30 janvier, 2012

Briseur de couples !


Ça semble idiot le dire mais une thérapie réussie vous transforme. Et chez qui aller pour une thérapie réussie ailleurs que chez moi ? La question ne se pose même pas !

L'an dernier, une demoiselle charmante et sérieusement cortiquée est venue me voir. La petite nana est le prototype de la petite surdouée telle qu'on les décrit dans les manuels spécialisés, à savoir glandeuse talentueuse et dotée d'un humour qui ne fait pas rire tout le monde mais que je goûte pour ma part totalement.

La belle est venue me voir pour des problèmes qu'elle jugeait terribles mais que j'ai estimés assez classique du fait de mes compétences et de mon expérience que l'on ne vante plus ! Bref en deux coups de cuillers à pot, comme un neurochirurgien traiterait une vilaine tumeur cérébrale opérable, je l'ai aidée à se débarrasser de vilaines pensées à la con et ma foi, ça a marché parfaitement.

Son sourire est revenu et elle est revenue au top de ses capacités. Si je n'avais pas honte de me comparer au grand Pietro, le mécanicien qui a entretenu mes Lancias et Alfa-Roméos durant des années ; ma patiente était comme ma bagnole quand elle sortait d'un réglage à l'oreille de son double-corps Weber 36DCA5. Après, je remontais au volant et putain, elle montait dans les tours avec une agilité déconcertante. Bref, je cois avoir fait du bon boulot et pour pas cher en plus puisque mes honoraires sont vraiment modérés.

Tant et si bien que s'est posé un problème de couple. Parce qu'il faut toujours rencontrer les gens quand ils vont bien. La demoiselle était à la colle avec un brave type gentil comme tout, un type sans histoires et doux comme un agneau, le mec qui ne pose pas de problèmes parce qu'il est toujours d'accord. Et une fois la demoiselle sortie d'entretien, ben le type qui s'était habitué à une forme de docilité et de passivité s'est aperçu que maintenant il y avait des tas de chevaux sous le capot. Il y a eu quelques sorties de route. De son côté ma chère patiente qui acceptait que sa vie fut conduite sur un rythme tranquille, a vite compris que c'était terminé. Elle a rué dans les brancards et désarçonné ce brave garçon qui ne savait plus s'y prendre avec elle. 

Elle a alors pris conscience que si elle avait choisi monsieur c'est parce qu'il était gentil et qu'elle l'avait rencontré à une époque où elle ne voulait que quelqu'un de gentil, comme une personne grabataire qui chercherait un garde-malade. De l'autre côté, la prise de conscience a été plus compliquée parce que ce n'est pas facile pour un mec de se dire que s'il a pu partager la vie d'une aussi chouette gonzesse durant quelques années c'est simplement parce qu'elle avait une étiquette en solde au cul mais que sinon le pauvre n'aurait jamais eu les moyens psychologiques de s'offrir ce petit bijou. 

Bref le couple est parti en vrille pour ne pas dire autre chose. Et à la manière de vases communicants funestes, tandis que l'une pétait la forme, l'autre s'est enfoncé dans l’abîme de la dépression. C'est assez normal ceci dit quand la femme que vous imaginiez être celle de votre vie, vous dit que c'est fini parce que finalement vous n'êtes qu'un gros looser ou un truc approchant mais qui ne fait pas vraiment plaisir.

Monsieur a pété les plombs et s'est retrouvé tout malheureux alors que Mademoiselle pétait de santé. Alors comme je suis un bon gars et que je n'aimais pas savoir que ce que l'une avait pris, l'autre l'avait perdu, j'ai proposé d'assurer le service après-vente. J'ai donc proposé à la demoiselle de filer mes coordonnées à monsieur en lui disant que j'avais l'habitude. En gros en bon garagiste que je suis, quand une sort de l'atelier, une autre y rentre.

C'est vrai que j'ai déjà connu ce genre d'histoire et l'une d'elle m'a particulièrement marqué. Je m'en souviens comme si c'était hier. J'avais reçu madame qui à l'âge de vingt-huit ans menait la vie d'une femme de soixante-dix ans aux côtés d'un père tranquille assez chiant. Mais une fois remise sur pieds, elle avait pris conscience que son mec n'était qu'un gros plomb lourd et pénible qu'elle devait lourder rapidement pour pouvoir décoller. Elle avait donc plaqué monsieur qui avait alors projeté de se pendre à une poutre de leur maison. Comme je comprends les histoires d'amour mais que je trouve un peu con de se pendre pour une femme, j'avais alors proposé à Madame de m'envoyer Monsieur en lui filant mes coordonnées.

L'accrochage avait été un peu dur parce que j'étais un peu vécu comme le mec par qui tout le malheur était arrivé même si c'est faux et que je n'avais fait que mon travail. Pour lui, c'était simple : certes elle et lui avaient une vie de merde mais au moins il n'était pas seul. Mais finalement après un début difficile, on s'était très bien entendus lui et moi et on avait pu faire du bon boulot.  Parce que finalement, l'essentiel de mon boulot consiste à créer une alliance thérapeutique solide.

Quelques mois après, ce mec que j'avais connu aussi sinistre que possible avait acquis humour et distanciation. Il avait guéri de sa one-itis, était devenu un mec charmant et rigolo plaisant aux femmes et en rencontrant un bon paquet jusqu'à ce qu'il rencontre celle qui lui avait vraiment plue. Tant et si bien que peu de temps après que l'on ait cessé de se voir, j'avais reçu une carte m'annonçant la naissance du fils qu'il avait eu avec cette fille pour qui il avait craqué.

E bref si vous pensez que vous avez une vie de merde et que vous tentez une thérapie, attendez vous parfois à des changements radicaux, alors prévenez monsieur ou madame. Et si elle ou il rit à l'énoncé de cette hypothèse tragique, peu importe, vous aurez prévenu. Quand vous le(la) jetterez avec pertes et fracas, vous n'aurez qu'à lui dire qu'il (elle) était prévenu(e). A la limite faites signer une décharge !

Quant à moi je prie chaque jour pour qu'un mari plaqué par ma faute ne m'attende pas avec un fusil devant ma porte.

6 Comments:

Blogger Kentin Jivek said...

Je viens de découvrir votre blog..superbe, êtes vous sur Twitter ?
@ bientôt

13/2/12 9:17 PM  
Blogger philippe psy said...

Merci. Non je ne suis pas sur twweter.

13/2/12 9:27 PM  
Blogger V. said...

"l'accrochage avait été un peu dur ..."
juste après avoir écrit que le type avait projeté de se pendre !
excellent !
j'ai bien rigolé.
comme bien souvent en vous lisant.

14/2/12 9:30 AM  
Blogger Emmanuel said...

Bon sang qu'elle écriture décapante. Vraimement jouissif comme texte.

28/2/12 12:11 AM  
Blogger Emmanuel said...

Vraiment jouissif comme texte.

28/2/12 12:13 AM  
Blogger C. said...

Et quand les deux protagonistes sont en plein travail au moment de la rencontre ...?
(Vous écrivez pas mal, j'aime bien)

7/4/12 2:16 PM  

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