15 avril, 2013

Cahuzac suite et fin définitive et totale !






Ça a beau être un gros bandit, moi Cahuzac je l'appréciais bien. J'appréciais sa manière de communiquer, de faire de la pédagogie, comme on dit aujourd'hui quand un élu vous explique qu'il va vous prendre à sec pour votre bien ! En tout cas, Cahuzac, il avait l'art de vous la mettre bien profond avec le sourire. A un point tel qu'on aurait eu envie de le remercier même en ayant mal voire très très mal au cul. Je ne sais vraiment pas pourquoi il s'est engagé à gauche ?!


Quand on voit son obsession de la réussite, sa capacité à monter des boîtes, à maîtriser la fiscalité française et à tripatouiller, ce type aurait du être UMP. D'ailleurs, d'après ce qu’en ont dit tous les journaleux après qu'il fut tombé à terre,ce gars là n'avait que des amis à droite voire très à droite (là je me signe prestement). Bref, même si l'aventure de Cahuzac m'a plutôt fait rigoler parce que je me dis "prends ça dans ta gueule François", je ne parviens par vraiment à lui en vouloir et encore moins à le détester. Je pense juste qu'il aurait du mieux choisir son camp. A droite, ils sont plus doués qu'à gauche pour couvrir leurs turpitudes. 

Tant et si bien, qu'un après midi, tandis que je glandais à la terrasse d'un café avec Jean Sablon et le Jeune Gentihomme tourangeau, nous avons abordé le cas Cahuzac avec sérieux en nous demandant ce que nous établirions comme communication de crise pour sortir le pauvre gars de la mouise et lui permettre au moins d'aller acheter sa baguette sans qu'on lui jette des pierres.

Parce que le monde marche comme ça ma bonne dame, chaque français gruge à qui mieux mieux mais ne pardonne pas aux autres de le faire, surtout s'ils sont ministres. Encore que je ne sais pas si tous les français lui en veulent. Je pense qu'on lui aurait bien pardonné ses turpitudes si il avait contre-attaqué plus tôt en se livrant à un mea culpa sincère.

C'était d'ailleurs l'axe que nous avions choisi, mes deux compères et moi. Nous avions fait le pari, que le vieux fond catho des français, aurait permis de pardonner ce bon Jérôme pourvu qu'il ait donné des gages de repentir sincère. Parce que le pardon, cela ne se réclame pas plus que cela se quémande, cela se mérite pourvu qu'on y mette la forme. Et alors, le petit Christ qui sommeille en chacun de nos compatriotes aurait forcément pardonné notre petite Marie-Madeleine Cahuzac en lui disant Va et ne pêche plus.

Parce que ce que les gens détestent, c'est qu'on se moque d'eux, que les élus soient arrogants au point de les mépriser ouvertement. D'ailleurs, l'espèce de déballage grotesque qui a suivi l'affaire dans lesquels, chacun des membres du gouvernements tenter de nous convaincre de leur transparence n'aura sans doute persuadé personne sauf les crétins encartés. Les autres, du prolo au bourgeois, n'y auront vu que de la poudre aux yeux. Entre celui qui déclare sa BMW à 300€ (sur le bon coin, aessayez de trouver une F650 à ce prix), ceux qui sont fauchés bien que gagnant 20 000€ par mois ou ceux qui sous-estiment largement leur patrimoine, voire ne déclare pas tout comme notre président (parait-il selon certaines sources), tout cela prête à rire

Alors là côté gouvernement, la communication était bâclée et minable. Cela sentait l'amateurisme à plein nez et heureusement qu'ils ont les journalistes pour feindre de croire en leur sincérité parce que sinon, ils se seraient aperçu que l'opération transparence avait échoué. Cela marque aussi la limite de n'être entouré que de lèche-culs parce qu'eut-il existé des journalistes un plus indépendants que le grotesque de ce déballage leur aurait sauté à la gueule.

Bref mes acolytes et moi avions établi un bon petit programme pour Cahuzac, un truc d'uen efficacité redoutable avec un scénario à faire pâlir les scénaristes de Hollywood. Mais comme ce bon Jérôme ne nous connait pas et que nous ne savions pas comment le joindre, nous avons raté le marché et il est allé droit chez ceux qui avait géré la com' de DSK après ses turpitudes ancillaires ! Sincèrement, le DSK face à Claire Chazal, je l'avais trouvé assez minable. Non que je juge l'homme mais que j'aie trouvé ce qu'il disait plutôt plat. Heureusement qu'il a de vrais talent d'acteur parce que sinon avec mémère en face pour lui donner la réplique et lui servir d'auguste, l'exercice aurait été nullissime.

Avec Jérôme, c'était un peu pareil, même si Achilli, le corse de BFM était un peu meilleur parce que plus pugnace que ne l'a été Chazal. On sentait que Jérôme ne croyait pas vraiment ce qu'il disant, du moins c'est l'impression que j'en pu avoir. Il était figé et récitait son texte comme un gosse qui dirait un compliment appris par cœur pour les quatre-vingt dix ans de sa mamie. Ça sonnait faux !

Et quand il nous fait du Ellroy en parlant de sa part d'ombre, ça tombe à plat. Et d'ailleurs c'est dit platement et vraiment sans conviction, en ânonnant laborieusement. Ce type dont tout indique qu'il aime la réussite professionnelle et le fric nous la joue encore à tel point sainte nitouche qu'on a juste envie de lui dire : " ta gueule Jéjé, arrête de nous prendre pour des cons !". Il tient à nous faire croire que son truc en fait c'était vraiment le service de l'état et que le fric n'était que sa part d'ombre alors qu'à mon sens c'est l'inverse. Ce mec est une vraie cash-machin, un vrai créateur d'entreprise et sa part d'ombre c'est de ne pas savoir s'en être contenté et d'avoir voulu en plus le pouvoir politique. 

Finalement, si l'on met de côté ses turpitudes fiscales, son gros problème c'est d'avoir été comme ces crétins qui une fois fortune faite, ne peuvent s'empêcher de rechercher la gloire et l'assentiment de l'intelligentsia en recherchant à tout prix la rosette à accrocher à la boutonnière. Et le voici parti sur le toboggan qui entrainera sa chute ! Le voici député, puis conseilleur général, et enfin maire puis président de la communauté de commune et enfin la consécration : le voici qui devient ministre, ce qui signera sa chute ! Saisi d'hubris, l'homme d'affaires apprendra la modération au sacrifice de sa réputation. C'est un peu l'itinéraire de Daniel Dravot dans L'homme qui voulut être roi au point d'y perdre la tête.

C'est comme cela qu'il aurait fallu communiquer. Il aurait fallu dire qu'il était né brillant et entreprenant dans un milieu déclassé et qu'il avait cherché une sorte de revanche, que l’argent ne lui avait pas suffit. Tout le monde adore ces parcours romantiques du type qui se trompe de voie, fait n'importe quoi et puis qui, une fois touché par la grâce se repent et change de vie. Ça a de la gueule c'est byronien ou pour ceux qui ne connaissent pas la vie de Lord Byron, c'est conforme à un roman de Tom Wolfe, ça plait ces histoires d’ascension suivies de chutes et de rédemption. 

Et puis en même temps que l'on fait son autocritique, on convie les autres à réfléchir sur eux mêmes, à regarder la poutre qui est dans leurs yeux. C'est cathartique en diable ce genre de déballage pourvu qu'il y ait une once de sincérité à défaut de l'être pleinement. Il fallait jouer l'ogre, celui qui en veut trop, tout le temps ! C'était simple à dire pourtant ! Expliquer qu'on veut toujours plus, qu'on enfle, que tout devient jeu, que la vie devient un Monopoly géant et qu'à la fin, ce n'est même pas pour frauder que l'on ouvre son premier compte à l'UBS mais simplement parce que c'est dans la droite ligne de a voie qu'on a suivie, qu'on joue comme les autres, qu'on se sent grisé par tout cela et qu'on perd le sens du réel. Il fallait expliquer que le coup du compte à l'UBS c'était un peu comme une partie de poker, un truc qui nous grise sans en envisager réellement les conséquences morales. 

Sincèrement à ce jeu, un mec comme Depardieu a mieux réussi que Jérôme Cahuzac. Depardieu aura tout fait, jusqu'à pisser dans un avion et à embrasser Poutine et les gens l'aiment toujours. Et Chirac alors, grand escroc devant l'éternel, pour qui les électeurs ont toujours du respect et de l'affection ! Ou encore Tapie qui après avoir tout commis, se permet encore de se balader la tête haute. Je crois que l'énorme faute de Cahuzac, ce n'est pas d'être ce qu'il est, c'est d'avoir voulu le dissimuler, d'avoir voulu se mentir à lui-même. Cahuzac n'avait pas les épaules assez larges pour assumer sa personnalité ; il y a du fake en lui et c'est le drame.

Je pense qu'il faut mieux passer pour un goinfre qui doit parfois assumer les défauts de ses qualités que pour un type mesuré qui a failli une fois, une seule. Cette technique donne l'image du petit comptable qu'on chope les maisn dans la caisse pour assouvir un petit vice secret. C'est merdique et peu crédible quand on est Cahuzac.

Sincèrement, mes deux acolytes et moi, on aurait mieux fait en termes de communication de crise. en un heure à gnalder à une terrasse, on avait déjà saisi le personnage et bâti un beau scénario avec lequel il serait sorti la tête haute.

Ce n'est pas en parlant de part d'ombre comme un violeur tenterait d'expliquer ses pulsions salaces à un psy qu'on peut s'en sortir avec honneur. Parfois il suffit juste d'assumer ce qu'on est en expliquant que cela conduit à des excès. Et que l'on peut à la fois être honnête et malhonnête comme ces bandits corses qui n'hésitent pas à faire des casses tout en étant des fils irréprochables.

C'est cela la dualité de l'individu, cette ambivalence qui fait que le pire des salauds peut nous émouvoir et le meilleur des hommes nous ennnuyer. Je ne félicite vraiment pas les communicateurs de Cahuzac. La prestation était merdique.

L'homme est une corde tendue entre la bête et le surhumain - une corde au-dessus d'un abîme.
Frederic Nietzsche