19 février, 2007

La psychologie est-elle unique ?

Dans le message précédent, j’avais prévenu que j’allais faire du racolage pour faire remonter le nombre de lecteurs. D’ailleurs, certains d’entre vous, auront été étonnés de voir la prothèse d’Heather Mills, en photo à la fin de cet article. Il est certain, qu’animer un blog parlant de psycho, en faisant figurer une photo de prothèse relève du tour de force. Mais rassurez-vous, bientôt vous comprendrez les raisons de cette image.

Donc, plutôt que de bassement racoler, en faisant du sensationnalisme, je préfère aujourd’hui vous livrer le fruit de mes réflexions dans un article de fond traitant de psychologie. Voici peu de temps, j’avais imaginé qu’il puisse exister, trois types de psychothérapies, l’une médicale, la seconde d’inspiration philosophique ou humaniste, et la troisième consistant en pratiques magiques recyclées habilement en démarche pseudo-scientifique, realité que l'on nie en tendant à amalgamer ces trois formes une seule.

Alors, si trois types de thérapies existent, peut-on affirmer qu’il existerait en face, trois types de psychologies. A mon sens oui. Pourquoi ? C’est fort simple.

L’axiome de base est que la psychologie est la digne fille de la biologie et de la philosophie et qu’elle intéresse un grand nombre de personnes.

La psychologie est fille de la biologie, en ce sens, qu’il apparaît aujourd’hui impossible, d’envisager l’approche du comportement d’un individu, en oblitérant la réalité physiologique. Dès l’antiquité, on a tenté de classer les individus en fonction de leurs caractères, que l’on imaginait liés à une constitution physique prédisposante. Si les antidépresseurs et les anxiolytiques fonctionnent, c’est parce que l’on a pu identifier des neurotransmetteurs et neurorécepteurs, responsables du mal-être par exemple. En ce sens, tout comportement a une base biologique et intéressera donc la médecine. La psychologie américaine par exemple, beaucoup plus scientifique que celle qui fut longtemps enseignée en France, se distingue beaucoup par les recherches de laboratoire, qu’elle a pu engendrer. On connaît ainsi, les travaux de Watson ou Skinner, sur le comportementalisme. Le but de cette psychologie scientifique est de chercher si les bases de comportements ou d’émotions posant problème n’auraient pas une origine purement scientifique objective, que l’on pourrait par la suite traiter soit par chimiothérapie, soit par une rééducation.

La psychologie est aussi fille de la philosophie et on peut imaginer que bien des textes de l’antiquité, préfigurent ce que sont aujourd’hui nos thérapies. Les individus pouvaient avoir le choix entre différentes écoles, présentant chacune un modèle, et donc des présupposés stricts, permettant à l’apprenti philosophe de mieux vivre. Cette tradition s’est toujours perpétuée, tant et si bien qu’aujourd’hui, certains philosophes peuvent se réclamer de tel ou tel auteur, selon qu’ils ont été influencés par une pensée. Cette conception psychologique de la philosophie, amènera même Wittgenstein, philosophe autrichien, à imaginer que la philosophie était une aide pratique pour mieux vivre comme un lavement qui part une fois son effet produit. Dans cette tradition, on imagine que parce que l’on ne pourra jamais connaître tous les ressorts de l’être humain, et chaque auteur interprète le monde selon sa propre sensibilité.

La frontière entre ces deux types de psychologie n’est pas toujours facile à tracer. D’ailleurs bien des personnes possèdent une double compétence, afin d’être autant à l’aise dans l’une que dans l’autre. Certains philosophes, tel Hobbes (portrait en haut de l'article) dans le Léviathan, ont longuement discouru de l’idée de nature et de l’idée de culture. Le marquis de Sade reprendra à son compte, cette controverse dans la troisième partie de la Philosophie dans le boudoir, prouvant que science et philosophie, sont souvent inextricablement mêlées. Mais, les philosophies antiques, elles-mêmes, proposaient un enseignement dans lequel la science n'était jamais absent.

Enfin, la psychologie intéressant beaucoup de monde, il est évident qu’un certains nombres de personnes n’auront pas les connaissances suffisantes pou appréhender les deux systèmes précités. Dès lors, soit que leur formation de base soit insuffisante, soit qu’elles souhaitent s’épargner les efforts nécessaires pour appréhender la médecine ou la philosophie de manière sérieuse, ces personnes se contenteront souvent d’ersatz qu’elles trouveront dans des magazines (Elle, Femme actuelle, Biba, Psychologie Magazine, etc.) ou des ouvrages de vulgarisation aux titres racoleurs (Réussir ses histoires d’amour à coup sûr, Apprendre à dire non, etc.). Nous sommes là aux marges de la psychologie, car cela y ressemble mais ce n’en est pas. C’est juste une bouillie parfois digeste parfois non, qui n’a pas vocation à répondre à des troubles importants mais à de petites difficultés existentielle. Il est normal que cela existe. Heureusement que tout un chacun ne court pas chez un psychiatre, ou ne se plonge pas dans Hegel, pour un rien !

Finalement, tout irait bien dans le meilleur des mondes si les adeptes de ces trois formes de psychologie, ne tentaient pas régulièrement d’empiéter sur le territoire des autres.

Les scientifiques adeptes d’une psychologie de laboratoire, envisagent qu’il est possible de tout guérir via la rééducation ou la chimiothérapie ou le respect de règles. Face à eux, l’individu perd sa singularité, son âme, pour devenir un rat de laboratoire que l’on va tenter de faire vivre longtemps et en bonne santé. Alors certes, l’intention est louable mais elle confine en définitive à une assignation à résidence, dans laquelle l’individu est pris en otage, normalisé et vidé de sa singularité. Adeptes de ce qu’on peut objectiver, le scientifique vantera les méthodes qui ont fait leur preuves, oubliant que certains individus, ne fonctionnant pas comme lui, se moque bien des preuves, mais cherchera son chemin dans des chemins de traverses. Par exemple, il est parfois connu que des maniaco-dépressifs, cessent de prendre leur Lithium, simplement parce que les crises maniaques leurs manquent. C’est une attitude, certes déraisonnables d’un point de vue médical, mais compréhensible d’un point de vue humain. De la même manière, je connais des personnes handicapées heureuses. Dès lors, ne peut-on pas affirmer que le bonheur n'est pas uniquement lié, voire pas lié du tout, à l'état de santé ? Quand on veut traiter de la même manière un comptable stresse, qu’un artiste toxicomane, on finit toujours par dérailler. Quand les médecins ne jouent pas les philosophes, ils sont utiles, sinon ils deviennent vite pénibles.

Les tenants d’une psychologie humaniste ou philosophique ont parfois tendance à ne voir que leur point de vue, en niant le fait médical. Dès lors, ils traiteront toutes les pathologies, à l’aune de leurs schémas philosophiques. C’est ce qui a amené des catastrophes et la déconsidération de la psychanalyse par exemple. Des prises de position ineptes contre les médicaments, une volonté de nier la biologie, amènent ce type de professionnels dans une toute puissance autant ridicule que dommageable. C’est d’autant plus stupide, que la psychologie philosophique ou humaniste, peut parfaitement vivre et prospérer aux côtés de la médecine. Mais lorsque l’on devient dogmatique au point que l’on trouve comme origine de la dyslexie, non une cause biologique, mais le fait que l’enfant aurait assisté à la scène primitive (cf. Dolto), on finit ipso facto, par se couvrir de ridicule pour se discréditer définitivement. Le philosophe jouant les médecins est un apprenti sorcier dangereux.

Enfin, pour conclure, les adeptes de la bouillie psy, en vente dans tous les bons magazines féminins, ne représentent aucun danger, dès lors qu’ils n’interfèrent pas entre des individus ayant de réels problèmes et les praticiens qui peuvent réellement les aider. Je me souviens d’un jour, où une patiente extrêmement déprimée, à qui je recommandais instamment de consulter un médecin pour prendre un antidépresseur, m’avait objecté que c’était dangereux. Quand je lui ai demandé, où elle avait lu cela, elle me répondit que c’était dans Elle, qui avait fait un article sur les dangers du Prozac. Le jour où les magazines en resteront aux histoires d’amour et aux bobos de tous les jours, on pourra aussi respirer.

Trois types de psychologie, trois types de praticiens, avec des publics spécifiques : que chacun reste maître de ses prérogatives, et sache travailler intelligemment avec ses confrères, et nul besoin de loi.