14 septembre, 2009

Vieux jeunes !


Né sous le signe du capricorne, j'ai la grande chance de ne jamais avoir été jeune. Donc, plus le temps passe, mieux je suis. Les autres changent : moi non, je reste à peu près le même. Certes j'enregistre des expériences mais bon, j'étais déjà tellement effroyablement lucide et pessimiste dans mon jeune âge que rien ne me surprend vraiment aujourd'hui. D'ailleurs, les jeunes s'entendent généralement bien avec moi. Je ne joue pas le copain, pas plus que je profite du fait que je pourrais être leur père pour les dominer.

Jeune, alors que j'étais déjà vieux, je détestais déjà ces types qui abusaient d'une prétendue autorité que leur aurait donné leur âge pour tenter de me dominer. Ces types prétendaient m'expliquer ce qu'était la vie. Je me sentais déjà aussi vieux qu'eux si ce n'est plus. Et j'ai toujours songé qu'un con qui avait vécu le double de moi, n'avait rien à m'apprendre. Non, décidément leur âge n'avait pas d'autorité sur moi. Je détestais tout autant ces vieux tentant de copiner en tentant d'abolir la frontière des ans.

Je me souviens de ces profs, rares heureusement, qui voulaient qu'on les tutoie ! Quelle horreur que d'être obligé de tutoyer et d'appeler par son prénom un type qui avait l'âge d'être mon père. Je me souviens d'un prof d'histoire-géo qui était la sosie parfait de Kadhafi et qui voulait qu'on l'appelle Jean-Claude. Je me souviens encore de lui, quand il passait dans les couloirs du lycée, avec son gros sourire faux sur sa face grêlée de cicatrices d'acné. Il me détestait parce que je n'y arrivais pas. Pour moi, c'était "monsieur", point barre. Simplement un type qui un jour ou l'autre devrait me juger et me noter, mais certainement pas un copain.


En revanche, je m'amuse à regarder ces vieux jeunes, ces gens de mon âge qui ne veulent pas vieillir et tentent à grands coups d'artifices de se prémunir contre les ravages de l'âge. Si les femmes peuvent me toucher avec leur côté de vieille poupée, les hommes m'ennuient. Quelle horreur de voir ces corps bronzés de retour de vacances. Ces crétins qui affichent quarante cinq ans au compteur et qui se vautrent aux terrasses, le torse moulé dans des t-shirts ridicules, affichant un air victorieux.

Leurs vêtements mêmes m'ennuient. Eux se croient habillés comme des jeunes alors que tout ce qu'ils portent n'est que produit par des marques chargées de créer de toutes pièces des lignes pour faux jeunes. Hélas pour eux, les vrais jeunes, ceux qui ont vingt ans aujourd'hui ne s'habillent pas comme cela !

Ces vieux crétins frappés de jeunisme et de régression, ne comprennent pas que passé un certain âge, on ne s'adapte plus. Alors, ils ont poussé leur période post-adolescente jusqu'à trente ans, trente cinq ans pour les meilleurs et ils se sont arrêtés. Fringués comme des teenagers des années quatre-vingt-dix, ils regardent le monde en conquérants tandis que les vrais jeunes les regardent interloqués et vaguement gênés.

Ça doit être si gênant pour un vrai jeune d'avoir un père qui copine, tente de fumer un pétard avec vous et discute avec vos copines comme s'il était sûr de leur plaire, alors que les petites donzelles de vingt ans n'ont rien à faire de ce vieux con. Garder de telles illusions quand on a quarante-cinq ans, c'est pathétique !

Dernièrement, je me baladais au parc de Sceaux avec la chienne de mon père âgée de trois ans. Même si c'est interdit, je lui avais ôté sa laisse, et la laissais se balader librement.

Elle passait régulièrement près de gros corbeaux en train de gratter le sol à la recherche de nourriture. Elle ne les ennuyait même pas. Elle a vieilli et a perdu ses illusions. Elle sait qu'un oiseau décollera toujours plus vite qu'elle ne court. Elle ne se donne même plus la peine de dépenser de l'énergie à les poursuivre.

Cela me faisait drôle de voir qu'une petite chienne de trois ans avait réussi à engranger cette expérience de la vie consistant à comprendre que le réel résiste toujours et que l'on ne fait pas ce que l'on veut, tandis qu'à Paris, je côtoie régulièrement ces adultes pathétiques restant persuadés qu'il suffit d'être bronzé et d'avoir le torse moulé dans un t-shirt grotesque pour avoir l'air jeune.

4 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Il avait les cheveux aussi sales que Kadhafi ? Le seul chef d'Etat qui a décidé d'insulter en permanence le syndicat des fabricants de shampoing ?

15/9/09 9:35 PM  
Blogger Sylvain JUTTEAU said...

Un peu d'étalage de culture :

L'image, c'est Cronos dévorant ses enfants, peint par Goya.

Ceusses qui veulent Googler "Cronos", et "Goya", y peuvent. Et comme ça y rajouteront des trucs très sérieux.

MDR MDR MDR

16/9/09 6:10 PM  
Blogger claudia13013 said...

Quelle utopie de vouloir avoir l'air jeune… Surtout quand on sait que les jeunes sont presque sans intérêt (si ce n'est de se souvenir de temps en temps que l'on a été aussi ignorants qu'eux) : pourquoi vouloir leur ressembler puisque lorsqu'on on l'a été, on s'est dépêché, par toutes sortes d'artifices, de paraître plus vieux.

Bien sûr, prendre soin de sa silhouette, de son hygiène corporelle, de sa tenue vestimentaire, est un minimum pour le respect que l'on doit à soi-même mais aussi aux autres.

Cependant tenter un travestissement intergénérationnel est une aberration dans laquelle une majorité de nos concitoyens sombrent le plus souvent, influencés par les médias de toutes sortes : "Surtout ne pas vieillir" semble être le but poursuivi aujourd'hui.


Michel Desbastides disait avec sagesse “Dans la glace du cabinet de toilette, la dictée du visage, et chaque matin les mêmes fautes d’orthographe”.

Ce miroir-là nous donne accès à notre double et nous offre tout simplement la dernière version à jour de notre visage.

Mais nous savons pertinemment, que notre identité change sans cesse derrière le visage et seule l’altérité (les rides par exemple en sont les fautes d’orthographe) démasque et tranche.

Nous passons du temps à en effacer les marques mais ce n'est que de la surface.

Quand on aime vraiment, on les oublie tout comme on ignore celles de l'être aimé… Alors aimons-nous déjà nous-même avant de vouloir être aimé pour ce que nous paraissons. On n'arrête pas l'horloge du temps.

17/9/09 5:34 PM  
Blogger Unknown said...

Bonjour,
Est-ce un texte "sincère" ou ironique.
En tout cas je peux dire que je n'ai jamais aimé avoir un look jeune et que cela m'a valu un grand isolement jusqu'à l'âge de 40 ans. Ayant tout compris, à savoir que je n'étais pas fait pour être "jeune", à ce moment là, je me suis enfin découvert. Et jamais je ne me suis senti aussi bien.
Comment continuer à correspondre sur ce thème? J'ai 53 ans. Frédéric

26/12/13 8:41 AM  

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