Les cas bizarres !
On se fait une fausse idée de ma profession, moi même quand j'ai commencé d'ailleurs, je ne savais pas vraiment où je mettais les pieds. On imagine toujours que l'on va recevoir des cas dramatiques, des tueurs en série, des fous dangereux et tout une cohorte de gans peu recommandables. Parce qu'il est bien connu qu'un psy ne reçoit que des fous.
Dans la pratique, les fous, les vrais finissent en HP mais pas dans no cabinets ou alors c'est qu'ils sont venus par erreur et on les réoriente gentiment vers un gentil docteur qui fera le nécessaire.
Bref, j'ai uen clientèle charmante à 99% et à part deux ou trois paranoïaques qui ont pu m'inquiéter, je n'ai pas eu en quinze ans de cas terribles.
Pourtant on me demande souvent si je n'ai pas des trucs croustillants à raconter. Et bien non, en fait, je n'ai rien de vraiment étrange à relater. Bien sur, je peux recevoir des gens un peu étranges mais bon, compte-tenu que moi-même j'ai acheté une RJ49 et que je lis des livres sur le hérisson, je ne suis pas le mieux placé pour me situer en directeur de la norme et taxer les autres d'originalité !
En fait, depuis quinze ans, sans doute que les deux qui m'ont le plus étonné sont un exhibitionniste et un homosexuel venu consulter pour une phobie.
Le premier ne pouvait s'empêcher d'observer sa voisine d'en face en se mettant à poil le machin à la main. C'est sur que quand le mec vous raconte cela, ça fait bizarre mais là, où dans la vraie vie, on ne pourrait s'empêcher de rigoler, dans l'intimité d'un cabinet c'est différent. D'une part parce que je prends mon boulot au sérieux et d'autre part parce que je comprends quel courage il aura fallu à ce pauvre type pour me regarder en face et me faire part de sa curieuse pratique.
Et puis, je ne suis pas américain, mon job ne consiste pas à classer les gens, à les coller dans des boites dès lors qu'ils sortent de la norme. J'essaie autant que faire se peut, de les saisir dans leur essence. Et puis, les exhibitionnistes ne sont généralement pas des gens dangereux. Il s'agit le plus souvent d'un acte impulsif-obsessionnel, une sorte de pattern répondant à un état de tension intérieur qu'il sert à soulager.
Bref, je l'ai reçu à plusieurs reprises et je crois qu'il a cessé mais je n'en suis pas sur. Dans tous les cas, il semblait satisfait de notre collaboration. Il s'est impliqué et au-delà de ses curieuses pratiques, c'était un type plutôt gentil, doux et timide. Je n'ai jamais cru qu'il pouvait se montrer dangereux et passer de l’exhibitionnisme au viol par exemple. Lui même ne l'a jamais redouté.
Le second cas curieux, c'était ce jeune homo qui à la suite d'une fistule anale redoutablement douloureuse, ne pouvait assouvir sa pratique sexuelle. Sans vous faire un dessin, un jour qu'il s'adonnait aux délices de l'amour, il avait eu tellement mal qu'il en avait déclenché une vraie phobie. Après avoir consulté un proctologue qui lui avait traité son problème médical, ce dernier l'avait dressé à moi afin que je traite sa phobie. En peu de mot, ma mission était de faire en sorte qu'il puisse s'adonner aux plaisirs de la sodomie de nouveau.
C'est vrai que dit comme cela, ma profession semble curieuse. Mais encore une fois, dans l'intimité du cabinet, les choses prennent un autre relief. Une phobie reste une phobie et je sais les traiter alors celle-ci ou une autre, peu m'importe, je réponds à des demandes et rien de plus.
Le plus drôle c'est que c'est un patient que je recevais le même jour à la même heure et que la plupart du temps GCM venait me chercher parce que c'était notre soirée MC Do et film con. Une fois GCM m'a trouvé un peu pensif et il m'a demandé à quoi je pensais.
Je lui ai répondu que je ne pensais à rien de particulier mais que je venais d'écouter un patient me parler de son anus durant une heure alors qu'il me fallait quelques minutes pour revenir au monde réel. Je me souviens de lui avoir dit que si lui même avait des problèmes de cette sorte, il pouvait m'en parler parce que j'étais encore chaud et prêt à tout entendre. Le connaissant, je crois qu'il a du me dire que mon métier était parfois dégueulasse.
Moi, je ne trouve pas que ce soit dégueulasse quand on restitue tout cela sous l'angle psychopathologique. Personnellement, je ne suis pas exhibitionniste, je ne me suis jamais masturbé à la fenêtre en face d'une voisine et mon anus va très bien. Mais je me dis que si j'avais été à la place de ces deux types, j'aurais trouvé plutôt rassurant que dans l'intimité d'un cabinet, il existe des gens comme moi prêts à entendre sans juger ces curieuses confessions. Ceci dit je précise que je ne suis aucunement spécialisé dans l'exhibitionnisme pas plus que je ne saurais me prétendre expert en anus douloureux ! Je reste généraliste.
C'est parfois étrange mais j'aime bien ma profession.
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