24 octobre, 2010

Patientes en colère !


Lundi dernier, une patiente m'a rappelé pour prendre rv alors qu'elle était partie fachée de mon cabinet. Agacée serait peut-être le terme plus adéquat. Elle a un travail qualifié, possède un appartement dans Paris, une famille mais elle est seule. La solitude faisait partie du tableau clinique, un problème parmi d'autres. Je crois que si la thérapie a plutôt bien fonctionné et a porté ses fruits, concernant sa solitude c'est un échec. 

Parce que sur ce sujet, je me déclare inconpétent. Elle n'est ni mieux ni pire qu'une autre. Elle est intelligente, sympa et sincèrement je ne vois pas ce qu'il l'empêche de rencontrer quelqu'un si ce n'est le fait d'avoir tardé sans doute. Habituellement, on rencontre durant ses études et sur son lieux de travail. A quarante-trois ans, ses études sont loin, et ne reste que le le lieu de travail. Mais qu'y puis-je moi ? Je ne tiens pas une agence matrimoniale. 

Alors comme elle était partie frustrée et ulcérée de ne pas avoir encore trouvé l'amour, elle a repris un rendez-vous pour discuter de tout cela. On a fait le point. Elle admet que le travail que nous avons fait ensemble a porté ses fruits. Elle est plsu apaisée, ne prend plus d'antidépresseurs, prend mieux soin d'elle et a progressé professionnellement. Elle m'avoue qu'elle est toujours seule.

Je lui réponds que je le déplore mais que je n'y peux rien. D'un point de vue clinique, il n'y a rien chez elle qui fasse qu'elle ne puisse pas rencontrer un homme. C'est juste un concours de circonstances, le résultat de choix, peut-être l'endroit où elle vit et les gens qu'elle fréquente habituellement. Mais je lui précise que le fait d'être célibataire ne constitue pas en soi une pathologie. Cela arrive à plein de gens. Je précise aussi que l'on pourrait peut-être explorer d'autres pistes si elle le veut mais qu'elle n'a jamais voulu m'écouter. Alors, nous en restons là. Je suppose qu'elle reviendra.

Voici un mois environ, j'ai eu une autre patient qui est partie du cabinet pour les mêmes motifs. Alors que je lui demandais si elle voulait reprendre rendez-vous, elle m'a dit "non" et est partie fâchée, les larmes aux yeux. Pourtant, elle était déprimée et elle ne l'est plus. Elle vivait sous la terreur d'un ex totalement pathologique (personnalité narcissique) et elle ne le craint plus. Moi, je trouve cela plutôt positif. Mais elle est seule et aura quarante ans dans quelques mois. Qu'y puis-je encore une fois ? Rien. A elle aussi, j'ai proposé des pistes. 

Curieusement, c'est une femme brillante et très sympathique qui aime les mecs plutôt virils dans le genre motards ou bucherons. Mais comme elle travaille à la télévision, elle s'obstine à fréquenter les soirées de ce milieu. Et c'est bien connu qu'on ne rencontre pas le genre de mecs qu'elle apprécie et qui sauraient l'apprécier dans ce genre de soirée, elle reste seule. En plus, comme dans ces soirées, elle ne représente pas la femme à laquelle les hommes présents s'intéressaient, elle perd de plus en plus confiance en elle. Moi je n'y peux rien. Quand on persiste à vouloir commander une pizza dans un restaurant chinois, on risque de crever de faim encore longtemps. 

Mais je suis sur, qu'elle aussi reviendra. C'est certain parce que l'on s'entendait très bien. Elle m'en veut juste de ne pas avoir su distordre le réel pour l'adapter à son cas. Elle rêve d'un mec un vrai, tout en ne se sentant pas capable de renoncer à son milieu bobo à paillettes qui la flatte sans qu'elle se l'avoue. Pourtant le réel étant ce qu'il est, les mecs qui lui plairaient et à qui elle pourrait plaire ne seront jamais présents dans ces soirées. Mais bon, je m'en fous, je sais qu'elle reprendra rendez-vous. Sa colère et sa frustration font partie de  la thérapie.

Au début quand les gens partaient comme cela dépités de mon cabinet, je m'en voulais, m'accusant de ne peut-être pas avoir fait mon boulot correctement. J'étais sans doute dans la toute puissance, collant mes attentes envers moi-même à celles totalement délirantes dont certains de mes patients faisaient preuve.

J'ai appris que je n'étais pas magicien et que l'équilibre mental ne dépendait pas de ce que l'on avait pas et dont on rêvait et que parfois il fallait se faire une raison : l'espoir fait vivre même s'il n'est jamais récompensé. Je me suis appliqué ma recette à moi-même. Avant, je me sentais frustré de savoir que je pouvais avoir cent idées de livres dans ma tête et de me sentir incapable d'en écrire un seul. Aujourd'hui que je m'accepte en tant que gros branleur, plus apte à rêver qu'à réaliser, tout va mieux. Il y a d'autres sources de satisfaction qu'un livre rédigé.

"Le monde ne mourra jamais par manque de merveilles, mais uniquement par manque d'émerveillement.
G.K. Chesterton

12 Comments:

Blogger Whatever said...

Attention, il y a des notes de brouillon en bas d'article, dont un prénom.

A part ça, post agréable et ontéressant à lire.

24/10/10 9:35 PM  
Blogger Lousk said...

vous avez laissé des notes en bas de l'article :D qui n'ont furieusement pas de rapport avec ce dernier d'ailleurs

24/10/10 9:46 PM  
Blogger Gabrielle said...

Dorothée ???


Je ne comprends pas votre dernière phrase.


C'est hyper flippant, mon prénom c'est Dorothée.


Je ne devrais certainement pas mais waouh ça fait un choc. Je me sens visée du coup :(

24/10/10 9:51 PM  
Blogger Stephanie P. said...

( attention un petit bout de brouillon vous a échappé ! )
Peut-être sont-elles amoureuses de vous : en lisant vos textes je me dis que vous correspondez au type d'hommes sur lesquels les femmes investissent beaucoup, mais j'extrapole à partir de ce que je lis uniquement, il me manque plein d'éléments !
Et tout ça est très bon pour les affaires : une cliente en manque revient un jour ou l'autre...
Pas de cynisme chez moi, juste du pragmatisme et un peu d'humour.
En vous lisant j'ai aussi des remords de ne pas avoir assez remercié mon psy, ce saint homme qui ne méritait pas un cas comme moi, il aura vraiment gagné sa retraite.

24/10/10 10:49 PM  
Anonymous Anonyme said...

"Les gens qui ne peuvent pas supporter la solitude sont précisément les moins agréables des compagnons." :o) Albert Guinon

24/10/10 10:50 PM  
Anonymous Anonyme said...

@Philippe : mais ça, c'est trop facile !!!!! sourire.

"Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles." Sénèque

Pareil pour les rêves ...
Ils ne sont impossibles que parce que nous n'essayons pas de les réaliser.
Et ne me dites pas que tous les rêves n'ont pas vocation à l'être ...
Je vous répondrais qu'"Il ne t'est jamais donné un rêve sans le pouvoir de le réaliser" ... et ce n'est même pas de moi mais de Richard Bach.
Je vous enverrai le livre.

Et vos projets à vous, votre super plan avec la gentille capricorne, votre manuel ?! ...

PS : Pour vos patientes, bien sûr qu'elles reviendront ... elles reviennent toujours, non ?!

24/10/10 11:08 PM  
Blogger 100hp said...

J'ai lu un jour ce vers (je ne retrouve plus l'auteur, je cite de mémoire) :

"Vivre sans amour, c'est vivre sans mémoire."

Auquel j'ajouterais :

"Mon amour, ma chérie,

Chaque journée de travail, chaque soir,
Chaque injustice, chaque souffrance,
Chaque joie, chaque désir que j’ai eu,
Chaque fois que j’ai été heureux d’être là,

Tout cela est mort avec ton absence."

Je crois que ces femmes (et aussi les hommes) comprennent à cet age que vivre sans amour, c'est gouter à la "petite mort".

Cordialement.

25/10/10 7:26 AM  
Blogger Gabrielle said...

Un brouillon ? bon ok vous pouvez supprimer mon commentaire, faudrait pas qu'une de vos patientes voie son nom cité dans le blog :)

25/10/10 8:44 AM  
Blogger dpi said...

ouah tout le monde y va de sa petite citation; alors allons y aussi.

je ne sais plus quel philosophe a dit, je crois qu'il s'appelle Randstad : "valoriser l'homme c'est valoriser l'entreprise"
c'est beau , non ? il y a aussi "zero tracas ..." mais là c'est nul.

sinon Philou, le post est super comme d'hab.j'ai bien rit pour la pizza dans un resto chinois, l'image est terific !

25/10/10 9:54 AM  
Blogger Gabrielle said...

Vous avec oublié ce grand philosophe prénommé Céline Dion:

"S'il suffisait qu'on s'aimeuhh
S'il suffisait d'aimeeer".

25/10/10 3:36 PM  
Blogger Orage said...

Vous parlez beaucoup de pistes mais vous ne mettez pas de panneaux indicateurs!

25/10/10 3:52 PM  
Blogger Unknown said...

Dommage d'avoir renoncé (pour le livre que vous avez en vous).
Proclamer que vous êtes fainéant ne vous fera certainement pas avancer !!!!
Imaginez que vous changiez, que vous retrouviez un jour plein de courage pour faire face à cette indolence ?
Je crois moi, que la nature humaine n'est pas aussi figée et que vous trouverez un jour l'énergie pour l'écrire, votre livre !

29/10/10 4:42 AM  

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