Commémoration !
C'est drôle, parfois je me trouve inclassable politiquement. Parce que si je suis libéral, je suis aussi très attaché à certaines traditions.
Ainsi, en ce 21 janvier 2009, je me souviens parfaitement que voici seize ans, Toju et moi-même avions assisté à la commémoration de l'assassinat de Louis XVI place de la Concorde. Le plus drôle est que nous appartenions tous deux à la grande administration. Nous imaginions la tête de nos collègues s'ils avaient su que nous honorions de nos présences une telle manifestation. C'eut été un coup à se faire fusiller après avoir fait nos autocritiques. Enfin, moi étant plus retord, peut-être que j'aurais simplement écopé du goulag en chargeant Toju et en l'accusant d'avoir perverti mon jugement.
J'y étais passé le matin, et trouvant l'événement très beau et fort émouvant, de retour au bureau j'en avais parlé à Toju qui, n'ayant pas grand chose à faire, m'y avait accompagné. Comme j'adore le protocole, je m'étais fendu d'un lys blanc acheté chez Lachaume, le fleuriste de la rue Royale. Je me souviens que nous étions des centaines ce jour là à défiler devant les CRS pour aller déposer des fleurs à l'endroit où s'était élevée la guillotine. C'était très émouvant. J'ai aussi le souvenir vivace d'une fort jolie petite demoiselle au profil racé.
Mon beau lys blanc m'avait coûté cent-vingt francs de l'époque. C'était une fortune en 1993 ! Je m'étais dit que c'était vraiment un très très beau lys et qu'il valait bien son prix. Et puis ensuite, j'avais songé que Lachaume avait forcément des frais importants et qu'il était normal que leurs fleurs soient plus chères qu'ailleurs. Ensuite, j'avais pensé que rue Royale, je ne devais pas m'attendre aux prix de Barbès.
Et en fin de compte, j'avais finalement pensé que ces salauds de mercantis profitaient vraiment de la moindre occasion pour faire de l'argent et que je m'étais fait entuber. Enfin bon, le geste était beau et c'était le principal. L'idée de "beau geste" est vraiment l'excuse foireuse qui m'a permis de donner une légitimité à mon geste inconsidéré.
On pourrait trouver étrange que quelqu'un qui se dise libéral ait ainsi assisté à une telle commémoration. Aujourd'hui encore, je n'ai toujours pas d'explication. J'attribue cela à ma nostalgie qui me fait dire chaque fois que "c'était mieux avant". Et puis, il y avait sans doute du dandysme à défiler devant les CRS pour aller honorer un roi disparu.
Et puis, je suppose que je suis bien plus libertarien que libéral stricto sensu. Alors l'idée de royauté me plait. Etre roi au royaume de soi-même est finalement l'aboutissement de toutes mes idées.
On peut même se demander si cette autonomie quasi complète, qui vous ferait regarder d'un oeil atone la comédie humaine, ne serait pas l'issue magnifiée d'une thérapie comportementale et cognitive réussie ?
Etre devenu tellement maître de ses pensées, et donc de ses représentations, que l'on pourrait n'être touché que parce que l'on désire, se contentant de mettre le reste à distance. Décidement, le stoïcisme est une discipline de grand vaniteux.
Ainsi, en ce 21 janvier 2009, je me souviens parfaitement que voici seize ans, Toju et moi-même avions assisté à la commémoration de l'assassinat de Louis XVI place de la Concorde. Le plus drôle est que nous appartenions tous deux à la grande administration. Nous imaginions la tête de nos collègues s'ils avaient su que nous honorions de nos présences une telle manifestation. C'eut été un coup à se faire fusiller après avoir fait nos autocritiques. Enfin, moi étant plus retord, peut-être que j'aurais simplement écopé du goulag en chargeant Toju et en l'accusant d'avoir perverti mon jugement.
J'y étais passé le matin, et trouvant l'événement très beau et fort émouvant, de retour au bureau j'en avais parlé à Toju qui, n'ayant pas grand chose à faire, m'y avait accompagné. Comme j'adore le protocole, je m'étais fendu d'un lys blanc acheté chez Lachaume, le fleuriste de la rue Royale. Je me souviens que nous étions des centaines ce jour là à défiler devant les CRS pour aller déposer des fleurs à l'endroit où s'était élevée la guillotine. C'était très émouvant. J'ai aussi le souvenir vivace d'une fort jolie petite demoiselle au profil racé.
Mon beau lys blanc m'avait coûté cent-vingt francs de l'époque. C'était une fortune en 1993 ! Je m'étais dit que c'était vraiment un très très beau lys et qu'il valait bien son prix. Et puis ensuite, j'avais songé que Lachaume avait forcément des frais importants et qu'il était normal que leurs fleurs soient plus chères qu'ailleurs. Ensuite, j'avais pensé que rue Royale, je ne devais pas m'attendre aux prix de Barbès.
Et en fin de compte, j'avais finalement pensé que ces salauds de mercantis profitaient vraiment de la moindre occasion pour faire de l'argent et que je m'étais fait entuber. Enfin bon, le geste était beau et c'était le principal. L'idée de "beau geste" est vraiment l'excuse foireuse qui m'a permis de donner une légitimité à mon geste inconsidéré.
On pourrait trouver étrange que quelqu'un qui se dise libéral ait ainsi assisté à une telle commémoration. Aujourd'hui encore, je n'ai toujours pas d'explication. J'attribue cela à ma nostalgie qui me fait dire chaque fois que "c'était mieux avant". Et puis, il y avait sans doute du dandysme à défiler devant les CRS pour aller honorer un roi disparu.
Et puis, je suppose que je suis bien plus libertarien que libéral stricto sensu. Alors l'idée de royauté me plait. Etre roi au royaume de soi-même est finalement l'aboutissement de toutes mes idées.
On peut même se demander si cette autonomie quasi complète, qui vous ferait regarder d'un oeil atone la comédie humaine, ne serait pas l'issue magnifiée d'une thérapie comportementale et cognitive réussie ?
Etre devenu tellement maître de ses pensées, et donc de ses représentations, que l'on pourrait n'être touché que parce que l'on désire, se contentant de mettre le reste à distance. Décidement, le stoïcisme est une discipline de grand vaniteux.
4 Comments:
Oui, un des plus beaux moments de ma vie...
Le 21 janvier 2009, soit 18 ans plus tard, je suis venu travailler avec une chemise noire et une cravate gris sombre.
Tous les 21 janvier, j'ai un pensée spéciale pour le roi.
Non pas que je trouve que la monarchie héréditaire soit une bonne chose. Non, certainement pas. La monarchie héréditaire est à mes yeux une déchéance de la monarchie véritable, telle qu'elle a été pratiquée jusqu'au XIV° siècle.
La monarchie véritable est l'élection par les aristocrates du meilleur d'entre eux. Et lorsque l'on entend "le meilleur d'entre eux", nous devons comprendre celui qui cultive les vertus cardinales décrites par Platon, et reprises dans le catéchisme de l'Eglise catholique :
Justice
Sagesse
Courage
Tempérance
Platon avait défini ces vertus comme étant celles des "Gardiens de la Cité".
Ce sont aussi dans la tradition hindoue les vertus des Kshatriyas.
Et l'on peut établir la correspondance avec les séphiroths 2 à 5 de l'arbre de vie de la Cabbale.
Bref, où que l'on tourne son regard, les Traditions authentiques se réfèrent à ces mêmes notions.
Toju.
"Parce que si je suis libéral, je suis aussi très attaché à certaines traditions."
Masi oui Philippe. Non seulement c'est compatible mais recommandé.
Libéralisme : libertas sub lege (la liberté sous le règne de la oi PB : ne pas confondre la Loi avec la législation produite comme par des lapins mécaniques)
et attachement à des traditions et règles établies par le succès sur la longue durée.
@ Philippe
« si je suis libéral, je suis aussi très attaché à certaines traditions »
Comme Boolo, je n'y vois aucune incompatibilité, au contraire. La liberté est le fruit de conquêtes libérales opérées par les grandes révolutions (hollandaise, anglaise, américaine, française de 1789 à 1792). Ces événements ont surgi grâce à l'entretien d'une tradition de défense des libertés qui, de l'Humanisme à ces révolutions, en passant par la Réforme, s'est perpétuée sur plusieurs siècles.
Comment cette conquête des libertés aurait-elle été possible sans la transmission d'une tradition libérale ? La remarque vaut pour aujourd'hui, où certains confondent liberté et tabula rasa...
Quant à Louis XVI : j'espère au moins que tu as offert ton lys blanc à cent-vingt francs à la « fort jolie petite demoiselle au profil racé », car pour le reste, j'avoue que je goûterais fort peu une commémoration en hommage à un roi qui n'a pas craint de faire appel aux cours ennemies de la France pour écraser la Révolution. C'était logique de sa part d'un point de vue politique, mais quel abaissement la France aurait-elle subi si sa trahison avait été couronnée de succès ?
Rappelons qu'à Valmy, la France a gagné in extremis, et que les Austro-Prussiens avaient promis de « livrer Paris à la subversion ». Ne l'oublions pas.
Quant au stoïcisme : en lisant le Manuel d'Épictète, je me suis dit que celui qui parviendrait à l'appliquer serait invulnérable.
Mais c'est tout simplement inhumain à mettre en place. Je me demande quel homme serait capable de vivre un deuil avec un total détachement.
"Etre roi au royaume de soi-même est finalement l'aboutissement de toutes mes idées."
Comme le disait déjà Jésus il y a un bout, amener le Royaume (tiens tiens, ce mot) de Dieu sur Terre revient grosso modo à rendre chacun monarque absolu de lui-même et ses biens, et serviteur (de la même façon que Jésus fut serviteur, bien sûr) de tous les autres.
Une planète remplie de monarques absolus, couverte d'innombrables royaumes, où chaque foyer serait un palais, où chaque lieu serait une chasse gardée ou sanctuaire ou hommage, où chacun se traiterait avec la bienséance et le respect qui convient entre souverains. Le pied.
Et on ferait siéger des autruches au Palais Bourbon pour asseoir (sans mauvais jeu de mot) une bonne fois pour toutes la gravité et le dérisoire mêlés de ce nouvel état de fait.
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