Ce jour où je fus un vrai fat !
Montesquieu, penseur capricorne, concis et efficace, bref le gars bien !
Il faut évidemment entendre le terme "fat" au sens de fatuité et non au sens anglais de "fat", même si je l'avoue je puis avoir quelques kilos en trop ! Ce n'est pas de ma faute, tel un chien glouton, je mange tout ce qu'on me donne, je finis l'assiette. A bord, d'un vol Air France, je me contente de la ridicule portion qui m'échoit sans rien chercher d'autre mais une fois chez moi, si l'on me fait un kilo de pâtes (des Del Cecco uniquement), je les mange. C'est ainsi. Ce doit être une survivance ancienne qui se manifeste dans mon génome; datant d'une époque lointaine ou l'on ne savait pas ce que l'on mangerait le lendemain. Donc je mange comme si les jours suivants, j'allais crever de faim !
Après ma mort, on dira de moi que si ma pensée était très avance sur son temps, mon appétit datait du néolithique. Je suis totalement incohérent génétiquement. Je suis une énigme et j'en suis très fier parce qu'il faut bien que je sois fier de quelque chose.
Quoiqu'il en soit, pour revenir sur les deux articles précédents, il fallait un épilogue. Et c'est fort à propos que je vais vous narrer deux episodes au cours desquels je fus d'une redoutable fatuité. Mais sans doute que si un américain était passé par là, il m'aurait trouvé fort brillant et "so french". Faut dire qu'ils en sont toujours à comprendre Derrida alors qu'ici je ne suis pas sur que ses livres trouvent preneurs dans les bacs de solde chez Gibert, boulevard Sait-Michel.
Nous étions trois, Chris, le jeune HEC qui m'avait démasqué sur tweeter, le docteur Le Touffier, riche et talentueux gynécologue-obstétricien et moi, votre serviteur ! Nous parlions du sinistre Macron, le fils du démon et plus particulièrement de son curriculum-vitae prêtant à suspicion dans la mesure où bien malin sera celui qui saura s'il a vraiment fait ce qu'il évoque dans ses souvenirs. Est-ce que le gamin (i.e. Macron) a vraiment bossé pour Paul Ricoeur ou s'est-il contenté comme dirait un sociologue, dont je tairai le nom, de faire "les pipes et le café", c'est à dire de vaquer à de basses besogne telles que ranger les livres, collaborer à une bibliographie et faire le ménage sans oublier d'éteindre avant de sortir ?
Comme je n'aime pas du tout Macron, j'aurais tendance à dire que c'est un mytho et puis c'est tout, sans même vouloir démêler le vrai du faux. Mais l'important n'est pas là. Notre camarade médecin qui en fait d'études est plutôt resté dans la pratique, puisque les études de médecine ne sont pas les plus intellectuelles qui soient. Après avoir appris l'anatomie, le pied, la main, le nez, etc., vous vous coltinez des tas de trucs par cœur pour qu'à chaque groupe de symptômes coïncident une pathologie probable. Et si vous vous trompez et que le patient n'est pas mort, vous envoyez chez le spécialiste qui lui même peut envoyer chez un autre spécialiste qu'on appelle un interniste comme le Dr House. Après ce sont les PFG qui prennent le relais et eux ne font aucun diagnostic parce qu'il est évidemment trop tard.
Le Touffier étant honnête, voilà qu'il se retrouvait face à deux escrocs, un jeune et un vieux, dont une partie des études avaient surtout consisté à amasser des concepts fumeux et mal approfondis destinés à enfumer ceux qui n'ont pas suivi le même parcours. Car si je fus juriste, je rappelle que je fus aussi diplômé d'une école de commerce, autant dire l'école du crime vu que je n'y ai rien appris de vraiment valable mais que j'y ai bien rigolé.
Confiant en notre sincérité, ce médecin naïf nous demande si nous connaissions Ricoeur. Bien sur que oui, répondimes-t-on de concert car l'un comme l'autre avions pratiqué l'enfumage dans notre jeune temps et avions passé un temps considérable à engranger des tas de trucs tels des brocanteurs sauf que chez nous, ça s'appelle la culture générale.C'est ce qui permet de faire illusion face à ceux qui savent vraiment quand on sait en jouer et de ne pas passer pour un con, et de passer pour des génies face à ceux qui ne connaissent rien. Autant dire que la culture gé' comme on dit, c'est utile. Si'l y avait encore des salons littéraires, le jeune Chris et moi, y aurions eu notre place, pérorant à qui mieux mieux et faisant assaut de bons mots. Hélas, l'époque est à l'intelligence artificielle et autres concepts foireux et non à la véritable intelligence, tant pis pour nous.
Et ramenant de vagues souvenirs, de cours et de choses entendues ou lues ici et là, voici que Chris et moi nous lançons dans une conversation où l'on cita pêle-même les concepts de mêmeté et d'ipséité face à un docteur Le Touffier passablement impressionné par notre immense culture et devant se dire qu'il était sans doute plus riche que nous mais que sorti du bloc opératoire, il ne tenait pas la route face à des monstres de cultures tels que nous. Nous fumes deux fats doublés de cuistres, nous fumes français et l'idée ne nous a pourtant pas pris d'acheter un bouquin de Ricoeur et de le lire parce qu'on a d'autres choses à foutre ! Non mais !
Une autre fois, et pour cela il faut que je remonte au début des années 90, je déjeunais avec l'ami Toju, et l'un comme l'autre, emplis de fatuité, vaniteux comme des paons et passés par l'université nous eûmes une étrange conversation. Nous étions alors dans l'administration française qui nous octroyait l'immense privilège de nous sustenter dans un self-service. Munis de nos plateaux, une fois assis à table, nous nous lançâmes dans une passionnante controverse au cours de laquelle ils 'agissait de savoir si le plateau était une table mobile ou la table un plateau fixe. Cette discussion, connue sous le nom de controverse du plateau est restée dans nos mémoires et lorsque nous nous voyons, il nous arrive d'y faire référence devant un auditoire médusé face à tant d'intelligence. Là où le clampin moyen se serait contenté de manger, deux beaux esprits comme Toju et moi nous étions lancés dans une discussion passionnante dont aujourd'hui encore, on ne sait pas qui de nous deux a raison.
Cela rejoint la discussion passionnante que j'avais lancée à propos de Placid et Muzo, personnages de bande dessinées de Arnal, dont je ne sais toujours pas si Placid est un ours nain ou une souris géante étant entendu qu'il fait la même taille que Muzo qui est un renard. L'énigme reste à ce jour pleine et entière et ne sera sans doute pas plus tranchée que celle ayant trait au plateau et à la table.
Tout ceci pour vous dire que l'époque actuelle avec son concert d'apprentis penseurs prêts à prendre pour argent comptant toutes les théories venues d'outre-atlantique m'emmerde à un point qu'on ne saurait décrire si ce n'est pour dire qu'il dépasse l'Everest. Marre de ces apprentis-pensants, de ces faux-chassants qui ayant lu trois livres et les ayant mal digérés, se permettent de remettre en cause les fondements anthropologiques de notre société, même si elle est imparfaite. Je vomis ces demi-habiles à la mine grave et au sourire absent qui se font un devoir de gâcher le moindre moment de bonheur dans cette vallée de larmes pour nous asséner leur catéchisme bien pensant. Je n'en peux plsu de ces curés laïcs et de ces dames de charité athées qui crachent sur Dieu pour mieux nous bassiner avec leurs minuscules divinités de papier.
Ours nain ou souris géante, table amovible ou plateau fixe, ipséité ou mêmeté, ce n'est pas compliqué de théoriser à l'infini et de faire assaut de vaine intelligence. Lire Placid et Muzo ou Paul Ricoeur nous placera toujours face à l'infinie complexité du monde intelligible.
L'important restera toujours, qu'est-ce qu'on mange et qu'y-a-t-il après la mort, tout le reste est vain.
"La gravité est un mystère du corps inventé pour cacher les défauts de l'esprit. La gravité passe si souvent pour de la compétence. Quand la vravité n'est que dans le maintien, comme il arrive si souvent, on dit gravement des inepties."
"La gravité est le bouclier des sots"
Charles de Montesquieu
Dessins de Arnal, textes de Paul Ricoeur
3 Comments:
Bonjour Philippe,
Magistral retour en force. Très heureux de vous retrouver et de vous lire. J'en profite pour vous indiquer que vos billets sur les pervers narcissiques m'ont bien aidé. Grâce à vous, j'ai pu contrecarrer les agissements d'un individu particulièrement retors.
Joyeux Noël et bon réveillon de la Saint Sylvestre
Bonjour Philippe,
Magistral retour en force. Très heureux de vous retrouver et de vous lire. J'en profite pour vous indiquer que vos billets sur les pervers narcissiques m'ont bien aidé. Grâce à vous, j'ai pu contrecarrer les agissements d'un individu particulièrement retors.
Joyeux Noël et bon réveillon de la Saint Sylvestre
Si je puis me permettre, et loin de moi l'idée de vous froisser le moins du monde, j'ajouterais une minime correction à votre propos : l'important c'est qu'est-ce qu'on mange et qu'est-ce qu'il y a à la télé.
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