Le roi de l'organisation !
La semaine dernière, c'est tout guilleret que j'accueille une de mes charmantes patientes venue pile à l'heure. Hélas, elle n'est pas encore assise dans le fauteuil que voici mon interphone qui sonne. Je vais répondre et l'accent allemand que j'entends me donne à penser que j'ai fait une connerie.
Non que je redoute les allemands et que j'aie peur de voir un feldgendarme m'embarquer à la Kommandantur, mais simplement que je sais que quand Beate sonne à la porte, c'est qu'elle a vraiment rendez-vous. Cette femme, charmante au demeurant est estampillée TÜV et d'une rigueur absolue. Avec elle, la date c'est la date et l'heure c'est l'heure. Et je me dis que si elle sonne, c'est qu'elle a bien rendez-vous et que la jeune femme qui vient de s'asseoir en face de moi n'avait pas rendez-vous. Ou plutôt, si, elle aussi a rendez-vous simplement parce qu'ayant oublié de noter celui de cette chère Beate, je lui ai refilé.
Bref, il est dix-neuf heures et j'ai deux patients sur les bras, ce que je déteste surtout parce que c'est Beate, que je la connais bien et que j'imagine très bien sa tronche quand je vais lui dire que je me suis trompé. Elle va me regarder comme si j'étais le roi des crétins, me sourire comme si j'étais un gamin un peu idiote en exprimant toute la commisération qu'elle a pour moi. Et même si je sais qu'elle tient en haute estime mes compétences de psy, je sais aussi que je n'ai jamais réussi à la convaincre de mes compétences de gestionnaire. Putain, c'est pas demain que j'irai bosser chez Messerschmitt comme Georges Marchais ; à l'époque du STO personne n'aurait voulu de moi, même pour passer le balai.
Bref, quitte à passer pour un con, j'arrange le truc avec Beate à qui je donne un autre rendez-vous me confondant en excuses et l'assurant que je ne suis qu'un vermisseau de français et que si nous sommes doués pour le vin et la fête, nous ne sommes décidément pas des gens sérieux. Je songe alors que nul ne m'y reprendra et que maintenant je vais faire super attention. Parce que je sais que si je suis un gros branleur au niveau de l'organisation, j'étais pourtant fier de gérer mon agenda comme un grand, un peu comme un enfant ravi de savoir noter ses devoirs dans son cahier de texte !
C'était bien mal me connaitre parce que pas plus tard que dans l'après-midi c'est Victoire qui m'appelle pour me demander si c'est bien à dix-huit heures que nous avons rendez-vous. Je regarde d'un œil distrait mon agenda pour lui dire que c'est à dix-neuf heures. Les heures passent alors et les patients s'enchainent et voici qu'à dix huit heures et douze minutes, toujours pas de patient.
Pris d'un doute subit je regarde mon agenda plus attentivement et je constate qu'en fait j'avais donné rendez-vous à Victoire à dix huit heures et non dix neuf heures. Mais comme je suis stupide et qu'au lieu de noter les noms, je ne note que les initiales, j'ai confondu Victoire avec Vincent mon patient suivant vu qu'ils ont eu la sotte idée de porter non seulement un prénom mais aussi un nom commençant par la même lettre.
Je rappelle immédiatement Victoire pour lui faire part de mon erreur et lui présenter mes excuses et celle-ci m'explique qu'elle est finalement rentrée chez elle et revient en voiture et qu'elle sera donc là à dix-neuf heures mais pas avant. Je lui explique alors que je préviens les autres patients suivants pour décaler tout le monde. Je me confonds ainsi en excuses auprès de Vincent et du suivant en leur expliquant que malheureusement je suis obligé de les décaler d'une demie heure, ce qu'ils acceptent gentiment.
Je rappelle ensuite Victoire pour lui dire que c'est d'accord, et que même si la séance ne sera pas entière, je me fais fort de rattraper le temps perdu lors de la prochaine séance, ce qui soit dit en passant me permettra de décaler tout mon emploi du temps encore une fois. Mais comme manifestement il y a des embouteillages monstres, Victoire me rappelle pour me dire qu'elle ne pourra jamais être là à l'heure. Comme sa séance est amputée de la moitié, je lui dis que venir pour un quart d'heure ne serait pas forcément intéressant, aussi reprenons nous rendez-vous pour la semaine prochaine. Bien sur, je suis ensuite obligé de rappeler les deux patients suivants pour les avertir que finalement ils pourront venir à l'heure initialement prévue.
Bref je démontre à ceux qui en doutaient que je suis le roi de l'organisation. Mais je feins de rire de tout ça alors que cela me rend plutôt triste parce qu'en fait j'étais super fier de savoir gérer mon agenda comme un grand. En plus cette année, j'avais acheté le 2011 avant que l'année nouvelle ne débute et je me trouvais en progrès.
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