Les filles !

Quentin et Condé : deux époques, deux manières d'être !

Ce soir, j'ai rencontré mes colistiers car demain matin, je fais du tractage. Notre tête de liste étant un redoutable ingénieur, je loue sa probité et son sérieux, mais il semblerait qu'il se noie dans un verre d'eau. Il adore les commissions et les réunions tandis que moi, je déteste cela. J'ai un côté autocrate. J'ai l'habitude de dire que je suis suffisamment inspiré pour trouver toutes les ressources en moi-même. A défaut, j'ai quelques amis de bon conseil.

Donc, je ne suis pas sur que demain matin tout soit prêt. Le tract est assez médiocre, dans le sens où il est bourré d'informations que les gens ne liront sans doute pas. Peu importe, demain matin, je serai fidèle au rendez-vous pour tracter. Si le tract ne satisfait pas mes concitoyens, j'ose espérer que ma tchatche y suppléera !

C'est ainsi que je suis rentré tardivement chez moi. Je m'installe donc avec un plateau préparé par mon épouse, toujours inconsolable depuis la condamnation d'Ivan Colonna, devant la télévision. Je me mets sur TF1 pour regarder la Star Academy.

J'arrive juste pour savoir qui de, Claire-Marie, Antoine ou Sevan, sera exclu de la Star'Ac ! Avouez que c'est une chance inouïe. Autant vous dire que je suis tout cela impavidement, en mâchant bovinement mon diner. Que ce soit Claire-Marie, Antoine ou Sevan qui reste en lice m'importe finalement peu.

Les faveurs du public ayant été à Claire-Marie, c'est entre Antoine et Sevan que les jurés vont devoir choisir: quel suspens ! Brr, j'en tremble encore ! Curieusement, je m'attends à ce que ce soit Antoine qui soit choisi. Je me trompe puisque ce sera Sevan, le fils de Henri Verneuil, qui restera au château, selon la formule concernée.

Mon attention est toutefois mobilisée lorsque le résultat est donné par Pascal Nègre, le défenseur d'un modèle économique périmé qu'on appelle le CD. Il explique que cela été difficile de départager les deux concurrents restant, mais annonce que c'est finalement le petit Antoine qui sortira. Le reste du groupe est sous le choc, ce que je peux comprendre. Au bout de quelques semaines, des liens se sont forcément tissés.

Toutefois, je suis atterré lorsque je vois un concurrent nommé Quentin, âgé de dix-neuf ans, genre beau-gosse séducteur qui se la pète, se jeter dans les bras d'un dénommé Pierre, âgé de vingt-six ans, pour y pleurer à chaudes larmes. Et le susnommé Pierre de l'entourer de ses bras, en lui caressant la tête et le dos, pour le consoler. Sont-ce deux homos ? A priori, si le cas de Pierre reste litigieux, Quentin m'était apparu comme un hétéro de base assez classique.

Ce côté tactile et charnel courant chez les filles m'avait toujours amusé, mais je ne l'avais pas encore observé chez les garçons. La plupart du temps, l'homme sensible, se retient de verser sa larme. Il tente de rester digne, regarde droit devant lui, contracte sa mâchoire et ne dit rien. Et si d'aventure, une larme perle sur sa joue, il invoquera ce putain de soleil qu'il a dans l'oeil, même un jour de pluie. Et d'ailleurs, par peur de pleurer, il préfèrera tourner les choses en dérision.

Aujourd'hui, et vas-y qu'on s'épanche comme des gamines de douze ans ! Où est passée la belle réserve masculine ? En voyant Quentin le bellâtre pleurer, je me disais que je n'étais sans doute pas au courant d'une clause du règlement de la Star'Ac. J'ai alors supposé que le petit Antoine allait au mieux être déporté dans une mine de sel, ou au pire être fusillé de douze balles dans la peau pour avoir perdu.

Ah non ? il rentre juste chez lui ? Il a perdu dans un jeu, c'est tout ? Curieusement, j'ai noté un accroissement de ces jeunes métrosexuels ultraféminisés dans ma clientèle. Très soignés, propres sur eux, piercés, les cheveux plein de gel et leur torse maigre moulé dans de ravissants petits T-shirts, la plupart sont d'ailleurs purement hétérosexuels. Ce qui m'amuse beaucoup, c'est que la demande de consultation est généralement due au fait que leurs histoires d'amour avortent.

L'homme sensible est quelque chose d'appréciable, mais il ne faut pas que la sensibilité soit de la sensiblerie : homme sensible mais homme d'abord. Sinon, les petits gars, les femmes se lassent et finissent par se barrer avec un voyou ! Je demande d'ailleurs le plus souvent à ces jeunes hommes, de s'inscrire à un sport de combat, en même temps qu'ils suivent la thérapie, afin de renouer avec leur virilité disparue.

En 1641, à peine âgé de dix-neuf ans, le grand Condé, était déjà officier de cavalerie émérite et se signala devant le siège d'Arras. Deux ans après, en 1643, tout juste âgé de vingt-et-un ans, à la tête d'une armée, il battait les espagnol à la bataille de Rocroi.

En 2007, âgé de dix-neuf ans, le joli petit Quentin, aussi apprêté qu'une demoiselle se rendant au bal des débutantes, chouine comme une petite fille et pleure à chaudes larmes parce que son camarade de jeu vient d'être exclu et finit par se précipiter dans les bras de son copain. Que deviendra-t-il dans deux ans ? Espérons qu'il ne déprimera pas parce que sa permanente ou sa couleur sont ratées !

Alain Soral avait publié voici quelques années, un ouvrage intitulé "Vers la féminisation ?". Je pense qu'il avait méconnu l'importance des modifications. Il s'agit vraisemblablement d'une fillisation, si vous me pardonnez ce néologisme. Car si l'on est forcé d'admettre que la dignité n'est en aucun cas incompatible avec le fait d'être une femme, on me pardonnera d'affirmer qu'un côté petite fille puisse être pénible.

Mais bon, ce que j'en dis moi ? Hein ! Ca me fait du boulot !

(Note à l'intention de Toju : Non, Condé n'est pas connu pour avoir joué du zurna !)