Génie méconnu !
La première fois que j'ai reçu un toxicomane, je n'en avais jamais vu. A part un ou deux fumeurs de chichons et le peu que j'avais appris dans les livres, je ne savais rien de la toxicomanie. Pour moi, l'héroïnomanie conduisait forcément à un destin tragique tel qu'on le présentait dans Moi Christiane F., 13 ans droguée prostituée. En bref, si l'on était une femme, on finissait immanquablement par faire le trottoir en proposant des passes pas chères en arborant un beau sourire orné de chicots noirâtres et déchaussés, et si l'on était un homme on finissait au mieux voleur d'autoradios.
Et oui, souvenez vous des années quatre-vingt et demandez vous combien de Blaupunkt (Cassette auto-reverse et FM s'il vous plait !)ont finis taxés par des toxicos en manque pour être revendus une misère à des fourgues. On avait tous des racks et on planquait les autoradios sous les sièges pour ne pas nous les faire chouraver par un tox en manque ! Maintenant cette époque est révolue, les chaîne laser sont intégrées dans les tableaux de bord et on file enfin de la méthadone et du subutex aux toxicomanes.
Lorsque j'ai débuté, j'ai fait comme tous mes confrères, je suis allé faire de la retape auprès des médecins du quartier. Comme aucun d'eux ne m'attendait, j'ai eu du mal. Il s'en est trouvé deux ou trois pour accepter de me tester en m'envoyant leurs fonds de tiroir, les patients dont personne ne veut : les alcoolos et les toxicos. Je pense avoir obtenu d'excellents résultats même si les alcooliques sont plus difficiles à traiter.
La première fois que j'ai reçu un héroïnomane, c'était une jeune femme avec laquelle j'ai bien accroché. Comme à la vérité je ne connaissais rien de cette addiction, j'ai été très soft. Je me suis dit que si moi je fumais, elle prenait de l'héro tout connement et j'ai considéré son addiction comme une parmi tant d'autres. La seule différence entre la clope et l'héro, c'est que cette dernière vous envoie dans le mur très rapidement.
Ensuite, je me suis demandé pourquoi elle prenait cette merde et j'en ai déduit qu'elle avait besoin d'un filtre entre elle et la réalité parce que cette dernière était sans doute insupportable pour des raisons qu'elle allait m'exposer.
De fil en aiguille, j'ai bâti patiamment mon petit modèle, tranquillemetn en me basant sur ce qu'elle m'expliquait. Au fur et à mesure que les toxicos débarquaient dans monc abient, j'affinais ma perception du problème. Tant et si bien qu'au cinquantième, je pense avoir fini par posséder une connaissance importante du problème.
J'ai toujours été cool, m'abstenant de juger leurs pratiques et je crois que mon attitude leur a plu. De plus, j'ai souvent été félicité parce que je fumais. Sans doute que de nos jours un psy qui fume dans son cabinet est devenu rare. Mais pour ces toxicos, damnés des pratiques psychothérapeutiques, mon addiction aux JPS était importante dans la mesure où cela créait un pont entre eux et moi.
Nous partagions une dépendance et même si la mienne était moins grave que la leur, ils ont estimé que je connaissais suffisamment le problème pour être honnête. Effectivement, cela devait les changer des médecins hyper contrôlants n'ayant jamais bu un verre de trop ni même fumé une clope. Pour eux, j'étais un humain et non une sorte d'ingénieur en psychopathologie chargé de les reprogrammer.
J'avais pourtant acheté des livres savants sur le sujet pour me documenter mais je les avais trouvés barbants. Et puis sincèrement si un confrère avait tenté de me débarrasser de mon addiction à la clope en utilisant les techniques décrites dans ces ouvrages, je pense que je l'aurais envoyer se faire foutre très rapidement. Rien de pire quand vous savez que vous déconnez, qu'on vienne encore vous le rappeler !
Durant les deux ou trois premières années, les toxicos ont été une partie importante de ma clientèle. Si je n'ai jamais eu de problèmes avec les héroïnomanes, que je trouve charmants et sensibles pour la plupart, j'avoue avoir eu des problèmes avec les cocaïnomanes. D'ailleurs, je ne suis pas loin de pense, à l'instar des héroïnomanes, que la coke est une came de blaireaux qui rêvent d'être des géants. Mais bon, tout n'est pas rose non plus et ç vue de nez il doit y avoir un cinquième d'héroïnomanes qui sont des sociopathes pour qui on ne pourra jamais rien.
Ma tête fonctionnant bien, j'avais réussi au bout d'une année à me bâtir un modèle assez performant me permettant de prendre en charge ce type de clientèle. Bien entendu, j'avais eu le droit aux remarques acerbes d'un confrère psychanalyste m'expliquant que je ne traitais que les symptômes mais non la cause. C'est leur grand truc aux psychanalystes de dire qu'on ne traite pas la cause. Je l'avais envoyé se faire foutre parce que je n'ai pas de temps à perdre avec des mecs qui utilisent des théories datant des années 1900.
Lutter contre la psychanalyse n'a jamais été mon fort. Je n'y crois pas, je pense que c'est de la daube pour archéo-intellos abonnés au Monde et à Télérama, mais comme je suis libéral, je pense aussi que le soleil brille pour tout le monde. Si les gens veulent consulter un analyste, grand bien leur fasse. Je n'ai pas la vocation de martyr et je n'ai jamais eu envie de vivre ce que vit Michel Onfray en ce moment ni d'avoir Elisabeth Roudinesco et ses amis médiatisés sur le dos. De plus, je crois plus en la neurobiologie qu'en la pensée magique.
Et puis un jour, en lisant un canard spécialisé auquel je suis abonné, j'ai eu la surprise de voir que deux chercheurs venaient de publier un modèle de prise en charge des toxicomanes soit disant révolutionnaire. J'ai lu leur prose et quelle ne fut pas ma surprise de constater que mes intuitions étaient quasiment toutes reprises dans leurs travaux de recherche.
Je me suis senti fier et con à la fois. Fier parce que je me suis dit que pour un mec qui débarquait dans ce truc, la toxicomanie dont tout le monde se gargarisait, armé seulement de sa bite et de son couteau, je m'en étais plutôt bien sorti. Et con, parce que plutôt que les noms de ces deux chercheurs inconnus, c'est le mien qui aurait du figurer en tête du document que je venais de lire.
Et puis, j'ai réfléchi. Glandeur comme je suis, ne vivant que par mes facilités, je me suis dit que je me serais attelé à un travail de rédaction de mon modèle, que tenu en respect avec un flingue sur ma tempe. Il ya des gens faits pour la recherche, des gars sérieux et concentré, et puis il y a les mecs comme moi, qu'un rien ne distrait et qui préfèrent écrire des petits articles rigolos sur leur blog que de travailler sérieusement.
Depuis ce jour, je me suis résigné à n'être qu'un génie méconnu.
Et oui, souvenez vous des années quatre-vingt et demandez vous combien de Blaupunkt (Cassette auto-reverse et FM s'il vous plait !)ont finis taxés par des toxicos en manque pour être revendus une misère à des fourgues. On avait tous des racks et on planquait les autoradios sous les sièges pour ne pas nous les faire chouraver par un tox en manque ! Maintenant cette époque est révolue, les chaîne laser sont intégrées dans les tableaux de bord et on file enfin de la méthadone et du subutex aux toxicomanes.
Lorsque j'ai débuté, j'ai fait comme tous mes confrères, je suis allé faire de la retape auprès des médecins du quartier. Comme aucun d'eux ne m'attendait, j'ai eu du mal. Il s'en est trouvé deux ou trois pour accepter de me tester en m'envoyant leurs fonds de tiroir, les patients dont personne ne veut : les alcoolos et les toxicos. Je pense avoir obtenu d'excellents résultats même si les alcooliques sont plus difficiles à traiter.
La première fois que j'ai reçu un héroïnomane, c'était une jeune femme avec laquelle j'ai bien accroché. Comme à la vérité je ne connaissais rien de cette addiction, j'ai été très soft. Je me suis dit que si moi je fumais, elle prenait de l'héro tout connement et j'ai considéré son addiction comme une parmi tant d'autres. La seule différence entre la clope et l'héro, c'est que cette dernière vous envoie dans le mur très rapidement.
Ensuite, je me suis demandé pourquoi elle prenait cette merde et j'en ai déduit qu'elle avait besoin d'un filtre entre elle et la réalité parce que cette dernière était sans doute insupportable pour des raisons qu'elle allait m'exposer.
De fil en aiguille, j'ai bâti patiamment mon petit modèle, tranquillemetn en me basant sur ce qu'elle m'expliquait. Au fur et à mesure que les toxicos débarquaient dans monc abient, j'affinais ma perception du problème. Tant et si bien qu'au cinquantième, je pense avoir fini par posséder une connaissance importante du problème.
J'ai toujours été cool, m'abstenant de juger leurs pratiques et je crois que mon attitude leur a plu. De plus, j'ai souvent été félicité parce que je fumais. Sans doute que de nos jours un psy qui fume dans son cabinet est devenu rare. Mais pour ces toxicos, damnés des pratiques psychothérapeutiques, mon addiction aux JPS était importante dans la mesure où cela créait un pont entre eux et moi.
Nous partagions une dépendance et même si la mienne était moins grave que la leur, ils ont estimé que je connaissais suffisamment le problème pour être honnête. Effectivement, cela devait les changer des médecins hyper contrôlants n'ayant jamais bu un verre de trop ni même fumé une clope. Pour eux, j'étais un humain et non une sorte d'ingénieur en psychopathologie chargé de les reprogrammer.
J'avais pourtant acheté des livres savants sur le sujet pour me documenter mais je les avais trouvés barbants. Et puis sincèrement si un confrère avait tenté de me débarrasser de mon addiction à la clope en utilisant les techniques décrites dans ces ouvrages, je pense que je l'aurais envoyer se faire foutre très rapidement. Rien de pire quand vous savez que vous déconnez, qu'on vienne encore vous le rappeler !
Durant les deux ou trois premières années, les toxicos ont été une partie importante de ma clientèle. Si je n'ai jamais eu de problèmes avec les héroïnomanes, que je trouve charmants et sensibles pour la plupart, j'avoue avoir eu des problèmes avec les cocaïnomanes. D'ailleurs, je ne suis pas loin de pense, à l'instar des héroïnomanes, que la coke est une came de blaireaux qui rêvent d'être des géants. Mais bon, tout n'est pas rose non plus et ç vue de nez il doit y avoir un cinquième d'héroïnomanes qui sont des sociopathes pour qui on ne pourra jamais rien.
Ma tête fonctionnant bien, j'avais réussi au bout d'une année à me bâtir un modèle assez performant me permettant de prendre en charge ce type de clientèle. Bien entendu, j'avais eu le droit aux remarques acerbes d'un confrère psychanalyste m'expliquant que je ne traitais que les symptômes mais non la cause. C'est leur grand truc aux psychanalystes de dire qu'on ne traite pas la cause. Je l'avais envoyé se faire foutre parce que je n'ai pas de temps à perdre avec des mecs qui utilisent des théories datant des années 1900.
Lutter contre la psychanalyse n'a jamais été mon fort. Je n'y crois pas, je pense que c'est de la daube pour archéo-intellos abonnés au Monde et à Télérama, mais comme je suis libéral, je pense aussi que le soleil brille pour tout le monde. Si les gens veulent consulter un analyste, grand bien leur fasse. Je n'ai pas la vocation de martyr et je n'ai jamais eu envie de vivre ce que vit Michel Onfray en ce moment ni d'avoir Elisabeth Roudinesco et ses amis médiatisés sur le dos. De plus, je crois plus en la neurobiologie qu'en la pensée magique.
Et puis un jour, en lisant un canard spécialisé auquel je suis abonné, j'ai eu la surprise de voir que deux chercheurs venaient de publier un modèle de prise en charge des toxicomanes soit disant révolutionnaire. J'ai lu leur prose et quelle ne fut pas ma surprise de constater que mes intuitions étaient quasiment toutes reprises dans leurs travaux de recherche.
Je me suis senti fier et con à la fois. Fier parce que je me suis dit que pour un mec qui débarquait dans ce truc, la toxicomanie dont tout le monde se gargarisait, armé seulement de sa bite et de son couteau, je m'en étais plutôt bien sorti. Et con, parce que plutôt que les noms de ces deux chercheurs inconnus, c'est le mien qui aurait du figurer en tête du document que je venais de lire.
Et puis, j'ai réfléchi. Glandeur comme je suis, ne vivant que par mes facilités, je me suis dit que je me serais attelé à un travail de rédaction de mon modèle, que tenu en respect avec un flingue sur ma tempe. Il ya des gens faits pour la recherche, des gars sérieux et concentré, et puis il y a les mecs comme moi, qu'un rien ne distrait et qui préfèrent écrire des petits articles rigolos sur leur blog que de travailler sérieusement.
Depuis ce jour, je me suis résigné à n'être qu'un génie méconnu.
2 Comments:
oui mais vous auriez pu publier une méthodologie sur un site internet sans trop vous prendre la tête et en se faisant plaisir du coup....
Félicitations en tout cas. :-)
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