Vie de chien !
Naguère, j'étais plutôt du soir. Mais voici que depuis peu, à peine rentré, la panse pleine, je m'endors comme un vieux sur mon canapé. Mon épouse a beau hurler, tout tenter pour me réveiller, il n'y a rien à faire. Je redresse un peu la tête, puis je me mets à dodeliner, avant de ronfler comme un sonneur.
De guerre lasse, mon épouse se tait enfin, me laissant m'endormir comme une loque face à la télévision qu'elle ne prend même plus la peine d'éteindre lorsqu'elle monte se coucher, m'abandonnant là, telle une épave.
Je me suis longuement interrogé sur cet état de fait. J'y ai d'abord vu les ravages de l'âge et j'ai été horrifié. L'image d'un Philippe vieillissant s'endormant au coin du feu n'était pas pour me plaire. Car, indépendamment du poids des ans qu'atteste l'état civil, je reste fringant, j'en suis persuadé.
Enfin, fringant à ma manière qui serait plutôt celle d'un ours. Rien du félin fébrile et toujours aux aguets en moi ! Non, moi je penche plutôt du côté de l'ours qui préfère se taper des restes appétissants d'une bonne poubelle pour économiser son énergie plutôt que de s'échiner à courir après une proie. On appelle cela être un prédateur opportuniste, c'est à dire bouffer tout et n'importe quoi, pourvu que le rapport entre l'énergie dépensée et l'énergie acquise soit toujours positif. C'est ça être malin.
D'ailleurs tout le monde vous le dira, un ours est un animal plus intelligent, bien plus intelligent qu'un chat. Or, qu'est-ce qu'un lion ou un léopard, si ce n'est un gros chat pas très malin ? Puisque que je n'aime pas les chats, je n'ai pas de raison de préférer les lions et autres félins idiots et très surfaits.
Le jour où le lion comprendra qu'on peut très bien bouffer en faisant les poubelles, il pourra enfin faire du lard en se reposant, plutôt que de s'échiner à courir après des gazelles trop rapides. Mais le lion est con que voulez-vous ! En plus cet abruti d'animal a pris le parti de vivre dans les savanes africaines où les poubelles ne sont pas légion. Tandis que l'ours, plus intelligent, a élu domicile dans de superbes parcs nationaux américains, où des touristes sympas laissent trainer des tas de choses.
Maintenant que vous êtes persuadé que lion est un animal bête qui a usurpé son titre de roi des animaux, alors que le vrai roi c'est l'ours, revenons à nos moutons. je disais donc que je m'étais interrogé sur cette curieuse manie qui consistait à m'endormir comme un vieux dès 23h00.
Je me suis donc interrogé et j'ai soumis ce problème à ma vive intelligence que tout le monde dont tout le monde reconnait la sagacité.
Ainsi, quand je vivais à Paris, dans un immeuble hausmannien, je ne m'endormais jamais avant deux heures du matin. Et encore fallait-il que je me souvienne que j'avais des rendez-vous à honorer le lendemain et qu'il fallait que je présente frais et avenant, et non une mine hâve et des yeux bouffis de sommeil.
Plus tard, ayant réintégré mon petit pavillon de banlieue, je me suis souvenu que je restai un couche-tard effréné. Là encore, c'est que ma conscience professionnelle qui m'obligeait à aller dormir. Parce que, que je vous le dise, je suis plus du soir que du matin. S'il y a une profession que je n'aurais pas pu faire, c'est éboueur parce qu'il faut se lever tôt. Tiens, je n'aurais pas pu non plus travailler sur les marchés. Ça tombe bien parce que j'avais d'autres ambitions que de ramasser les ordures ou de vendre des légumes.
Il semblerait que j'ai pris des habitudes de gallinacés du fait des changements que mon épouse a fait intervenir dans mon habitat. Simple comme je suis, je pouvais vivre dans mon ridicule petit pavillon de banlieue. Mais c'était sans compter avec mon avocate d'épouse, laquelle étant habituée aux moulures hausmanniennes de son ancien appartement et aux ors des palais de justice, se trouva fort dépourvue dans ce logement de prolétaire.
Ayant épousé une femme impécunieuse, celle-ci s'est donc mis en tête de transformer ma modeste demeure en une sorte de palais, en quadruplant l'espace disponible, à grands renforts de travaux dispendieux ! Pourquoi pas? A la limite, il sied plus à quelqu'un comme moi de vivre en un palais qu'en une maison misérable. Ceci dit, j'aurais vu d'un bon œil l'adjonction d'un vieux mobilhome d'occasion monté sur parpaings et d'un auvent en tôles brutes, puisque s'agissant de gagner de la surface vitale, autant le faire à moindre coût.
Les voisins se seraient moqués de nous ? Et alors ? Combien de pavillons de banlieue sont ainsi constitués d'ajouts successifs et plus moches les uns que les autres. Je n'aurais pas été le premier à vivre dans un gourbi. Un joli puits réalisé en vieux pneus peints en blanc, agrémenté de nains multicolores, aurait donné un côté pimpant à l'ensemble. Et puis, j'aurais réagi en stoïcien, leur jetant à la face mon dédain, préférant me boucler dans ma maison de bric et de broc plutôt que de subir leurs sarcasmes de nouveaux riches.
Hélas, ma peu frugale épouse a décrété qu'elle voulait vivre dans une maison en dur et a fait appel à un architecte ! De plus, étant bien moins conservatrice que moi, elle a opté pour des solutions techniques onéreuses. C'est ainsi qu'en lieu et place de volets que l'on ferme manuellement, ce sont des stores électriques ruineux qui ont été mis en place. Plutôt que du bon vieux PVC moche mais très abordable, il fallut mettre des ouvertures en aluminium. Tenez, rien que d'écrire ces mots je me sens défaillir à l'idée de tous ces artisans cupides qu'il m'aura fallu payer !
Mais le pire fut atteint, lorsqu'elle opta pour un chauffage au sol, à basse température. Pingre comme je peux l'être, et tous les capricornes le sont, non par avarice mais par peur du lendemain, moi j'aurais opté pour de bêtes et disgracieux radiateurs. Leur coût étant bien moindre, je me serais accommodé de leur piètre rendement énergétique. Après tout, si j'avais eu froid, je pouvais toujours me couvrir d'un vieux plaid rapiécé, obtenu gratuitement dans un stock de la Croix Rouge. Pourquoi toujours dépenser ? Je roule toujours gaillardement sur un scooter qui va bientôt fêter ses treize ans et bien malin sera le concessionnaire qui me fourguera une machine neuve.
En parlant de ce chauffage au sol, je crois d'ailleurs que je tiens là, le responsable de mes endormissements précoces. Ce n'est en aucun cas du une viellissement précoce. Il suffit que je rentre de mon cabinet, frigorifié par la conduite de mon scooter, et que je me jette sur mon canapé pour me sentir envahi par une chaleur bienveillante. Tant et si bien, qu'une heure après, alangui et amolli par la douce chaleur montant de mon ruineux parquet, je rejoins Morphée.
Moi le grizzly, né pour braver le froid et affronter l'adversité, je me retrouve tel un chien domestique, somnolant la truffe entre les pattes, face à la cheminée.
C'est sans doute le destin de tout grand fauve solitaire, une fois marié, de se retrouver à mener une vie de chien.
De guerre lasse, mon épouse se tait enfin, me laissant m'endormir comme une loque face à la télévision qu'elle ne prend même plus la peine d'éteindre lorsqu'elle monte se coucher, m'abandonnant là, telle une épave.
Je me suis longuement interrogé sur cet état de fait. J'y ai d'abord vu les ravages de l'âge et j'ai été horrifié. L'image d'un Philippe vieillissant s'endormant au coin du feu n'était pas pour me plaire. Car, indépendamment du poids des ans qu'atteste l'état civil, je reste fringant, j'en suis persuadé.
Enfin, fringant à ma manière qui serait plutôt celle d'un ours. Rien du félin fébrile et toujours aux aguets en moi ! Non, moi je penche plutôt du côté de l'ours qui préfère se taper des restes appétissants d'une bonne poubelle pour économiser son énergie plutôt que de s'échiner à courir après une proie. On appelle cela être un prédateur opportuniste, c'est à dire bouffer tout et n'importe quoi, pourvu que le rapport entre l'énergie dépensée et l'énergie acquise soit toujours positif. C'est ça être malin.
D'ailleurs tout le monde vous le dira, un ours est un animal plus intelligent, bien plus intelligent qu'un chat. Or, qu'est-ce qu'un lion ou un léopard, si ce n'est un gros chat pas très malin ? Puisque que je n'aime pas les chats, je n'ai pas de raison de préférer les lions et autres félins idiots et très surfaits.
Le jour où le lion comprendra qu'on peut très bien bouffer en faisant les poubelles, il pourra enfin faire du lard en se reposant, plutôt que de s'échiner à courir après des gazelles trop rapides. Mais le lion est con que voulez-vous ! En plus cet abruti d'animal a pris le parti de vivre dans les savanes africaines où les poubelles ne sont pas légion. Tandis que l'ours, plus intelligent, a élu domicile dans de superbes parcs nationaux américains, où des touristes sympas laissent trainer des tas de choses.
Maintenant que vous êtes persuadé que lion est un animal bête qui a usurpé son titre de roi des animaux, alors que le vrai roi c'est l'ours, revenons à nos moutons. je disais donc que je m'étais interrogé sur cette curieuse manie qui consistait à m'endormir comme un vieux dès 23h00.
Je me suis donc interrogé et j'ai soumis ce problème à ma vive intelligence que tout le monde dont tout le monde reconnait la sagacité.
Ainsi, quand je vivais à Paris, dans un immeuble hausmannien, je ne m'endormais jamais avant deux heures du matin. Et encore fallait-il que je me souvienne que j'avais des rendez-vous à honorer le lendemain et qu'il fallait que je présente frais et avenant, et non une mine hâve et des yeux bouffis de sommeil.
Plus tard, ayant réintégré mon petit pavillon de banlieue, je me suis souvenu que je restai un couche-tard effréné. Là encore, c'est que ma conscience professionnelle qui m'obligeait à aller dormir. Parce que, que je vous le dise, je suis plus du soir que du matin. S'il y a une profession que je n'aurais pas pu faire, c'est éboueur parce qu'il faut se lever tôt. Tiens, je n'aurais pas pu non plus travailler sur les marchés. Ça tombe bien parce que j'avais d'autres ambitions que de ramasser les ordures ou de vendre des légumes.
Il semblerait que j'ai pris des habitudes de gallinacés du fait des changements que mon épouse a fait intervenir dans mon habitat. Simple comme je suis, je pouvais vivre dans mon ridicule petit pavillon de banlieue. Mais c'était sans compter avec mon avocate d'épouse, laquelle étant habituée aux moulures hausmanniennes de son ancien appartement et aux ors des palais de justice, se trouva fort dépourvue dans ce logement de prolétaire.
Ayant épousé une femme impécunieuse, celle-ci s'est donc mis en tête de transformer ma modeste demeure en une sorte de palais, en quadruplant l'espace disponible, à grands renforts de travaux dispendieux ! Pourquoi pas? A la limite, il sied plus à quelqu'un comme moi de vivre en un palais qu'en une maison misérable. Ceci dit, j'aurais vu d'un bon œil l'adjonction d'un vieux mobilhome d'occasion monté sur parpaings et d'un auvent en tôles brutes, puisque s'agissant de gagner de la surface vitale, autant le faire à moindre coût.
Les voisins se seraient moqués de nous ? Et alors ? Combien de pavillons de banlieue sont ainsi constitués d'ajouts successifs et plus moches les uns que les autres. Je n'aurais pas été le premier à vivre dans un gourbi. Un joli puits réalisé en vieux pneus peints en blanc, agrémenté de nains multicolores, aurait donné un côté pimpant à l'ensemble. Et puis, j'aurais réagi en stoïcien, leur jetant à la face mon dédain, préférant me boucler dans ma maison de bric et de broc plutôt que de subir leurs sarcasmes de nouveaux riches.
Hélas, ma peu frugale épouse a décrété qu'elle voulait vivre dans une maison en dur et a fait appel à un architecte ! De plus, étant bien moins conservatrice que moi, elle a opté pour des solutions techniques onéreuses. C'est ainsi qu'en lieu et place de volets que l'on ferme manuellement, ce sont des stores électriques ruineux qui ont été mis en place. Plutôt que du bon vieux PVC moche mais très abordable, il fallut mettre des ouvertures en aluminium. Tenez, rien que d'écrire ces mots je me sens défaillir à l'idée de tous ces artisans cupides qu'il m'aura fallu payer !
Mais le pire fut atteint, lorsqu'elle opta pour un chauffage au sol, à basse température. Pingre comme je peux l'être, et tous les capricornes le sont, non par avarice mais par peur du lendemain, moi j'aurais opté pour de bêtes et disgracieux radiateurs. Leur coût étant bien moindre, je me serais accommodé de leur piètre rendement énergétique. Après tout, si j'avais eu froid, je pouvais toujours me couvrir d'un vieux plaid rapiécé, obtenu gratuitement dans un stock de la Croix Rouge. Pourquoi toujours dépenser ? Je roule toujours gaillardement sur un scooter qui va bientôt fêter ses treize ans et bien malin sera le concessionnaire qui me fourguera une machine neuve.
En parlant de ce chauffage au sol, je crois d'ailleurs que je tiens là, le responsable de mes endormissements précoces. Ce n'est en aucun cas du une viellissement précoce. Il suffit que je rentre de mon cabinet, frigorifié par la conduite de mon scooter, et que je me jette sur mon canapé pour me sentir envahi par une chaleur bienveillante. Tant et si bien, qu'une heure après, alangui et amolli par la douce chaleur montant de mon ruineux parquet, je rejoins Morphée.
Moi le grizzly, né pour braver le froid et affronter l'adversité, je me retrouve tel un chien domestique, somnolant la truffe entre les pattes, face à la cheminée.
C'est sans doute le destin de tout grand fauve solitaire, une fois marié, de se retrouver à mener une vie de chien.
8 Comments:
Le chauffage au sol, c'est une horreur et puis ça donne des varices.
C'est quand même bizarre, ton chauffage au sol, il n'endort que toi... C'est donc une attaque de chauffage ciblée !
Tom, je parle d'un chauffage basse température, pas d'une solution technique merdique en vogue dans les seventies !!
GCM, eh oh lui eh !!! N'importe quoi !!!
Une rumeur court selon laquelle s'endormir sur un canapé qui se trouve dans une pièce avec chauffage au sol favoriserait les hémorroïdes... peut-être que GCM lutte contre le sommeil à cause de cela ??
GCM ne lutte pas contre le sommeil ! Il n'est pas fatigué parce qu'il se lève tard !
Il a peut être peur des hémorroïdes quand même ??
Je ne me lève pas tard, et les hémorroïdes me font très peur effectivement.
Mais je n'ai pas à lutter contre le sommeil. Il suffit de jeter un oeil sur Philippe, bouche ouverte, la bave perlant sur son menton, emettre des sons d'une rare inélégance, et dont certains font froid dans le dos, pour comprendre que dormir, c'est obligatoirement mal !
c'est la lionne qui chasse. Le lion est encore plus malin que l'ours. Bien que celà ne soit que stricte programmation génétique.
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