28 mars, 2016

Formation rapide !


Voici déjà quelques temps au cours d'une séance de caffing, on discutait des relations hommes / femmes. Chacun pointait les différences et les points communs pouvant exister entre mâles et femelles de notre espèce. On a du balancer pas mal de lieux communs mais on s'en foutait. Ceci dit on a du aussi raconter des trucs très malins vu le concentré d'intelligence qu'il y avait autour de la table. Ce sont les bienfaits du brain storming que d'amener quelques pépites dans un amas de grosses bêtises. On ne se censure pas, on parle, voilà tout. Après tout, ne faut il pas pelleter des tombereaux de merde pour trouver des diamants ? Hein ? N'est-il pas ! ? Ainsi va la vie !

Je me souviens que j'ai dit au Touffier que quand j'étais petit, j'avais été marqué en lisant Le petit Nicolas. D'une part parce que Goscinny a parfaitement décrit les états d'âme d'un enfant parfois nettement mieux que certains ouvrages savants de psychologie du développement. Enfin, parce qu'il existe parmi toutes les histoires publiées du Petit Nicolas, quelques pépites qui méritent que 'on s'y attardent, tant sous des dehors légers, elles se révèlent pleines d'enseignement.

Et puisque l'on parlait des rapports hommes/femmes, j'ai expliqué avoir été marqué par deux histoires dans lesquelles intervient Marie-Edwige, un des rares personnages féminins de ces historiettes. Il faut dire qu'à l'âge du petit Nicolas, on n'a que faire des filles, lesquelles sont vécues comme un empêchement à bien s'amuser. Quand on a huit ou neuf ans on est mieux entre copains car les jeux sont très sexués. Ce n'est bien qu'après que l'on commence à s'intéresser aux filles et encore plus tard qu'on en revient aux basiques en se souvenant que décidément on est bien mieux entre mecs.

J'avais donc été marqué par la justesse avec laquelle Goscinny, en observateur avéré, narrait l'impact de la présence d'une fille sur une bande de garçons alors que cette dernière ne fait absolument rien si ce n'est se tenir présente. Dans cette histoire intitulée "Marie-edwige", Goscinny montrait que la simple présence d'un élément féminin suffisait à bouleverser les rapports entre garçons, dès lors que leur rivalité ne les opposait plus que pour attirer l'attention d'une fille.

Dans une autre histoire intitulée "L'anniversaire de Marie-Edwige", c'est le petit Nicolas qui se retrouve seul, invité à l'anniversaire de la petite fille en tant que seul garçon. Et c'est aussi de voir un garçon plutôt habitué à réprimer ses émotions confronté à un monde où elle s'exprime naturellement. Sans le comprendre, car ces notions n'existaient pas à l'époque ou il écrivit ces histoires, Goscinny nous montrait à cette époque la différence existant entre compétition sexuelle masculine et féminine.

J'avais alors expliqué à l'auguste assemblée présente ce jour là, qu'à mon sens, il suffisait de lire ces deux histoires pour tout comprendre des rapports hommes/femmes et naturellement admettre que si bien des choses nous rapprochent, bien d'autres nous tiendront toujours éloignés.

Le Touffier, en bon médecin, c'est à dire en gars sérieux qui ne se contente pas d'une parle mais creuse tous les sujets, avait trouvé sur le net les deux histoires en accès libres. Hélas elles n'auront tenu que peu de temps en ligne et les ayant droits de René Goscinny les ont fait disparaitre. Qu'à cela ne tienne, on les trouve sur Amazon pour pas grand chose. Mais je gage bien que quelques pirates du net, parmi mes lecteurs, auront tôt fait de retrouver ces deux histoires pour les consulter gratuitement.

Ainsi à tout patient qui vient me voir pour se plaindre de ses rapports avec les femmes, je demande si il a lu ces histoires du Petit Nicolas. Et si ce n'est pas déjà fait, je lui enjoins de le faire dans les plus brefs délais car tout y est dit. S'il l'a déjà fait, et n'y a pas trouvé son content, j'avoue ne pas comprendre ce que l'on peut chercher de plus !


11 mars, 2016

Aliénation sociale et collectif de défense !


Groupe de marcassins constituant un collectif de défense en vue de lutter contre l'abrutissement du monde.

Coordonnées !



En publiant les commentaires, je me suis aperçu que certains lecteurs me demandaient des contacts. Comme certains commentaires sont parfois attachés à deux très vieux articles, il n'est pas facile, une fois publiés, de les retrouver et d'y répondre. Pour cela, merci de m'écrire en mail à :

pa6712@yahoo.fr

KO Debout !

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Voici quelques semaines, j'étais comme un boxeur KO debout mais avec la très nette impression que l'on m'avait convié à boxer les mains attachées dans le dos. Parce que, même si en tant qu'être humain, citoyen et bien sur contribuable, je fais moi aussi partie de la société, j'ai eu très nettement l'impression que depuis pas mal de temps, la société se passait bien de moi et continuait sa course folle sans vraiment se préoccuper de mes aspirations. L'espace d'un instant, je me suis senti comme perdu dans un monde dont il ne maitriserait plus les codes, comme un vieillard désorienté confronté à un environnement nouveau et déstabilisant.



Que s'est-il passé ? Rien de bien spectaculaire, si ce n'est qu'à chaque fois que j'ai regardé les informations ou ouvert le Parisien, comme chaque matin avant mes consultations en prenant mon café, je me suis pris une mauvaise nouvelle dans la figure.  A vrai dire, ces nouvelles n'étaient pas mauvaises en elles-mêmes puisqu'elles ne me concernaient même pas directement pas plus qu'elles n'annonçaient de drames terribles. Non, elles m'ont juste apporté jour après jour la preuve ou du moins l'impression très nette que je vivais dans un monde devenu fou auquel je ne comprenais plus rien.



Je ne saurai même plus vous dire dans le détail ce qui m'a le plus affecté. Je me souviens par exemple que le fait de savoir que notre dernier Garde des sceaux. Jean-Jacques Urvoas, ait eu l'idée d'unifier les ministères de la justice et de l'intérieur au sein d'un super-ministère qu'il souhaitait baptiser du doux nom de "ministère de la règle et du droit" m'a laissé pantois. J'ai songé qu'il aurait pu rajouter le ministère de la santé pour psychiatriser les déviants tant qu'il y était. Je me souviens aussi que c'était un jour ou la RATP avait fait grève en soutien aux salariés de Good Year. Je m'étais étonné qu'un service public puisse ainsi déclencher une grève politique et puis je me suis vite dit qu'il fallait que je renonce à comprendre.



Je crois que ce jeudi, car c'était un jeudi, je me suis dit que plus que dans un monde de fou, il se pourrait que je commence à vivre dans une sorte de néo-fascime 2.0. Même si ce n'était pas l'idée que je me faisais du fascisme. Pour moi, le fascisme, ça avait la couleur et les odeurs des odyssées politiques d'avant-guerre. Ça portait l'uniforme et la casquette plate, c’était le fait de grands leaders charismatiques et paranoïaques faisant de grands meetings et haranguant les foules. Comme tout le monde, j'avais en tête les images de Hitler à Nuremberg ou les célèbres mouvements de mentons de Mussolini ou encore l'aspect débonnaire et néanmoins effrayant de Staline. Et puis mes deux parents étant nés avant guerre, j'en avais entendu parler maintes et maintes fois de ce conflit. Mais jamais je n'aurais cru que le fascisme, dont on nous rappelle toujours le bruit des bottes, soit le fruit de gens ternes en costumes gris.



Finalement je me suis dit que le début du fascisme c'était quand moi, et les autres bien sur, avions la nette impression que nos voix ne sont pas entendues, que l'on crie dans le désert pour enfin renoncer à simplement parler voire à penser. Renoncer à penser parce que le fait même de penser, de poser une analyse nous met face à des impossibilités cognitives, de blocages neuronaux. D'ailleurs, pourquoi parler de moi ou des autres, parce que ce dont ils se moquent vraiment, c'est du réel. Ce qu'ils nient, ce n'est ni moi, ni les autres, mais tout ce qui n'est pas eux. Ils nient tout ce qui est réel et n'appartient pas à leur environnement proche. Formés à la dure école de la politique, prompts à s’entretuer pour le pouvoir, n’ayant d’autre ligne d’horizon que les élections, leur réel n’est pas le notre.

Nous vivons un vrai totalitarisme même si ce terme peut sembler outré. Souvenons-nous que le propre du totalitarisme est d'aliéner les individus en niant leurs aspirations mais surtout en détournant leurs actions vers des buts choisis par le pouvoir. Ce totalitarisme est certes vécu avec plus de douceur et de confort parce que les dirigeants sont devenus habiles. Or si nous n'avons aucun problème à dénoncer cette aliénation lorsque l'on nous parle de sectes étranges ou de régimes exotiques maltraitant de manière évidente leurs populations, il nous est plus difficile de l'admettre pour nous. Parce que nous avons l'apparence de la liberté, parce que nous avons un droit de vote, etc. Et pourtant, nous n'en sommes pas moins enrôlés nous-mêmes dans un système aliénant. Peut-être qu'au-delà de toutes les explications savantes, le fascisme ce n'est que cela : obéir à des gens qui sont persuadés de mieux savoir que vous.



J'en étais là de mes réflexions en allant à mes rendez-vous ce jeudi matin lorsque j'ai retrouvé X, un patient libéra. Le pauvre était dans le même état que moi, en pire peut-être. Peut-être parce qu'il est ingénieur de formation. Parce que moi, j'ai été formé si ce n'est pour faire face à tout, du moins pour puiser dans mes connaissances afin de donner du sens à ce qui n'en a apparemment pas. La différence entre moi et mon patient X c'est juste de savoir d'où provient la souffrance mais pas toujours d'aller mieux. On fait ce que l'on peut. Si mes études m'ont permis de manipuler des outils de conceptualisation, ils ne me donnent aucun moyen d'agir pour autant. Je sais ce qui arrive mais je n'y peux rien.


Ayant étudié en mon jeune temps à l'INETOP, le triangle de Sigaut et la notion d’aliénation, de stratégie de défense et d'idéologie défensive de métier ne me sont pas inconnues. C'est même assez amusant d'utiliser ces notions de psychologie du travail à la vie de tous les jours. Mais aujourd'hui qu'on ne peut plus justement se laisser vivre parce que vivre dans ce monde de dingues est un vrai travail. Un travail qui consiste chaque jour et parfois chaque heure ou minute à se dire que "non je ne suis pas dingue".



Comme je l'expliquais dans un article très récent, François Sigaut a construit un triangle dans lequel, égo (moi) est en contact avec autrui par la médiation du réel. En situation de travail, cela signifie que la reconnaissance sociale ne peut s'obtenir que lorsque ces trois sommets sont liés. Que le lien entre égo et autrui soit rompu et c'est l'aliénation sociale qui s'installe. 

C'est ce que vécurent ou vivent encore de nombreux salariés dans la logique d'organisation scientifique voulue par Taylor ou par Ford. Dans ce cas, l'individu est considéré comme une machine, le bœuf Taylorien ou le chimpanzé  Fordien, qui n'a que des cadences à respecter. L'individu est exclu du processus de création au profit de la mystique du chef chez Ford ou de l'ingénieur chez Taylor, bref de ceux qui savent mieux. Comme le déclarait le médecin du travail de Ford à Bardamu dans Voyage au bout de la nuit : "l'ouvrier rêvé est un crétin, ce qu'il nous faut ce sont des chimpanzés".



Dans l’aliénation mentale, c'est le sujet qui voit la réalité telle qu'elle est alors qu'autrui, les autres l'ignorent totalement. La société, ou du moins ceux qui sont sensé la construire et lui donner une forme intelligible, rejette le sujet tout autant que le réel. Dans l'imagerie populaire, c'est le prolo qui trime durement pour un salaire de misère tandis que le patron fume de gros cigares en expliquant que s'il payait plus ses salariés, ceux-ci iraient boire leur augmentation ! C'est la négation de ce qui constitue un individu, à savoir sa subjectivité.
 
Aujourd'hui, l'aliéné social, ce n'est plus l'OS rivé à sa chaine, figure de la contestation issue des années soixante-dix, c'est bien plus de monde que cela. L'aliénation sociale concerne aujourd'hui toutes les couches de la population, au delà du statut privé-public, elle réunit les riches et les pauvres, les notables et les sans-grades. L'aliénation sociale concerne tout un chacun qui est confronté au réel.  C'est le téléspectateur lambda qui écoute le président de la République expliquer que "ça ne coûte rien, c'est l'état qui paye". La lutte des classes a volé en éclat au profit d'une autre fracture, celle existant entre ceux qui exercent un vrai métier et les autres.

Il serait effectivement très injuste de dire que l’aliénation sociale ne touche que les salariés du privé mais pas ceux du public. Je reçois ainsi de nombreux fonctionnaires qui vivent aussi la même aliénation sociale que les autres, quelque soit le statut qui les protège. Il serait donc plus juste de dire que si fracture il y a, elle existe entre ceux qui ont un vrai métier et les autres. Il y a donc ceux qui sont au front, quelle que soit la catégorie à laquelle ils appartiennent et ceux de l'arrière, les planqués, qui parfois ne font rien ou pas grand chose ou pire, décident pour nous. Il y a l'agriculteur et le technocrate européen, mais aussi le professeur, le guichetier de la Poste ou encore le médecin et leurs ministères de tutelle.

Dans mon cabinet, les aliénés sociaux, ce sont aussi bien ces salariés du privés qui se plaignent de l’empilage de taxes et de textes toujours plus nombreux. Mais ce sont aussi les magistrats ou les policiers qui se demandent à quoi ils servent ou ce professeur d'université qui a pris conscience que sa réelle fonction n'était pas d'enseigner mais de garder le plus longtemps possible des étudiants pour qu'ils n'aillent pas grossir le nombre des demandeurs d'emploi. C'est aussi ce scénariste qui a appris de lui-même à s'auto-éduquer, à brider son imagination, afin que les histoires qu'il propose aux producteurs veillent à respecter une doxa de bon aloi.

Cette aliénation sociale ressemble à s'y méprendre à une dépression noogène telle que la décrivait Victor Frankl. Sauf que dans le cas d'une dépression noogène, l'individu a perdu le sens de sa propre existence et se sent dans un vide existentiel. Dans le cadre de l’aliénation sociale, il n'y a pas perte de sens bien au contraire, le sens est trop présent. Les personnes ont l'impression qui perdure qu'ils vont bien dans le bon sens mais que quelqu'un a manipulé les cartes tant et si bien qu'ils ne s'y retrouvent plus. Ils savent exactement où aller mais le logiciel GPS qu'on leur impose les emmène ailleurs.



Finalement, face à cette aliénation sociale, pour tenir le coup, ne pas sombrer dans la dépression ou dans l'alcool, il faut développer des stratégies de défense. Élaborées au départ dans le cadre strict du travail afin de faire face aux souffrances importantes que peuvent constituer l'ennui et la peur, les stratégies de défense existent afin de résister psychiquement à l'agression que constituent certaines organisations du travail. Ces stratégies de défense peuvent aussi s'adapter à la vie quotidienne de tout individu confronté à l'aliénation sociale. Il s'agit donc pour tout un chacun de dominer la peur ou l'incompréhension face au monde en agissant sur la perception du risque. Ce déni de perception du risque permet de le chasser de la conscience.

Lorsque la pseudo-réalité nous agresse, lorsque l'on prend conscience que ce qui est décidé pour nous ne peut l'être que par des malades en pleine aliénation culturelle, cultivant juste l'entre-soi pour ne jamais sortir voir la réalité, l'important est de ne pas flancher, de rester debout en se disant que nous ne sommes ni fous ni inadaptés. Ce qui est parfois compliqué quand on est confronté aux délires de toutes sortes. Par exemple comment tenir quand est créé un secrétariat d'état à l'égalité réelle ? Comment gérer l'information selon laquelle l'UE voudrait interdire les bouilloires et les grille-pains à deux fentes ? Comment faire face à une situation dans laquelle on aurait l'impression de vivre dans un asile où les fous seraient non seulement déguisés en médecins mais en plus contrôleraient les traitements.



Bien sur, la meilleure solution serait que la société sorte de son aliénation culturelle et que le réel reprenne ses droits. C'est sans doute possible à la faveur d'un retour inopiné du réel. Les économistes et les businessmen pencheront pour un krach boursier en analysant des indices tandis que les croyants attendront l'apocalypse sagement en traquant les signes eschatologiques, tous étant persuadés que quelque chose d'important viendra sonner la fin de la récréation pour tout le monde. Chacun attend donc un événement salvateur, d'une révélation (apocalypse) économique ou religieuse. Beaucoup rêvent finalement que "ça pète" enfin. Mais bien des exemples passés montrent que le retour du réel, fruit d'une prise de conscience peut être long tant le déni est important.

Chacun trouvera en lui-même, en fonction de ce qu'il est psychiquement et de son environnement immédiat, la stratégie de défense la plus adaptée pour continuer à avancer sans sombrer. Qu'il s'agisse de garder des œillères en vivant dans le déni (ce n'est pas si grave après tout), d'atténuer sa souffrance en  interposant entre soi et le monde un filtre destiné à atténuer la douleur (drogue, alcool, etc.), de pratiquer le cynisme viril (ce monde est pourri mais tant pis je fonce pour y survivre), de nier ses vulnérabilités en tentant coûte que coûte de s'adapter (je suis un winner) ou encore de pratiquer l'humour et l'autodérision en soulignant chaque fois l’imbécillité du système, chacun fait pour le mieux.

On peut aussi à titre individuel adopter d'autres stratégies de défense. Dans ce cas, il s'agit de reconnaitre sa souffrance mais aussi de la transformer en quelque chose de positif. Ainsi chacun à son échelle peut-il adopter le rôle d'opposant au système. Qu'il adopte la stratégie du génie incompris, du précurseur, de l'excentrique clairvoyant ou encore du classique dissident en lutte contre le totalitarisme, les choix qui s'offrent à l'individu sont assez nombreux pour rester dans le système tout en s'en affranchissant au maximum. 
Celui qui accepte de ne pas jouer totalement le jeu en prenant le risque de passer pour un fou ou un inadapté social sortira forcément gagnant puisqu'à la fin, c'est toujours la grandeur d'âme qui décide. Tel Diogène répondant "ôte toi de mon soleil" à l'empereur Alexandre venu lui demander les secrets de son bonheur, ou encore comme ces opposants célèbres pour avoir affronté la tyrannie au prix de leur liberté, il faut tenter d'ériger son âme en citadelle intérieure comme disait Marc-Aurèle. Conformité en dehors et dissidence en dedans affirmait déjà Sénèque voici deux-mille ans. C'est plus facile à dire qu'à faire me direz-vous. On se prend juste à rêver d'une justice immanente qui ferait que cette souffrance psychologique ne soit pas vécue pour rien.

Ce jeudi matin, j'avais eu un rendez-vous annulé au dernier moment alors, avec mon ingénieur, nous avons pu commencer notre séance au café en terrasse. Il m'a demandé comme je faisais moi, pour résister. Je lui ai répondu, comme je l'expliquais au début de cet article que compte tenu de ma formation, j'avais un point de vue critique qui me permettait sans doute de trouver un sens à cette folie ce qui m'évitait de sombrer. Au moins à défaut d'autre chose, avait je sans doute les capacités à modéliser et conceptualiser tous ces problèmes. Enfin, je lui ai expliqué que finalement, je n'avais que fort peu de liens avec cette société aliénante. Nonobstant les fois où j'ouvre le journal ou écoute les nouvelles télévisées, ce que je fais finalement trop, je pense que mes interactions avec la société sont si ténues que je voyage en passager clandestin. Tout comme les autre, j'attends la chute seul sur mon radeau. Un patient exerçant la profession de chirurgien m'a expliqué que pour "survivre" à ce maelstrom de bêtises, il tentait de voyager d’oasis en oasis. J'ai trouvé la formule jolie.

Quant aux relations que j'ai conservées, qu'il s'agisse de certains de mes patients ou des quelques amis d'enfance que j'ai gardés et avec qui je partage encore quelque chose, je crois qu'ils sont suffisamment proches de moi en termes de valeurs pour qu'eux et moi constitutions un collectif de défense, comme on dirait en psychopathologie du travail,  assez efficace pour ne pas nous laisser trop abimer par ce monde de fous. C'est notre petit maquis à nous. On n'y fait rien de fabuleux, on se serre juste entre nous en attendant des jours meilleurs.

En ce sens, mes séances de caffing, dans la mesure où elles me permettent d'interagir avec des personnes dont je suis proches philosophiquement me permettent de tout supporter ou presque. Socialisme tyrannique, féminisme absolu, terrorisme à tous les étages, mesures économiques aberrantes, écologisme totalitaire, et j'en passe et des meilleures, ne peuvent rien contre un groupe soudé. Aussi m'efforcè-je quand j'entends une nouvelle qui me saisit d'effroi de me dire que ce sera une occasion d'en rire un peu plus tard.

"A l'intérieur, dissidence totale ! A l'extérieur, faisons comme tout le monde !"
 Sénèque