06 mars, 2008

L'érudition ne suffit pas ! Styles sociaux appliqués !


Quand dans mon dernier article, j'ai osé dire que j'avais trouvé Dany le Rouge excellent, que n'avais-je pas osé dire ! Je n'ai pas vérifié, mais mes petits amis de la réacosphère ont du virer les liens qu'ils avaient collés vers mon blog ! Dans les faits, j'avais trouvé Madelin aussi excellent bien qu'un peu moins bon que Dany, c'est vrai !

Et puis, j'ai osé dire que Finky avait été terne et plutôt nul lors de cette émission. Et même le comparer à un jeune prof débutant qui se fait chahuter. Je pense que l'émission étant encore sur le site de France5, il suffit de constater. Le premier qui me dit qu'il a trouvé Finky éblouissant est vraiment un menteur. Mais bon, ça y est j'étais le renégat, le traître, Philippe le Rose, le mec qui ose dire que Dany le Rouge, l'ennemi absolu a du talent, tandis que Finky, le nouveau pote, était terne et chiant !

Ceci étant dit, il suffit de relire mon article, j'ai admis que ce que disait Finky était intéressant. Mais bon, il n'avait pas le ton pour le dire. L'ambiance était à la grosse déconnade, Dany et Madelin s'en donnaient à coeur joie. Mai 68, c'était du passé, l'un et l'autre ayant plutôt réussi leurs vies, ils avaient pour ce joyeux bordel qui les a vu démarrer le regard attendri du mec qui retrouve la tronche de ses copains de classes sur Copainsdavant, en oubliant tous les mauvais moments qu'ils avaient pu passer. Ce que c'est que la nostalgie tout de même hein ?! La nostalgie, ça repeint à neuf le passé, tout le passé en lui donnant un aspect propre et enchanteur !

Moi, je me suis bien marré et je n'ai pas songé au fond. C'est l'aspect comportemental qui m'a passionné. Voir ces deux anciens "voyous" de Madelin et de Dany parader et pérorer en tirant la couverture à eux tandis que l'honnête Finky sombrait peu à peu, était assez passionnant.

Pour comprendre mon point de vue, lisez ou relisez ce vieil article dans lequel je développe un peu ce qu'on appelle les Styles sociaux. Et hop, je vous recolle le schéma dessous !

Sur ce plateau, il y avait deux types de personnalités. Les premiers exprimant leurs émotions, que l'on dit aussi "tournés vers les autres" : Madelin et Dany ! Madelin est un ancien avocat et un élu qui a même été plusieurs fois ministres. Autant dire que les caméras et les gens ne lui font pas peur. Son métier c'est le show. Dany, lui on ne sait pas bien quelle est sa spécialité mais c'est un histrion de première, un cabot indéniable. Et les seconds contrôlant leurs émotions, que l'on appelle aussi "centrés sur la tâche" : Finky et un obscur député PS. Finky c'est le philosophe, l'érudit, l'agrégé, le prof à polytechnique, tout entier dévoué à la réflexion et au sérieux. Le député PS ? Je ne le connais pas mais en l'observant il semblait taillé sur le même modèle.

Dany et Madelin sont centrés sur les autres, cela se sent. Et ils s'affirment facilement. On les nommera "promouvants". Finky et le député PS, sont centrés sur la tâche et sans doute plus à l'écoute, on les appellera des "analysants". Ce sont des experts.

Mélangez ces deux types de personnalités sur un plateau et vous verrez forcément les promouvants se tailler la part du lion. Pas parce qu'ils sont plus intelligents mais parce qu'ils sont dans leur élément : ils s'affirment et sont centrés sur les autres. Ils sont donc heureux comme des poissons dans l'eau. Les caméras de télévision, c'est leur truc. Et un aussi bon public que ce brave Moati qui rigole de chacune de leur blague, c'est pain-bénit pour eux ! En revanche, dans le silence d'une bibliothèque, ou dans un monastère, ils ne feront pas long feu.

Les analysants ne pouvaient pas tirer leur épingle du jeu, c'était impossible. Le député PS l'a compris rapidement. Il a sorti deux ou trois trucs puis il s'est mis "off". Il n'a plus rien dit laissant les deux agités déconner. En revanche, Finky, sans doute habitué à donner des cours, n'a pas voulu se laisser déborder par le chahut. Il a continué contre vents et marées à parler alors que personne ne l'écoutait, pas même Moati.

Il y a bien eu quelques tentatives pour lui répondre, histoire de faire comprendre qu'il n'était pas venu pour rien, mais l'émission était déjà partie en piqué vers la grosse déconnade. Et Finky, quelques soient ses indéniables talents, n'avait pas celui de récupérer ce perte d'altitude ! S'il avait pris des cours de pilotage, il aurait compris que pour récupérer un piqué, il faut "rendre le manche" et ne jamais le tirer à soi, sous peine d'accélérer la chute ! Manque de pot, le pauvre Finky, a fait le contraire. Le mec intelligent a montré ses limites. Côté com' il a été nul, c'est un fait !

Ceci prouve que le choix des invités sur un plateau est important. Imaginer que l'on va dire quelque chose d'intéressant quand il y a Dany le rouge dans les parages relève de la gageure. Dany va tirer la couverture à lui, comme il a toujours su le faire, et vous serez condamné à être le spectateur de ses élucubrations. Madelin plus doué, et sans doute plus proche en termes de caractère, l'a bien compris. Il aurait pu en mettre plein la tronche à Dany, mais il s'est aligné sur le fil conducteur de l'émission. Pour contrer Dany, il aurait fallu un plus gros calibre que ce pauvre Finky.

J'ai par exemple, le souvenir d'une émission mémorable dans laquelle un type impressionnant a repris les commandes. Malheureusement, je n'ai pas retrouvé de traces de cette émission. C'était un "Ciel mon mardi !" animé par Christophe Dechavanne. Le sujet était le service militaire. Sur le plateau, il y avait un jeune aspirant qui était fier de faire son service national et avait choisi de suivre une PMS.

A ses côtés un glandu, aussi déconneur que Dany le Rouge, avait lui choisi de ne pas le faire. Il avait décidé de se faire réformer en feignant la maladie mentale. On sentait le pur jouisseur. Pas d'explications libertariennes construites qu'on aurait pu comprendre à défaut d'admettre, non, simplement le jeune con de gauche qui n'avait pas envie de se faire chier et qui laissait le sale boulot aux autres. Le toquard déloyal par essence qui pensera toute sa vie qu'un mec droit est un connard. Le roublard, le menteur, le petit con profiteur qui n'a pas d'autre thèse à opposer que son bon plaisir du type "j'fais c'que j'veux d'abord".

Bien sûr, le public de jeunes avait hué l'aspirant et applaudi le godelureau. Et Dechavanne, sentant le vent, avait montré sa nette préférence pour le réformé. En gros, c'était simple. On nous montrait le salaud d'aspirant sans doute affilié au FN tandis que le type qui avait choisi de se faire réformer devenait le mec cool, tendance "génération Mitterrand". Le pauvre aspirant était tout rouge et tout coincé dans son uniforme. Mais..., c'était sans compter sur la présence de l'invité.

Cet invité, je ne me souviens plus de son nom bien qu'à l'époque il ait été très très connu. C'était un vieux sénateur-maire RPR à l'ancienne, un compagnon de la libération, un mec qui avait fait la guerre, une très grande gueule habituée aux fracas des batailles. Pas du tout le mec complexé par ses idées, pas le genre à plier face à une assemblée de petits branleurs et surtout pas face au jeune con qui se vantait de s'être fait réformer. Je me souviendrai toujours du moment où il est monté au créneau. Tout le monde rigolait et l'aspirant était prêt à se rendre.

Ce vieux sénateur-maire avait simplement à peu près dit au type réformé en le tutoyant :

"Tu vois tu fais rigoler tout le monde, tu te vantes et tu fais le malin simplement parce que tu es un mauvais citoyen. Pour moi tu es un nul, un gris nul. Tu te fous de la gueule de ce jeune aspirant. Et pourtant je vais te dire moi j'ai connu l'occupation. Et en ce temps là, les mecs comme toi, ne faisaient rien. Par contre, les mecs comme lui, ce sont eux qui ont eu du courage. Lui, il est comme toi, il serait peut-être mieux chez lui que sous les drapeaux, mais il a choisi de faire son devoir. C'est un mec bien, un mec droit. Et si aujourd'hui, tu ne parles pas allemand c'est parce qu'il y a eu des mecs comme lui qui ont choisi le camp du devoir et non de la lâcheté et de la facilité !"

Il avait été si convaincant, tellement martial, avec sa voix de stentor habituée au commandement et sa belle gueule léonine aux cheveux blancs, que la salle n'avait pas moufté et qu'il avait été applaudi. Le pâle Dechavanne avait plié ses gaules et changé de camp parce qu'il avait compris que sur le plateau, il y avait un seul chef, ce vieux sénateur. Un peu plus et il aurait demandé à la régie de lui envoyer Sambre-et-Meuse en fond sonore ! On avait vu le petit con fondre sur place, diminuer de taille, se faire tout petit, protester misérablement puis se taire, tout rouge tassé dans son coin.

Il fallait une aussi grande gueule que ce vieux sénateur-maire pour faire fermer celle du petit con. Tout discours d'expert à la Finky aurait été nul et non avenu parce que le plateau et la salle n'obéissait plus qu'aux émotions. Le discours n'y avait plus sa place. Pour que le discours reprenne sa place, il fallait un type qui sache le mettre en scène, ressente l'émotion et soit capable de la domestiquer pour la tourner à son avantage. Ce vieux sénateur-maire, parfait promouvant en avait les capacités. Il n'avait pas opposé un discours d'expert. Non, face au fleuret du petit con, il avait sorti son épée à deux mains et lui avait tranché la tête.

Bien souvent un plateau de télévision ou une réunion publique est dominée par les émotions. Dès lors ne s'en sortent que ceux qui les captent et les apprivoisent. Et pour cela les promouvants sont les maîtres absolus. Sachant s'affirmer et étant centrés sur les autres, ce sont des tribuns naturels. C'est leur seul talent. Les arguments, c'est aux analysants de les établir mais après, les promouvants sont rois pour faire passer les idées.

On retrouve toujours ce même schéma dans la profession d'avocat. Dans les disciplines où l'on plaide peu, il faut des experts car on se battra à coups d'arguties juridiques. Les conclusions sont primordiales. Dans le droit pénal où la plaidoirie est essentielle (les conclusions écrites ne sont même pas obligatoires, l'éloquence est reine, c'est le lieu de prédilection des ténors du barreau, des grandes gueules qui savent émouvoir et faire des effets de manche. C'est le royaume des Collard, Vergès et consorts.

Face à un Dany le rouge, il aurait fallu un autre promouvant, dans la veine de ce vieux sénateur-maire pour lui porter l'estocade. Ou à la rigueur un "contrôlant", un type sachant s'affirmer et centré sur la tâche. Cela aurait donné un truc dans le genre du débat entre Jean-Marie Le Pen et Nicolas Sarkozy, au cours duquel la puissance légendaire du vieux breton n'avait rien pu face à l'extrême précision des coups du petit magyar. Ce jour là, Le Pen avait été ridiculisé. A se croire le meilleur et ne pas bosser ses dossiers pour se contenter de rester dans l'imprécation et les idées vagues, il avait trouvé son maître.

A ce titre, il parait que lors de cette même émission de Moati, à l'époque des élections présidentielles, l'invité Olivier Besancenot avait menacé de ne pas venir si Alain Soral était sur le plateau. Besancenot est un promouvant aussi, mais suffisamment intelligent pur savoir qu'un autre promouvant tel que Soral aurait eu raison de lui, et l'aurait trucidé. Il préférait de loin avoir à faire à des opposants un peu "couilles-molles". C'était plus simple à rétamer qu'un sabreur comme Alain Soral.

La moralité de tout cela, c'est que dans un show, émission ou réunion publique, seuls ceux qui sont centrés sur les autres ou s'affirment tireront leur épingle du jeu. La vérité, même si c'est bien triste, n'est pas à l'ordre du jour. Les participants, qu'ils soient assis dans la salle ou bien composés des téléspectateurs épars, forment une sorte d'eggrégore qu'il faut charmer et captiver.

La politique est sans doute une chose très sérieuse. Mais dans sa partie visible, ce n'est que du spectacle. Peu importe l'intérêt de votre texte, si vous l'ânnonez sur scène, les gens s'ennuient et ne vous écoutent plus.

Si les élus étaient forcément les plus intelligents, cela se saurait depuis longtemps. Et quand, dans un commentaire précédent, Robert Marchenoir me dit :

"[...] Pfff. Quelle burne, ce Finky. Il a même pas un attaché de presse ou un conseil en communication. Quel ringard."

Ben oui, à ce niveau de responsabilité, on doit faire attention à ces choses là. Soit on tente d'améliorer sa communication en acquérant de l'humilité et en comprenant qu'être intelligent n'est pas tout. Après tout, même le plus abscons des ouvrages nécessite une mise en page. Soit, on n'en a pas envie, auquel car on sélectionne les émissions auxquelles on assiste afin de ne pas se faire piéger et ridiculiser.

Moi, j'ai regretté la disparition précoce de cher Philippe Muray. Voici un beau promouvant qui serait rentré dans la danse avec entrain et aurait mis une correction à Dany le Rouge. Mais de ce que j'ai vu :

Dany vainqueur incontestable aux points contre Finky. C'est ça la boxe.

6 Comments:

Blogger El Gringo said...

"la puissance légendaire du vieux breton n'avait rien pu face à l'extrême précision des coups du petit magyar"

Dire du bien de Sarkozy aprés Dany-le-rouge, mais tu veux te fâcher avec tout le monde?
Fais attention Philippe, tu finiras seul, sans amis... ;-)

7/3/08 10:14 AM  
Blogger monoi said...

Vous avez vraiment le talent pour expliquer ce que je ressens confusement.

Et puis j'aime beaucoup votre comparaison: "Non, face au fleuret du petit con, il avait sorti son épée à deux mains et lui avait tranché la tête"

Bonne chance pour les elections.

7/3/08 10:45 AM  
Blogger philippe psy said...

Merci Monoi ! Enfin, un commentaire sympa !!! Ca faisait longtemps !

El Gringo, non je ne me fâche pas avec tout le monde. J'aime tout le monde moi !

7/3/08 4:48 PM  
Anonymous Anonyme said...

En d'autres termes:

"Le plus significatif dans toute cette clownerie, c’est bien cette expression envoyée par l’éternel petite bite à Finkielkraut : “Monsieur le professeur”."

"Aveuglé par son propre conformisme, Danny le réac continue à se rejouer les scènes de série B de sa jeunesse et s’imagine que les gens sérieux et tournés vers l’homme, c’est à dire la littérature, réprésentent un tant soit peu le passé."

"N’arrivant pas à saisir que son auditoire d’il y a 40 ans joue aujourd’hui au golf, cherchant à adapter son swing à un ventre proéminent, avant de de discuter doctement dans quelle sicav investir et toute la panoplie du libérale libertaire grisonnant sous viagra, Cohn-Bendit ne voit pas que les moins vieux qui l’écoutent sont pris de violentes nausées devant tant de gras gargarismes qui n’ont de juvéniles que les poussées de décibels et sont aussi érotiques qu’un monologue de de Gaule sous poppers. En un mot : il fait honte. On est gêné pour lui."

"Le personnage médiatique Finkielkraut serait-il la face cachée d’un personnage plus respectable que celui d’invité de plateau télé ? Un personnage excluant tous les autres rôles, l’homme sous le masque pour parler théâtralement ? Oui. Voilà ce qu’il est, je pense, depuis que j’ai écouté ces émissions radios la bibliothèque idéale : un professeur. Un lumineux professeur de littérature."

"Mais comme le mot adéquat manque (maître ? passeur ? ) laissons à Cohn Bendit le soin de se définir lui-même, avec une grande intuition, comme l’étron nihiliste qu’il est en nommant Monsieur le Professeur son strict opposé."

http://ilikeyourstyle.net/index.php/2008/03/07/monsieur-le-professeur/#respond

8/3/08 12:40 PM  
Blogger philippe psy said...

@robert : Tout à fait d'accord. Finky s'est trompé de scène. Ce n'était pas une chaire, juste une scène de théatre pour histrions. Ceci étant dit, Dany est bien trop malin pour ignorer ce qu'ILYS écrit. Il le sait et s'en fout. Lui s'en est sorti. Mai68 l'a lancé, il lui doit cela. Le reste il s'en fout et le dit d'ailleurs.

8/3/08 8:58 PM  
Anonymous Anonyme said...

"Ceci étant dit, Dany est bien trop malin pour ignorer ce qu'ILYS écrit. Il le sait et s'en fout. Lui s'en est sorti. Mai 68 l'a lancé, il lui doit cela. Le reste il s'en fout et le dit d'ailleurs."

Oui, c'est tout à fait cela, Philippe. Et c'est bien cela qui qui me rend absolument furieux, que je trouve absolument insupportable. Cohn-Bendit n'est pas le seul dans ce cas, d'ailleurs.

Je n'avais pas réalisé qu'il le disait, en plus. Ca va bien avec ce genre de personnage.

9/3/08 7:53 PM  

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