Où le Philippe le psy connait un succès énorme !
Bon, modeste comme je suis, ce n'est vraiment pas mon genre d'étaler ici mes succès thérapeutiques ! Mais devrais-je rougir de honte jusqu'à la fin de mes jours d'avoir été si orgueilleux, ça il fallait que je vous le raconte.
Voici près d'un an que Mlle X me pétait les couilles avec des douleurs lombaires. Alors n'étant pas médecin, il m'a semblé normal de faire des examens afin d'avoir un diagnostic différentiel. S'il y en a bien un qui ne croit pas au "tout psychologique" et qui ne passe pas son temps à psychologiser, c'est bien moi ! D'ailleurs c'est bien simple, je ne fréquente aucun confrère ou si, mais seulement deux sympas et très âgés.
Les examens n'ayant rien donné, j'ai alors osé parler de troubles somatoformes. J'avais d'ailleurs à cette époque parlé de ces curieuses pathologies dans une série de trois articles sur ce blog. Et ne voilà-t-il pas que je me fais engueuler, Mlle X m'assurant que c'était une spondylarthrtite ankylosante. Je ne me laisse pas fair,e piaffe et rue dans les brancards et l'assure que non, ce n'est pas une SPD ! Et là, la phrase qu'on me jette à la gueule comme on repousserait un rom venu vous vendre un journal de SDF : "de toute manière qu'en savez-vous, vous n'êtes pas médecin !".
Je vois rouge immédiatement, j'éructe et gueule comme un putois que je ne suis peut-être pas médecin mais que je sais reconnaitre une SPD que j'ai déjà eu des cas de la sorte, que c'était fort différent et qu'en l'état il s'agit d'un trouble somatoforme et que je n'en démordrai pas. Je rajoute à la volée que son médecin qui est lui bien médecin j'en suis sur n'est pourtant qu'un âne incapable de bien diagnostiquer et que quand on est aussi mauvais généraliste, on se contente de soigner des rhumes et des bronchites mais qu'on ne vient pas jouer dans la cour des grands ! Fuck !
Et les mois passent et passent et l'état ne s'améliorer guère ce qui me fait rigoler vu que moi, je sais que c'est psychologique et non physiologique. Mais bon, je ne dis rien surtout que Mlle X est du genre coriace alors je n'ai pas envie qu'elle me morde. On continue à papoter et puis voilà, rien ne s'arrange. Parfois quand j'ai envie de l'emmerder un peu, je lui demande "et vos hanches ?" Et j'ai le droit à la même réponse alors je souris en me disant que comme c'est psychologique et du à un stress intense non diagnostiqué, il n'y a pas de risques que cela s'arrange avec des myorelaxants ! Comme je suis sur de moi, je peux rigoler et m'en foutre.
Et les mois passent encore jusqu'à ce qu'une conversation anodine me mette sur la piste. On est en train de parler de PC quand la demoiselle me dit que le sien date de 2006. Je lui dis alors qu'il serait temps de le changer et la voici qui d'une voix calme me dit que ce n'est pas vraiment le moment. Et là, zou la lumière jaillit en moi ! Cette simple remarque suffit à me mettre sur la voie du manque d'argent, du revers de fortune, et de la honte qui s'ensuit et qui fait qu'elle n'a même pas osé m'en parler ! Comme dit Blier à Gabin dans Le cave se rebiffe : "la thune décarre à tout va et si ça continue elle va se retrouver sur les jantes !"
Alors gentiment mais fermement, je la cuisine et la questionne sans la lâcher dans le genre "vous allez arrêter de me prendre pour un con et me parler franchement" et là, les vannes s'ouvrent. J'apprends que suite à un changement inopiné, elle a perdu plus d'un tiers de son salaire et que les fins de mois sont devenues très difficiles.
Mais comme c'est une battante, une de ces femelles masculines qui n'ont pas encore compris la différence entre courage et témérité, plutôt que de se barrer sous de meilleurs cieux, elle s'est accroché quitte à crever à son poste, sans rien dire en tendant le dos. Le genre de maitresse femme décidée à régler tout toute seule seule tout le temps, sans se plaindre, quitte à endurer un stress intense qui la met périodiquement au bord de l'épuisement et de la décompensation dépressive.
Enfin, elle parle, elle se confie : fin de mois difficile, risque d'interdiction bancaire, pas d'avenir professionnel, stress intense, idées de damnation, etc. Et ça sort et puis voilà. Ensuite, je prends une feuille et on note la situation actuelle et on construit un arbre de décision comportant trois branches matérialisant les trois options qui lui sont offertes. J'aurais pu en rajouter une consistant à se suicider mais ce n'est pas trop mon truc vu que je suis payé pour éviter cela.
Quelques jours passent et je l'appelle pour lui demander : "Et vos douleurs dans les hanches ?" Elle n'a plus rien. Bien sur pour ne pas s'avouer vaincue parce que cela lui arracherait un peu la gueule que j'aie eu raison, elle se contente de me dire qu'elle considérablement moins mal et qu'elle ne prend plus de myorelaxants et qu'elle passe enfin des nuits complètes sans se réveiller sous l'effet de la douleur.
Moi modeste, je ne dis rien parce que mon métier n'est pas de faire un concours avec mes patients pour définir qui sera le plus malin de deux. Mais bon, Mlle X si un jour vous me lisez et que vous vous reconnaissiez dans cet article, alors sincèrement, vous me direz ? Qui était le meilleur , votre médecin abruti, ce roi des cons, ou moi ?
Moi bien sur, mais je le savais depuis des mois.
8 Comments:
C'est intéressant...Dans une situation analogue mon psy m'a dit de supporter la situation parce que les temps sont durs et que je suis un vieux cul.
(enfin il l'a pas dit comme ça :o) )
Je dois reconnaître que ça m'aurait intéressé de voir votre arbre de décision dans mon cas !
(on parle toujours plus de ses succès que de ses échecs... En mm temps, quand on peut écrire succès plus souvent qu'échecs, ça se défend)
Marrant, je lis en ce moment même Healing Back Pain du docteur John E. Sarno du département de médecine de réhabilitation à l'université de New York. Il est médecin et dit pareil: plus de 90% des "maux de dos" sont en fait des somatisations de colère ou d'angoisse non exprimée (dont 5% environ nécessitent d'ailleurs une psychothérapie). Et il guérit les gens en leur expliquant le mécanisme intrinsèque (charge émotionnelle -> spasmes musculaires -> anoxie -> douleurs).
@V. : je n'ai que des succès, sinon c'est qu'il y a résistance du patient ! :)) C'est marrant l'angoisse, c'est un beau travail d'enquête.
@J. : oui je suppose aussi mais moi je ne fais pas de livres sur le sujet !
à Philippe : excellente réponse :o)
@Philippe : effectivement ! résistance du patient ... mdr.
C'est trop drôle ...
On peut aussi imaginer un psy qui expliquerait à un de ses patients qu'il n'a pas su le diagnostiquer plus tôt parce que cet idiot aurait trop mis ses symptômes en avant ...
"Heu ... je n'ai pas vu que vous souffriez d'un SSPT ... vous êtiez si agressive (revivesnce), tellement toujours sous contrôle (hypervigilance), puis vous preniez la fuite à chaque avancée (évitement) ..." Mdr.
J'aime beaucoup vous lire, quel dommage que vous n'écriviez plus aussi souvent qu'avant !
Revenez vite.
Désolé d'être aussi terre à terre mais je n'ai pas compris le début de l'article : 1. elle va voir un médecin qui ne lui trouve rien mais 2. elle vous contredit quand vous lui dites qu'elle somatise, puis 3. vous dites que le médecin est un nul puisqu'il n'a rien trouvé, alors que d'après vous (2) il n'y a rien à trouver...
@100hp Tous les médecins et les patients sont de profonds abrutis, c'est ce que je retiens de la lecture sur ce blog.
"une de ces femelles masculines qui n'ont pas encore compris la différence entre courage et témérité"
On passe sur les relents de misogynie douteux, vous attendez quoi, une médaille?
Moi je savais, moi je suis un grand psy, moi je sais mieux que mes patients qui n'osent pas m'avouer que j'ai toujours raison, parce que ça leur fait mal de l'admettre...
Enfin, votre blog, c'est pas pour parler de psychologie, c'est uniquement pour récolter les lauriers tressés par les commentateurs si je comprends bien, et vous auto-encenser. Faudrait vous remettre en question de temps en temps quand même.
C'est la première fois que j'entends parler d'arbre de décision, et je crois que j'en ai sacrément besoin d'un à ce moment de ma vie, donc je suis contente d'avoir lu cet article rien que pour ça.
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