18 février, 2008

Morts pour l'art !

Les "Beaux-Arts" à Paris

La gauche spécialisée dans la vente de faux espoirs aura fait de nombreuses victimes depuis son accession aux commandes en 1981.

L'art et la culture si souvent vantés dans les discours de nos élites socialistes, ont amené bon nombre de nos concitoyens les plus faibles à s'engouffrer dans des formations bidons, alors qu'ils n'avaient ni le talent ni l'endurance nécessaire pour percer.

Car quoi qu'on en dise, les artistes, les vrais, n'ont pas attendu Mitterrand et ses sbires pour faire leurs choix. Indépendamment du statut d'intermittent ou de la promotion ad nauseam de la culture, il y a toujours eu des individus qui dès leur plus jeune âge se sont illustrés par une créativité hors pair les amenant à choisir des carrières artistiques.

Ainsi, alors qu'avant on devenait artiste parce qu'on sentait que c'était sa voie, aujourd'hui on cherche à le devenir parce que c'est un statut valorisant. Hélas, quand on suit une voie pour des questions d'apparence, il est fort à craindre que la chute survienne peu après.

C'est ainsi que de plus en plus, je suis confronté à des trentenaires, aimables gauchistes lecteurs de libération, qui comme le dit La Fontaine "viennent crier famine quand la bise fut venue". C'est ainsi qu'en un mois, j'ai reçu trois demoiselles charmantes qui viennent de percuter le mur du réel avec force dégâts.

La première après des "études d'art" se dit photographe et ne survit chichement que grâce à de maigres compétences sur photoshop. Agée de plus de trente ans , elle rêve encore d'être célèbre. Sa frustration est immense et pourtant elle ne souhaite pas se remettre en cause. Elle y croit, quand je l'écoute, j'entends dans ma tête "j'me voyais déjà en haut de l'affiche".

La seconde après un DEA d'histoire de l'art a accepté de refaire une petite formation diplomante d'assistante. Une fois encore sa frustration est immense puisqu'il lui échoit maintenant d'accepter des emplois de type bac+2 alors qu'elle a un bac+5. Ses expériences professionnelles sont désastreuses.

La troisième occupe un emploi au smic et se dit aussi photographe. Après avoir échoué dans son pays d'origine (en Europe de l'ouest), elle est venue à Paris où elle imaginait que la vie culturelle lui serait plus favorable. Elle m'a expliqué avoir étudié durant dix années dans différentes écoles fort connues.

On pourrait évidemment conseiller à ces trois demoiselles de reconsidérer leurs attentes et de se mettre en quête de métiers qui recrutent. Ce serait sans compter cette énorme frustration qui grève les performances futures dans un autre emploi.

Que pourrait valoir un salarié qui à chaque moment aurait en tête la fabuleuse carrière qu'il aurait pu avoir et considèrerait ce qu'il fait actuellement comme un purgatoire injustifié ? C'est pourtant ce qui se passe pour ces trois demoiselles qui en l'état, alors qu'elles sont normalement intelligentes, sont absolument inemployables.

Pour ma part, ce sont des cas bien plus complexes que des dépressions carabinées. Dans un cas de dépression, j'appelle l'artillerie, c'est à dire les médicaments et puis le patient et moi, patiemment allons réussir à endiguer les pensées négatives. Cela fonctionne généralement bien.

En revanche pour le genre de cas dont je vous parle dans ce message, c'est beaucoup plus compliqué. Ces demoiselles ont la nette impression d'avoir été chassées d'un paradis qui existe. La preuve est dans tous les journaux, toutes les galeries, dans lesquels quelques happy-fews subventionnés paradent en pérorant sur l'art. "Pourquoi pas moi ?" ne cessent de se lamenter ces demoiselles. Et c'est vrai après tout, pourquoi pas elles ? Manque de talent, de persévérance ? A moins que ce ne soit le manque de réseaux. Les pauvrettes qui imaginaient qu'il suffisait d'un quelconque talent pour réussir dans l'art contemporain. Toutes ont encore en tête la réussite insolente d'un Bastiat. L'art devient une sorte de loto, si on tire le gros lot, alors c'en est fini des contingences matérielles.

Et moi, avec ce type de patientes, je rame et rame encore. Je suis confronté à ce qu'en psychologie sociale on nomme l'escalade d'engagement. Que dit au juste cette théorie ? « Seuls les actes nous engagent. Nous ne sommes donc pas engagés par nos idées, ou par nos sentiments, mais par nos conduites effectives ».

De fait, si nous tergiversons souvent avant de prendre une décision, pesant patiemment le pour et le contre, une fois la décision prise et transformée en une conduite effective, nous aurons toujours tendance à ne plus la remettre en cause.

Et à rationaliser cet acte, à le justifier même si l’on a parfois au fond de nous le sentiment diffus de s’être trompé ou d’avoir été trompé : « l’individu rationalise ses comportements en adoptant après coup des idées susceptibles de les justifier. Nous avons montré, par exemple, qu’une personne amenée par les circonstances à tenir un discours en contradiction avec ses opinions modifiait a posteriori celles-ci dans le sens d’un meilleur accord avec sa conduite (le fait d’avoir tenu ce discours-là) », écrivent J.L. Beauvois et R.V. Joule, auteurs d’un remarquable ouvrage : "Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens".

Je suis donc confronté à une croyance forte qui est difficilement remise en cause. Ces trois demoiselles agissent à l'instar d'un joueur compulsif auquel on demanderait de lâcher sa machine à sous alors qu'il vient d'y engloutir 100 €. Il est fort à parier qu'il nous répondrait qu'elle va finir par cracher le jackpot. Ces trois demoiselles en sont là. En surface, elles m'expliquent qu'elles en ont marre de "ramer" de "survivre", mais inconsciemment elles disent qu'elles ont bien trop investi dans l'"art" pour cesser d'espérer totalement. Alors moi, j'attends ...

Et face à ces milliers de personnes échouées sur les rivages du réel après des années d'études artistiques perdues, que font nos élus ? Rien, encore et toujours, on ne cesse de nous vendre la culture et l'art comme des panacées voire des droits inaliénables. Manifestement, réussir artistiquement est devenu un droit opposable, presqu'un du !

J'attends de nos élus qu'ils aient la même franchise que ce bon Rudyard Kipling. Lui aimait la guerre et son fils non. Il préférait l'horticulture. Mais poussé par son père, il se rangera à ses idées et fera une formation d'officier. Promu lieutenant, il mènera sa section au massacre. Son corps et celui des ses camarades ne seront jamais retrouvés. On estime qu'ils furent hachés par l'artillerie allemande et enfouis ou mélangés à la terre. Ce fut un grand deuil, une perte immense pour Kipling qui fut secrétaire d'état à la guerre de 1914 à 1916. Il se reprochera toujours d'avoir été l'instigateur de la perte de son fils.

Sur le lieu de leur disparition figure une simple stèle rappelant le sacrifice de cette section avec les noms du jeune lieutenant Kipling et de ses hommes. A côté figure une autre stèle que le grand Rudyard Kipling, celui qui par ses conseils mauvais fit tuer son fils, le prix Nobel de littérature 1908, fit graver. On imagine combien fut long le chemin qui le fit ravaler son immense orgueil pour qu'il puisse faire graver le message suivant :

"S'ils veulent savoir pourquoi nous avons péri,
Dites-leur : c'est parce que nos pères nous ont menti."

«If any question why we died, Tell them, because our fathers lied»

J'aurais aimé que nos élus vendeurs de faux espoirs qui mènent une jeunesse à la perdition puissent aujourd'hui avoir cette même démarche. Je suppose que leurs fils ne sont pas des études d'art et qu'il y en a peu en licence d'esthétique, de cinéma ou de théâtre. Pour tous ceux qui espérent néanmoins encore percer dans l'art, rendez-vous ici !


Rudyard Kipling, encore un capricorne !

5 Comments:

Blogger El Gringo said...

"une personne amenée par les circonstances à tenir un discours en contradiction avec ses opinions modifiait a posteriori celles-ci dans le sens d’un meilleur accord avec sa conduite"

Un peu comme un gars qui s'inscrirait sur une liste de gauche alors qu'il est libéral?

18/2/08 12:31 PM  
Blogger Laurence said...

si tes patientes persistent et signent pour faire carrière dans l'aaaaaaart, voici une idée de formation et de conversion :
http://www.univ-lyon2.fr/ACSP/0/fiche___formation/

18/2/08 12:37 PM  
Anonymous Anonyme said...

L'art, comment ca marche?
http://provisoire.com/artfaq/artfaq.htm

19/2/08 1:38 PM  
Anonymous Anonyme said...

désolé pour votre conclusion, mais j'ai comme l'impression que si le fils de quelqu'un se lance dans l'art il aura plus de chances de percer qu'un fils de personne.

19/2/08 6:00 PM  
Anonymous Anonyme said...

Article très intéressant. Mais il faut dire aussi qu'il y a pas mal de chômage de nos jours, non ? Pas facile de reclasser les gens parfois. J'évoque actuellement ce problème sur mon blogue avec ma propre situation. Il faut se battre pour s'en sortir !

21/2/08 3:47 PM  

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