Faire l'intéressant !
Ceci est jeton de téléphone pour ceux qui ne connaitraient pas ! D'où la formule de l'homme pressé entrant dans un rade dans tous les vieux films : "Patron, un café et un jeton de téléphone !"
Je lis peu la presse économique spécialisée, me contentant de la lecture de certains blogs fort bien faits. Parfois, je tombe sur la Tribune ou les Echos que je parcours mais cela reste rare. En revanche, j'achète dès leur parution Management et Capital que je trouve fort bien faits.
Les spécialistes me diront que ce sont deux magazines nuls et c'est peut-être le cas. Il n'empêche que j'aime bien leurs maquettes, les jolies photos qu'ils insèrent et que ces magazines permettent au pauvre type qui a quitté la vie des affaires voici tant d'années que je suis, de se tenir un minimum au courant. Pour moi, Capital et Management, c'est un peu comme lire Gala, on sait toujours qui est qui !
Et puis c'est très souvent très très drôle ! Je ne me lasse jamais de ces commentaires dithyrambiques sur tel patron ou tel consultant qui ont toujours l'art d'avoir réinventé l'eau chaude ou le fil à couper le beurre. Ces "non-innovations" sont toujours présentées avec un mélange de franglais, d'admiration non feinte et d'infini respect.
Tout à l'heure après être passé déposer mes chèques à la banque, je suis allé chez Bruno mon vendeurs de journaux qui année après année m'appelle toujours beau-gosse avec sa curieuse voix qui chuinte et j'ai fait l'acquisition de Management. Ensuite, je me suis posé à une terrasse couverte de café et j'ai commencé à parcourir mon joli magazine plein de couleurs. Et, je suis tombé sur une pépite.
J'apprends ainsi que le nouveau patron de la Fnac, Christophe Cuvillier était l'inventeur d'une pratique révolutionnaire en terme de gestion d'entreprise et que cela n'avait pas échappé à la sagacité légendaire des journalistes de Management ! Allez, ouvrons les guillemets, je cite :
""... le patron garde toujours son Iphone à portée de main. Pour mitrailler sans cesse : "une vitrine au magasin de Bruxelles, une affiche à Sâo Paulo, au Brésil, une PLV à Vélizy 2, je photographie tout." Y compris d'ailleurs chez les concurrents. On en plaisante au siège de l'entreprise, à Ivry-sur-Seine : plus une réunion sans que Cuvillier ne dégaine son smartphone pour suggérer d'adapter telle trouvaille du chef de rayon informatique de Barcelone ou d'un vendeur romain. Il appelle cela de la "cross fertilization". Après vingt ans de marketing, on ne se refait pas !"
Bon, déjà notre PDG est un super globe-trotter qui n'hésite pas à parcourir le monde et là je suis déjà esbaudi ! Mais en plus il possède un smartphone ! C'est à n'en pas douter un amateur de dernière technologie ! Je me sens déjà éperdu d'admiration pour ce patron tellement moderne ! Moi qui suis con, je n'aurais jamais pensé à me balader dans mes filiales et en plus je crois que j'aurais eu les poches pleines de jetons de téléphone (photo ci-dessus), n'ayant jamais songé à me payer un Iphone ! Et puis ce type préside une grosse boîte et on apprend qu'il regarde un peu ce qui se fait de bien un peu partout. On sent les vingt ans de marketing comme dit l'article. Putain, on voit qu'il a fait HEC !
Mais le plus beau, ça reste la "cross fertilization". En lisant cette ébouriffante nouveauté, cette invention révolutionnaire, j'ai failli défaillir parce que si j'admets qu'on puisse être plus intelligent que moi, savoir que certains sont à des années lumières au dessus de moi, me laisse hébété.
La cross fertilization ! Ouah ! Reprenant mes esprits, je me dis "mais alors quand Ahmed l'épicier envoie son neveu espionner chez Nordine son concurrent situé deux rues plus loin pour connaitre ses prix et ses références, il fait de la cross fertilization ???". Puis, plongé dans des abîmes de réflexions, je songe encore que si Roger l'agent Citroën d'Amboise zyeute un peu la vitrine de Jean-Paul l'agent Peugeot de Nazelles-Négron, situé de l'autre côté de la Loire, il fait aussi du cross-fertilizing !?! Et là, le cerveau emporté dans un quasi-délire, la vérité commence à surgir en moi. Je me dis que quand je demande à Laurence et à mon épouse de téléphoner à mes concurrents sur le quartier pour prendre rendez-vous en demandant les honoraires pratiqués, je fais moi aussi de la ... cross-fertilization.
Le monde fini et rassurant que je connaissais, plein de repères rassurants, s'ouvre sous mes pieds. Depuis des centaines d'années, tous abrutis que nous sommes, propriétaires de nos affaires, nous faisons de la cross-fertilization et nous ne le savions même pas !
Putain dire que pour passer dans Management, il suffisait de trouver un néologisme anglais un peu con et d'avoir un smartphone dans sa poche !
Parfois, je me mettrai des claques ! Passer si près du succès et de la notoriété et tout rater pour si peu, c'est vraiment rageant !
Putain,je bénis le ciel de ne pas devoir travailler dans une grande entreprise comme celle-ci avec ce genre de mec. Je crois qu'avec mon mauvais esprit, mon patron s'en serait pris plein les dents s'il était venu la bouche en cœur et sur de lui me parler de cross-fertilization. Je me serais dit "mais écoute moi ce gros branleur qui est en train de réinventer l'eau tiède et qui nous fait son intéressant". C'est marrant de complexifier le réel à outrance en faisant croire ensuite qu'on en détient les clés. Ceci dit ce n'est pas idiot comme méthode d'asservissement.
Je crois que j'aurais fini syndicaliste, salarié ultra-protégé, à ne pas en branler une en attendant que cela se passe.
Les spécialistes me diront que ce sont deux magazines nuls et c'est peut-être le cas. Il n'empêche que j'aime bien leurs maquettes, les jolies photos qu'ils insèrent et que ces magazines permettent au pauvre type qui a quitté la vie des affaires voici tant d'années que je suis, de se tenir un minimum au courant. Pour moi, Capital et Management, c'est un peu comme lire Gala, on sait toujours qui est qui !
Et puis c'est très souvent très très drôle ! Je ne me lasse jamais de ces commentaires dithyrambiques sur tel patron ou tel consultant qui ont toujours l'art d'avoir réinventé l'eau chaude ou le fil à couper le beurre. Ces "non-innovations" sont toujours présentées avec un mélange de franglais, d'admiration non feinte et d'infini respect.
Tout à l'heure après être passé déposer mes chèques à la banque, je suis allé chez Bruno mon vendeurs de journaux qui année après année m'appelle toujours beau-gosse avec sa curieuse voix qui chuinte et j'ai fait l'acquisition de Management. Ensuite, je me suis posé à une terrasse couverte de café et j'ai commencé à parcourir mon joli magazine plein de couleurs. Et, je suis tombé sur une pépite.
J'apprends ainsi que le nouveau patron de la Fnac, Christophe Cuvillier était l'inventeur d'une pratique révolutionnaire en terme de gestion d'entreprise et que cela n'avait pas échappé à la sagacité légendaire des journalistes de Management ! Allez, ouvrons les guillemets, je cite :
""... le patron garde toujours son Iphone à portée de main. Pour mitrailler sans cesse : "une vitrine au magasin de Bruxelles, une affiche à Sâo Paulo, au Brésil, une PLV à Vélizy 2, je photographie tout." Y compris d'ailleurs chez les concurrents. On en plaisante au siège de l'entreprise, à Ivry-sur-Seine : plus une réunion sans que Cuvillier ne dégaine son smartphone pour suggérer d'adapter telle trouvaille du chef de rayon informatique de Barcelone ou d'un vendeur romain. Il appelle cela de la "cross fertilization". Après vingt ans de marketing, on ne se refait pas !"
Bon, déjà notre PDG est un super globe-trotter qui n'hésite pas à parcourir le monde et là je suis déjà esbaudi ! Mais en plus il possède un smartphone ! C'est à n'en pas douter un amateur de dernière technologie ! Je me sens déjà éperdu d'admiration pour ce patron tellement moderne ! Moi qui suis con, je n'aurais jamais pensé à me balader dans mes filiales et en plus je crois que j'aurais eu les poches pleines de jetons de téléphone (photo ci-dessus), n'ayant jamais songé à me payer un Iphone ! Et puis ce type préside une grosse boîte et on apprend qu'il regarde un peu ce qui se fait de bien un peu partout. On sent les vingt ans de marketing comme dit l'article. Putain, on voit qu'il a fait HEC !
Mais le plus beau, ça reste la "cross fertilization". En lisant cette ébouriffante nouveauté, cette invention révolutionnaire, j'ai failli défaillir parce que si j'admets qu'on puisse être plus intelligent que moi, savoir que certains sont à des années lumières au dessus de moi, me laisse hébété.
La cross fertilization ! Ouah ! Reprenant mes esprits, je me dis "mais alors quand Ahmed l'épicier envoie son neveu espionner chez Nordine son concurrent situé deux rues plus loin pour connaitre ses prix et ses références, il fait de la cross fertilization ???". Puis, plongé dans des abîmes de réflexions, je songe encore que si Roger l'agent Citroën d'Amboise zyeute un peu la vitrine de Jean-Paul l'agent Peugeot de Nazelles-Négron, situé de l'autre côté de la Loire, il fait aussi du cross-fertilizing !?! Et là, le cerveau emporté dans un quasi-délire, la vérité commence à surgir en moi. Je me dis que quand je demande à Laurence et à mon épouse de téléphoner à mes concurrents sur le quartier pour prendre rendez-vous en demandant les honoraires pratiqués, je fais moi aussi de la ... cross-fertilization.
Le monde fini et rassurant que je connaissais, plein de repères rassurants, s'ouvre sous mes pieds. Depuis des centaines d'années, tous abrutis que nous sommes, propriétaires de nos affaires, nous faisons de la cross-fertilization et nous ne le savions même pas !
Putain dire que pour passer dans Management, il suffisait de trouver un néologisme anglais un peu con et d'avoir un smartphone dans sa poche !
Parfois, je me mettrai des claques ! Passer si près du succès et de la notoriété et tout rater pour si peu, c'est vraiment rageant !
Putain,je bénis le ciel de ne pas devoir travailler dans une grande entreprise comme celle-ci avec ce genre de mec. Je crois qu'avec mon mauvais esprit, mon patron s'en serait pris plein les dents s'il était venu la bouche en cœur et sur de lui me parler de cross-fertilization. Je me serais dit "mais écoute moi ce gros branleur qui est en train de réinventer l'eau tiède et qui nous fait son intéressant". C'est marrant de complexifier le réel à outrance en faisant croire ensuite qu'on en détient les clés. Ceci dit ce n'est pas idiot comme méthode d'asservissement.
Je crois que j'aurais fini syndicaliste, salarié ultra-protégé, à ne pas en branler une en attendant que cela se passe.
12 Comments:
des crosses :
ça me rapelle un collègue qui consultait des fournisseurs et filait les plans des uns aux autres.
'mais que fais-tu?'
'je fais avancer le progrès'
Depuis hier, je me demande si quand je lis d'autres blogs, je ne ferais pas sans le savoir en fait du cross-fertilizing ?
"Je crois que j'aurais fini syndicaliste, salarié ultra-protégé, à ne pas en branler une en attendant que cela se passe."
...dans les P et T, à chiper les colis des "usagés", comme ceux que j'ai croisé en travaillant brièvement à La Poste ?
"'je fais avancer le progrès'"
Chez les économistes, on appelle ça 'réduire les coûts de transaction' et, effectivement, ça fait progresser la cvilisation.
Helloooo !
Pas la peine de publier ce commentaire, mais vraiment, il faut que tu voies ça !!!!!!
http://www.alloshowtv.com/series/view_s.php?idep=pkhbt89746q6zxl&cat=S&id=1OOS700030O4H27
@GCM : So El Gringo is a fag ??? :)))))))))))))))))))))))))))
Yes, el gringo is a gay fag !
Où l'on remarque que le meilleur engrais pour la fertilisation, ça reste quand même les déjections.
Bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla-bla...
"mais alors quand Ahmed l'épicier envoie son neveu espionner chez Nordine son concurrent situé deux rues plus loin pour connaitre ses prix et ses références, il fait de la cross fertilization ???".
Non, Ahmed, il fait du benchmarking. Bah ouais, le marketing c'est précis...
et le plus drôle, c'est qu'effectivement Cuvillier est un visionnaire (c'est comme ça qu'on appelle un borgne dans le monde des managers aveugles) : à force de faire du benchemarking dans tous les sens (cad regarder ce que font les concurrents), on en a oublié de s'interesser à se qu'on faisait bien en interne et en local.
@Pythéas : c'est drôle que vous parliez de benchmarking parce que j'ai failli aborder ce sujet grotesque. "Benchmarking" ou comment se la raconter en parlant d'une pratique vieille comme le monde !
Le marketing est complexe mais je pense qu'il ne le devient que loin des formations fumeuses des ESC. Les labos de psycho cognitive ou de labo sociale font aussi du marketing ...
Ces labos sont même les meilleurs pourvoyeurs - heu pardon - providers d'études sur le sujet. Ayant eu l'auguste honneur d'assoir mes fonds de culotte sur les bancs d'une ESC il y a une dizaine d'années, j'ai pu mesurer avec un plaisir constant la capacité d'enfumage toujours renouvelée des experts du genre. Un maitre en la matière ? George Chetochine, capable du meilleur comme du pire. Oui, oui, du meilleur : j'ai toujours sur ma table de chevet l'une de ses recommandations : la réalité de la réalité, de Paul Watzlawick. Si vous ne connaissez pas déjà, courez l'acheter !
Je dirais même pire que ça : nous faisions tous de la prose et nous ne ne le savions même pas !
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