19 décembre, 2012

Joyeux anniversaire !


Parfois des choses m'ennuient, notamment lorsque je sais que j'ai la solution mais que cette putain de sacrosainte règle selon laquelle je me doive d'être patient, bienveillant et précautionneux m'oblige à prendre mon temps alors que j'ai la solution toute prête. Quoiqu'il arrive, je me dois de coller un minimum aux standards qu'un patient se fait d'un psy, surtout s'il vient de la part d'un médecin. Je ne peux pas être trop cash ni trop direct, je joue mon rôle, je me suradapte.

Voici peu, disons quelques mois, j'ai reçu un grand gaillard qui a bien des malheurs avec les filles. Plutôt bien de sa personne, très grand ayant de bons diplômes et une situation enviable, voici qu'âgé d'une petite trentaine d'années, il en a marre de la bagatelle mais cherche du sérieux. Or, voici qu'outre certains problèmes, il se trouve que depuis sa dernière histoire sérieuse, il ne semble tomber que sur des femmes sans intérêt. 

Il faut dire qu'il les lève dans des bars tandis que bourré comme un coing, il ne sait même plus a qui il s'adresse vraiment. Il collectionne ainsi, les grandes et les petites, les minces et les grosses, les blondes, brunes ou rousses sans jamais trouver celle qu'il cherche. Il faut dire, qu'il doit attendre que son alcoolémie ait baissé pour estimer à sa juste valeur la fille avec qui il vient de sortir.

On aurait pu en rester là et je ne sais pas ce que j'aurais bien pu lui dire, si ce n'est de multiplier les contacts jusqu'à ce qu'il trouve l'élue de son coeur. Ou bien, qu'il cesse de papillonner partout et se concentre sur celles qui l'intéressent en fixant des critères basiques et surs. Mais surtout, je lui aurais expliqué qu'il était préférable de rencontrer les gens à jeun afin de savoir à qui l'on avait à faire.

Sinon, c'est un type charmant avec lequel je m'entends fort bien. Le prototype même du mec sensible qui est parvenu à canaliser sa sensibilité et qui a suffisamment roulé sa bosse pour enfin chercher quelque chose de sérieux. 

Et le plus amusant, c'est lorsqu'il me décrit la femme de sa vie, sa "came" comme il dit. Elle sera blonde, grande, mais pas maigrichonne façon mannequin mais plutôt bien charpentée. Elle sera dotée d'humour, sera de bonne famille, pratiquera l'équitation, voudra une histoire sérieuse sans toutefois l'enfermer dans un rôle papa-maman un peu gnangnan. De plus, elle ne craque que pour les types très grands et la connaissant parfaitement, je sais que mon patient serait sa "came".

C'est assez étonnant d'écouter ce cahier des charges dans la mesure ou j'ai dans ma clientèle, le modèle qui lui correspondrait. Grande, voire très grande, écuyère chevronnée, de bonne famille, cool et rigolote mais cherchant tout de même une histoire sérieuse et n'ayant que deux ans de moins que lui.

A la longue s'en était rageant parce que les connaissant parfaitement tous les deux, je sais parfaitement qu'ils sont bien assortis. Bon, ma profession n'étant pas de tenir une agence matrimoniale, je ne pouvais rien dire ni faire en principe.

Comme c'est une patiente que je connais fort bien, je me suis amusé à lui dire que je recevais un type parfait pour elle, histoire de la faire enrager. Alors parfois, elle me demande de la recevoir juste après lui. Mais comme ils n'ont pas les mêmes horaires, c'est impossible et puis déontologiquement, je ne me vois pas tendre un piège de la sorte à mon patient. Alors, elle enrage, elle trépigne en se disant que j'ai peut-être la clé qui la délivrera de son célibat. En attendant, elle rame sur les sites de rencontres où elle ne rencontre que du second choix.

Et lorsqu'elle me presse d'organiser une rencontre, je lui réponds que d'une part, ce n'est pas mon métier et qu'enfin, ce patient m'ayant été envoyé par un médecin, je ne peux me montrer aussi libre qu'avec quelqu'un qui serait venu du blog. Je ne me vois pas lui annoncer de but en blanc "vous savez machin, c'est le produit que vous cherchez en stock, vous l'appelez ou c'est elle qui vous contacte ?".

Je lui dit qu'il faut du temps et le moment adéquat pour faire ce genre de choses et qu'il ne faut rien précipiter au risque de tout foutre en l'air. Et puis, il y a encore un peu de boulot à faire, bref, il faut être patient, ce qui est une qualité que cette sagittaire, éduquée en princesse, a du mal à comprendre.

Et j'ai revu depuis mon cher patient, une fois, deux fois puis trois. Et ce jour là, il me refaisait encore les mêmes confidences sur la femme de sa vie qu'il ne rencontrait jamais. Comme à l'accoutumée, parce qu'il ne sait plus qu'aller dans les bars pour rencontrer, il me disait "Philippe, c'est bien simple, je fais de la merde !". Réflexion illustrée pour m'expliquer que malgré toutes ses tentatives pour trouver l'élue de son coeur, aucune de celles qu'il voyait ne semblait lui correspondre.

Et puis, je crois que j'ai été passablement lassé par les récriminations de mon patient. De but en blanc, je lui ai dit que ce qu'il cherchait je l'avais en stock, et que je garantissais le produit, pièces et main d'oeuvre et kilométrage illimité. Il s'est montré intéressé et j'ai du décrire ma chère patiente.

C'est simple, lui ai-je dit, c'est une sorte de valkyrie, toute droit sortie d'un opéra wagnérien. Blonde, tr§ès grande et solidement charpentée, des yeux bleus, vive d'esprit, beaucoup de caractère, bien éduquée, écuyère émérite et tout ce que je pouvais dire d'elle sans trop en dire. Alors là, il a eu l'air intéressé. Surtout quand je lui ai dit que c'était "du lourd" et que sur ce coup, il avait intérêt à être au top parce que ce genre de pouliche, ce n'était pas fait pour les mauvais cavaliers.

Sont venus les aspects pratiques et mon cher patient, se positionnant en homme sensible m'a confié que jamais il n'oserait la contacter. Ce à quoi j'ai répondu que comme il avait à faire à une femme de tête, si il me donnait l'autorisation de donner ses coordonnées, elle l’appellerait sans problème. Il a été enthousiasmé par ma proposition. Je lui ai demandé s'il était sur et certain que je puisse le faire. Il m'a répondu que oui, que c'était murement réfléchi et que même si la démarche était originale, cela l'amusait beaucoup. Je l'ai félicité sur le fait que pour une fois, au lieu de chouiner sur ses malheurs, il ait envie d'agir. Après tout les TCC sont des thérapies de l'action.

Et donc, ni une ni deux, j'ai pris mon Iphone et j'ai envoyé ses coordonnées à ma patiente, en lui souhaitant "bon anniversaire" parce que c'était justement le jour de son anniversaire.

Mon job, c'est le bonheur de l'homme, je ne l'oublie jamais. On verra ce que cela donne. Comme dit la petite Aude Pépin (je n'y peux rien, c'est son nom !) dans le spot publicitaire pour Meetic : "moi je pense que les belles rencontres, elle se font partout mais surtout ailleurs". Alors pourquoi pas via mon cabinet ?

3 Comments:

Blogger Unknown said...

Donc si je vous suis bien, un déséquilibré avec une déséquilibrée ferait un couple équilibré ?

27/12/12 1:53 PM  
Blogger El Gringo said...

Philippe Desachy..? ;-))

27/12/12 3:31 PM  
Blogger V. said...

vu la photo, les chiens feront des chats...
J'aime bien le commentaire de Lulu Belle.

28/12/12 5:24 PM  

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