05 juin, 2011

A quoi sert de vivre ? (suite et fin)


La semaine passée, j'ai évoqué le cas de cette patiente qui affirme n'avoir aucune raison de vivre. Certains d'entre vous avaient laissé des commentaires sous l'article et d'autres m'ont écrit afin de me proposer une solution à cette lancinante question : à quoi sert il de vivre ?

Dans les faits, j'y avais réfléchi de mon côté bien entendu et j'étais arrivé à une conclusion assez simple permettant de répondre à cette question en n'y répondant pas. Et puis, j'ai reçu le jeune JC qui lui aussi avait entrepris de résoudre ce problème. Comme il me l'a avoué, il n'a pas voulu mettre un commentaire sous l'article parce qu'il est bien trop réservé. 

Alors nous avons discuté tous les deux et sommes parvenus à la même conclusion. A savoir qu'il est inutile de répondre à la question "pourquoi vit-on" pour avoir enfin de vivre. Le plus simple est de se demander comment l'on vit. Parce que si l'essentiel de sa vie est orienté pour savoir pourquoi l'on est là, il y a peu de chances pour qu'on ait une qualité de vie exceptionnelle. 

Finalement, la réponse au pourquoi se trouve plutôt dans le comment, dans le fait de cesser les vaines réflexions pour passer à l'action.De la même manière que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en vivant enfin que l'on trouve une raison de vivre.

Cela me fait penser à l'apprenti psy que j'avais reçu voici quelques temps et qui ne se jugeait pas prêt à recevoir des patients. Il attendait d'être parfait, persuadé que la relation thérapeutique était un lien dans lequel une sorte de psy tout puissant et omniscient déversait son savoir et sa grande sagesse vers un patient totalement démuni. 

J'avais tenté de lui expliquer qu'il faudrait bien commencer un jour et qu'il était certain qu'il serait sans doute moins bon à trente ans qu'à quarante et ainsi de suite. Il n'avait pas été convaincu, de même qu'il avait du mal à saisir que la relation thérapeutique était une interaction, que cela n'avait rien à voir avec un protocole médical au cours duquel un "expert" donnerait un traitement à un "malade". 

Tout comme cette patiente se demandant pourquoi l'on vit, ce futur confrère attendant d'avoir toutes les réponses à ses questions en imaginant que des ruminations mentales valent réflexion alors qu'elles ne sont que le symptôme d'un état dépressif ou anxieux.

En vérité je vous le dis, moi qui me perdait souvent dans de vaines réflexions, attendant je ne sais quel éclair pour entreprendre, ma vie a changé depuis que j'ai appris à me dire "ta gueule Philippe, tu verras bien".

Nous sommes nés une fois, il n'est pas possible de naître deux fois, et il faut n'être plus pour l'éternité : toi, pourtant, qui n'est pas de demain, tu ajournes ta joie ; la vie périt par le délai, et chacun de nous meurt affairé.
Epicure, Sentence vaticane 14

2 Comments:

Blogger heidi said...

"Ta gueule..., on verra bien".
Ah tiens j'essayerai à l'occasion.

16/6/11 9:33 AM  
Blogger Élie said...

De toute façon, si un sens devait se dégager de notre vie, ce ne serait qu'une fois qu'on l'a vécue, pas en cours de route, de même qu'une œuvre n'a pas de sens tant qu'elle est inachevée, qu'il s'agisse d'un roman, d'une peinture ou d'un film.

Sinon il y a une version soft du " ta gueule, on verra bien", c'est la pleine conscience ; être entièrement à ce qu'on fait pendant qu'on le fait, considérer les pensées juste pour ce qu'elles sont : juste des pensées, des jugements, des opinions, rien de plus et rien de moins. Cela évite moult ruminations aussi inutiles que douloureuses. On ne ressasse pas le passé, on ne se projette pas dans le futur, on reste là où l'on est, même si l'expérience n'est pas forcément agréable.

6/6/18 6:46 PM  

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