23 novembre, 2018

Coiffeur de star !




Je ne sais plus qui me l'a envoyé ? Ah si, je m'en souviens, c'était sa voisine de palier que j'avais eue comme patiente l'année précédente. Une petite bonne femme de vingt-cinq ans très rigolote et très sympathique. La pauvre, venue à Paris depuis peu s'était vite confrontée au réel et ses rêves de gloire s'étaient écroulés. Alors aussitôt dit, aussitôt fait, je lui avais dit que plutôt que de psychologiser des heures, le socle d'une vie réussie c'était d'abord de trouver une forme de stabilité. Après elle pourrait se remettre à rêver si l'envie la reprenait.


Elle avait donc trouvé un travail plutôt intéressant et pas si mal payé mais bien loin de ces désirs d'autres fois et par la suite, un petit appartement refait à neuf pour un loyer très correct. Comme j'ai souvent du le dire, le réseau iil n'y a que ça. Et quand ça ne marche pas, il y a le réseau du réseau. Bref, une fois installée dans la vie avec CDI et logement, tout était allé pour le mieux. La petite, satisfaite de mes prestations m'avait envoyé deux ou trois personnes dont ce jeune homme.

Il a pris rendez vous et que je l'ai reçu un jeudi. Je m'en souviens j'avais eu une annulation et il a pris ce créneau immédiatement. J'ai songé que c'était quelqu'un qui se décidait vite. Il était passé juste après un patient exerçant le joli métier de commissaire aux comptes.

Quand j'ai ouvert la porte, j'ai tout de suite vu qu'il n'était pas commissaire aux comptes mais qu'il avait une profession comment dire un peu "artistique". C'était un petit gars, mince voire menu, affublé d'une moustache en guidon de vélo magnifique ! Sa manière de me saluer, son déhanchement et le ton de sa voix m'ont permis immédiatement de voir qu'il n'était pas fort des halles pas plus que salarié dans le secteur de la machine-outils. Je suis très fort en lecture froide, un vrai mentaliste !

Effectivement, il était coiffeur. Mais attention pas n'importe lequel. D'abord, il m'a parlé de sa drôle de vie qui n'avait pas toujours été si drôle que cela. On aura beau dire et faire, l'homosexualité se vit mieux dans le Marais à Paris ou au Castro à San Francisco, que dans un gros bourg de Haute Marne au milieu des champs. Il avait donc morflé. Et plus encore mais là, impossible de le révéler.

Toujours est-il qu'il m'a raconté ses malheurs durant cette première séance et qu'on a bien accrochés lui et moi. Alors que tout semblaient nous opposer, mon format et le sien, mon coté bourrin et son maniérisme, on s'est immédiatement bien entendus. Ca parait bête mais moi j'aime bien les gens qui font coïncider leurs paroles et leurs actes. Et c'était son cas. Car, derrière le petit coiffeur maniéré se dissimulait un type déterminé qui aurait pu en remontrer à bien des brutes côté courage. Il se révélait ambitieux et il avait les moyens de ses ambitions.

Je crois que je lui ai d'ailleurs dit lors de cette première séance. Il était assez angoissé et je lui ai dit qu'il était impressionnant. Et quand il m'a demandé pourquoi, je lui ai franchement répondu que sous ses airs maniérés, se dissimulait un petit gars avec une énorme paire de testicules. Ce n'était pas de la drague mais évidemment un compliment sincère. Il l'a pris comme tel et en a été très touché.

Finalement l'énorme problème pour lequel il venait me voir n'était compliqué à traiter. On a du le faire en deux ou trois séances. Puis, il m'a gardé comme une sorte de coach. Parce que j'ai toujours été persuadé que ce type, s'il menait convenablement sa carrière, aurait son salon à trente cinq ans et serait connu.

Autrant vous dire, mais vous vous en doutiez, que je me tape complètement de la coiffure. Et bien figurez-vous que ce petit gars m'a bluffé. Il était tellement geek et passionné par son métier qu'il a réussi à m'y intéresser. Je connais maintenant pas al de chose et si une patiente se pointe avec un balayage; je sais immédiatement si c'est un bon ou un mauvais qui lui a fait.

Bref (je dis souvent bref), ce petit gars a non seulement réussi à me toucher mais à m'intéresser à son métier d'une manière sincère. Je l'ai trouvé bon mais pas juste bon. Ce type est juste fait pour la coiffure et pour rien d'autre. Vous lui filez une touffe de cheveux emmêlée et il vous en sort un truc génial. C'est bluffant. Car si l'on pense que la coiffure c'est juste prendre une paire de ciseaux et couper en égalisant bien, après l'avoir connu, on se dit que la coiffure pourrait être une forme d'art.

Tant et si bien que j'ai voulu le mettre à l'épreuve. Ce qui tombait bien puisque le salon mondialement connu où il travaille ne le paye ps si bien que cela. Eh oui, à Paris la vie est chère. Saint Louis, le saint patron des coiffeurs devait veiller sur lui puisqu'à la même époque, je recevais Peggy.

Peggy, c'était une jeune femme très brillante revenant de loin. J'avais eu sa mère comme patiente qui me l'avait adressée. Ma mission c'était de faire en sorte que cette chère Peggy mette tout en oeuvre pour trouver enfin l'amour et faire des petits. Parce que si la réussite professionnelle était au rendez-vous pour Peggy, sa vie affective n'était qu'un grand désert.

J'avais pris les choses en mains. La mission n'était pas compliquée. Elle était grande, avait de 'allure et un très joli visage. Quelques kilos en moins, un relookage et une coupe de cheveux digne de cela auraient raison de son manque de confiance ; j'en étais sur. Ca avait plutôt bien marché. Le poids, elle l'avait perdu, près de trente kilos sans vraiment souffrir. Le look s'était amélioré parce qu'il est plus facile de s'habiller quand on se plait que lorsque l'on chercher à se dissimuler. Restait la coiffure.

Je lui en parlais régulièrement.Jusqu'à ce qu'un jour le petit coiffeur ait rendez vous juste après elle. J'ai prévenu Peggy que je recevais un as de la coiffure. Ce soir là, elle m'expliqua qu'elle était fatiguée et ne souhaitait pas parler de sa féminité. J'opinais en feignant de la comprendre.

Ceci dit quand mon petit coiffeur se pointa, je les présentai l'un à l'autre. S'il fallait attendre le bon vouloir des patients pour faire leur bien, je serais mort ! Et là, quelle leçon ! Etant du même âge, le coiffeur l'a tutoyé et en cinq minutes a tout deviné de l'infâme traitement qu'elle réservait à se chevelure. En quelques mots il lui a expliqué ce qu'il lui fallait et lui a proposé de venir à domicile la coiffer. Moi, en totale confiance j'ai rajouté que si cela ne lui plaisait pas, je remboursais la coupe. Il faut savoir s'engager et parier. Elle accepta !

La semaine suivante, j'attendais Peggy fébrilement, je savais que mon petit coiffeur était passé la veille la coiffer. Même si je lui faisais une totale confiance, il va sans dire que j'étais un peu anxieux. Mais lorsque je lui ouvrir, je ne pus retenir un cri de surprise du type "wooow" assorti d'un "putain" pas très élégant. Elle était métamorphosée ! C'était incroyable. Elle en était elle même ravie !

Et bien croyez le ou non, trois semaines après, elle rencontrait un mec avec qui elle est depuis quelques mois. Ca semble sérieux et ça me ravit vu que l'essentiel de mon job, c'est de rendre les gens heureux.

Évidemment, depuis il a coiffé une autre de mes patientes, toute aussi heureuse du résultalt. Quant à lui, cela lui permet de se faire sa clientèle ! Quant à moi, je suis ravi parce que j'aime bien prendre en compte la totalité d'un chantier qu'on me confie. Et s'il faut en passer par la coiffure, qu'à cela ne tienne.

Récemment, mon petit coiffeur passait après une de mes comtesses. J'ai un nombre non négligeable d'aristos-cathos dans ma clientèle dont cinq comtesses (titres de courtoisie). Cette comtesse là, est une grande brune fine et ayant belle allure/ Mais ses cheveux ! Quel désastre. Combien de fois lui ai je dit qu'être coiffée comme Morticia n'était pas la meilleure stratégie pour trouver l'amour. Mais rien n'y fait.


Cette fois dernière, coup de bol, je recevais mon petit coiffeur juste derrière elle. Elle avait accepté de mauvaise grâce d'avoir un avis professionnel. Moi je trouvais qu'elle avait les cheveux trop longs. Mais bon, je ne suis pas un figaro !

Voici que mon petit coiffeur de stars entre en scène. Je fais les présentations. Il commente techniquement la coupe de cheveux. Il m'explique que la longueur est bonne mais que c'est un problème de brushing. Moi, debout derrière lui, je ne moufte pas, j'apprends, je suis l'apprenti coiffeur. Il va alors se laver les mains et s'enquiert d'une brosse. Heureusement ma patiente en a une dans son sac. Il lui met alors la main dans les cheveux, les remue, fait je ne sais quoi, puis, se saisissant de la brosse lui intime de ne pas bouger. Et là, le miracle s'accomplit, la sage grande brune devient d'une seul coup une femme sexy ; moi je suis sur le cul. Ben oui c'est un métier. Et il le maitrise à la perfection. Et encore je vous passe le dialogue plutôt rigolo entre ma patiente et lui.

Ma patiente court devant un miroir se contempler et n'en revient pas. Elle est presque gênée de voir son potentiel érotique ainsi révélé mais cela lui déplait pas. Mon petit coiffeur lui explique alors comment faire son brushing et lui donne sa carte au cas ou. Une heure après, je recevrai un SMS dans lequel elle me dit  il est vraiment très doué.

Alors pourquoi parler de coiffure me direz vous ? Simplement parce que parfois un nouveau départ dans la vie c'est simplement une nouvelle coupe de cheveux. Et que sincèrement, en deux coups de brosse mon petit coiffeur a réussi là où je ramais depuis des mois. C'est une belle leçon d'humilité qui remet le psy et la psychologie à leurs justes places !

Les bons coiffeurs sont mes meilleurs concurrents !

18 novembre, 2018

Carnets de guerre !


Parce que tout le monde en parlait, la presse, les gens et mes patients, hier samedi, j'ai voulu voir de mes yeux ce que pouvait être le mouvement des gilets jaunes à Paris. Alors avec quelques comparses, Eddy, l'Antillais, Bag et le Pilote, nous y sommes allés. Ca me rappelait ce que le philosophe alain avait dit quand il s'était engagé à l'âge de 47 ans pour faire 14/18. Certes, ce n'était plus de son âge mais il ne se voyait pas vivre de loin ce que ses élèves auraient enduré. C'eut ét mauvais pour un philosophe.

Nous nous étions donné rendez-vous dans un coin cale pour déjeuner avant de "monter au front". Parce que, aussi stupide que cela semble, c'est l'impression que l'on avait. Ici à l'arrière, assis en terrasse chauffée, on était au calme. Et si ce n'était la présence éparse de quelques Gilets jaunes (GJ) dans la rue, on se serait cru comme n'importe quel samedi de n'importe quelle année. Ça nous a rappelé quelques pages de Céline, dans Voyage au bout de la nuit, quand en convalescence à Paris, il s'aperçoit qu'on dine toujours au restaurant et que des spectacles y sont proposés alors que lui et ses copains se font défoncer au front sous la mitraille et les obus.

Comme on papotait librement, un macroniste s'est immiscé dans notre conversation en nous rappelant que Macron avait été élu démocratiquement et qu'il fallait respecter les institutions. Le mec avait une trentaine d'années et des épaules de serpent et venait nous faire la la leçon. Bag qui est plus sanguin que moi lui aurait bien dit d'aller se faire enculer mais moi j'ai privilégié le dialogue. Ça n'a servi à rien puisque le mec était un adepte des tables rondes et des négociations. Alors que parfois, même si je n'aime pas ça, faut juste rentrer dans la gueule des gens qui vous emmerdent. Bref on était là comme de gros planqués sauf qu'on n'a pas pris de cafés parce que pour monter en ligne, mieux vaut avoir une vessie vide.

Et puis on a pris le métro et rejoint la ligne 1, celle qui traverse Paris d'ouest en est. Et là, les annonces ont commencé : la RATP diffusait un message avertissant que certaines stations étaient fermées en raison des événements. On devait donc descendre à la station Palais Royal et continuer à pied. Dans la rame, la présence de GJ était plus importante. Nous étions en civil, c'est à dire que nous n'avions pas revêtus de gilets jaunes. A ma décharge, je possède quatre voiture mais un seul gilet et Dieu seul sait dans laquelle il git, roulé en boule dans le coffre.

A peine débarqués, nous avons remonté la rue de Rivoli, totalement déserte si ce n'est quelques groupes épars qui allaient à la manifestation. La circulation ayant été coupée, aucune voiture ! L'ambiance commençait à changer. On sentait que l'on se rapprochait du front. Arrivés proches de la Concorde, tout au bout, nous nous sommes heurtés à un dispositif de CRS plutôt énervés. Dieu seul sait ce qu'ils avaient affronté. Toujours est-il que même si j'aurais adoré discuter avec eux et leur demander leur sentiment sur ce qui se passait, je n'ai pas osé le faire. Courageux mais guère téméraire, j'ai préféré, avec mes camarades, observer que de prendre des coups de matraques.

Là, on sentait déjà qu'on n'était pas loin. Entre les CRS en robocop et les déflagrations des grenades qui se faisaient entendre, on sentait qu'on était proche du front. On a donc décidé d'obliquer rue Saint Florentin, à droite pour rejoindre la rue Saint Honoré. Tout au bout, un dispositif, cette fois-ci de gendarmes bloquait l'accès à la rue Royale. Les gendarmes étaient plus cools. On a pu plaisanter avec eux. Ils n'étaient pas agressifs. D'ailleurs les GJ qui nous entouraient ne l'étaient pas non plus. Tout le monde leur demandait ce qu'ils pensaient de Macron et bien sur aucun n'a répondu. On s'en doutait mais ça nous a fait rigoler de voir des demi-sourires sur leurs visages. M'est avis que même si c'est leur job, ça ne les enchantait pas trop d'être là face à des gens plutôt pacifiques. Moi j'ai pas souvent l'occasion de discuter avec des gendarmes, même si j'en ai eu deux dans ma clientèle, alors ça me plaisait bien de pouvoir papoter avec eux. Mais bon, c'était pas vraiment le moment pour ça.

Alors on a rebroussé chemin rue Saint Honoré et on a obliqué à droite rue Duphot pour rejoindre la place de la Madeleine, vu que les bruits de déflagrations venaient de là. En remontant cette rue, on a pris la mesure de la violence des événements qui s'y déroulait. En sens inverse, descendaient des groupes épars de GJ, toussant, crachant, les yeux rougis par les lacrymogènes. On avait l'impression de monter en ligne remplacer les copains qui en revenaient. A un moment, avisant un groupe de GJ semblant particulièrement éprouvés, j'ai dit à Bag : regarde c'est tout ce qui reste du 172e RI ! Ils sont montés à huit-cents et il n'y a que cinquante rescapés.

C'était assez apocalyptique même si je sais que mes comparaisons avec la grande guerre sont outrées. C'est certain que c'était plus tranquille rue Duphot un samedi de novembre 2018 que Verdun en 2016. N'empêche que pour des gens, comme moi et mes amis, habitués à vivre en temps de paix, la fumée que l'on apercevait, montant derrière les immeubles, les déflagrations et ces gens gazés qui refluaient avaient un côté "guerre" indéniable. On est enfin arrivés à l'angle de la rue Duphot et du boulevard des Capucines. Et là, il y avait quelques centaines de GJ plutôt déterminés. Comme on n'était pas là pour juste observer, on est allés sur la place au contact avec les CRS. Il ne s'agissait pas de leur envoyer un quelconque projectile mais simplement de gueuler "Macron démission" a cinquante mètres d'eux. A un moment donné, j'ai dit à mes potes de reculer parce que je pressentais que les CRS allaient charger. C'est marrant, comme je sens ces trucs-là.

Et ça n'a pas raté, après une volée de grenades assourdissantes et lacrymogènes, les CRS ont chargé et les GJ se sont repliés en désordres. Heureusement que j'ai de la masse parce que sinon j'aurais pu être écrasé. J'ai fait comme les autres, j'ai mis mon surpoids en route et j'ai vite rappliqué à l'arrière, rue Duphot ou c'était calme. Bag ayant eu la bonne idée de prendre du sérum physiologique, on s'en est foutu dans les yeux parce qu'on en avait pris plein la gueule. Mais bon, c'était marrant comme tout. A ce moment, le fond de ma pensée, c'était qu'un peuple trop calme ne produit rien mais qu'il suffit de petites choses comme ça pour sentir naitre en soi des appétences pour la conquête. Se faire charger par les CRS et en prendre plein la tronche, ça remet les pendules à l'heure, ça permet de renouer avec sa virilité et ça canalise vite sa sensibilité. C'est ce qu'aurait dû proposer Jung à propos de l'Anima ! Elle est vite domptée l'Anima au contact de la violence. Ce n'est plus le moment de faire sa danseuse et de chouiner. Il en faut peu pour se sentir vivant. Les CRS sont de bons psys sans le savoir.


Quand nous étions en retrait, à l'abri des CRS, c'était sympa, on sentait une vraie camaraderie, comme dans les tranchées où l'instituteur jouait à la manille avec l'ouvrier agricole. C'était d'ailleurs ce qu'il y avait de plus drôle : cette mixité sociale ! Ce que tous les programmes d'inspiration socialiste n'ont jamais fait, Macron l'a fait ! A force d'être haï et détesté de tous, il a réussi à coller tous les français dans la rue. Et j'ai vu ce jour, l'aristo et le prolo fraterniser sur l'autel de la guerre à la fiscalité confiscatoire. En gros, c'était : bande d'enculés, si vous pensez que les bleus et leurs grenades vont nous faire reculer, vous vous gourez. Debout les morts ! Ils ne passeront pas. Bref, on est tous remontés au combat place de la Madeleine, histoire d'agacer les bleus et de savoir si on ne pourrait pas se faufiler vers L’Élysée ! Si j'avais pu y rentrer j'aurais été bien con parce que d'une part, Macron n'y était pas et que d'autre part, j'ai trop de respect pour le patrimoine pour le saccager. Mais bon, on aurait pu faire de supers photos pour les souvenirs. En plus, bien que je l'estime parfois nécessaire, la violence c'est pas mon truc. Ça part trop vite en couille !

De nouveau, les bleus qui connaissent leur boulot de maintien de l'ordre nous ont fait dégager à coups de grenades et on s'est repliés une fois encore. Mais qu'est-ce que c'était sympa de pouvoir continuer à gueuler "Macron démission" à gorge déployée. Je ne sais pas combien on était mais ça faisait du bruit et c'était chouette.  Le pauvre mec dans mon genre a de petits plaisirs parfois. A l'arrière, on a pu papoter. J'ai vu une femme très bien se plaindre d'avoir été gazée. La pauvre s'attendait à ce qu'elle soit entendue. Je lui ai dit que les CRS envoyait rarement des chocolats et que le maintien de l'ordre était à ce prix. Maintenant, soit on tenait, soit on repartait la queue entre les jambes. Mon pote le Pilote gueulait à la foule de tenir le carrefour pour qu'on ne soit pas encerclés. Et cet ancien militaire avait raison. Les flics sont malins et voulaient nous prendre dans une nasse. Finalement, on est retournés au contact et on s'en est repris plein la gueule mais on a tenu. Et le bourgeois a retenu la leçon : tant qu'il paye en fermant sa gueule tout va bien. Mais qu'il demande des comptes et on lui balance des grenades. Non camarade bourgeois, l'élu n'est pas ton ami, juste un type qui te trahira et fera tout pour garder ses prébendes.

Pas très loin j'ai vu un mec se faire crever un œil par un éclat de grenade. N'étant pas équipé et peu soucieux de perdre la vue, j'ai décidé de quitter la scène et de me replier. Parce que la guéguerre, c'est rigolo mais encore faut-il avoir prévu des lunettes de plongée, des gants et un masque à gaz. Nous étions venus en touristes et là, on sentait que ça se professionnalisait. Ça se crispait de part et d'autre. Les GJ étaient chauds comme la braise et allumaient des feux sur le boulevard des Capucines et de l'autre côté, on sentait la tension monter chez les bleus. Nous, on s'est dit qu'à notre grand âge c'était déjà bien sympa d'avoir été trois fois au contact. On avait fait de belles photos de nous devant le paysage apocalyptique de la Madeleine noyée dans les brumes des lacrymogènes et on avait fait le plein de souvenirs, le moment était venu de partir. On venait de vivre un moment historique et on pourrait dire qu'on avait "un peu" participé. Mon pote le Pilote a décidé de continuer le combat et a entrainé l'Antillais à sa suite. Il était sur de pouvoir rejoindre la rue Tronchet et de là, pouvoir passer aux Champs Élysées. Il a d'ailleurs réussi puisque le soir même il m'a envoyé de superbes vidéos sur What'sapp.

Nous, estimant qu'on avait fait œuvre utile mais que le moment était venu de plier les gaules, on s'est replié place du Marché Saint Honoré pour boire un coup en terrasse, de loin l’activité de loisir que l'on maitrise le mieux. On a discuté des deux heures que l'on venait de passer. Certes nous étions d'accord pour convenir que Macron était un pitre mais on n'imaginait pas qu'il le soit à ce point pour ne pas sentir que ce qui se passait allait au-delà d'une simple protestation. J'en ai profité pour faire une incursion en psychopathologie en expliquant que bien souvent les personnalités narcissiques finissaient mal parce que toute tentative de remise en cause en vue de négocier était une blessure atroce à leur narcissisme fragile. J'ai alors imaginé qu'entre lui et son gouvernement d'incapables, ça n'allait pas s'arranger.

Il faut vous dire, qu'étant né en 1967, j'ai eu l'habitude de voir des politiques, qui s'ils n'étaient pas au-dessus de tout soupçons avaient au moins le mérite d'avoir connu la guerre, certains s'y étant illustrés. Alors, RPR ou cocos, ils savaient identifier la violence et redouter l'embrasement. On s'est demandé ce qu'on ferait à la place de notre juvénile président. On a tous été d'accord qu'il fallait reculer parce que les événements étaient graves et ne pouvaient que s'envenimer. C'est un peu ce que j'avais retenu de ces deux heures passées à la Madeleine. Les gens étaient exaspérés et prêts à tout. Et pour une fois, ce n'était pas les manifestants professionnels qui étaient dans la rue, ceux que leur centrale syndicale fait rentrer dans le rang après les négociations, mais le peuple, la classe moyenne.

Et là, j'ai eu l'impression qu'être face aux CRS leur avait ôté les écailles des yeux. Ils comprenaient que les élus n'étaient plus leurs représentants mais une caste se goinfrant sur leurs dos bien à l'abri derrière les flics et les gendarmes. Enfin, j'avais noté que des gens à priori bien pacifiques étaient en train de prendre goût au sang et que cette manifestation ne serait pas la dernière. Si en 14-18, on a pu en quelques mois transformer des clercs de notaires et des ouvriers agricoles en "assassins" professionnels, je ne vois pas pourquoi il n'en serait pas de même aujourd'hui. J'ai maudit intérieurement ce gouvernement d'incapables pour son manque de discernement.

Ce que j'ai dit à mes amis, c'est qu'à la place de notre Président, le soir même j'aurais fait une allocution du type "je vous ai compris". Sans se renier trop, ni trop baisser son pantalon, il aurait suffi de dire qu'il avait voulu aller trop vite et n'avait pas pris la mesure des souffrances du peuple et ça passait. On baissait le prix de l'essence et on filait une prime qu'on finançait comme on pouvait et les fourches se seraient baissées. Hélas, Macron n'est pas un grand politique formé au combat mais un petit intrigant initié aux complots de cabinets. Il ne le fera pas. Il restera muré dans son mutisme et son narcissisme. Et puis, il n'a ni le physique, ni le passé pour jouer au père de la nation. Parce que qu'on le veuille ou non, et même si c'est une injure au chef de l'état :

Macron n'est qu'un petit con !

11 novembre, 2018

Il y a cent ans !

Voici cent ans, la terrible guerre de 14-18 prenait fin. Comme mes lecteurs habituels le savent, j'ai beaucoup lu sur ce conflit. D'une part parce que mes grands parents l'ont faite et ensuite parce qu'elle marque la transition entre une époque à laquelle j'aurais aimé vivre, la Belle époque, et ce monde moderne dominé par les USA que j'exècre. Ce n'est pas de ma faute si je préfère la compagnie de Proust, Huysmans et Fournier que celle de Steve Job ou de Microsoft. J'ai simplement du goût. Le marquis de Dion et son mécanicien Bouton ont plus de charme qu'Elon Musk et sa saloperie de Tesla.



Et puis la Grande guerre est arrivée et l'Europe s'est suicidée. Tout cela avec le jeu débiles des alliances et l'acte stupide de Gavrilo PrinciUn débile flingue un archiduc en costume d'opérette et zou, tout fout le camp. Cinq ans après, c'est la désolation. On comptera des millions de morts, d'estropiés, de veuves et d'orphelins. La France est morte en 14-18 et avec ele une kyrielle de jeunes écrivains et artistes. 



Voici quelques temps je vous avais expliqué qu'un jeune patient 'avait demandé ce qui avait le plus changé entre mon époque et la sienne. J'avais alors parlé de l'argent. Le gros argent étalé et un peu sale a effectivement changé les choses. Du moins il me semble. 

Ce qui a changé aussi, c'est que je suis la dernière génération à avoir connu des héros, anonymes ou pas. Actuellement, dans n'importe quelle série américaine, on croise un personnage ténébreux, un peu mutique, beau gosse et blasé, qui explique qu'il "était à Falloudja" comme s'il revenait de l'enfer. Et là, les gens se taisent face à tant d’héroïsme. Moi ça aurait tendance à me faire rigoler. Falloudja c'est environ 95 morts américains. Pour un pays ayant une tradition militaire comme le notre, Falloudja, reste une escarmouche, un galop d'essai, un heurt entre la coloniale et une tribu rebelle à la fin du XIXème siècle mais certainement pas un haut fait d'armes. Pour quiconque aurait quelques lettres et aurait lu Georges Darien, grand écrivain anarchiste, Falloudja, c'est bien moins terrible que Biribi le terrible bagne militaire installé en Afrique du Nord, ces terribles compagnies de discipline destinées à mater les plus rebelles.

Aujourd'hui qu'en en parle tant, j'ai conscience d'avoir discuté, fréquenté des gens, le plus souvent anonymes qui avaient fait l'histoire. Mobilisés un premier aout de 1914 pour aller faire une guerre qui ne devaient pas durer, ils y sont restés cinq ans pour les plus chanceux, moins pour ceux morts au champ d'honneur ou blessés grièvement.

J'étais jeune et ils étaient déjà vieux. Je me souviens de plusieurs d'entre eux. Mais l'un d'eux a particulièrement retenu mon attention parce qu'il avait un côté fascinant. Aujourd'hui, on dirait qu'il était perché. Et si l'on est psécialiste on dirait que c'était simplement un beau cas, bien réel, de syndrome de stress traumatique. A l'époque on ne comprenait pas, on les prenait pour des simulateurs. Puis on a fini par comprendre que soumis à un stress intense, certains n'avaient jamais repris leurs esprits. Comme on ne savait pas comment les traiter, on s'est contenté soit d'interner les plus atteints. Les autres ? Il se son débrouillés comme ils pouvaient. Ils ont eu de petites vies, de petites joies, des peines immenses et ils sont morts sans qu'on ne comprenne vraiment ce qui leur était arrivé. 

Qu'il s'agisse de soldats traumatisés par une bataille ou d'une mère devenue folle à la mort de tous ses fils, on se contentait de dire d'un air navré : le(la) pauvre, tous ces malheurs ça lui a tapé sur le ciboulot. On les appelait aussi "les malheureux" ou disait d'eux que leur esprit "battait la campagne". C'était à peu près le seul diagnostic fait par les braves gens. Sans doute que les spécialistes avaient un diagnostic plus savant mais comme ils étaient totalement démuni en termes de traitements, ça n'avançait pas les choses.
 
Celui que j'ai bien connu, il s'appelait Roger. Quand il a été mobilisé il était étudiant aux Beaux Arts. Autant vous dire, que muni de pinceaux et de sa palette, il était bien loin des faits d'armes. Mais la République, cette vieille catin, n'en a eu cure et a envoyé tous ses enfants, quels qu'ils soient à la guerre.

Roger avait été l'ami de Georges Braque mais dieu seul sait comment il l'avait connu. Peut-être parce qu'ils étient tous deux des anciens de 14, Braque ayant été très grièvement blessé à la Somme. Il parlait de Braque sans jalousie. Il était content de l'avoir connu comme si l'aura de ce grand peintre rejaillissait ainsi sur lui l'obscur. Il en parlait savamment. Parce que s'il était un peu étrange, en matière d'art, Roger avait un jugement sûr. Roger, n'avait pas eu "la chance" de Georges Braque. On m'avait expliqué qu'il était revenu de la guerre comme ça, uun peu bizarre et qu'il ne s'en était jamais remis. Pris dans les terribles bombardements lors de la bataille du Chemin des Dames ou était-ce de la seconde bataille de la Marne, je ne sais plus, le fait est qu'il avait été blessé mais surtout qu'il avait perdu la tête. Il n'a jamais fini les Beaux Arts mais il était devenu artiste peintre parce que c'était là sa passion.



Il vivait non loin de chez nous. Je ne l'ai jamais vu que juché sur un ridicule petit vélo avec lequel, quel que soit le temps, il allait et venait. C'est même étrange car à l'époque il était âgé et pourtant il allait en vélo. Il émanait de lui une sorte de jeunesse étonnante. De temps à autre, il prenait le train avec son matériel et s'en allait peindre, disparaissant quelques jours sans avertir personne. Il était étrange et lunaire mais d'une grande gentillesse. Déjà très jeune, j'avais conscience qu'il était "paumé" et c'est plus tard que mon père m'avait expliqué qu'il était comme cela depuis la guerre.

Mon grand père par solidarité, parce que lui aussi avait connu la guerre, lui achetait des toiles et lui en commandait. Je crois qu'il a peint la maison familiale par tous les temps. D'où j'écris, j'en ai une en face de moi, peinte par lui. Je ne suis pas sur qu'elle soit d'un grand intérêt artistique. En vous écrivant, je la fixe et je me dis qu'il n'avait peut être pas un talent immense. Mais la toile est jolie, agréable à regarder avec une touche personnelle qui fait que je reconnaitrai toujours une toile de ce vieux Roger. Il avait son style et si je ne suis pas critique d'art,  au moins savait-il peindre, ce qui de nos jours reste incroyable. A la mort de mon grand père, mon père a pris la suite. Il lui a acheté des toiles. Certaines étaient intéressantes d'autres moins. L'important, c'était de ne pas le laisser crever de faim. Et pour vivre, Roger n'avait qu'une maigre pension et pour toutes compétences, son talent de peintre.  Certaines fois Roger s'appliquait, d'autres fois non. Mais même la plus médiocre de ses toiles valait largement la production d'un artiste du dimanche.


Parfois il se murait dans sa solitude, battant la campagne, seul dans ses pensées, et on le croisait arpentant la ville sur son ridicule petit vélo. On n'avait pas de nouvelles et personne ne s'inquiétait parce que malgré tout, Roger, aussi étrange soit-il, revenait toujours à bon port. Parfois, comme un chien errant en manque de caresse, il venait chercher du contact. Dans ce cas, il pouvait passer plusieurs fois par semaine. Il ne restait pas longtemps sauf si mon père l'invitait à diner. Mon père prévenait ma mère qu'il resterait à diner et on rajoutait une assiette. Ce qui n'emballait pas ma mère parce que Roger n'était pas le convive idéal. Il restait quelques minutes avec nous, l'air presque normal, avant de se remettre à battre la campagne et de parler de ce qu'il avait connu mais aussi de peinture. Mon père discutait avec lui et je restais à les écouter.

Parfois, même si j'étais seul, Roger sonnait à la grille. Il se présentait à l'ancienne, jamais par son prénom mais par son nom. Il me disait : ah bonjour Philippe, c'est C., ton père est là ? Je lui disais que mon père n'était pas là et j'allais lui ouvrir la grille. Je le trouvais là tenant son ridicule petit vélo par le guidon. Il me saluait fort courtoisement avant de me répéter trois ou quatre fois "ah ton père n'est pas là, c'est bien dommage". Il prenait alors un air de chien battu que je ne savas pas bien décrypter. Jouait il la comédie dans le but de m'attendrit et de se faire offrir un café ou était il réellement triste.

Dans tous les cas, le sachant fort seul et d'une grande gentillesse, je le faisais rentrer. Je lui faisais alors un café. Il avait des gestes très précis. Il sucrait son café et le buvait à petites gorgées sans parler puis prenait de mes nouvelles et me donnait des siennes. Puis, invariablement il parlait d'art. Je n'ai jamais été passionné par la peinture à laquelle j'ai toujours préféré la sculpture. Mais lui, me fascinait. Il me parlait de peintres célèbres qu'il avait connus sans jamais avoir eu leurs succès. Et plus que ce qu'il me racontait, j'aimais ses extases, cette impression qu'il était branché sur quelque chose, auquel je n'aurais jamais accès. Aujourd'hui, l'impression qui me vient lorsque je me remémore ces souvenirs est la même que j'ai eue lorsque j'ai lu le Grand Meaulnes. Roger lorsqu'il me parlait me faisait pénétrer dans le domaine mystérieux d'Yvonne de Galais.
 
Cela m'amuse d'ailleurs toujours lorsque des patients me disent que je vais les trouver bizarres comme si la bizarrerie allait m'arrêter. A dix/douze ans, je conversais avec un peintre ancien du Chemin des Dames particulièrement perché sans être impressionné, alors croyez moi l'étrangeté ne me fait pas peur.

Roger pouvait à tout moment s'abimer dans sa songerie.Ça  arrivait d'un coup, d’un seul. Il parlait, finissait sa phrase, concluait l'entretien par une sorte de "bah oui, c'est ainsi" et il partait ailleurs.  Comme j'avais aussi mes occupations et que je savais qu'il était inutile de lui parler dans ces moments là, je l'installais dans le bureau de mon père, je lui laissais un paquet de cigarettes, un briquet et un cendrier et j'allais vaquer à mes occupations. Parfois mon père rentrait et le trouvait là pensif. Ils discutaient un peu et mon père chargeait son ridicule petit vélo dans le coffre de sa voiture pour le ramenez chez lui. Peut-être lui glissait-il un petit billet au passage mais cela, je ne l'ai jamais su. Mon père était quelqu'un de bien et n'aurait pas eu l'idée de faire de la publicité pour la charité qu'il faisait. Parfois, Roger sortait de son rêve et déçu que mon père ne soit pas encore là, partait tout seul. Je le raccompagnais alors à la grille et il me rappelait deux ou trois fois de ne pas oublier de dire à mon père qu'il était venu, ce que je ne manquais pas de faire.

Et puis il est mort assez âgé et seul. J'étais encore très jeune. Je ne saurais vous donner la date précise de son décès et plus personne ne se souvient sans doute de lui, si ce n'est votre serviteur en ce jour.  Il avait deux neveux qu'il voyait rarement mais qui étaient là le jour des obsèques. Une petite maison avec un beau terrain dans une jolie ville de banlieue ouest, ça valait tout de même quelque chose.

C'était un drôle de type, un homme âgé et étonnamment jeune à la fois, un peintre sans doute très moyen qui savait pourtant parler de peinture, C'était un de ces héros anonymes de la Grande Guerre dont on commémore le centenaire aujourd'hui. Un jeune type mobilisé comme tant d'autres, abimé par ce carnage et mort oublié de tous.

Aujourd'hui en ce onze novembre deux-mille-dix-huit, je lui dédie ce modeste article.

10 novembre, 2018

La femme qui se prenait pour un Scénic !



L'homme qui prenait sa femme pour un chapeau est un ouvrage d'Oliver Sacks,neurologue de profession, publié en 1985. C'est un recueil dans lequel l'auteur décrit les affections neurologiques « les plus bizarres » qu'il a rencontrées. Le titre provient du cas d'un homme atteint de prosopagnosie, qui savait reconnaître les objets composés de formes géométriques simples, comme un chapeau mais plus les visages comme dont le sien et celui de sa femme. 

Si ma patiente n'est atteinte d'aucune neuropathe grave, le fait est qu'elle m'a déclaré voici quelques temps que si elle était une voiture, elle serait une Scénic, un modèele Renault assez courant dont l'achat; selon elle; est guidé par l'aspect pratique plus que par le coup de coeur. Peu soucieux de la contrarier, je lui ai dit qu'elle ne manquait pas de qualités et que si elle était une Renault Scénic, elle serait sans aucun doute un modèle haut de gamme doté d'une sellerie cuir et de la climatisation automatique bizone. 

Car il en va du Scénic, comme du Kangoo ! De même qu'il existe un bas de gamme, il existe aussi une version luxe. Dans la gamme Kangoo, c'est le fameux RXE dont je vous ai déjà parlé et dont je suis propriétaire, pour les Scénic, c'est la version Initiale Maris (rien que ça) avec tout un tas de fourbi haut de gamme fourni avec la voiture dont je n'avais même pas idée que cela peut exiser vu que je roule toujours dans de vieilles bagnoles. 

A première vue, je ne retrouve pas ma patiente dans ce véhicule courtaud et un peu pataud vu qu'elle es petite, blonde et menue. Au jeu du portrait chinois, vous savez ce jeu pénible qui consiste à répondre à des questions du genre "et si vous étiez une fleur (ou une bagnole) vous seriez quoi, je l'aurais plutôt perçue comme un petit cabriolet que comme un monospace. Mais bon, elle est libre de se comparer à ce qu'elle veut. Après tout, c'est elle qui le vit !


Personnellement, je n'ai jamais eu l'idée de me comparer à une voiture au jeu du portrait chinois. Mais si je devais être une voiture, je serais ? Qu'est ce que je serais ? Je n'en ai aucune idée. Disons qu'étant plutôt doté d'un volume important, je ne serais pas une voiture de sport, c'est certain. Tenez je me vois bien en antique Volvo 240 break, une bagnole increvable ayant fait les délices de la profession d'antiquaire vu qu'on pouvait y charger une armoire normande sans laisser le hayon ouvert.

D'ailleurs j'adore cette voiture même que parfois, à l'insu de mon épouse qui me croit sur Wikipedia, je regarde les annonces de vente de Volvo 240 sur Le bon coin en rêvant de m'n offrir une. Mais une essence parce que le moteur Man qui équipait les versions diesel semble être une merde sans nom. Oui, vous l'aurez compris, moi qui suis champion de la perte de temps, il a fallu que je lise les forums Volvo afin de tout connaitre d'une voiture que je ne posséderai jamais. Sur le moment, ça me fait rire mais quand j'y réfléchis, je me dis que si j'avais investi tout ce temps perdu à des projets intelligents, je serais sans doute très riche et influent comme Gérald Darmanin ou Bruno Lemaire !


Mais revenons à ma patiente. D'un point de vue objectif, elle est plutôt mignonne mais à la limite, ça on sen fout parce qu'il y en a plein. Enfin, précisons qu'elle est très mal coiffée. C'est d'autant plus rageantpuisque j'ai dans ma clientèle un coiffeur de star qui fait des miracles pour un prix modique quand je lui envoie des patientes. Et croyez moi, il connait son métier. Voici quelques mois, je lui ai envoyé une patiente à qui a il a fait payer soixante euros la coupe au lieu de quatre-cents euros. Si ça c'est pas du social et du piston !

Mais bon, quand j'ai abordé le sujet avec ma patiente qui se prend pour un Scénic, y'a rien eu à faire. Elle m'a objecté qu'elle avait le cheveu fin. Comme si mon coiffeur de star ne triomphait pas du cheveu fin ! Ah cet orgueil de jeune femme diplômée de Sciences-Po qui pense que si l'on n'est pas issu de l'IEP on n'est qu'un bon à rien. Tant pis pour elle ! 

Dans les faits, pourquoi se prend t elle pour une Scénic, cette voiture pratique que personne n'achète sur un coup de coeur mais simplement parce qu'elle correspond à une étape de sa vie, comme le fait d'avoir trois enfants; un chien et des trucs à transporter ?

Simplement parce qu'elle a une mauvaise image d'elle-même et qu'elle connait si peu les hommes qu'elle reste persuadée que, hormis pour les salopes à gros nichons, il n'y a aucun salut à attendre d'eux. Il faut dire que si l'ons e réfère au panorama télévisuel, les femmes que l'on nous montre relèvent plus souvent de la salope aventurière prête à tout plutôt que de la petite blonde de bonne famille brillante.

Car si elle est coiffée comme un dessous de bras, ma patiente est extrêmement brillante. Elle dispose ce qui est rare : l'instinct de finesse. En plus elle pratique l'humour noir et a très mauvais esprit, ce qui constitue un grand intérêt. Hélas, quelle que soit les qualités que je pointe, elle reste persuadée de n'être qu'une Scénic dans un monde où seules les salopes à gros nichons et faible QI prospèrent. 

Ce qui est évidemment faux. Comme il faut de tout pour faire un monde, il faut de tout pour tout le monde.Et je connais un tas de types brillants qui après avoir lancé un regard salace à la salope à gros nichons épouseront pour autant la fille bien. D'abord parce que ce son des gens bien et qu'ils ne se verraient pas amener à la table familiale une gonzesse qui allumerait leur père mais aussi parce que soucieux d'avoir des enfants, ils préféreront tout de même que ces derniers soiet d'eux plutôt que d'un mec rencontré par hasard à la salle de sport avec lequel leur salope à gros nichons aurait fait des galipettes.

Bref le monde étant bien fait, il n'y a pas de Scnéic ou de voitures de sport en matière de femmes. Il y a des femmes bien, qui peuvent être salopes ce qu'il faut mais fidèles et de grosses catins. Et soucieux de ne pas être taxé de sexisme, j'en ai autant à propos des mecs. Il y a de gros toquards mais aussi ds mecs bien qui pour autant ne sont pas forcément des trous du cul vissés devant leur ordinateur.

D'ailleurs un mec comme le Gringeot, mâle parmi les mâles, qui a couché avec plus de femmes qu'il n'y a de cheveux sur la tête de Sébastien Folin, animateur plus connu pour sa luxuriance capillaire que pour sa carrière, ne s'y est pas trompé puisqu'il vit avec une femme bien. Même si je le soupçonne, à raison, de mater de temps à autre, les salopes à gros nichons qu'il croise sur son chemin.






D'ailleurs, ne nous y trompons pas, même les grandes horizontales, comme on appela les demi-mondaines de la Belle époque, n'étaient pas que des catins mais s'étaient efforcées de parfaire leur éducation pour avoir l'air de femme bien. Car sinon, Liane de Pougy, Isabelle Otero ou Émilienne d'Alençon, auraient pratiqué dans des bordels militaires plutôt qu'avec les têtes couronnées de l'époque. Coucher c'est bien, mais avoir une femme avec qui l'on peut partager plein de choses et que l'on peut sortir dans tous les milieux c'est bien aussi. 


Alors, puisque je sais qu'elle me lira, vu que je lui avais dit que je ferais un article sur sa curieuse comparaison, j'enjoins donc à ma chère patiente de cesser tout cela et la prie de se considérer désormais comme quelqu'un de bien. Voilà, ça c'est de la thérapie express. 

Le plus drôle c'est qu'en juillet dernier, alors qu'elle était entre deux emplois, ma patiente est venu au cafing. Ce jour là, sans le savoir elle a fait forte impression. Les gens l'ont trouvée mignonne et extrêmement intelligente. Et ça c'était l'avis du banquier, un mec aussi riche que mon ami Olivier qui a réussi et roule en Ferrari et Le Touffier, un chirurgien vachement intelligent et très riche aussi. Bon, c'est sur que les deux avaient l'âge d'être le père de ma patiente mais n'empêche qu'elle a fait forte impression. Y'a que la coiffure qui n'a pas suscité d'éloge vu qu'elle est mal coiffée. Voilà c'est dit et redit, si elle me flingue mercredi quand je la verrai, je ne l'aurais pas volé !

D'ailleurs puisqu je parle de mon ami Olivier, qui est riche, a réussi et roule en Ferrari, le plus drôle c'est qu'il ne roule pratiquement jamais avec vu que c'est pas une bagnole fiable. Il lui préfère sa BMWqui démarre au quart de tour et ne le laissera pas en rade sur la route. 

Voilà c'est ainsi, on est ce qu'on est. Et c'est un mec qui se compare à une Volvo 240, et ce sans aucun complexe, qui vous l'affirme.

PS : le coiffeur que je connais est vraiment très bien même avec les cheveux fins.