17 avril, 2012

Refaire le passé !


Hier mais je ne vous donnerai pas la date exacte, Lapinou m'appelle pour me traiter d'escroc en m'accusant d'avoir antidaté tous les derniers articles ! Comme tous les socialistes, Lapinou est prompt à voir la paille qui est dans l'oeil de son prochain mais pas la poutre qui est dans le sien !

Bon c'est vrai et alors ? Si la plateforme Blogspot qui héberge mon blog offre cette possibilité c'est pour que l'on s'en serve. Et puis, je ne sais pas mais cela me faisait profondément chier de constater que durant un mois je n'avais rien écrit. Je trouvais que cela contrevenait totalement à mon engagement de début d'année dans lequel je vous assurais qu'en 2012 je serais plus assidu.

Bon, je constatais que je ne respectais pas mes bonnes résolutions et c'était mal. Mais Dieu en son infinie mansuétude permet aujourd'hui au pêcheur repentant du net de revenir sur ses erreurs et de s'amender non seulement pour l'avenir mais aussi pour le passé.

Un jour si j'en ai la volonté et le désir j'arrêterai de fumer depuis cinq ans ! Et peut-être que si je suis en verve, je vous annoncerai le résultat des élections une semaine avant avec une fiabilité absolue !

Magie du net !

15 avril, 2012

Douleurs perçues !

Parfois le roi des animaux, l'homme, est à la merci d'un virus qui provoque le terrible rhume !

Chaque fois que j'ai un rhume, je vis un vrai cauchemar. Alors que j'aurais besoin de soutien, de tendresse, d'empathie, d'aide, en bref que l'on me comprenne, me plaigne et me vienne en aide, mon épouse au mieux se fiche de mes plaintes et au pire se met en colère en jugeant que je suis pénible !

Oui, alors qu'elle m'a épousé pour le meilleur et pour le pire, voici que lorsque le pire arrive, un rhume, elle me lâche totalement pour vaquer à ses occupations, me laissant avec mon nez bouché et mon activité cognitive réduite. Le monde est vraiment cruel mais j'ai trop lu les stoïciens pour m'en étonner. Alors je reste seul avec mon terrible rhume, me jetant avec le peu de forces qui me restent sur un doliprane ou un efferalgan pour tenter d'apaiser mon calvaire !

De plus, mon épouse comme toutes les femmes, a un sens pratique très développé mais n'est pas encline à comprendre des choses plus complexes et abstraites. C'est pourquoi notre couple, je suis celui qui pense tandis qu'elle remplit les déclarations d'impôt, signe les T.I.P. et les envoie, gère l'approvisionnement et de manière générale toutes ces menues tâches ancillaires. De mon côté, assis dans un fauteuil ou vautré sur un canapé, je lis des livres ou je surfe, avide de connaissances. La spécialisation de l'espèce est vraiment bien faite ne trouvez-vous pas ?

Parce que comme je lui dis souvent : comment peux-tu dire que je n'ai qu'un rhume et que je ne devrais pas me plaindre ? Es-tu donc en moi pour connaitre mon degré de souffrance ? Mes nocicepteurs sont-ils sans secrets pour toi pour que tu puisses ainsi invoquer de ma part un côté douillet alors tel n'est pas le cas mais que je serais plutôt une sorte de chêne solide sur lequel tu peux t'appuyer (enfin sauf pour les tâches ancillaires pour lesquelles je ne suis pas programmé) ?

Dans les faits, il semble que plusieurs recherches entreprises depuis le milieu des années deux-mille le prouvent, le ressenti de la douleur soit différent selon que l'on soit un homme ou une femme. On imagine que tandis que l'homme séparerait presque totalement douleur physique et douleur morale, la femme en soit incapable mélangeant allègrement les deux.

Dès lors, on peut imaginer que si les plaintes masculines en termes de douleurs morales soient moindres, c'est qu'ils possèdent ou plutôt croient posséder en eux-même les capacités de régler ce genre de problèmes par eux-mêmes. C'est bien connu que les hommes estiment pouvoir tout, tout seul et tout le temps. Ce qui nous vaut généralement une patientèle masculine bien plus abimée dans nos cabinets que la patientèle féminine. Parce que pour qu'il consulte, il faut que l'homme en soit à vouloir se pendre. Et encore ce n'est pas toujours évident !

Peut-être que cette surestimation de ses capacités cognitives à traiter tous les problèmes rend pour l'homme le simple rhume insupportable. Parce que si le rhume ne provoque pas une douleur intense, il rend suffisamment brumeux pour rendre impossible toute concentration et toute production de pensées durant quelques jours et ça, c'est insupportable ! Nous sommes, par un simple petit virus, soudainement privés de notre pouvoir et vidés de nos fonctions vitales qui font de nous des hommes. Tout se dérègle en même temps, on tousse, on renifle, on se mouche et on ne parvient plus à penser. Notre prestance, élément indispensable à notre existence, en prend un sacré coup.  Donc plutôt que de vous moquer de nous en inventant des expressions aussi foireuses que grippe d'homme comme au Québec par exemple, il faudrait sans doute s'intéresser aux répercussions d'un simple rhume sur notre destin d'homme !

Pour moi, ce n'est qu’intuitif mais je le tiens pour acquis, si un simple rhume est si difficile à vivre c'est que nous sommes le produit de la biologie et de constructions sociales qui font que pour un homme, ne plus penser et avoir le cerveau comme de la gelée est insupportable !

En revanche, il semblerait que pour les femmes, douleurs morales et physiques soient inextricablement liées. Une femme aurait plus vite mal et de façon plus intense qu'un homme quelle que soit la zone douloureuse selon des études de la Société Française d'Etudes de la Douleur. Des statistiques semblent démontrer que les femmes souffrent 150 fois plus de migraines, se plaignent 60 fois plus de douleurs aux genoux, 40 fois plus de douleurs cervicales et 30 fois plus de douleurs aux genoux. Pour comprendre cela, on ne possède que des hypothèses.

Ainsi, on peut imaginer que stimulé dès l'adolescence par les maux du cycle menstruel, le système nerveux féminin pourrait être plus réceptif à la douleur, un peu comme si la persistance de douleurs chroniques provoquaient une souffrance psychologique rendant les femmes plus réceptives aux douleurs physiques.

Les émotions semblent aussi jouer un rôle important en provoquant chez les femmes un ressenti différent en présence de douleur physique. Même si le circuit nerveux est identique entre les sexes, il se pourrait que les émotions comme l'appréhension, l'angoisse et le stress interfèrent davantage chez les femmes, ce que montre l'imagerie médicale. 

Dans une perspective psychosociale, une faiblesse de revenus, des situations de rupture, la précarité professionnelle ou encore la solitude peuvent former un contexte favorisant l'apparition de douleurs chroniques voire une somatisation. Alors que confrontés aux mêmes maux, un homme a plus de chances de trouver des dérivatifs.

Bref, les recherches le confirmeront sans doute ces prochaines années, si un homme enrhumé vit un calvaire, il semble pourtant que ce soit les femmes qui se plaignent le plus malgré la réputation que l'on nous fait d'être douillets ! 

C'est pour cela que tandis que je réclame justement que mon épouse me plaigne et me prodigque une attention constante quand j'ai un vilain rhume et que je me mouche (j'en ai les larmes aux yeux rien que de penser à cela), je ne la plains que rarement lorsque par hasard elle ose me faire part d'une douleur quelconque.

Là, je me redresse et d'un ton n'admettant aucune réplique, je lui explique doctement qu'en fait elle croit avoir mal mais que c'est dans sa tête et qu'en fait elle n'a rien, du moins rien d'assez grave qui puisse l'empêcher de vaquer à ses menues occupations auxquelles elle prend toujours plaisir (travaux administatifs, cuisine, ménage, logistique diverse et variée). 

Bien sur, peu avide de comprendre ce qui se passe en elle, elle ose se mettre en colère, me traitant de macho ou pire osant carrément me dire : ah la la quand toi tu as un rhume, tu geins comme une gamine mais moi je n'ai pas le droit de me plaindre !

Mais je ne renonce pas à l'édification patiente de sa culture scientifique en lui expliquant que tout cela est fort compliqué et qu'elle manque sincèrement de connaissances en psychologie, neurologie et endocrinologie pour admettre qu'en fait elle n'a pas si mal qu'elle le pense mais QU'ELLE CROIT AVOIR MAL ! 

Et lorsque malgré toute la patience dont je suis capable, elle reste butée, rejetant toutes mes explications, je me tais alors me contentant d'un : tu crois tout savoir mais est-ce que je te donne des cours de droit moi ? Non ! Ah si un jour tu pouvais avoir mon humilité et ne pas imaginer tout savoir !

Décidément si des études scientifiques récentes et à venir semblent prouver que les femmes seraient plus sensibles à la douleur que les hommes, il est certain que les avocats sont imbus de leur personne et croient tout connaitre !

12 avril, 2012

Nouvelle lubie !

Le pigeon paon c'est vraiment la classe !

Je suis sujet aux lubies. A un autre siècle on aurait dit de moi que j'étais une sorte de lunatique, c'est à dire étymologiquement, quelqu'un dont les comportements sont gouvernés par les mouvements de la lune. Quoique, je ne sois pas un lunatique stricto sensu, puisque ce terme servait auparavant à qualifier les personnes souffrant de troubles bipolaires. 

Je crois que l'on m'aurait qualifié autrement, on aurait dit de moi que j'étais un "original", forme plaisante, mesurée et aimable servant à désigner les individus un peu marginaux et étranges mais gentils. Une sorte d'idiot du village pas tout à fait idiot mais pas totalement intégré non plus, un type dont on se dit qu'il est à l'ouest mais pas suffisamment pour le classer dans les débiles patentés.

Bref, je suis comme je suis et je m'en fous. Et c'est vrai que je suis sujet aux lubies auxquelles je cède parfois comme Ulysse écoutant les sirènes. Ma dernière lubie ce sont les pigeons. Voici trois ans, moi qui suis doté de deux pieds gauches en guise de main, je me suis mis en tête de construire une volière. Il se trouve que dans mon jardin, j'avais un emplacement idéal où au milieu d'un massif d'arbustes, je m'étais dit qu'un édicule serait du plus charmant effet.

C'est ainsi que je me mis à construire de toutes pièces une volière. Pourquoi une volière d'ailleurs ? Je n'en sais rien. Peut-être parce que j'aime bien les oiseaux et qu'une volière ça fait cossu  dans un jardin. Allant chercher bardeaux, cornières métalliques et grillage à fines mailles et peinture, je me mis fiévreusement à réaliser ce que mon esprit dément m'avait fait entrevoir. Mes mains virevoltant, se saisissant tour à tour de la scie, du rabot, du tournevis et du pinceau, donnèrent ainsi naissance à une charmante construction que d'aucuns, beaucoup moins humbles que je ne suis auraient appelé une "folie" ou encore "fabrique de jardin" !

En vérité (je vous le dis), la réalisation s'est étalée sur trois ans car entre temps j'ai été l'objet d'autres crises lubiques qui m'ont amené à lâcher ma volière pour voler vers d'autres cieux. Mais en fin de compte, elle est maintenant là et bien là, sauf la porte que j'ai laissée traîner tout l'hiver dehors et qui se trouve maintenant gondolée et impropre à tout usage. Bon, le résultat est plus probant de loin parce que j'ai pu constater que si j'étais champion pour la manipulation abstraite de toutes les données possibles et inimaginables, je suis incapable de donner corps proprement à un projet. 

Petit déjà alors que je dessinais pourtant bien, je mettais de la peinture partout. Et mes vieux lecteurs se souviendront de mon expérience de maquettiste amateur qui m'a fait me poser la question de savoir si je n'étais pas un dyspraxique non diagnostiqué. Bref, esthète dans mes idées, je me mue en goret voire en verrat dès lors qu'il s'agit de faire quelque chose de mes mains ! Je me révèle donc comme étant un véritable intello pour qui toute praxis semble impossible ; ma demeure ce sont les cimes de la pensées et non la concrétisation vulgaire de projets. On se rassure comme on peut et d'ailleurs comme le me disait récemment un charmant patient venu de Lyon : le secret pour vivre bien c'est de se mentir à soi-même !

Pour parachever le tout, j'ai eu la sotte idée de me faire aider par Lapinou pour les finitions. Comme le pauvre garçon est aussi limité que moi en aptitudes manuelles, cela n'a pas transfiguré le résultat de ma démarche en termes de finitions. Quelle drôle d'idée ai-je donc eue de me faire aider par un socialiste ?

Ma volière est donc de guingois, peinturlurée à la va-vite et le toit est fuyard mais j'ai eu soin de le protéger par en dessous de longues feuilles de plastique transparent punaisées presqu'invisibles à moins de passer la tête par en dessous ce que personne ne fera jamais : malin le garçon non ? De toute manière, il faut vraiment l'observer de près pour voir qu'elle a été réalisée par le mec le moins manuel du monde. De loin, c'est à dire, vue de ma terrasse, elle est pleine de charme et on la croirait là depuis toujours. Et d'ailleurs si on m'en parle, je suis suffisamment imaginatif pour dire qu'elle était là bien avant que j'achète la maison.

En regardant mon oeuvre, je me demande encore comment un menuisier parvient à faire tenir des trucs d'équerre alors que j'en suis incapable. Diantre, parvenu en doctorat, je serais donc incapable de réaliser ce qu'un simple diplômé d'un CAP peut faire ?! Ayant peur de me trouver bien bête, je me dis juste qu'après tout, une Ferrari n'est pas faite pour aller faire ses courses au supermarché du coin ce qui ne veut pas dire qu'elle soit bien moins qu'une Renault Scénic, voilà tout. On se rassure comme on peut !

Et puis, en biologie, on estime que l'évolution est un processus par lequel des populations d'organismes vivants acquièrent et transmettent des traits biologiques nouveaux au travers des générations successives. Chaque espèce est donc le produit de l'évolution mais aussi de la spécialisation sur plusieurs milliards d'années. Et bien moi, ma spécialisation ce n'est pas le travail manuel, voilà tout !

Ma volière étant presque terminée, puisque je dois tout de même finir la porte, me voici donc dans la nécessité de la peupler. Et j'ai jeté mon dévolu sur les pigeons qui ne réclament vraiment qu'un entretien minimum. La lubie étant prise, je me suis jeté sur Amazon, achetant tout ce que la littérature sérieuse pouvait offrir à un amateur éclairé de colombiculture. A peine arrivés par la poste, je me suis jeté sur les trois ouvrages commandés que j'ai dévorés comme si ma vie en dépendait.

Je crois qu'aujourd'hui, alors que je n'ai jamais élevé le moindre pigeon de ma vie, je suis assez calé dans ce domaine pour en parler avec des spécialistes et m'en sortir honorablement. Mon côté intello et ma mémoire me sauveront toujours. A défaut de faire, d'être un grand réalisateur, je me débrouille suffisamment pour que mon absence totale d'expérience dans différents domaines ne soit jamais un handicap pour en parler savamment !

C'est ce que j'expliquais un jour à Laurence concernant sa curieuse pratique de juge de gymnastique. Je lui soutenais qu'après avoir lu une heure ou deux les documents qu'elle détenait sur le sujet, je me faisais fort de la remplacer au pied levé en m'en tirant avec les honneurs (alors qu'effectuer une simple roulade me paraîtrait difficile). Laurence avait réagi vivement comme si je minorais ses connaissances en m'accusant de vanité alors qu'il n'en était rien.

Pourtant, j'en suis persuadé, tous les domaines d'activités sont régis par une sorte d'algorithme qui en définit les bases et la logique. Il suffit de lire, de poser les bonnes équations et de le percer à jour. Après, vous devenez cordonnier avec un cordonnier, boucher avec un boucher, musicien avec un musicien et ...  colombophile avec un colombophile.

Bon voilà pourquoi j'étais un peu absent du blog, plongé dans la menuiserie et l'étude de la colombophilie. Me voici revenu et sans doute qu'un jour, je vous parlerai de coturniculture que j'ai pratiquée aussi en amateur voici quelques années.

Par contre j'ai laissé tomber l'idée de mettre des ruches dans mon jardin. L'apiculture c'est chiant et puis je ne mange pas tellement de miel. En tout cas, je suis sûr qu'il y a un Dieu pour moi parce que juste avant que la raison ne me rattrape, j'avais trouvé sur le bon coin, un lot de dix ruches à un prix défiant toute concurrence !

Le pigeon c'est moins pénible, ça s'élève tout seul et ça ne pique pas. Et puis qui sait, si un jour je deviens vraiment calé en pigeons, je prendrai peut-être une carte UMP pour me lancer en politique sérieusement !

06 avril, 2012

Les RH !

Photo conne utilisée pour illustrer l'entreprise "où l'on croit en l'homme" !

Récemment un de mes jeunes patients, je crois me souvenir que c'était un centralien ou peut-être un plus modeste Gadzart me parlait des RH en mettant en doute leurs compétences. Pardonnez-moi de citer les écoles mais bon, leur prestige rejaillit sur moi parce que je me dis que j'avais vu juste en estimant que mon lectorat était sans doute le plus brillant qui soit ! En revanche, je ne citerai pas les écoles de moindre importance parce qu'elles ne flattent pas assez mon gros ego et puis que de toute manière vous ne les connaîtriez peut-être même pas ?!

Bref ce jeune homme brillant que j'ai l'honneur de compter parmi mes lecteurs et patients, moi qui ne suis qu'un infâme vermisseau, mettait donc en doute la pertinence des choix de la RH de la société dans laquelle il végétait jusqu'à présent. Bien que je puisse servir de modèle à un sculpteur qui se proposerait de sculpter une allégorie à la neutralité, je ne pus qu'opiner vigoureusement du chef afin de manifester ma totale et entière adhésion à son jugement.

C'est vrai qu'en quinze de métier, j'ai vu un nombre incalculable de personnes en butte à de misérables tracasseries du fait de leur hiérarchie alors que personnellement je n'avais eu aucun problème avec ces personnes. Carrières empêchées, misérables vexations, procédures idiotes systématisées, etc., tout semble concourir pour dégoûter les gens d'aller bosser. Et il semblerait que plus la boîte soit importante, plus les erreurs augmentent comme si au fur et à mesure que le nombre de salariés croissait, les responsables des RH voyaient croître aussi leur niveau d'études et donc le fatras d'idioties qu'on apprend au sujet de la gestion des ressources humaines et qui transforme n'importe quel honnête homme en crétin pompeux.

C'est toujours assez amusant de voir des idiots incapables de sentir les choses et de prendre une décision par eux-mêmes s'entourer de systèmes-experts destinés à leur éviter les erreurs. Les procédures se mettent alors en place à grands renforts de tests psycho-techniques, de procédures apparemment mûrement élaborée mais finalement totalement arbitraires, de théories fumeuses, de grilles diverses et variées et d'évaluations, la totalité étant sensée aboutir au Graal : la totale objectivité !

Curieusement quand ces mêmes ingrédients sont administrés à une société cela donne au mieux une planification à la française et au pire l'URSS, en bref une sorte de monstre qui à l'instar de Chronos finit par dévorer ses enfants pour continuer à persister.

Le problème de cette manière de faire la RH est qu'elle repose sur une erreur consistant à confondre objectivité et vérité. En tant que telle, l'objectivité est ce qui caractérise un objet, par opposition à ce qui caractérise un sujet.Elle caractérise ce qui est propre à l'objet ou, plus généralement, ce qui constitue un objet. L'objectivité s'oppose donc à ce qui n'est qu’apparence, illusion ou fiction mais aussi à ce qui ne serait que mental ou spirituel et donc inobservable puisqu'uniquement ressenti. L'objectivité suppose donc l'invariance (ce qui ne change pas) et l'altérité (ce qui est différent de nous. On constate donc déjà la difficulté à réaliser cette objectivité lorsqu'il s'agit pour un individu d'en juger un autre !

Enfin dans une perspective épistémologique, rappelons que l'objectivité n'est pas synonyme de vérité ! L'objectivité constitue plus un gage de bonne foi, un indice de confiance, et une mesure de la qualité des faits rapportés que l'assurance de la vérité. Ainsi, en sciences dures, certaines théories étaient objectives en leur temps du fait des connaissances de l'époque tout en s'étant révélées fausses.

Dans la psychologie, le DSM frôle et s'enfonce même parfois dans cet écueil car en prétendant pourtant à l'objectivité. Ainsi même si son côté pratique est évident, il apparaît comme une sorte d'américanisation de la pathologie mentale, un fast-food du diagnostic, qui enferme dans le physique, l'observable, le symptôme pur et peu gradué, en faisant, et c'est le comble, le sacrifice de la vie psychique du patient. Des traits de caractères sont psychiatrisés à outrance tandis que des troubles de l'humeur sont totalement banalisés.

Tout ceci pour dire que les RH, une discipline qui devrait pourtant être liée intimement à la psychologie, lorsqu'elles ne sont issues que de procédures, celles où l'on fait venir un candidat dix fois par peur de se tromper dans un recrutement ou celles où l'on propose une grille de gestion de carrière sont généralement objectives mais d'une manière si limitées que cela confine parfois au ridicule. Parce que finalement la seule assurance que l'on ait, c'est que même si elles sont fausses, erronées et bâties sur des théories fumeuses, ceux qui  ont produit ces théories étaient sans doute de bonne foi ! Or, admettons que la bonne foi pour toute corpus de connaissance accouche le plus souvent de systèmes fantoches que de vérités. On se retrouve donc depuis Taylor avec une simplification à outrance de l'individu au travers de l'application erronée de ce que l'on appelle "les sciences de l'ingénieur" à un secteur bien plus complexe.

Finalement, le "nez", le "bon sens" ou encore "l'intuition" ou quelque soit le nom que l'on voudra donner à ce sixième sens que l'on possède tous en nous à des degrés divers possède sans doute autant de valeur que ces théories fumeuses. Même si ce fameux bon sens dont on se défie (parfois à juste raison) ne peut faire l'économie de certaines connaissances.

Mais avouez que dire que vous avez recruté untel parce que "vous le sentiez bien" a moins de gueule que d'expliquer que "le sujet a répondu positivement à la batterie de tests prévue dans le processus de recrutement" et si vous parsemez le tout d'anglicismes, ce sera encore mieux !

Après avoir discuté de tout cela avec mon patient, j'abordais alors le rôle de la psychologie du travail dans les RH. Et ma foi, autant que je puisse l'avoir constaté, je crois que les personnes recrutées aux RH sont le plus souvent de formation juridique et aptes à traiter les problèmes légaux qu'humains. La psychologie du travail, plutôt développée outre-atlantique, conserve pour l'entreprise française des relents de gauchismes et d'idéologie qui ne la font pas tellement apprécier.

Pourtant pour avoir suivi la formation en psychologie du travail à l'INETOP, je constate qu'au-delà des orientations idéologiques sous-jacentes, j'ai réellement obtenu bien plus de connaissances que celles que j'avais par exemple acquises auparavant dans un DEA d'organisation appliquée à l'IAE de Paris où ce que l'on m'a enseigné du management relevait plutôt du bricolage, que de connaissances issues de recherches effectives.

En bref, si vous vous intéressez aux RH, je ne puis que vous recommander la lecture de ces trois ouvrages :

  • Souffrance en France, Christophe Dejours, Point ;

  • La fonction psychologique du travail, Yves Clot, PUF ;

  • RH, les apports de la psychologie du travail, Lévy-Leboyer et coll., Editions de l'organisation ;


Forts de ces lectures, vous constaterez que les gauchistes n'ont pas toujours tort et vous aurez en outre l'insigne honneur et l'avantage certain d'avoir lu des ouvrages que peu de prétendus spécialises des RH ont lus ce qui vous donnera une longueur d'avance sur eux et vous permettra de comprendre des tas de trucs marrants comme tout que vous n'auriez même pas imaginés !

Ainsi, si à juste titre vous pensez que dans votre boîte les RH sont un ramassis de connards, et c'est votre droit le plus strict, apprenez à l'être moins qu'eux ! Bonne lecture.

03 avril, 2012

J'ai enfanté un monstre !

Thérapies pour nice guys, résultats assurés !

Tandis que les médecins m'envoient principalement une patientèle composée aux deux tiers de femmes, du blog m'arrivent deux tiers d'hommes composés en majorité d'ingénieurs. Depuis quelques temps, je rentre (pardonnez moi ce terme de garagiste) du Centralien, du Mines, du Pont, du Télécoms, ainsi que d'autres écoles moins prestigieuses. Que les diplômés d'autres écoles me pardonnent de ne pas citer leurs cursus mais c'est bien fait pour eux, ils n'avaient qu'à bosser plus et ne pas se contenter d'écoles avec prépas intégrées ! Qu'ils sachent cependant qu'en venant me consulter ils seront aussi bien traités que leurs camarades plus doués qu'eux ! 

Autant vous dire que parmi mes chers ingénieurs, fleurissent un certain nombre de geeks et autres nice guys, du genre à avoir fait des herbiers ou avoir été abonnés à Sciences et Vie Junior à l'adolescence ! C'est une clientèle toujours un peu compliquée mais assez sympathique quand on a compris comment les prendre ; Et puis, avouez que s'ils étaient aussi neuneus que ça, ils ne m'auraient pas choisi mais opté pour un confrère plus conventionnel et moins rigolo. Donc, même si cela ne saute pas toujours aux yeux quand ils sont assis devant vous avec leurs procédures toutes faites sur la vie et qu'ils vous regardent fixement au travers de leurs petits lunettes à montures métalliques (lunettes agréées ENM 1982 modèle juge d'instruction), je me dis que s'ils m'ont choisi, c'est que la base est bonne et qu'on en tirera quelque chose. Et puis je m'en fous, j'adore les défis.

C'est ainsi que je reçus le jeune X diplômé d'une école à prépa intégrée dont je ne citerai pas le nom parce qu'elle n'est pas assez prestigieuse pour que justement son prestige rejaillisse sur moi ! Dans le genre geek, on n'aurait pas pu faire mieux ! Je suis sûr qu'avant d'être abonné à Sciences-et-vie Junior, il avait vu étant enfant lire Okapi le magazine des enfants qui ne sont pas vraiment des enfants sans vraiment être des adultes. Désolé pour l'éditeur de ce magazine mais j'ai encore le souvenir vivace d'un bon copain de primaire qui y était abonné et que les aventures de Grabotte et Léonidas faisaient rire aux larmes alors que moi cela ne me faisait  même pas sourire et que de toute manière j'étais abonné au Journal de Mickey qui était bien plus drôle ! En revanche ma mère ne voulait jamais m'acheter Pif Gadget parce qu'il parait que ça finançait le parti communiste !

Bref, après l'avoir remis au travail, ce qui nécessita de ma part la nécessité de tronçonner le baobab qu'il avait dans sa main (ce qui l'a empêché d'ailleurs de faire une vraie prépa et une école prestigieuse), il fallu nous attaquer à son côté nice guy. Et là il y avait du boulot mais je le rappelle, la base était bonne parce que le jeune homme était du genre glandeur de talent et que je sentais qu'on pouvait en tirer quelque chose.

Vous dire ce que l'on a fait exactement, je ne saurais pas trop, vu que même si je pars toujours avec un plan d'attaque super carré j'en viens toujours à bosser un peu à l'arrache au fur et à mesure des séances en me rappelant tout de même qu'il y un boulot à faire pour lequel je suis payé.

Bref, on s'est vus régulièrement et j'ai du lui faire lire le bouquin de Glover, Trop gentil pour être heureux, le syndrome du chic type. Ensuite, on a du s'attaquer à un truc que mes petits camarades psychanalystes appelleraient l'idéal du moi avec des recettes éprouvées consistant à expliquer qu'il faut cesser de se mentir et de vouloir ressembler à quelqu'un que l'on n'est pas mais partir de ce que l'on est en élaguant le côté nice guy pour devenir un mec tout à fait bien. Bref, à l'opposé de ce que penserait Mistery qui persiste à vouloir faire jouer les mecs à contre-emploi, moi je pense qu'il est idiot de changer les gens mais qu'il suffit juste de petites touches et retouches pour transformer un geek ingénieur en mec tout à fait charmant. Bref, je suis un gros délicat qui travaille à la gouge et non au marteau-piqueur !

Bon mais de tout cela on s'en fout. Sauf que le petit ingénieur s'est mis à changer. Déjà il a trouvé son style, un truc assez curieux mais qui lui va bien, un look suranné mais marrant comme tout. Chaque fois que je le lui ouvre la porte, j'ai l'impression de voir un mec sorti du passé, un ingénieur de Sud-Aviation qui viendrait me présenter le futur biréacteur de tourisme sur lequel sa boîte bosse : le SE210 appelé aussi Caravelle ! Et ça c'est bien d'avoir trouvé son style parce que s'il avait voulu s'affubler d'un perfecto et de bottes en croco,  il aurait eu l'air déguisé pour ne pas dire l'air d'un con ! 

Et puis voici qu'il s'est mis à se chercher une activité un peu plus virile que la programmation et en farfouillant de-ci delà, voici qu'il s'est initié au tir sportif et que cela lui a plu. Et un jour tandis que nous avions rendez-vous, ne voilà-t-il pas que mon gentil geek embraye comme un fou sur les armes à feu, parlant de calibres et de munitions. J'écoute impavide mais un peu effrayé tout de même mon ex-gentil ingénieur me parler de la puissance de feu du Glock 17 et du Berreta 92F en admettant tout de même que le Sig P210 n'est pas mal tout de même à condition de ne pas se faire entuber en achetant une pâle copie fabriquée dans le genre du CZ99 ou du Astra A80. 

J'en reste sur le cul, soufflé, ébahi. Et voici qu'il se lance dans un cours sur les munitions en me parlant de joules, de Kgm et de recul avec une assurance et un ton tels qu'ils ne dépareillerait pas dans la bouche du responsable de l'armurerie d'un régiment étranger parachutiste. Comme il a épuisé sa batterie de smartphone, il me demande mon iPhone et ouvrant Safari, il me montre ensuite des tas de munitions en rigolant tout seul parce qu'après avoir trouvé un calibre 577 tyrannosaur il m'explique que là : "c'est carrément ovekill" !!! Et zou, après n'avoir parlé que de cela, il quitte le cabinet ravi de lui.

Quinze jours après, le voici qui revient pour sa séance bimensuelle, et là gaillardement le voici qu'il parle de gonzesses avec un recul et un humour carrément graveleux. Le pauvre gars qui ne savait pas comment choper se comporte en mufle patenté et ravi de l'être. Il me parle ainsi d'une ex quelconque qui lui aurait dit qu'en ce moment la vie était dure et qu'elle raclait les fonds de tiroir. Et lui, plutôt que de compatir, le voici qui ne trouve qu'à me répondre "les fonds de tiroir je m'en fous, c'est elle que j'aurais bien raclée !". Professionnel jusqu'au bout, je reste de marbre mais en moi je suis ébahi par ces résultats. Encore un mois ou deux et il se pointera en me tutoyant et m’appellera ma couille après m'avoir demandé une bière et posé son calibre sur la table basse et ses pieds sur une chaise !

Comme le docteur Frankenstein et sa créature, je crois que j'ai accouché d'un monstre ... d'un Gringeot !