Calculs macabres !
Comme on a le compteur quotidien des cas diagnostiqués mais aussi des décès, on constate que la mort, celle que l'on avait oubliée à force de la tenir à distance dans les hôpitaux et les EPHAD, se rappelle à nous. Et chacun de regarder fébrilement, si'l y a eu plus ou moins de morts que la veille, et le cas échéant de se demander si la différence est significative ou non.
Bref, on sait que l'eau monte, on attend qu'elle soit à sa cote maximale pour espérer enfin la décrue. Je n'ai cessé de vous le dire, je suis un pessimiste optimiste alors j'essaie de ne pas me laisser contaminer par l'hystérisation de la communication en tentant de garder mon sang-froid. Et croyez moi ce n'est pas facile. J'ai l'impression d'être en train de regarder un film d'épouvante en étant le seul à ne pas croire que c'est réel, tandis que l'ensemble des spectateurs me reprochent de ne pas "être dans le truc".
C'est terrible, j'ai l'impression qu'un truc cloche. Certes le coronavirus est réel mais en même temps j'ai l'impression qu'on en fait trop. Je ne peux me départir de cette impression. L'épidémie ne sera pas aussi mortelle qu'annoncée. Ce qui est en cause, me semble-t-il, c'est l'avalanche des cas au même moment avec l'incapacité des hôpitaux à faire face bien plus que le nombre de décès qu'il y aura finalement.
L'époque a changé. Sans doute qu'en 1958, durant l'épisode de la grippe asiatique comme en 1968, avec la grippe de Hong-Kong, on restait plus prosaïque. On savait qu'en cas d'épidémie un peu sévère, les premiers à partir seraient les vieux et les malades. C'était comme ça, "ils ne passeraient pas l"hiver". On tolérait ce genre de choses, sans doute parce qu'à l'époque subissaient encore des générations pour qui le médecin avait longtemps été le rebouteux du coin et pour qui la médecine moderne était un luxe inouï. Aujourd'hui, la médecine est aussi devenue un confort alors on s'alarme qu'un vieillard ayant dépassé 90 ans décède.
Toujours est-il, et je ne crois pas me tromper, que je pense que le Coronavirus tuera bien moins que prévu. Sans doute précipitera-t-il les choses, au sens ou ceux qui auraient du décéder dans les mois qui viennent décèdent aujourd'hui tandis que d'autres verront leur vie amputée de quelques années qui leur restaient. A ceux-ci s'ajouteront les gens fragiles car immunodéprimés par exemple plus quelques cas incompréhensibles, en l'absence d'une autopsie, de gens jeunes et en bonne santé qui n'auraient pas du mourir.
En écrivant cela, je l'ai déjà dit, j'ai conscience qu'il s'agit de personnes, de gens qui aiment et sont aimés et seront regrettés. Malheureusement l'heure n'est plus à l'évocation des disparus mais au comptage comptable des décès. Et je pense qu'il y aura finalement moins de 30 000 morts au total. C'est beaucoup si on les nomme un par en rappelant leurs noms et leurs vies mais c'est finalement peu au regard de ce que les documents alarmistes annonçaient.
Quelques jours avant le confinement, j'avais eu ce débat avec un ancien patient qui avançait une thèse britannique pour expliquer que ce serait effroyable et que les morts se compteraient en centaines de milliers. Comme je l'avais dit précédemment, même si je n'avais pas compris grand chose à leurs équations savantes, je crois que leur méthodologie laissait à désirer. J'avais donc botté en touche et expliqué à mon ex-patient que je n'y croyais pas. Ces jours derniers, un épidémiologiste britannique est venu apporter de l'eau à mon moulin en expliquant par A plus B et bien mieux que je ne l'aurais fait qu'effectivement cette étude était totalement farfelue.
De la même manière, cet ex-patient ne cessait de clamer que nous vivrions ce que vivaient les italiens avec une semaines de décalage. Certes, on dénombre des morts tous les jours, mais la catastrophe transalpine ne s'est pas reproduite chez nous. Ce sera intéressant de savoir pourquoi.Est-ce un bête de problème de comptage, soit que les italiens mettent tous les décès sur le compte du vilain virus et nous non, soit que les liens qu'ils entretiennent avec des personnes âgées soient très différents de ce que l'on pratique chez nous.
Aujourd'hui, j'avais un rendez vous WhatsApp avec l'un de mes patients, Toinon (il va être heureux de son surnom) un jeune homme brillant diplômé d'une grande école de commerce et exerçant de hautes responsabilités. Comme tout un chacun, mais bien mieux que je ne l'aurais fait puisqu'il semble avoir de meilleurs souvenirs de statistiques que moi, il a sur son tableur Excel établi une feuille de calcul selon laquelle, il prévoit un pic pour le 3 avril avec pour ce jour là un total de 1100 décès. Si je suis d'accord sur la date compte tenu du confinement et des derniers possibles infectés, je m'inscris en faux sur le nombre. Je pense qu'il sera en deçà de ce qu'annonce Toinon.
Voilà à quoi nous prédispose l'époque que l'on vit, confinés comme nous sommes : nus comptons les morts en espérant que le jour qui vient il y en ait moins qu'aujourd'hui. Comptabilité macabre mais nécessaires, de la même manière que lorsque des inondations de 2018, on regardait la Seine monter le long du Zouave du Pont de l'Alma en espérant qu'elle redescende rapidement.
Pourvu que j'ai raison, c'est tout ce que je demande ! Croisons les doigts et prions.
1 Comments:
Tout bien réfléchi, tant mieux qu'Henri Virlogeux ne soit plus là pour voir tout ça..
Enregistrer un commentaire
<< Home