La honte !
Ainsi, l'une des émotions la plus infamante et dure à vivre est-elle la honte. La honte est une émotion mixte, c'est-à-dire un mélange d'émotions simples (peur, colère, tristesse) et de sentiments (impuissance, rage retenue, désespoir triste, vide...).
Il s'agit d'une émotion plus archaïque que la culpabilité car elle est souvent moins verbale et plus sensorielle que cette dernière. Elle se manifeste émotionnellement (gêne, malaise, peur,...ou exubérance, agressivité, etc.), corporellement (yeux baissés, tête basse, rougissement, etc.), cognitivement (discours interne dévalorisant ou agressif) et comportementalement (inhibition, paralysie, etc.).
Je crois que c'est exactement ce que ressentent mes passagers lorsque je les emmène en RJ49. Pourtant le sentiment de honte possède beaucoup de points positifs en ce sens que cette émotion est une grande régulatrice des comportements sociaux.
Ainsi, les aspects positifs de la honte sont de l'ordre de l'éducation et de l'apprentissage de la vie sociale car cette émotion régule les relations sociales. Elle nous protège en nous signalant les bonnes limites à ne pas dépasser. Tous les parents ont dit un jour à leur enfant : "N'as tu pas honte ?". Chacun se souvient de la publicité "Tu t'es vu quand t'as bu !" dans laquelle c'est la honte qui a été choisie pour réguler socialement la consommation d'alcool. La honte est donc un outil efficace d'apprentissage des relations sociales.
La honte est positive quand elle limite nos comportements sans altérer notre identité. A petite dose et ponctuellement, la honte nous indique le juste chemin vers le respect des autres et de soi et nous enseigne l'humilité.
Comme toutes les émotions, elle nous informe sur nous, et nous invite à ne nous placer ni en "sous-homme" (soumission, position de victime) ni en "sur-homme"(domination, position de sauveur ou persécuteur). Excès de honte et absence de honte sont préjudiciables. Les personnes qui ne ressentent plus la honte manifestent souvent des comportements arrogants, envahissants, violents qui nuisent à la qualité de la vie sociale. Celles qui en ressent trop sont dans l'anxiété ou la phobie sociale.
Notre société "moderne" à force de ne voir que l'aspect négatif de la honte, en ce qu'elle engendre comme souffrances, a commis une grave erreur. En voulant trop protéger l'individu, elle a renforcé son identité, parvenant à une boursouflure de l'égo, au détriment du "savoir vivre ensemble". La société n'est plus qu'un agrégat atomisé d'individus livrés à leurs caprices personnels où chacun pense qu'il a le droit de faire ce qui lui plait.
En rentrant dans le RER ce soir, j'avisais une jeune morue, pas très jolie, qui écoutait sa musique pourrie, les écouteurs enfoncés dans les oreilles, l'œil bovin, les pieds allongés sur la banquette située en face d'elle. Fut un temps ou en quelques secondes, soit au moyen de regards peu amènes ou encore de réflexions bien senties, cette jeune conne aurait ressenti un sentiment de honte tellement grand qu'elle aurait immédiatement ôté ses pieds de la banquette et n'aurait sans doute jamais recommencé.
On lui aurait juste enseigné que si elle se croyait "cool" et "décomplexée", en réalité son attitude n'était que la manifestation d'un manque d'éducation flagrant aggravé d'une connerie monumentale. Et peut-être que si elle avait osé moufté, on l'aurait sortie à coups de pied au cul puisqu'elle avait encore l'âge d'en prendre. L'effet aurait été bénéfique car le sentiment de honte peut être si puissant qu'il s'engramme parfois définitivement dans le système limbique mettant des limites qu'on ne dépassera plus jamais un peu comme une phobie.
Au lieu de cela, dans une société axée sur le jeunisme, où sous prétexte de ne pas entraver l'exercice de la liberté individuelle et l'épanouissement de ces petits cons, vanté par la mère Dolto, il est "interdit d'interdire", nous avons tous à souffrir de comportements pénibles que des lois de circonstances, aussi idiotes qu'inefficaces tentent d'éradiquer sans succès.
Qu'il s'agisse des "incivilités" pénibles et répétées, ou même du port de la Burqua dont on nous rebat les oreilles actuellement, il n'y a nul besoin de lois de circonstances ou de mesures vexatoires d'exception pour faire en sorte que le corps social reprenne une forme de cohérence. Il suffit juste de remettre à l'honneur le sentiment de honte, sans doute si pénible à vivre, mais tellement efficace pour corriger les excès de narcissisme et d'égo. La honte ne brime pas, elle élague juste les extrêmes.
Mais il est difficile à la fois de hurler sans cesse à la discrimination, de promouvoir le droit à la différence, d'inciter à s'épanouir, d'appeler à se "réaliser" et d'admettre la honte comme élément fédérateur du corps social.
5 Comments:
C'est bien cet article sur la honte, mais pour la sentir ne faut-il pas reconnaître des modèles référents qui se tiennent père, mère, prof etc?
Le gars sur la photo n'a pas honte, par contre si ses parents la voyait je suis sûr qu'ils seraient outrés !
Il a l'air d'en connaitre un bout sur la mécanique le gars de la photo.
Bien outillé en plus. En revanche, la tenue n'est pas conforme règles de sécurité.
Tu devrais inviter le Range Rover à ta prochaine soirée...
Bonjour,
Voilà un p'tit article sur les Prisons :
http://sylvainjutteau.blogspot.com/2009/07/pourquoi-la-prison-francaise-est-un.html
Toju.
J'étais tellement éberluée par la photo que j'ai pas réussi à lire le post....
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