Le moment de s'effacer !
Moi, j'aime bien les gens. Ma porte est ouverte et je reçois beaucoup. On passe de bons moments mais je sais qu'à un moment donné les gens auront toujours mieux à faire que de venir. Nous en parlions avec Thomas qui s'étonnait que X passe moins à la maison ou que je n'aie pas tout fait pour me réconcilier avec Y et Z.
Je lui ai dit que X ayant une copine, cela me semblait normal qu'il passe du temps avec elle plutôt qu'avec moi, que c'était dans la logique des choses. Quant à Y et Z, viendrait sans doute un moment où ils me recontacteraient. Je lui expliquai qu'à mon avis l'amitié était aussi largement dépendante des circonstances de la vie. Ainsi, nous avons tous eu des amis d'écoles avec qui c'était "à la vie, à la mort" que l'on n'a pourtant jamais revus une fois le bac obtenu.
On a parlé de quelques cas communs et il m'a trouvé extrêmement pessimiste sur les gens. Pourtant je ne lui ai pas dit que tout le monde finissait par trahir mais simplement que tout avait une fin même les relations qui semblaient les plus solides, que c'était ainsi et que c'était la vie. Curieusement, il m'a dit que compte tenu de mes connaissances, je pourrais les manipuler pour qu'ils restent : les culpabiliser par exemple. J'ai trouvé cela étrange et lui ai expliqué que cela ne me viendrait pas à l'idée. Qu'il ne me semblerait pas très utile de voir quelqu'un simplement parce que sa présence résulte d'une sorte de chantage affectif intolérable.
Il m'a demandé si je m'en fichais en se doutant que ce n'était pas le cas. J'ai effectivement répondu que je n'étais pas aussi insensible que cela. Mais qu'ayant, comme lui d'ailleurs, la chance d'être né sous le signe du capricorne, le signe du temps, j'étais patient et que j'étais capable de me pétrifier, de me mettre en plongée profonde et d'attendre. Que si j'étais extrêmement sociable, la solitude ne me faisait pas pour autant peur.
Les gens font ce qu'ils veulent et restent libres. J'ai toujours adoré l'idée émise en psychologie sociale que la base de tout lien social reste l'utilité. Il n'y a rien de gratuit et le don pur n'existe pas. On ne fréquente les autres que parce qu'ils nous sont utiles, même si cette utilité n'est évidemment pas forcément odieuse matérialiste. Et comme je le disais en préambule, cette utilité est aussi largement dépendante des circonstances. Si j'avais été en 1916 à Verdun, mon meilleur pote de régiment aurait été un frère sous les obus, qui m'aurait peut-être oublié vingt ans près.
Dès lors, on cesse de fréquenter certaines personnes ou elles cessent de nous fréquenter parce que cette utilité n'existe plus. Quand on devient inutile les liens cessent. La relation perdure parfois parce que la culpabilité fait durer un peu le lien, mais la plupart des gens n'ont pas suffisamment de conscience de leur faute pour ne pas pouvoir se pardonner à eux-mêmes.
L'expiation ne dure jamais bien longtemps juste le temps de se trouver des justifications. On est toujours trahi par ceux que l'on aime. Les autres n'ont aucune prise sur nous. Chacun sait que l'expression qui dit que lorsque l'on va mal on apprécie la douceur de l'infirmière mais que lorsque l'on va bien on ne se souvient que de la douleur des piqûres est vraie.
Thomas m'a semblé troublé et étonné, un peu comme si je venais déverser un seau de merde malodorante dans son monde de Bisounours ou que je venais de piétiner la belle maison en légos qu'il venait de réaliser en lui disant qu'on s'en foutait parce que ce n'était pas une vraie maison.
Je déteste abuser des vingt ans qui nous séparent, mais là, j'étais forcé de lui dire que mon expérience l'assurait : les gens trahissent toujours. Dès lors il faut juste les aimer pour ce qu'ils sont. Aimer les gens, c'est en être responsable, c'est tout. Il faut juste pour l'accepter que le cœur se brise ou se bronze. Ce doit être la différence entre la sensibilité et la sensiblerie. Et puis être patient et se souvenir de ces vers d'un autre capricorne célèbre Rudyard Kipling dans son célèbre poème stoïcien If : Et si tu peux aimer tous tes amis en frère /Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi.
Il a trouvé cela étrange. Sans doute aurais-je du lui dire que si l'on se référait aux stades moraux de Kohlberg, que j'avais déjà abordé ici, on pouvait trouver des gens aux idéaux plus élevés, chez qui les circonstances n'avaient que peu de prises sur les relations. Mais ce stade 7 que Kohlberg appelait mystique est plutôt rare. De toute manière, ils finissent toujours par revenir, enfin la plupart.
Les gens trahissent toujours. Et les capricornes qu'animent la lucidité saturnienne le savent très bien. D'ailleurs Paul Léautaud, écrivain capricorne misanthrope, dont la dernière phrase avant de mourir fut "maintenant foutez-moi la paix", l'écrivait dans son journal :
Je lui ai dit que X ayant une copine, cela me semblait normal qu'il passe du temps avec elle plutôt qu'avec moi, que c'était dans la logique des choses. Quant à Y et Z, viendrait sans doute un moment où ils me recontacteraient. Je lui expliquai qu'à mon avis l'amitié était aussi largement dépendante des circonstances de la vie. Ainsi, nous avons tous eu des amis d'écoles avec qui c'était "à la vie, à la mort" que l'on n'a pourtant jamais revus une fois le bac obtenu.
On a parlé de quelques cas communs et il m'a trouvé extrêmement pessimiste sur les gens. Pourtant je ne lui ai pas dit que tout le monde finissait par trahir mais simplement que tout avait une fin même les relations qui semblaient les plus solides, que c'était ainsi et que c'était la vie. Curieusement, il m'a dit que compte tenu de mes connaissances, je pourrais les manipuler pour qu'ils restent : les culpabiliser par exemple. J'ai trouvé cela étrange et lui ai expliqué que cela ne me viendrait pas à l'idée. Qu'il ne me semblerait pas très utile de voir quelqu'un simplement parce que sa présence résulte d'une sorte de chantage affectif intolérable.
Il m'a demandé si je m'en fichais en se doutant que ce n'était pas le cas. J'ai effectivement répondu que je n'étais pas aussi insensible que cela. Mais qu'ayant, comme lui d'ailleurs, la chance d'être né sous le signe du capricorne, le signe du temps, j'étais patient et que j'étais capable de me pétrifier, de me mettre en plongée profonde et d'attendre. Que si j'étais extrêmement sociable, la solitude ne me faisait pas pour autant peur.
Les gens font ce qu'ils veulent et restent libres. J'ai toujours adoré l'idée émise en psychologie sociale que la base de tout lien social reste l'utilité. Il n'y a rien de gratuit et le don pur n'existe pas. On ne fréquente les autres que parce qu'ils nous sont utiles, même si cette utilité n'est évidemment pas forcément odieuse matérialiste. Et comme je le disais en préambule, cette utilité est aussi largement dépendante des circonstances. Si j'avais été en 1916 à Verdun, mon meilleur pote de régiment aurait été un frère sous les obus, qui m'aurait peut-être oublié vingt ans près.
Dès lors, on cesse de fréquenter certaines personnes ou elles cessent de nous fréquenter parce que cette utilité n'existe plus. Quand on devient inutile les liens cessent. La relation perdure parfois parce que la culpabilité fait durer un peu le lien, mais la plupart des gens n'ont pas suffisamment de conscience de leur faute pour ne pas pouvoir se pardonner à eux-mêmes.
L'expiation ne dure jamais bien longtemps juste le temps de se trouver des justifications. On est toujours trahi par ceux que l'on aime. Les autres n'ont aucune prise sur nous. Chacun sait que l'expression qui dit que lorsque l'on va mal on apprécie la douceur de l'infirmière mais que lorsque l'on va bien on ne se souvient que de la douleur des piqûres est vraie.
Thomas m'a semblé troublé et étonné, un peu comme si je venais déverser un seau de merde malodorante dans son monde de Bisounours ou que je venais de piétiner la belle maison en légos qu'il venait de réaliser en lui disant qu'on s'en foutait parce que ce n'était pas une vraie maison.
Je déteste abuser des vingt ans qui nous séparent, mais là, j'étais forcé de lui dire que mon expérience l'assurait : les gens trahissent toujours. Dès lors il faut juste les aimer pour ce qu'ils sont. Aimer les gens, c'est en être responsable, c'est tout. Il faut juste pour l'accepter que le cœur se brise ou se bronze. Ce doit être la différence entre la sensibilité et la sensiblerie. Et puis être patient et se souvenir de ces vers d'un autre capricorne célèbre Rudyard Kipling dans son célèbre poème stoïcien If : Et si tu peux aimer tous tes amis en frère /Sans qu'aucun d'eux soit tout pour toi.
Il a trouvé cela étrange. Sans doute aurais-je du lui dire que si l'on se référait aux stades moraux de Kohlberg, que j'avais déjà abordé ici, on pouvait trouver des gens aux idéaux plus élevés, chez qui les circonstances n'avaient que peu de prises sur les relations. Mais ce stade 7 que Kohlberg appelait mystique est plutôt rare. De toute manière, ils finissent toujours par revenir, enfin la plupart.
Les gens trahissent toujours. Et les capricornes qu'animent la lucidité saturnienne le savent très bien. D'ailleurs Paul Léautaud, écrivain capricorne misanthrope, dont la dernière phrase avant de mourir fut "maintenant foutez-moi la paix", l'écrivait dans son journal :
«Il est plus difficile de rendre que de ne pas recevoir.»
11 Comments:
Vous écrivez "les gens trahissent toujours" ...
Je suppose que vous parlez de l'idée que l'on se fait d'eux, non ?
Je ne vois pas ce qu'ils pourraient trahir d'autre ...
En effet, soit ils sont libres soit ils ne le sont pas.
S'ils sont libres, ils peuvent choisir le chemin qu'ils souhaitent et ils prennent, en toute conscience, celui qu'ils considérent être le meilleur pour eux.
Donc, la seule personne trahie dans l'histoire c'est celle qui se trahit elle-même lorsqu'elle croit que parce qu'elle aime, elle posséde et du coup, elle s'offense du fait que ceux à qui elle tient puisse faire un autre choix que celui qu'elle attendrait d'eux.
@Boudeuse : vous avez raison. D'où l'importance de renoncer à l'idéalisme et à toute idée un tant soit peu aristocratique. Comme disait ce brave Barbey d'Aurévilly : à part les prêtres, les poètes et les soldats, l'humanité est faite pour le fouet ! :)))
Je ne connais pas ce Barbey que vous évoquez mais, à quoi pourrait-il faire allusion sinon au fouet de la conscience ?
Pour le reste ...
Renoncer à l'idéalisme, aux idées aristocratiques ...
Il n'y a rien d'inné dedans !
C'est un long chemin de croix !
Beaucoup n'arrive jamais au bout !
Cet article est scandaleux !!!
Message personnel à Thomas : Je vais tellement te rosser à coups de revers et d'amorties que tu vas vômir ta bouffe de bisounours par les trous de nez. Et même quand ça arrivera, je continuerai. Impitoyablement. Je te ferai comprendre ce qu'est l'amitié à coups de larmes et de sang, tu vas manger sévère. Et lorsque tu seras à terre, et que tu ne pourras plus te lever, je n'appelerai pas le SAMU, non. J'appelerai des amis à moi, de ceux qui figurent dans le carnet d'adresses du gringeot. Des BIKERS ! TOUT EN CUIR ! Ils t'emmèneront danser au "Fucking Blue boy" contre l'avis des médecins, et tu seras leur poupée de cire, poupée de son. Moi, je serai tapi dans l'ombre, et tu n'entendras que mon rire, un rire bruyant, moqueur, sarcastique !
Tu comprendras alors ce qu'est l'amitié, et tu me pardonneras.
@GCM : tu sais quand Thomas va apprendre qu'Olive roule en Ferrari, il se moquera de tes menaces. Je le connais, il est très sensible aux signes extérieurs de richesse.
Coucou Boudeuse,
Mais ma petite Boudeuse, il y a l'idée que l'on se fait de l Autre et… intrinsèquement l’idée que l’on se fait de soi-même. Lune marchant toujours avec l’autre, main dans la main. La réalité est que l’on se reflète et de soi-même et de l autre ce que l’on pense être de ce soi ou de cet autre. Vous me suivez ? Soit,non pas un produit fini et idéalisé que l'on nommerait confortablement conscience, mais un processus évolutif de conscientisation. Je crois que par "fouet" le psychothérapeute évoquait subtilement cela. Son ébauche psycho-philo concernait à la fois l’être, la volonté, la liberté et le pouvoir.
C’est un tantinet didactique et pédant je le crains, et m'en excuse. mais je sais que vous ne m’en voudrez pas pour si peu. Nest-ce pas...
Au plaisir.
Je ne suis que de passage. Je n ai rien à rajouter. Mais alors rien de rien… M enfin si un peu quand même pour GC http://www.youtube.com/watch?v=qdMDAHQF8rc Jai bien rigolé la première fois que lai visionnée. Je vous(t’)assure/s elle est géniale la vidéo.
Oui bon ! J en profiterai également pour souhaiter un bon retour au boulot au psychothérapeute. Comme moi pas être rancunière hein !
...Sympathique personnage blogosphérique après tout que ce grand Philippe, malgré sa dure carapace qui n'est qu'apparente.
Shalomo Alaykoum.
Assurer sans s évidemment ...
Mon petit GCM, tu sais très bien que tu vas te faire massacrer au tennis et je pense que c'est pour cette raison que tu te terres chez toi les week ends où je suis sur Paris. Personne ne peut croire que tu as une vie sociale, sentimentale ou sexuelle (je ne parle pas des animaux).
Philippe, dis à Olive que je me mettrai à genoux devant lui en le conjurant de m'emmener faire un tour dans sa FERRARI. Cela lui rappellera l'époque ou son subalterne, un certain QCM, se jettait à ses pieds pour pouvoir lui apporter un café.
Thomas, tu vas vraiment te mettre à genoux devant Olivier ??? Putain je veux pas rater ça !
Je ne vois pas pourquoi vous parlez de trahison, comme s'il y avait eu rupture d'une promesse, d'un pacte, qu'ils soient explicites ou tacites.
Je parlerais plutôt d'éloignement, parfois délibéré, parfois non, parfois géographique, parfois dû aux circonstances (le cas que vous évoquez au début de l'article, X a une copine et souhaite passer du temps avec elle)
Vous n'avez jamais eu cette impression en revoyant des amis que vous n'avez pas vu depuis des mois que c'est comme si vous les aviez quittés hier ? Et vous aurez toujours des choses à vous dire quand vous vous retrouvez ?
Et puis, il y a des gens qu'on côtoie quotidiennement au contraire, et avec qui les liens sont somme toute de circonstance et superficiels. Quand on ne les voit plus, c'est comme s'ils n'avaient jamais existé.
Et puis il y a des rencontres fortuites qui vous marquent malgré leur courte durée : une conversation avec un ou une inconnue dans les transports, dans une file d'attente...
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