Où je joue mon Dr House !
Vendredi, c'est mon jour de congé, mon jour off, comme on dit maintenant, celui où je ne fais rien du tout. C'est à dire que je me lève tard, qu'ensuite je vais déjeuner dans ma brasserie habituelle avec les mêmes gens, avant d'en revenir après avoir bien mangé et bien bu pour m'affaler sur mon canapé afin d'entamer une sieste. Bon, parfois j'en profite pour faire de menues emplettes ou pour aller déposer mes chèques à la banque, voire faire d'autres menues besognes. Par exemple, je dois aller faire le parallélisme de ma Jaguar, même qu'on m'a dit de ne confier l'opération qu'à Fernand, parce que c'est le roi de la géométrie et qu'il vous règle ça pile-poil. Mais c'est rare queje fasse quelque chose de vraiment constructif, parce que le vendredi j'aime ne rien faire du tout !
Justement c'est vendredi que j'ai reçu le jeune S. Il m'avait appelé mardi mais comme j'étais complet, je lui ai dit de me rappeler vendredi afin de prendre un rendez-vous. Parce que le vendredi matin, je peaufine aussi mon emploi du temps et je rappelle tous ceux que je n'ai pas eu le temps d'appeler avant.
Alors manifestement, ça semblait urgent parce qu'au téléphone, le jeune S n'en menait pas large, il angoissait terriblement. Comme je n'aime pas voir souffrir les gens et qu'il m'était adressé par un bon pote médecin, je lui ai dit de passer vendredi en fin de journée. Ça me permettait de bien manger, de picoler comme je voulais tout en faisant ma sieste, de manière à être frais et dispos en fin de journée.
Alors le jeune S s'est pointé, a sonné et je lui ai ouvert. Le type avait mon format mais en plus grand et j'ai trouvé ça bien parce que parfois ça fait du bien de recevoir des mecs qui ne sont pas des hipsters avec des slims en taille 34. Il m'a serré la main et je l'ai précédé dans mon cabinet, chez moi, dans ma maison, où j'avais fait un peu de rangement cinq minutes avant pour qu'il n'ait pas l'impression de débarquer chez un mec atteint du syndrome de Diogène.
Il s'est assis, a refusé le thé ou le café que je lui proposais mais moi je m'en suis fait un (de café, vu que j'ai une Nespresso dans mon bureau). Et nous avons commencé à papoter. Comme il était anxieux et qu'il me décrivait les symptômes, j'ai écouté la litanie que je connais par cœur. Et quand il a fini, je lui ai demandé ce qu'il avait comme problème dans sa vie. Alors il a commencé à me parler du divorce de ses parents, dix ans avant. J'ai recentré le débat sur le ici et maintenant parce que l'anxiété, comme je lui ai expliqué, c'est toujours actuel. Ça puise parfois ses racines dans le passé mais ça concerne toujours des trucs actuels. Alors le divorce de ses parents même si je trouvais ça triste, je m'en tapais un peu.
Lui, il m'a dit que ma consœur du CMPP était passionnée depuis trois semaines par ce divorce et même qu'elle l'écoutait sans rien dire en ponctuant juste leur conversation de "hmmm" et de "poursuivez". Je lui ai alors expliqué qu'il se pouvait qu'elle soit de formation psychanalytique vu qu'en France, il en reste plein mais que moi, ce n'était pas mon truc. Il fait "ah ok" et j'ai compris que de toute manière la psychanalyse n'était pas son truc, qu'il savait à peine ce que c'était et que pour lui, un(e) psy c'était juste une personne qui pouvait l'aider à aller mieux.
Alors une fois qu'il ait cessé de me parler du divorce de ses parents dont je me tapais dans le cadre de la crise d'angoisse qu'il avait faite trois semaines avant et qu'il angoissait de revivre, on a pu parler de son présent. Manifestement, ses études se passaient bien, il avait une copine adorable et un avenir rose s'ouvrait à lui, vu qu'il étudiait l'informatique et que c'est une formation qui recrute plus que euh, journaliste par exemple !
Bon comme tout allait bien, je me suis demandé quel stresseur avait pu le mettre dans cet état alors on a parlé des produits classiques comme l'alcool et la came. Ben non, le jeune S était sage comme une image. Il m'a avoué ne pas avoir pris une mine depuis des années et même boire raisonnablement et ne pas avoir fumé un bédo depuis au moins cinq ans parce qu'il trouvait que cela lui faisait du mal. Bon, moi je lui ai reposé la question en lui expliquant que je n'étais ni de la police et encore moins le père-la-morale et qu'il fallait tout me dire. Mais bon, il n'a pas démordu et m'a dit avoir une vie plutôt saine et ne toucher à rien que ce soit du cannabis, de la coke, de l'héro, de la met' et j'en passe !
J'ai poursuivi en lui demandant s'il n'avait pas une allergie connue à quelque chose qu'il aurait pu manger par mégarde mais il n'avait aucun terrain allergique, que ce soit aux arachides ou aux chats ou à n'importe quoi. Mais bon, comme l'anxiété est toujours un phénomène actuel soit d'origine psychologique, soit physiologique, je me suis dit qu'il avait un truc. Comme il venait de la part d'un pote médecin sympa, je me doutait que le mec aurait vérifié les trucs classiques.
Alors je lui ai demandé ce qui s'était passé voici trois semaines. Et là, il m'a dit qu'il était allé voir un autre médecin parce qu'il avait une rhinopharyngite. Bon, déjà j'ai dressé le profil sommaire du garçon immédiatement, parce que le mec qui emploie le terme "rhinopharyngite" plutôt que "rhume" et qui court chez un médecin pour si peu de choses, est sans doute déjà une petite flipette à tendance hypocondriaque.
J'imagine qu'il a surjoué ses symptômes du genre : oh docteur, aidez moi, je vais mourir, mon petit nez coule tout le temps et mes sinus sont pris, je vais mouriiiiiiir ! Et effectivement c'est ce qu'il a dit à son médecin, une femme qui ne le connaissait pas, et qui a décidé de lui donner du Solupred, un truc à base de cortisone de synthèse, que l'on file parfois pour décongestionner les sinus (entre autres).
Et le problème c'est que parfois, la cortisone a pour effet indésirables (parmi un paquet d'effets indésirables) l'augmentation du rythme cardiaque. Alors mon pépère, déjà hypocondriaque, se demandant s'il ne va pas déjà mourir de son rhume, a senti son petit cœur battre et battre encore et encore, et il en a déduit qu'il faisait certainement une crise cardiaque.
En même temps, qu'il réalisait que son petit cœur allait le lâcher bientôt, son angoisse est montée, et le rythme cardiaque s'est encore accéléré, ou du moins il s'est focalisé dessus jusqu'à ne plus rien percevoir d'autre que les battements qui devaient résonner dans ses petites oreilles, et il s'est dit que c'était sur, qu'il allait mourir comme ça, à vingt-trois ans. Bon, sans rien demander à personne, il a arrêté le Solupred et tous les médicaments qu'on lui avait donnés. Il a courur chez ma consoeur du CMPP.
Puis, voyant que rien n'allait mieux, bien au contraire, il a repris un rendez vous chez le médecin qu'il connaissait (mon pote), lequel n'ayant pas été au courant du traitement donné mais ayant constaté que le jeune homme était un peu angoissé de nature, me l'a juste envoyé.
En même temps, qu'il réalisait que son petit cœur allait le lâcher bientôt, son angoisse est montée, et le rythme cardiaque s'est encore accéléré, ou du moins il s'est focalisé dessus jusqu'à ne plus rien percevoir d'autre que les battements qui devaient résonner dans ses petites oreilles, et il s'est dit que c'était sur, qu'il allait mourir comme ça, à vingt-trois ans. Bon, sans rien demander à personne, il a arrêté le Solupred et tous les médicaments qu'on lui avait donnés. Il a courur chez ma consoeur du CMPP.
Puis, voyant que rien n'allait mieux, bien au contraire, il a repris un rendez vous chez le médecin qu'il connaissait (mon pote), lequel n'ayant pas été au courant du traitement donné mais ayant constaté que le jeune homme était un peu angoissé de nature, me l'a juste envoyé.
Alors le jeune S m'a demandé ce qu'il avait et je lui ai expliqué qu'à cause de la cortisone, son rythme cardiaque avait augmenté mais qu'au lieu de regarder sur Google en tapant juste "solupred crise d'angoisse" pour avoir la solution, il avait cru qu'il faisait une crise cardiaque et que depuis il était anxieux à l'idée de mourir.
Bref, il était anxieux à l'idée d'avoir une crise d'angoisse. Je lui ai dit de voir avec son médecin et de lui expliquer à l'avenir que la cortisone n'était peut-être pas son truc et que tout rentrerait dans l'ordre. Je lui ai aussi dit que de retour chez lui, il pourrait regarder sur Internet et que son problème était fréquent et à priori pas grave du tout.
Bref, il était anxieux à l'idée d'avoir une crise d'angoisse. Je lui ai dit de voir avec son médecin et de lui expliquer à l'avenir que la cortisone n'était peut-être pas son truc et que tout rentrerait dans l'ordre. Je lui ai aussi dit que de retour chez lui, il pourrait regarder sur Internet et que son problème était fréquent et à priori pas grave du tout.
Il m'a payé et deux heures après, il m'a envoyé un SMS en me disant "c'est fou, vous aviez raison, c'est le Solupred, je n'ai plus d'angoisses merci". Bon j'ai évité de lui dire que j'avais toujours raison ou la plupart du temps car ma modestie m'incite à penser que je peux faire des erreurs, parfois.
Mais le fond du problème c'est que l'angoisse, c'est toujours actuel et qu'il ne faut pas chercher les causes dans le passé, même si des origines existent.
5 Comments:
rondement mené de mains de maitre!
que des dire des CMPP que j'ai "trop" pratiqué avec mon fils ainé? il était alors petit garçon de 4 ans, que l'on faisait dessiner pendant une heure, sans qu'il ne se passe rien de plus pour lui (ils sont passés à côté de sa très forte dyslexie!), jusqu'au jour où je l'ai vu débouler dans la salle d'attente en me disant "c'est bon, on peut y aller, j'ai fini de dessiner"... il avait demandé à la psy s'il pouvait aller faire pipi pour fuir le grand tableau vert et les craies... elle a donc attendu le retour de son petit patient, qui venait comme un grand, de mettre fin aux séances de psy! alors les CMPP....
Rien à voir avec le sujet mais je voulais simplement vous remercier. je me suis perdu sur le eb en cherchant des informations sur l'homme qui veut du bien à l'humanité : Claude Got, et je suis tombé sur votre blog. J'ai pu ainsi écouté avec plaisir kashmir de led Zeppelin.Un petit bonheur. merci.
Bonsoir,
Je suis une affreuse gauchiste et je suis tombée sur vote site en tapant " le syndrome de peter pan" , j'ai aimé votre article, j'ai lu plusieurs de vos articles et j'ai souvent été amusée, mon mari me dit que c'est normal car finalement je suis une fille de droite refoulée...cela explique donc cela...ceci dit j'ai été refroidie par l'article sur lou reed puis sur sas...(beurk ! j'oublie...après tout c'est normal de ne pas avoir les mêmes goûts..!). J'aime aussi les polars, je vous lis depuis septembre et je m'amuse à vous imaginer, quel âge pouvez-vous avoir ????? entre 45 et 65 ans ???? parfois vous êtes jeunes dés fois super vieux, cela m'amuse...Je suis aussi celle qui a fait revivre le site du lapin jaune !!!! Franchement il n'a pas fait long feu par rapport à vous !Rien ne sert d'imiter le maître....Bon au final j'arrête de délirer, je vous écris j'ai besoin de vous ! Pourvez-vous écrire un article sur les psychorigides, je dois en manager une et franchement je suis dans l'impasse, comment lui dire qu'elle est frappadingue ?????? Bref au delà de la plaisanterie, je finis par souffrir de cette situation même si j'ai un égo suffisamment développé, mais au bout de 4 ans de pratique je pête un peu un cable....Bon baiser de bretagne,
Bonsoir,
Je vous ai envoyé un commentaire, merci de ne pas faire apparaitre mon nom de famille SVP..Je suis une novice sur les commentaires de blogs, je ne sais pas bien comment cela marche je n'avais pas envie de me créer une fausse adresse tout cela pour vous écrire un petit commentaire.
En tout cas toujours très intéressée sur un article sur le thème cité dans mon commentaire précédent.
Bonne nuit,
Chantal
Très intéressant et divertissant votre article! Est-ce qu'on pourra avoir droit svp à un article sur l'anxiété chronique, ses symptômes, signes, conséquences, etc? J'ai bien peur que j'en souffre suite à un article que j'ai lu. D'avance merci.
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