, on ne personnalise pas sa fonction, on incarne l'état et on est investi de son autorité. Tout se joue sur une juste distance faite de respect et d'intimidation.

L'uniforme est fait pour cela que l'on soit flic, magistrat ou pompier. Et quand on a des fonctions qui n'impliquent pas le fait de porter un uniforme nonobstant le pouvoir qu'elles confèrent, on tente de se souvenir que c'est dans la tête que doit alors se porter l'uniforme. Un ministre de l'intérieur est garant de l'ordre public, il ne se bat pas comme un chiffonnier !

C'est sans doute pour cela que de nombreux jeunes patients âgés de moins de trente ans ont pris la défense de Dieudonné contre un ministre jugé ridicule. C'est sans doute aussi pour cela qu'un bon nombre avouent avoir de l'admiration pour Poutine. Sans doute qu'un ancien général du KGB chevauchant torse nu ou avec une carabine en mains incarne plus l'idée de pouvoir qu'un nabot en scooter. D'ailleurs tandis que le premier est surnommé le Tsar, le second a hérité du sobriquet de Flamby.

On sait depuis l'expérience de Milgram que le degré d’obéissance qu'un individu a pour l'autorité est corrélé à la légitimité que celle-ci lui inspire.L'obéissance ou soumission à l'autorité est l'une des formes de l'influence sociale. En psychologie sociale, on parle d'obéissance lorqu'un individu adopte un comportement différent parce qu'un autre individu, perçu comme une source d'autorité, le lui demande ou lui impose. L'individu dominé reconnaît à un autre, ou à un groupe une valeur certaine. Lorsque cette reconnaissance est faite, l'individu passe alors un accord tacite, un consentement avec le supérieur qu'il a reconnu ; il échange sa liberté contre la volonté générale d'être assuré et sécurisé.

Mais comme le dit le proverbe, c'est en forgeant que l'on devient forgeron ! Peut-être que mon ami Manuel l'apprendra. Ceci dit, rien n'est moins sur car l'orgueil est le plus gros écueil sur le chemin du savoir.

2 Comments:

Blogger El Gringo said...

"Sans doute qu'un ancien général du KGB chevauchant torse nu ou avec une carabine en mains incarne plus l'idée de pouvoir qu'un nabot en scooter"

Sans doute, mais de là à "avoir de l'admiration" pour lui, il y a quand même une sacrée marge. Hitler ou Staline incarnaient l'autorité à la perfection, n'est-ce pas?

8/3/14 8:01 PM  
Blogger chaton said...

@gringo: ben oui, sauf que nos dirigeants à nous ont l'autoritarisme sans l'autorité. Faut le faire!

9/3/14 11:06 PM  

Enregistrer un commentaire

<< Home