20 avril, 2008

Mon analyse !

Carl Gustav Jung !

Jeudi dernier je suis allé déjeuner avec mon psychanalyste. J'ai gardé d'excellents liens avec lui. On se tutoie et on est de bons potes. Parce qu'il faut que je vous dise que j'ai fait une analyse. Comme tout bon psy qui se respecte, je me devais d'avoir fait le tour de ma problématique. J'ai donc couru, alors que j'avais vingt-sept ans, chez un psychanalyste.

Je crois qu'il aura fallu que j'en voie cinq ou six avant de fixer mon choix parce que je suis un peu chiant. Certains étaient malaimables tandis que d'autres n'avaient pas de jolis cabinets. Je me souviens particulièrement d'un type près de la place de la Nation, un vrai freudien, vêtu d'un costume beige, évoluant dans un cabinet lui aussi dans les tons beige ! On aurait dit un caméléon ! Il n'a pas dit un mot, juste des "hmm".

Finalement je suis tombé chez un brave type, psychiatre de profession et psychanalyste à ses heures qui a accepté de me prendre. Deux arguments l'ont emporté. D'une part, il était psychiatre et je préférais cela. Je me suis toujours méfié des psychologues parce que la formation ne m'apparait pas assez élitiste. D'autre part, il avait mal planqué son Figaro ce qui fait que je me suis dit que c'était sympa de voir qu'il y a avait encore des mecs de droite dans ce marigot de rouges qu'est la psychanalyse. Enfin, j'ai trouvé qu'il avait des yeux bleus au regard incisif.

J'ai du être assidu un tout petit plus de deux ans puis un jour, j'ai trouvé que tout cela suffisait et je me suis énervé. Je lui ai répété mot pour mot l'interprétation qu'il avait fait d'un de mes rêves et je lui ai demandé si vraiment il croyait de telles bêtises. Il m'a tenu tête mais comme j'argumentais bien, mon brave analyste m'a avoué que lui, ce qui l'avait sauvé c'était la religion et non la psychanalyse. J'aurais pu m'enfuir de chez ce Tartuffe mais j'ai apprécié sa sincérité et son humanité.

A partir de ce moment là, je suis resté mais, l'on peut dire que je me suis surtout offert des cours particuliers de psychopathologie. Car si mon analyste est sans doute le pire qui soit, c'était par contre un redoutable diagnosticien très fin à l'érudition étonnante. Avec lui, je me suis payé de belles tranches de belle clinique française, datant d'une époque où les médecins savaient encore écrire et n'étaient pas recrutés comme le sont les ingénieurs.

Pourquoi être resté trois années de plus ? Comme je suis un peu crétin et de plus natif du signe du capricorne, je suis pour les solutions carrées. Je m'étais dit qu'une bonne analyse, c'était au moins cinq ans. Qu'à partir de cinq années, on avait fait le tour de son inconscient et qu'on pouvait se targuer d'avoir vraiment fait une analyse. On n'était alors plus un petit joueur, mais au contraire un grand, un vrai, un de ceux qui appartiennent à l'aristocratie parisienne des analysés et qui peuvent regarder les autres de haut en les méprisant un petit peu. De plus, mon analyste avait lui-même fait son analyse auprès d'un ami de Jung, c'est vous dire s'il était balèze et par ricochet moi aussi !

Je suis donc allé cinq années durant, une fois par semaine rendre visite à ce brave homme. J'ai fini par maitriser l'anima, l'animus, l'ombre, bref tous les archétypes jungiens et même toute la psychologie analytique jungienne, tant et si bien qu'une fois diplômé en psychologie, je me suis attelé à me former aux thérapies comportementales et cognitives (TCC). Ce qui prouve bien l'énorme confiance que je place en l'analyse. J'avoue pourtant avoir des tas d'ouvrages de psychanalyse et sans doute tout ce qu'a publié Jung. Ca fait très chic dans mon cabinet. Ca fait mec cultivé et pas sectaire ! Tandis que je défie quiconque de trouver un ouvrage de TCC dans le cabinet d'un psychanalyste !

Mon choix radicalement opposé à l'analyse a beaucoup fait rire mon cher analyste qui commençait à connaitre mon esprit rebelle. Il ne m'en a jamais voulu de ne pas marcher sur ses traces ce qui prouve que j'ai eu raison de lui faire confiance. A défaut d'être le meilleur des psys, je ne me suis pas trompé en le jugeant droit et honnête. Et croyez-moi dans ce milieu, ce n'est pas si courant. J'en ai connu et j'en connais encore des salauds et des pourris qui n'hésitent pas à rançonner leurs patients au nom de la sacro-sainte cure analytique orthodoxe !

Parfois, je crois que mon psy aurait aimé que je fasse un transfert massif sur sa personne mais cela a toujours été impossible. Je l'ai respecté mais delà à faire un transfert, il ne faut pas déconner. Je crois d'ailleurs que le transfert est une chose impossible dans mon cas, je suis bien trop orgueilleux pour cela. Je peux admettre des tas de choses mais pas le transfert. Ce doit être du à mon côté "seul maître après Dieu". Déjà qu'adolescent, je n'ai jamais été fan de quiconque, ce n'était pas pour le devenir une fois devenue adulte d'un analyste ! Bien entendu, des confrères psychanalyste bien intentionnés m'objecteront que mon absence de transfert était en elle-même un transfert ou quelque chose d'approchant ou encore le signe d'un truc très grave. Pourquoi pas ? Je pourrais leur répondre que le transfert n'est pas ma came, parce que je ne suis pas une fiotte, mais à quoi bon ?

Je suis tellement habitué aux divagations des confrères que voici bien des années que je n'y prends plus garde. Ainsi, voici quelques temps, alors que j'allais à une soirée donnée par mon syndicat professionnel, l'un de mes confrères psychanalystes ayant appris que j'offrais le café ou le thé aux patients, s'écria "mais c'est du passage à l'acte !". "Ouh la la, pas beau, vilain", semblait-il s'écrier ! Le passage à l'acte chez les analystes, c'est le truc gravissime par excellence ! Dans sa bouche, cela signifiait qu'il y avait une substitution de ma pensée par l'acte et que par exemple en offrant un café à une patiente, je n'osais affronter l'idée que j'aimerais bien me la taper. Ils ont vraiment l'esprit mal placé. Avec eux, c'est soit du pipi-caca soit carrément du cul ! Le registre est mince et lassant à la longue. On a beau leur dire que parfois, "un cigare n'est rien d'autre qu'un cigare", certains ne veulent pas l'entendre.

Je lui répondis que si pour lui, être gris et sans substance, offrir un café à quelqu'un signifiait que l'on voulait avoir des relations sexuelles avec, pour moi tel n'était pas le cas. Je lui expliquai qu'offrir un café signifiait simplement que j'offrais un café, ce qui est somme toute un acte bénin destiné à accueillir les gens et à favoriser leur bien-être à un moment où ils aimeraient parfois être ailleurs. Il me regarda avec ses gros yeux ronds et ne poursuivit pas la conversation, sentant que je l'aurais envoyé chier avec fracas cette tête de con.

C'est un peu l'avantage de pratiquer les TCC, dans le mesure où les psychanalystes nous détestent cordialement et encore plus depuis la parution du Livre noir de la psychanalyse. On n'est donc pas obligé de s'appuyer leurs logorrhée et on peut les haïr en retour sans éprouver le moindre remord. Le dernier analyse qui ait tenté de m'entretenir des mérites comparés de l'analyse et des TCC, c'était au cours d'une soirée. C'est donc un confrère que j'avais rencontré fortuitement. N'ayant aucune envie de revenir sur ce débat, je lui avais juste répondu qu'il m'emmerdait et qu'il faisait ce qu'il semblait juste et moi aussi, point barre. Il m'avait regardé bizarrement derrière ses culs de bouteilles sans doute désireux de savoir si je n'étais pas un dangereux psychopathe puis s'était éloigné ers des rivages plus cléments.


Je ne regrette pourtant pas cette analyse qui a duré cinq ans, car cela me place aujourd'hui en position de force lorsque j'affirme que l'analyse ne sert à rien. Ce qui, j'en conviens n'est pas très confraternel ni déontologique comme démarche. Mais comme mes chers lecteurs me savent libéral, je rajouterai que les gens font ce qu'il veulent et que s'ils veulent entreprendre une analyse, grand bien leur fasse ! Ce n'est pas mon problème !

2 Comments:

Blogger El Gringo said...

Et ça marche avec les gonzesses le coup de la cafetière?

22/4/08 12:01 AM  
Blogger philippe psy said...

Le thé c'est mieux, tu passes pour un mec délicat, tu trompes ton monde ! Le coup de gnôle est à exclure !

23/4/08 12:21 AM  

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