09 avril, 2018

Utiitaires !



Mon article sur la Kangoo RXE m'a valu bien des commentaires enthousiasmés. Je ne me suis jamais déclaré comme étant le spécialiste en utilitaires même si une lubie m'a parfois conduit jusqu'à comparer les gammes d'utilitaires des constructeurs français. Mes lecteurs savent que je suis friand de connaissances stupides et inutiles.

Toutefois au cours d'un échange par mail avec un lecteur parisien, motard de surcroit, j'ai appris qu'il n'avait rien contre les utilisateurs de Kangoo. J'en ai été fort aise. Toutefois, comme il me sait amateur de deux roues, il m'a expliqué que son expérience parisienne de la moto l'avait amené à se méfier comme de la peste des Citroën Berlingo !

Il m'a expliqué que chaque fois, qu'on lui a fait une queue de poisson, ou grillé une priorité, c'était généralement un conducteur de Berlingo qui était l'auteur de l'infraction. Il m'a expliqué que si je voulais rester longtemps en vie à Paris en deux-roues, je devrais me méfier à tout prix de ces dangereux individus qui étaient sans conteste de vrais psychopathes.

Je lui ai dit que j'avais bien fait de choisir un Renault Kangoo RXE et il m'a de suite rassuré en m'expliquant qu'un être aussi exquis que moi ne saurait rouler en Citroën Berlingo qui était, me le répéta-t-il, le véhicule préféré des gens possédés et des assassins en puissance. D'après lui, tout conducteur de Berlingo devrait être fiché S.

Estimant l'information pertinente et intéressante, je me permets de la livrer ici à l'intention de mon lectorat roulant en moto ou en scooter à Paris. Apprenez à reconnaitre un Berlingo et si d'aventure vous en croisiez un, tenez vous sur vos gardes, ils sont dangereux !!!

Conducteurs de Berlingo, il est bien fini le temps de l'impunité ! Il est révolu le temps ou; après avoir fait une queue de poisson à un pauvre motard, vous pouviez vous enfuir, riant sous cape, en etant surs de votre impunité ! On vous à l’œil maintenant !

Procédure ou pas !


Dans mon métier, on voit de tout. Des choses graves ou pas graves. Je comprends que chacun voit midi à sa porte mais une partie de mon temps est consacré à dédramatiser des situations que mes chers patients dramatisent à outrance. Je ne leurs en veux absolument pas dans la mesure ou un simple rhume me donne déjà envie de choisir la meilleure des conventions obsèques afin que mon épouse ne débourse rien pour mes funérailles. Ce qui trouble l'homme, ce ne sont point les choses mais le jugement qu'il porte sur les choses, disait ce brave Epictete voici deux mille ans. Rien n'a changé.

Et puis parfois, il y a des personnes qui se présentent parce qu'ils vivent ou ont été victimes de situations gravissimes. Ainsi, ma seconde patiente; reçue voici déjà vingt ans, était venue me voir en me disant ces simples mots : voilà, j'ai une leucémie, je vais mourir et je voudrais savoir comment le dire à mon fils de neuf ans. Fort heureusement, après moult péripéties, elle n'est pas morte et n'a donc jamais eu à parler de sa fin proche à son fils.

Récemment, une personne est venue me consulter, venue de la part d'un ancien patient, en me disant qu'elle avait été violée dans son adolescence. Comme toujours ou presque, l'agresseur est un membre ou un proche de la famille. La situation a évolué dans la mesure ou il ne lui reste qu'un an pour porter plainte avant que l'action ne soit prescrite.

Et la question que cette personne m'a posé est de savoir si elle devait ou non porter plainte ? D'après ce que je ressens de cette personne, je n'ai pas à mettre en doute son témoignage. De toute manière, même si j'avais le moindre doute, il ne m'appartient pas de m'en ouvrir. C'est à la justice et à l’éventuel expert qui sera missionné de faire son travail. Moi, je reçois et j'écoute puis je conseille. Et là, il s'agissait pour cette personne de raconter son histoire à un tiers de confiance et d'avoir un avis qu'elle estimait éclairé.

Alors porter plainte ou non ? Je sais que la mode est aux justiciers et aux chevaliers blancs mais les choses sont plus compliquées que cela. Parce qu'il existe chez certains individus une résilience qui permet d'amortir les chocs psychologiques. Parfois, quand on a été traumatisé, on reçoit justice et d'autres fois non et on doit malheureusement faire avec. C'est là qu'entre en jeu la résilience qui fait qu'on va devoir vivre avec cet événement singulier tout en admettant que notre statut de victime ne sera jamais reconnu. C'est ainsi que certains devront vivre malgré ce qu'ils ont enduré sans jamais rien espérer et parfois même pas l’apaisement d'autrui. 

 J'ai le souvenir d'une patiente reçue pour des problèmes professionnels qui m'avait ainsi dit qu'elle avait été violée par son père. A l'époque, elle avait juste veillé à ce que cela n'arrive pas à sa plus jeune sœur mais avait préféré menacer son père sans le dénoncer pour ne pas briser la famille. C'était son choix. Pour elle, la simple culpabilité que ressentait son père lors de leurs rares rencontres dans les fêtes de familles était une juste consolation et un juste châtiment. Il avait mendié un pardon qu'elle ne lui avait jamais accordé. Il vivrait avec sa faute. Elle m'avait expliqué que rien n'aurait pu réparer l'outrage et surtout pas la justice. C'est vrai que la justice n'est pas toujours une panacée car elle n'a pas pour mission de réparer ce qui a été commis mais de sanctionner.

Dans le cas de cette personne venue me consulter récemment, je lui ai simplement demandé pourquoi il se "réveillait" tant de temps après alors qu'elle était autonome financièrement et affectivement depuis quelques années déjà. En fait, c'est en entendant parler du possible allongement de la durée de prescription qu'elle a pris conscience de tout cela; Jusqu'à maintenant, le viol dont il avait été victime était dans un coin de sa tête, tenu à distance et le seul lien qu'il avait entretenu avec ce traumatisme était cette possibilité qu'elle avait de porter plainte ou non ?

Sa question  a d'abord été de savoir ce que moi je ferais. J'ai répondu sincèrement en lui disant que de toute manière, n'ayant pas connu ce qu'elle avait connu, quoique je dise, cela resterait de la science fiction ou du roman. Parce que l'empathie est une réalité mais ne va pas jusqu'à croire qu'on est la personne en face de soi. Ou alors on est fou !

J'ai alors demandé son point de vue lequel était que même si les choses étaient actées, cette personne trouvait un peu "saumâtre" que l'agresseur n'ai jamais pris la peine de présenter des excuses, ce qu'il aurait pu faire à maintes reprises. Non, il a simplement nié l'évidence que tout le monde connaissait et a continué à fréquenter la famille de la personne comme si de rien n'était. Dans l'entourage, comme bien souvent, tout le monde s'est tu par peur du scandale.

J'ai compris sa démarche, je l'ai juste prévenue de ce qu'elle allait endurer. : le dépôt de plainte, la déposition, la confrontation puis sans aucun doute une expertise psychiatrique. non qu'il s'agisse de décourager cette personne mais simplement pour lui faire comprendre que tout cela réveillerait sans doute le traumatisme et que ce ne serait pas un parcours de santé. Et que le pire, c'est que son agresseur, tel que je le ressentais au travers de ce qu'il m'en avait dit, n'allais certainement pas se mettre à table et tout avouer mais nier et l'accuser elle de tous les maux et notamment de mentir. Je lui ai même dit que parfois, cela n'aboutissait à rien d'autre qu'un non lieu, les faits étant trop lointains et les preuves trop minces.

Parce que souvenons nous que les conseilleurs ne sont jamais les payeurs et que l'on sort rarement indemne de ce genre de procédures, surtout si elle n'aboutissent pas. C'est prendre le risque de rouvrir des plaies à peu près refermées depuis longtemps et pire encore, prendre le risque d'endurer une décision de justice qui rajoutera de l'injustice à celle que l'on a endurée. C'est aussi lors de ces affaires sordides, prendre le risque de voir la famille liguée contre soi parce que pour l'entourage, c'est du passé, quelque chose avec lequel tout le monde vivait et qu'on ne devait pas réveiller. Quelque chose qui devait rester dans un groupe restreint et non pas être étalé en public, avec des juges en plus ! Ça s'appelle un secret de famille.

La personne m'a dit qu'elle s'en foutait que l'important n'était pas la condamnation mais que l'agresseur, au travers de la procédure pénale, vive quelque chose d'aussi traumatisant psychologiquement qu'elle lors de l'agression. 

Je pense que sa décision était murement réfléchie, il ne lui restait plus qu'à trouver un bon avocat pénaliste et à lancer la procédure. Il ne s'agissait pas d'obtenir réparation mais, le délai de prescription approchant, de refuser de vivre avec ce souvenir, même s'il s'était atténué, tandis que l'agresseur coulerait des jours heureux sans jamais endurer les conséquences, mêmes minimes, de ses actes.

Cela m'a rappelé ce qu'un chirurgien disait; toutes choses par ailleurs, des erreurs médicales. Il expliquait qu'un patient pouvait pardonner une erreur, parce que c'est humain, mais que la morgue et le déni étaient ce qui généraient les procédures. 

Je comprends tout à fait cette démarche. Être face à quelqu'un qui nous a nuit et ne même pas parvenir à lui arracher un repentir sincère, ainsi qu'on est en droit de l'attendre dans un monde où les gens seraient tous en bonne santé mentale et feraient preuve d'empathie, est sas doute la pire des choses. Ça déshumanise, ça ravale au rang de sous-être, de chose sur laquelle on peut marcher sans s'excuser.  

Mais comme j'ai trouvé cette personne parfaitement équilibrée et tout à fait de taille à endurer une telle procédure, je lui ai dit que j'étais d'accord avec elle. Non que mon accord ait le moindre intérêt dans la bonne marche de la justice mais qu'elle était justement venue pour avoir du soutien dans le combat qu'elle s'apprêtait à mener.

Comme je lui ai dit, je ne suis pas sur du succès total de la démarche mais le simple fait de l'entreprendre va grandement déranger l'agresseur qui se croyait à l'abri de la moindre procédure depuis tant d'années et pensait exercer suffisamment de crainte à sa victime pour dormir sur ses deux oreilles. Et puis comme disait Guillaume d'Orange-Nassau :

« Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer »