20 janvier, 2020

Mais eh oh, je ne t'ai rien promis hein !


Dans l’exercice de ma profession, je suis confronté à différents problèmes et à la souffrance morale. Ça tombe bien, si j'ai peur du sang et que je détourne la tête lorsque dans un film il y  a une scène avec une seringue; la douleur morale ne me fait pas peur, pas plus que les gens que d'autres trouveraient bizarres. D'ailleurs je ne compte plus les gens qui ont commencé le premier entretien en me disant "je vous préviens, vous allez me trouver bizarre" et que je ne trouve pas si bizarre que cela. 

Mais le boulot, restant le boulot, j'affronte les différentes situations le cœur vaillant sans me laisser impressionner plus que cela. Quand les gens sont vraiment mal, je leurs réponds le plus souvent : "rassurez-vous, on en rigolera dans quelques mois". Bref, anxiété et dépression sont mon quotidien et je ne trouve pas, dans la majeure partie des cas, que ce soit des adversaires de valeur parce qu'on en vient à bout assez facilement.

Finalement, aujourd'hui pour moi, le plus grave, ce ne sont pas les pathologies édictées dans le DSM mais les modes de vie issus de la modernité urbaine. Vous allez sans doute sourire et me prendre pour un crétin, mais mon plus proche adversaire, c'est la solitude qui frappe de plus en plus à Paris. J'avais déjà écrit quelque chose à ce sujet voici quelques années, à propos d'une patiente âgée, décédée depuis, qui m'avait expliqué que j'étais le plus souvent son seul contact de la semaine.

C'est malheureusement le lot de bien des personnes âgées qui perdent leurs amis et que leurs enfants ne visitent plus. C'est malheureux mais c'est du à l'âge. On pourrait même se dire que si c'est déplorable, c'est humain. 

En revanche, ce qui est bien plus terrible, ce sont ces trentenaires du mauvais coté de la trentaine, qui me consultent parce qu'elles sont seules et rêvent de rencontrer l'homme de leur vie. Ce sont aujourd'hui le situations les plus compliquées que je dois affronter, ces jolies jeunes femmes qui s'étiolent gentiment et attendent toujours le prince charmant.

La plupart du temps je ne sais pas quoi faire, si ce n'est vanter la présence sur les réseaux sociaux et les sorties afin de faire des rencontres. C'est bien mince. C'est d'autant plus mince que je ne comprends plus rien aux hommes, même si j'en suis un. 

A mon époque, si l'on n'appartenait pas à la catégorie des "queutards" destinés à multiplier les conquêtes, on rencontrait une fille, on voyait si elle nous plaisait et si on s'entendait bien avec et on testait sur une durée raisonnable.

Aujourd'hui, tel n'est plus le cas. Trois fois de suite, alors que les histoires semblaient bien engagées, les types sont partis dès que les demoiselles ont demandé plus ! 

Il y a F qui sortait avec un type bien de sa personne. Ils passaient des soirées ensemble, puis des weekends et même des vacances. Ils avaient des valeurs en commun et des tas de choses à se dire. Avec F, j'avais été patient afin de valider les étapes, comme si on allait à la pêche au gros. Au bout d'un an, j'ai estimé que le poisson était ferré et qu'il était temps de le remonter. Pensez-donc, son copain et elle se baladaient même main dans la main lors de promenades en forêt et il avait été jusqu'à la plaquer contre un arbre pour lui rouler une grosse pêle ! Pour moi, c'était bon parce que ce genre de conduite signifie qu'on a des sentiments pour la fille, voire qu'on est amoureux d'elle !

Et bien non, je m'étais trompé. Lorsque F a demandé un peu plus et du moins, à être rassurée sur l'avenir de leur relation, le gars lui a répondu qu'il ne voulait pas s'engager et il a rompu. C'est à dire que durant un an, il est sorti avec, lui a joué la comédie de l'amour et du couple pour se barrer dès qu'il fallait passer à autre chose. Il estimait qu'il pouvait l'avoir quand il le voulait mais sans pour autant que leur relation n'obère sa sacrosainte liberté !

A l'époque, j'en avais parlé à G un gars très bien qui collectionne les conquêtes et je lui avais demandé : toi, quand tu veux juste coucher avec la fille, tu te balades main dans la main en amoureux ? Il m'avait répondu que non, que c'était dégueulassé de faire ça et que dans ses histoires, la fille ne devait s'attendre qu’à du court-terme. En disant a, il m'a fait penser à mon pote le Pilote qui m'a toujours explique : le cul c'est du jeu mais l'amour c'est sérieux. Bref, ces deux quinquagénaires étaient de mon avis : quand on ne veut pas de sérieux, on ne joue pas les amoureux transis. Il semblerait que l'époque ait changé.

Il y a aussi N, qui avait rencontré un type très bien, très intelligent bien qu'étant de gauche. Ceci dit, ça tombe bien, elle de gauche aussi. Leur histoire a duré un an. Ils se voyaient un weekend sur deux, partaient en vacances ensemble, s'entendaient si bien, qu'elle lui lui a présenté tous ses amis avec qui il s'est bien entendu.

Bien sur, elle en a eu marre de cette routine et elle a voulu plus. Cela se me semblait normal et s'inscrire parfaitement dans le fil d'une relation qui durait depuis plus d'un an. Et bien non, quand elle a voulu des garanties, il lui a dit qu'il l'aimait bien mais qu'il ne souhaitait pas s'engager.

Il y a eu S aussi. Là aussi, ça a duré plus d'un an. Ils se voyaient très souvent. Il lui demandait des conseils pour décorer sa baraque et elle lui faisait même sa ddéclaration d'impôt. Il lui a même présenté tous ses amis pour qui, c'était sa régulière. Leur histoire était tellement singulière qu'on aurait dit un vieux couple ayant élevé trois enfants partis de la maison. Et puis, un jour, comme elle voulait être sure  de ses sentiments, elle l'a fait par SMS. Et il ne lui a jamais répondu. Elle l'a relancé plusieurs fois et ce fut silence radio, pas une nouvelle.

J'ai parfois l'impression que certains de ces types se payent du bon temps avec des filles en ayant en prime leurs sentiments. C'est vrai que c'est plus sympa de coucher avec une fille amoureuse qu'avec une pute tarifée qui vous jette à la porte une fois le rapport sexuel effectué. En français littéraire, on appelle cela un suborneur, c'est à dire quelqu'un qui abuse de la naïveté d'une femme en la séduisant. C'est assez abject dans la mesure ou les trois patientes que j'évoque sont des filles bien sous tous rapports, physiquement comme moralement !

Et puis, il y a ceux qui souffrent d'une vraie pathologie de l'engagement, ceux qui ont vu papa et maman se déchirer au cours d'un interminable divorce. Ou encore, ceux qui, un peu immatures et le cerveau gavé de contes de fée et de films romantiques ont une vision érronée du couple; comme si c'était un enfermement. Combien de fois l'ai je dit : le couple n'est pas le leu de toutes les attentes pour madame comme pour monsieur. J'ai beau être marié et fort bien m'entendre avec madame, il y a des de trucs qu'on ne partage pas et c'est tant mieux.

C'est terrible d'être confronté quotidiennement aux attentes légitimes de ces jeunes femmes sans pouvoir rien faire. J"ai beau avoir lu Epictete et savoir qu'il ne faut pas faire dépendre de soi ce qui n'en dépend pas, je n'aime pas être impuissant. Et l, je le suis parce que j'ai l'impression que l'époque a tellement changé que je ne comprends plus rien aux hommes. Les femmes, ça va, je les comprends. Il faut dire que durant les dix premières années, elles composaient les deux tiers de ma clientèle. 

Mais les mecs, même si j'en suis un, je n'y comprends plus rien. A croire que certains, boostés par l'intérêt qu'a une femme pour eux, se transforment en pétasses ignobles incapables de tenter l'aventure du couple mais se gavant du désir de l'autre ?. C'est peut-être ça ? Les sites de rencontre ont peut-être changé la donne. La valorisation d'une éternelle jeunesse a sans doute renforcé le mode de vie consistant à agir en jeune urbain friqué, voyageant s'il en a envie, ayant une bonne amie avec qui il couche quand il en a envie, tout en conservant sa bande de potes.

En attendant, mes patients angoissent. Comme me l'avait dit le Dr Le Touffier, gynécologue de son état : être enceinte, c'est comme jouer au foot, à quarante ans, il reste juste quelques gardiens de but. Et croyez moi, j'y pense, au fur et à mesure des années qui passent. Et elles y pensent aussi ...

Mais la sanction tombera tôt ou tard sur ces suborneurs. Qui joue le jeune homme à trente cinq ans, comme s'il en avait vingt, se trouvera bienôt fort dépourvu une fois la quarantaine arrivée. Parce que les nuits agitées, les rendez vous de parents d'élève et les maladies infantiles, il faut être jeune pour supporter ça. Et puis, endurer la réflexion de l'institutrice, "tiens aujourd'hui c'est ton grand-père qui est venu", quand vous venez chercher votre gosse, faut être blindé pour supporter !

Voilà, j'en ai marre de ces situations qui se répètent. Donc, les mecs, si vous arrêtiez de jouer les pétasses et que vous vous engagiez, ça m'arrangerait vraiment. Je préfère recevoir des faire part de mariage ou de naissance que d'attendre avec les patientes l'irruption des premiers symptômes de la ménopause !

7 Comments:

Blogger Élie said...

C'est marrant, moi j'ai l'impression qu'aucune sanction ne leur tombera jamais dessus. Je suis convaincue qu'ils profiteront jusqu'à un âge avancé de la même manière, puis finiront aussi seuls que les femmes qu'ils ont délaissées.

20/1/20 9:33 PM  
Blogger Unknown said...

Cause 1 : uniquement les sites de rencontre :
1. Avant 30 ans, les femmes sélectionnent en pareto sur les sites de rencontre (80% moches – 20% potentiels). C’est l’hécatombe.
2. Après 30 ans, d’autres facteurs entrent en jeu : situation, expression, culture. Les femmes sélectionneront toujours en Pareto mais ce dernier se décalera : les beaux gosses d’avant peuvent être casés, l’horloge biologique tourne. Si on est un peu malin on arrive à court-circuiter le côté « physique moins bon ».
3. Les mâles anciens refoulés qui deviennent des potentiels « 20% » deviennent fou : ils savent qu’ils sont le produit phare de la nouvelle sélection. Combien d’hommes avec une bonne situation/ métier et/ou bac +3 à +5 parmi les lâcheurs ?

Cause 2 :
1. Les mâles sont les grands perdants juridiques : les engagements sont défavorables 80% du temps. L’analyse de risque est vite faite et tout engagement implique des conséquences que l’on ne veut pas/ plus assumer (comparaison avec les autres mâles du même âge, analyses des jurisprudences).
2. Le vivier est de + en + important, les cibles de + en + faciles (citation d’un ami de 35 ans entrant parfaitement dans le cadre : « sur les sites de rencontre, il est aussi difficile pour un homme de trouver une fuckfriend que de trouver l’amour pour une femme »). On reproche alors aux mâles de 30-35 ans de faire ce que les femmes de 20-25 font.
3. La « grotte » des hommes s’élargit à tout leur logement/ possession avec l’âge. On veut avoir la paix partout chez soi, pousser l’engagement c’est mettre en péril l’ensemble du territoire où l’on est maitre.

Mélanger un peu tout ça, ajoutez le comparatif avec l’herbe d’ailleurs (pas forcement + verte mais potentiellement + fournie), le constat d’évolution des femmes post engagement (femmes qui baisent moins une fois validation faite), le vécu, l’avis des autres, les extrémistes (féminisme, meetoo) qu’on entend un peu trop pour que cela ne nous influence pas négativement et vous avez une bonne partie du cocktail.

21/1/20 2:53 PM  
Blogger Unknown said...

J'ai honte d'avouer que je suis un de ces salauds qui a vécu une histoire d'un an avec une femme sans jamais savoir si nous pourrions fonder une famille ensemble.
Et que je me retrouve dans la situation de crétin célibataire pour avoir préféré une nouvelle histoire passionnelle à la construction d'un couple solide mais plus ennuyeux.
L'arroseur arrosé en somme...
Moi qui nourrit le souhait d'avoir des enfants, j'ai peut être raté cette chance pour avoir préféré les étincelles à une histoire plus classique et confortable.
Un amour calme et tranquille échangé pour une année de folies qui se termine par une rupture douloureuse mais logique...
Je n'avais jamais vécu de passion amoureuse, j'ai goûté à ce feu d'artifice...
Je voulais m'engager avec cette femme volcanique et elle m'a quitté parce qu'elle se sentait emprisonnée et ne voulait vivre que de passion et de vin blanc.
Bien fait pour ma gueule !
Je savais en m'engageant avec elle que j'en baverais, et j'ai espéré que les flammes nous amène vers une histoire plus stable, aveuglé par mon amour. Pari perdu.
C'est comme cela qu'on apprend.

22/1/20 11:26 PM  
Blogger olf said...

Dans un contexte économique et social où n'importe quel mec, surtout couillu peut se faire virer de son boulot n'importe quand, quelle peut être la valeur de son engagement ?

23/1/20 8:03 PM  
Blogger olf said...

D'un autre côté...

"en France : près de 45% des mariages finissent par un divorce."

https://www.jurifiable.com/conseil-juridique/droit-de-la-famille/divorce-france-statistiques

24/1/20 4:43 PM  
Blogger Maxime said...

Ce déficit de faire-part de mariage peut très bien être vu comme un problème d'offre et de demande.

L'homme veux du sexe, la femme de l'amour (oui, c'est réducteur). Le mariage est le prix que l'homme est prêt à payer pour le sexe. Sauf que ça finit souvent en divorce maintenant, et c'est même souvent la femme qui le demande.
Alors qu'il est si simple d'aller se chercher des plans culs auxquels on racontant qu'on cherche à se caser. Pas bien dur de baiser ensuite depuis la pillule. C'est pas bien honnête, mais c'est comme ça. On peut dire que la pillule a élargi l'offre de sexe. Donc moins de mariages...

Et puis c'est fou comme les femmes couchent facilement même quand elles ont compris que ça mènerait à rien. Comme si en fait, mieux vaux coucher avec le top 20% des hommes que faire son marché plus bas. Trop exigeantes sont devenus les femmes.

A l'époque où les mariages étaient stables, on partageait pas les taches ménagères. C'est peut-être pas un hasard. D'ailleurs il parait que les études ont prouvé que dans les couples qui partageaient les taches equitablement, il y avait moins de sexe.

Ca et d'autre explications. Il n'y a pas un seul facteur en fait. Et ya un virus aussi là qui aide pas. Sinon je t'aurais bien dit de m'envoyer tes patientes célibataires.

21/3/20 6:16 AM  
Blogger cmosorchestra said...

J'ai pas tout suivi, mais je suis sûr qu'Henri Virlogeux incarnerait à merveille un rôle de séducteur dans une adaptation de ces merveilleuses histoires!

30/3/20 2:01 AM  

Enregistrer un commentaire

<< Home