30 juin, 2014

Le mort de faim !


Je connais un type, un de mes patients, qui pour diverses raisons, est resté en état semi-comateux depuis trente ans. Ayant branché le pilotage automatique, il s'est contenté de peu. Un psychiatre dirait qu'il était "stabilisé". C'est leur mot pour désigner leur mission : rendre quelqu'un inoffensif envers lui-même et les autres.

Pour cela c'est simple, soit on prescrit des médicaments soit on encourage le patient à adopter des attitudes l'amputant totalement et définitivement de ce qu'il est. Mais certaines personnes sont si douées qu'elles savent d'elles-mêmes et sans le recours à la faculté s'administrer le même traitement.

Elles font alors de leur vie, si ce n'est un enfer, du moins quelque chose de morne et triste. Et comme l'esprit humain s'habitue à tout, nous encourageant à croire à l'évidente plasticité du cerveau, elles parviennent ainsi à vivre ainsi qu'un condamné au mitard, en voyant passer les jours les uns après les autres comme le condamné qui dessinerait des petits bâtons sur les murs de sa cellule.

Alors voici que ce pauvre type, au bout de trente ans de mitard, retrouve par le plus grand des hasards son amour de jeunesse. Certes les années ont passé mais le mythe est encore vivace. C'était la femme de sa vie, ce sera encore celle-la. Et le voici qui fait des kilomètres pour la retrouver tous les weekends, ne sachant que lui offrir pour la mériter de nouveau.

Elle l'a connu adolescent alors vous pensez si elle sait tout de lui, tout de ce qu'il était avant de devenir cet homme pénétré de sagesse. Ses fausses certitudes sur la vie et l'avenir, elle n'en a cure, elle sait aisément accéder à son intimité émotionnelle qu'il tente maladroitement de cacher derrière des défenses assez communes. 

Elle n'a pas de talent particulier si ce n'est le talent de ceux qui pensent avoir tout compris et osent en croyant agir volontairement alors que tout ce qui se joue existe malgré eux. Un peu comme un enfant qui soufflerait en l'air et verrait les nuages bouger, elle ne se rend pas compte que le processus qui s'opère existe malgré elle et non à cause d'elle.

Quant à lui, ce benêt, il a tant abdiqué émotionnellement qu'il est prêt à croire à ces tours de magie. Alors à deux, ils s'enfoncent dans une histoire d'amour qui n'en est pas vraiment une. Tandis qu'elle lui enseigne ce qu'elle croit avoir compris de l'âme humaine, au prix d'une longue psychanalyse, lui avale tout comme un seul homme, croyant avoir trouvé le Graal ! Alors que l'infirmière vient juste de lui planter une perfusion de glucose dans le bras, il se croit attablé chez Ducasse.

Le voilà qui revit et l'infirmière lui parle et parle encore. L'un et l'autre, tels deux fous engagés dans une folie à deux, croient dur comme fer à ce qui leur arrive. Elle toute fière de ses acquis psychanalytique se persuade qu'elle lui donne le meilleur sans se douter qu'il ne s'agit que de glucose. Lui, mort de faim depuis trop longtemps, se convainc que le quignon qu'on lui a donné à rogner est ce qu'il attendait depuis toujours et que ce n'est que le début.

Mais ce qui se jouait n'était qu'un transfert et contre-transfert. Tandis que personne n'aurait pu l'aider tant il était muré dans sa solitude et ses certitudes, elle l'a pu sans s'en rendre compte. Amour de jeunesse nimbées de tendres souvenirs de ces temps mille fois bénis, ce sont ces réminiscences qui ont agi et ouvert le coeur hibernant de notre vieil ours.

Et comme elle n'était pas si maligne que cela, elle n'a rien compris de ce qu'elle avait fait. Elle avait la clé de son cœur, le code secret qui ouvrirait le coffre de ses sentiments et elle en a usé. Elle a ouvert la lourde porte d'acier qui gardait là intact ces joyaux mais n'en a eu cure. Car une fois dans ce coffre, elle a jugé qu'il sentait le renfermé et que la poussière s'y était accumulée. Toute autre qu'elle aurait été ravie de se parer d'aussi merveilleuses pierreries mais elle, s'est juste empressée de prendre plumeau et chiffon pour tenter de nettoyer la grotte aux trésors.

Quand le sage montre la lune du doigt, l'idiot regarde le doigt, dit un proverbe chinois tellement vrai. C'est sans doute ce qui s'est passé. Peu importe que l'histoire n'ait pas marché. Au pire c'eut été un moment de grâce, comme celui que Blondin nous fait traverser dans Un singe en hiver. Gabriel Fouquet et Albert Quentin reparte chacun de leur côté mais il s'est passé quelque chose ! 

Tandis que là, elle est repartie sans jamais rien comprendre tandis qu'il se lamente d'avoir été si adorablement appâté sans qu'il n'y ait eu de suite. Après sa perfusion de glucose, il s'attendait à de l'Ambroisie, il n'aura eu qu'une soupe claire dans laquelle nageait quelques morceaux gras de psychologie rudimentaire, de l'aliment pour neuneu sous-cortiqué. 

Elle ne le comprendra jamais et croit dur comme fer aux fausses raisons qu'elle se donne. Lui, il est si sensible qu'il se demandera toujours ce qu'il n'a pas su offrir pour continuer avec elle.

Pauvre bonhomme, elle ne te méritait plus. Parfaite ou presque à quinze ans, peut-être n'a-t-elle pas donné tout ce que tu avais rêvé qu'elle produise. Toutes les vignes ne promettent pas de grands crus classés et certains petits vins sont tout juste bons à boire immédiatement.

Elle aura su le réveiller et c'est éjà ça. Maintenant qu'il a compris qu'il avait encore faim et qu'il n'était pas un mort vivant, il lui reste à trouver celle qui saura se montrer à la hauteur. En attendant, remercions la Providence de ce cadeau qu'elle lui aura fait sans s'en rendre compte : le ramener à la vie. Et quand on connait son métier, c'est un joli pied-de-nez du destin. 

Et puisque j'en étais à citer Nicola Sirkis dans l'article précédent, pourquoi ne pas citer carrément Michel Fugain ?

C'est un beau roman, c'est une belle histoire
C'est une romance d'aujourd'hui
Il rentrait chez lui, là-haut vers le brouillard
Elle descendait dans le midi, le midi
Ils se sont trouvés au bord du chemin
Sur l'autoroute des vacances
C'était sans doute un jour de chance
Ils avaient le ciel à portée de main
Un cadeau de la providence
Alors pourquoi penser au lendemain
Une belle histoire, Michel Fugain, 1972

29 juin, 2014

Peopolization et tolérance !


Jean Sablon et moi au Stade de France !

L'intérêt d'avoir quelques notables, personnes connues voire quelques peoples dans sa clientèle c'est qu'on peut jouer le crevard et être invité un peu partout comme si l'on était soi-même un people. Pour moi, lorsque cela arrive, c'est l'heure de gloire, la minute de vraie vie, l'instant magique qui me sort de ma médiocrité et qui me fait dire que j'ai beau rouler en Visa, je ne suis pas n'importe qui quand-même !

Vendredi soir, j'étais ainsi au Stade de France. Comme j'avais plusieurs places, j'ai emmené Lapinou et sa copine Lison et puis Jean Sablon, parce que lui, il ne fait jamais rien et que c'est un peu un dalleux et que boire et bouffer à l’œil, il aime bien.

Pendant que les fans avaient passé la nuit sur place pour espérer avoir une bonne place sur la pelouse, moi je suis arrivé juste à l'heure en retirant les places à mon nom. Et on nous a bien précisé de mettre les bracelets noirs. A peine passés le contrôle de sécurité, effectivement une jeune nana avisant nos bracelets s'est chargée de nous emmener dans les tribunes.

Le plus rigolo c'est quand deux nanas m'ont demandé comment on faisait pour avoir ces bracelets et moi j’ai juste répondu que je n'en savais rien et que c'était mon attachée de presse qui réglait les détails en désignant la petite Lison. Putain quel gros con je peux être quand je m'y mets ! Heureusement que je suis un obscur parce que sinon j'aurais la grosse tête et que j'organiserais sans doute mes anniversaires à la Voile rouge en prenant une douche au champagne ! De toute manière, l'établissement étant fermé, je ne regrette rien ! Mais bon, croyez-moi avec de l'argent et de la notoriété, j'aurais fini socialiste ! Plein aux as et sans vergogne, j'aurais maltraité ma femme de ménage en défendant les sans-papiers, j'aurais milité pour l'élection de Hollande tout en optimisant ma stratégie fiscale.

Moi qui ne suis rien, j'aime bien observer les nantis et les puissants et notamment les fameux peoples. Ils sont rigolos à regarder. Comme la place grouillait de gens connus, c'était assez drôle d'observer ces gens en buvant du champagne. Jean Sablon et moi étant parfois un peu langues de putes, du fait de notre anima qui nous fait nous comporter comme des mégères, on s'étonnait que Machine fasse si vieille alors qu'à la télévision elle soit bien et on trouvait que Truc devait mentir quand il assure avoir arrêté la picole. Quand à Chose, je veux bien me faire dentelière s'il ne prend pas de coke ! Désolé de ne pas citer les noms mais je suis déjà sous contrat avec Closer !

Et puis le plus rigolo, c'est de voir ces gens ayant au minimum mon âge mais le plus souvent dix à vingt ans de plus tenter de jouer les djeuns alors que ça ne rime à rien. Moi cette attitude me fera toujours penser à Pierre Richard dans Les Compères expliquant à Depardieu qu'il sait parler aux jeunes et entrant en disant "cool la basse, chouette la rythmique" avant de se prendre un coup de boule. Vous voudrez bien me pardonner mes piètre références cinématographiques au passage. 

Mais bon, mon père qui est né en 1929 et a connu le phénomène Zazou dans les années quarante ne me fout pas la honte en s'attifant avec une veste trop grande et en swinguant en marchant ! Il a su vieillir dignement. Putain, pourquoi quand ces péquenots abordent la soixantaine, s'obstinent-ils à se balader habillés en noir, mal rasés, les mains dans les poches, en se dandinant comme des ados désœuvrés. Je lance une question, comme ça rapidement, à la hâte : les peoples seraient-ils globalement des trous du cul immatures ? 

Jean Sablon et moi, on était venus comme d'habitude. Pas d'efforts particuliers ! Pas de jeans slims noirs ni de casquettes ! Un bon jean acheté au supermarché du coin faisait l'affaire ! Jean sablon avait même une petite liquette en coton, le genre de chiffon vendu 10 euros sur un marché de campagne, ce qui ne l'a pas empêché de jouer le beau et de choper comme un grand. Comme quoi, la classe, on l'a ou pas et c'est pas des frusques de marque qui changeront la donne. Y'a des trucs que l'argent n'achète pas !

A ce propos et pour conclure, j'ai souvent des commentaires qui me reprocherait un certain sexisme ce qui est bien sur faux parce que chacun sait que je suis super tolérant et d'ailleurs Manuel Valls est mon ami sur Facebook. Mais cela ne suffit pas et c'est ainsi, que dernièrement encore, une fâcheuse semblait déceler dans mes propos le germe ténu d'une probable homophobie latente à cause de mon article sur les limites de l'animus ! Putain, qu'est-ce qu'il ne faut pas lire quand même ! A tous ceux là, ces flics de la pensée qui passent leur temps à chercher des poux dans la tête des autres, je voudrais dire qu'il y a soixante-mille personnes, que dis-je des témoins, qui nous ont vus, Jean Sablon et moi chanter à tue-tête "3ème sexe". Alors si c'est pas une preuve ça ! Je n'y comprends plus rien.

Et on se prend la main
une fille au masculin
un garçon au féminin
et eux ne valaient rien
et on n'en a plus besoin
3ème sexe, Indochine, Paroles Nicolas Sirkis

Placid et Muzo et Blaise Pascal !


Comme vous vous en doutiez mon article récent sur Placid et Muzo a déchainé les passions. Il semblerait qu'une guerre larvée puisse prochainement opposer les ingénieurs aux littéraires et autres juristes. Esprit de géométrie ou esprit de finesse, le débat pascalien est encore vivace. Qui l’emportera ? Nul ne le sait encore !

J'en veux pour preuve qu'un de mes patients, diplômé de l'école des Mines, m'ait assuré que pour lui il était clair que Placid fut un ours dès le début. Pour lui, c'était clair comme de l'eau de roche et il argumente en m'expliquant qu'une souris eut été beaucoup plus petite que Muzo le renard. Pour lui, c'est une question qui n'a même pas à être discutée, c'est une évidence : il n'y a pas de souris de cette taille ! 

Selon cet ingénieur de talent, ce serait une aberration de considérer qu'un individu appartenant au genre mus puisse être aussi grand. Deux jeunes centraliens centraliens confirme cette thèse et je regrette de ne plus avoir de polytechnicien en ce moment dans ma clientèle pour avoir un avis supplémentaire. D'ores et déjà, on peut comprendre que Placid et Muzo se placent en bonne position parmi les ouvrages requis pour préparer sereinement une grande école d'ingénieurs.

A l'opposé, chez les littéraires, on se range de mon côté. C'est ainsi que Jean sablon, historien émérite, est d'avis que Placid ressemble plus à une souris qui aurait été dessinée par un enfant différent. Un jeune avocat, sans doute futur ténor du barreau, est aussi d'avis que tant les oreilles rondes surdimensionnées que que le museau fin et pointu font penser évidemment à une souris. suite à la lecture de mon blog, il a d'ailleurs écrit à Disney afin de leur proposer de les représenter lors d'un éventuel procès pour contrefaçon n'hésitant pas à qualifier Placid de copie servile ! Encore une fois, il est intéressant de comprendre que pour préparer un capes ou le barreau, la lecture de Placid et Muzo s'impose.

Le célèbre débat initié par Pascal est donc toujours d'actualité. De mon côté, je me propose de créer un test psychotechnique simple et efficace. Après avoir proposé d'observer un dessin représentant Placid, le candidat devra répondre s'il s'agit d'un ours ou d'une souris. Tandis que les premiers seront orientés vers des carrières littéraires et se verront proposer des carrières nécessitant de l'imagination et de la finesse, les seconds se verront proposé d'intégrer des écoles d'ingénieurs pour ensuite monter des murs bien droits ou percer des trous bien ronds. Simple et efficace !

Ceux qui cocheront les deux cases en estimant qu'il s'agit soit d'une sourours ou peut-être d'un oursis ouvriront un blog traitant d'astrologie après leurs études d'ingénieurs !

Différence entre l'esprit de géométrie et l'esprit de finesse. En l'un, les principes sont palpables mais éloignés de l'usage commun. Mais dans l'esprit de finesse, les principes sont dans l'usage commun et devant les yeux de tout le monde.
Pensées, Blaise Pascal (1670)

22 juin, 2014

Incroyable, où j'apprends des trucs fous !


Alors que je vous raconte un peu ma vie ! quand j'étais tout petite, je lisais tout le temps, de tout, des trucs bien et des conneries. Dans les trucs bien entre autre, il y avait l'encyclopédie Larousse dont je prenais les volumes les uns après les autres et que je feuilletais au hasard. Autant, j'étais un élève très moyennement impliqué, autant j'étais super concentré quand je lisais.

En revanche, j'étais aussi très éclectique et lisais tout un tas de daubes sans nom. Il m'arrivait même de demander de l'argent à ma mère pour aller acheter Pif Gadget. C'était à chaque fois l'enfer parce que ma mère ne voulait pas qu'on file du blé aux cocos. Eh oui, Pif le chien sous ses airs bonasses était un putain d'agent rouge, un fieffé membre du KGB ne désirant qu'une chose : nous réduire tous en esclavage, nous fourguer des Ladas, nous faire bosser dans un kolkhoze ou des Kombinat crasseux. 

Et comme ma mère aimait bien les Mercedes et les Alfa-roméo, le communisme ce n'était pas trop son truc. Il était donc hors de question que notre bél finisse dans les poches des gens de la Place du Colonel Fabien pour ensuite être rapatrié à Moscou où il financerait des goulags. Mais bon, j'ai eu des Pif Gadget, même que j'ai eu les pois sauteurs mexicains dont tous les mecs de ma génération se souviennent. 

Bref, je lisais beaucoup et de tout, du meilleur et du pire. C'est sans doute parce que j'avais une très bonne vue et pas de culs de bouteille sur le nez et que je ne lisais pas que des trucs sérieux que je n'ai pas fait l'X ou bien l'ENS. Sinon, aujourd'hui croyez moi, je ne tiendrai pas un blog comme celui-ci. Mon épouse se pavanerait en montrant son solitaire et en disant que j'ai une "grosse situation". Salauds de communistes, si je ne suis pas associé chez Accenture c'est de leur faute : tout ça à cause de Pif le chien !

Mais pourquoi vous parler de tout cela ? Ah si simplement parce que cette marotte ne m'a jamais quitté. Je lis toujours beaucoup, tout le temps, partout. Par exemple je lis aux toilettes. D'ailleurs puisque je suis ici et que j'y écris souvent pour ne rien dire ou pas des choses intéressantes, j'ai assisté voici deux semaines à un échange prodigieux. Madame T. se plaignait que son ingénieur de mari lise aux chiottes et mon épouse, pluôt que de se taire, de répondre "ah oui, Philippe est pareil". Mais putain est-ce que cela regarde Madame T. ce que je fais aux chiottes ! 

Ceci dit, l'ingénieur se contente de Télé7jours alors que moi j'ai une vraie littérature-chiotte. Voici quelques temps par exemple un médecin m'avait adressé une patiente ayant déjà publié et bien j'ai lu tout son roman le cul calé sur les gogues. Bien sur quand je lui ai dit que j'avais apprécié son livre je ne lui ai pas dit où je l'avais lu. J'ai préféré la laisser penser que je l'avais dévoré place de la Sorbonne. C'était un parfait bouquin à lire aux toilettes, pas trop mal écrit mais pas tellement prenant non plus et permettant de le lire par tranches de cinq minutes. Peut-être que son éditeur aurait du faire mettre un bandeau "spécial gogues" sur le livre pour augmenter le tirage !

Sinon, je lis aussi affalé sur mon canapé quand je regarde la télévision. Ce qui fait que toutes les cinq minutes, je demande : qu'est ce quis 'est passé ?". J'ai beau jouer le beau et faire croire que je peux mater la télé et lire mais en fait, je me concentre pour lire et je rate des trucs quand c'est un film. Alors sur ma tablette j'ai perpétuellement quarante onglets ouverts sur Firefox et je navigue de l'un à l'autre. Une fois encore, je lis des trucs sérieux ou pas. Dans les sérieux, ce sont souvent des trucs de politique ou d'histoire. Sinon je me bloque sur Le bon coin et je mate des annonces de bagnoles ou de bécanes comme un gros blaireau.

Et bien sur, je lis wikipédia comme quand j'étais petit et que je taxais les volumes de la grosse encyclopédie. Et là, je navigue de liens en liens, lisant tout et n'importe quoi. Comme j'ai bonne mémoire, je me souviens assez bien des trucs. Parfois cela me permet d'avoir une minute de gloire comme le soir où quelqu'un me parlant d'un lac d’Auvergne, j'eus la gloire de lui dire qu'il était méromictique. Et comme l'ignare me pressait de lui expliquer pourquoi je connaissais cela, j'eus le plaisir de lui dire que parmi mes marottes nombreuses je comptais la limnologie

Et voici qu'il y a quelques jours, parti de je ne sais où, je m'intéressais subitement aux dessinateurs. Enfin, c'est de liens en liens que j'arrivais sur ces pages et les noms m'évoquant des souvenirs de jeunesse, je cliquais et j'appris donc que le dessinateur de Placid et Muzo, se prénommait Jacques Nicolaou et était né à Chatenay-Malabry tout près de chez moi.

Bon Placid et Muzo était une bande dessinnée assez naze dont les gags frisaient le grotesque et le dessin l'amateurisme. De plus, c'était publiqué dans Pif gadget, le journal de cocos dont je parlais ! Mais, bon négociateur, je parvenais tout de même à taxer de temps à autre les trois francs que cela coutait pour m'offrir un Placid et Muzo poche ! C'était de petits bouquins carrés présentant une histoire par page se terminant toujours par un gag stupide. C'était con mais même si je n'appréciais pas vraiment, comme je lisais vite, parfois je n'avbais que cela à me mettre sous la dent chez le marchand de journaux, alors je faisais la vie à ma mère pour qu'elle m'en achète.

Et là, en lisant l'histoire du dessinateur et ces héros, j'apprends que Placid est un ours noir tandis que Muzo serait un renard. Placid moi, j'ai toujours cru que c'était uen souris, une sorte de grosse souris, une sorte de copie de Mickey dessinée par un mec pas doué en dessin justement. Alors comme j'étais persuadé que ce gros con de Placid était uen souris, j'en avais déduit que Muzo était un écureuil !

Entendons-nous bien, je sais différiencier un renard d'un écureuil et je trouvais que Muzo avait plutôt une dégaine de renard. Mais bon, comme il faisait la taille de la souris à côté de lui, je m'étais dit que le mec avait juste raté son dessn d'écureuil comme il avait raté celui de sa grosse souris. Parce que je trouvais cela con qu'un renard, si Muzo en était bien un, fasse la taille d'une souris ! J'avais beau être tout petit, on ne me la faisait pas et j'avais le sens des proportions moi ! Ce que j'avais sous les yeux, les deux personnages abrutis dont je lisais les gags idiots ne pouvaint être qu'une souris obèse  et un écureuil mal dessinés !

Mon cul oui ! Voilà ce que Wikipédia m'aura appris : Placid est un ours noir et Muzo un renard. Et en plus, j'ai vérifié sur plusieurs sites, vous pouvez me croire. Bon, maintenant, il ne me reste qu'à trouver le moment ad hoc pour sortir ma science. Après tout, j'ai bien réussi à placer "méromictique", il n'y a pas de raison que je n'assène pas un jour à la face d'un crétin que Placid est ours noir et qu'il peut vérifier et qu'on peut même parier !

Sur ce, je vous quitte là, maintenant que ma mission est remplie. Je vous remercie de m'avoir lu jusqu'au bout. Je me sens un tout petit peu coupable de vous avoir pris autant de temps pour lire un article si long et présentant finalement peu d'intérêt. Mais qui sait, je n'étais peut-être pas me seul à me méprendre sur Placid ! Si j'ai pu vous rendre service, j'en suis ravi ! Peut-être que demain, les langues se délieront dans les bureaux.

- Dis tu sais pas, en fait Placid c'est pas une souris, c'est un ours noir ! 
- Ah bon, t'es sur ?
- Ouais et Muzo un renard !
- Putain, c'est pas un écureuil lui ?
- Nan, c'est un renard !
- Mais c'est super mal dessiné comme personnages.
- Ben oui, mais c'était pour les gosses des communistes, autant dire des fils d'ouvriers, alors ils allaient pas prendre des stars.
- Non, et puis les bons dessinateurs c'est cher !
- Enculés de communistes ! En tout cas merci pour l'info.

Putain ce gag désopilant !

17 juin, 2014

Interlude !

 
Il devient de plus en plus dur de se procurer de bonnes photos de marcassins ! Un jour, je vais m'énerver, je vais m'acheter un super appareil-photo et je vais aller planquer dans la forêt de Rambouillet pour en photographier quelques uns ! J'aurai ma collection privée de photos de marcassins, sans doute la plus importante du monde et je pourrai balancer autant de photos que je veux !

Mais où va le monde !

16 juin, 2014

L'amour !


Ouh la la, c'est qu'il en a du chagrin mon jeune patient ! Comprenez que le pauvre lassé de jouer les utilités auprès d'une femme qu'il aimait a préféré rompre que de rester l'éternel amant auquel elle ne proposerait jamais rien.

Il faut dire qu'il a pris des risques, il s'est jeté sur la plus belle du bureau et une femme mariée en plus. Au début, il s'en foutait, il paradait à son bras, ravi d'avoir chopé la fille sur laquelle tous les hommes jetaient des regards envieux. Et lui, il faisait son petit mac, ravi d'être enfin le PUA de ses rêves ! Et qu'il ramène la donzelle chez lui pour des nuits torrides, et hop à part le weekend, c'était la fête du slip tous les soirs.

Sauf qu'il s'est attaché mais qu'elle, plus madrée et calculatrice, lui a fait comprendre qu'elle ne divorcerait pas. Certes elle adorait la sensibilité, la bonne éducation et les coups de rein de mon patient, mais plus encore l'appartement à Courchevel et les vacances aux Bahamas que lui procurent son friqué de mari.

Et là, ce fut la débandade parce que ce n'est pas facile de s'apercevoir que même s'il y eut des sentiments de la part de madame, ça n'allait pas plus loin que ceux qu'une femme de riche producteur de Bervely Hills aurait pour son jeune amant mexicain, celui dont elle aime tant la peau cuivrée et les pectoraux virils ! 

Mais bon, de là à vivre comme un pauvresse en bouffant des tacos et en roulant dans un vieux Ford F150, il y a des limites ! Les truffes c'est bon, les boutiques de Rodeo Drive sont sympas et le cuir de la Bentley plus agréables pour des petites fesses façonnées à grands coups de Pilates. C'est pas demain la veille que la belle allait abandonner son coiffeur visagiste ni son coloriste attitré pour se faire sa couleur avec un produit acheté en supermarché dans un lavabo ébréché.

Et alors là mon pauvre petit patient est tout déconfit. Certes, voyant que cela ne mènerait nulle part, c'est lui qui l'a larguée. Mais bon, sans doute qu'au fond il espérait qu'elle le rattraperait au vol en lui promettant le divorce rien que pour vivre avec lui. Ben non ! Elle préfère les avantages financiers procurés par un mec qu'elle aime un peu à l'indigence relative d'un type pour qui elle voue une passion. Face à cette passion, la raison l'emporte : cette femme est une tueuse !

Alors mon petit patient est encore plus triste. Certes il est assez intelligent pour savoir qu'ayant pris le risque d'aller avec une femme mariée, il doit en assumer les conséquences. Il est aussi suffisamment malin pour comprendre qu'ayant chopé au bureau, il va maintenant devoir se fader l'élue de son coeur tous les jours, sachant qu'elle ne le calcule même plus. Il est même prêt à admettre que c'est une putain de salope ! Bref, il est partagé entre la colère et l'abattement ! Son état oscille entre "je la hais cette pute" et "pourquoi m'as tu fait ça". Bref, il dérouille le pauvret.

Et moi, il me demande ce que j'en pense. Ben, j'en pense pas plus que lui, à savoir que séduire une fille du bureau et qui plus est une mariée c'était un peu chaud et qu'ayant joué il a perdu et puis voilà. Il s'en remettra même si je comprends l'orgueil mâle blessé ! Comme je lui rappelle sans cesse, c'est moins grave que s'ils avaient deux enfants et une baraque en commun ! Il se remettra dans quelques temps. Le problème chez les jeunes c'est qu'ils veulent tout, tout de suite ! Mais la vie n'est pas un putain de jeu vidéo sur lequel on peut annuler la partie et rejouer.

Alors je lui ai dit que puisqu'il comprenait tout cela mais qu'il se sentait toujours mal, il fallait faire un parallèle avec la toxicomanie, le syndrome de sevrage. Parce qu'être amoureux, c'est englué dans l'amour mais surtout être baigné et submergé par au moins trois hormones différentes : la phényléthylamine pour la passion, la dopamine pour l’insoutenable attente de nouvelles ou l’ocytocine pour les câlins.

La phényléthylamine (PEA) possède de puissants effets euphorisants et excitants ; elle pousse à l’hyperactivité. Elle est l'hormone de la passion qui fait passer des heures en compagnie de l’être aimé sans pouvoir arrêter de parler et d’échanger ou qui fait passer des nuits d’amour sans fin.

La dopamine, c'est l’hormone de la récompense. Elle sert à nous gratifier pour une bonne action que l’on a faite à notre propre corps : le nourrir, l’abreuver, ou assurer sa reproduction ! Notre corps lorsqu'il ressent l'afflux de dopamine se sent si bien qu'il voudra vite renouveler l’expérience !

L'ocytocine est notamment produite en grande quantité lors de l'orgasme. Elle nous plonge dans un état de bien être et d’apaisement, de confiance et d’optimisme. Elle est également produite pendant les massages et câlins ou tout autre moment de tendresse. D'abord connue comme "l’hormone de la maternité" car sécrétée en grande quantité au moment de l’accouchement en agissant sur les contractions de l’utérus, elle est aussi massivement présente lorsque la mère allaite son enfant puisqu’elle favorise la sortie du lait. On considère cette hormone comme étant à l’origine de l’amour entre parents et enfants mais également entre amoureux, une fois passée la passion de la dopamine et la folie de la PEA des premiers temps.  Il suffit juste d’un contact physique pour en sécréter.
 
L'endorphine est sécrétée entre autre lors d’efforts physiques importants et prolongés. Voilà pourquoi elle est associée au sport. C'est une sorte de dogue naturelle bien connue des sportfs devenus accros. Elle est aussi secrétée pendant l'orgasme.

Enfin, autre hormone sécrétée lors des ébats, la sérotonine aide à rester optimiste et à garder son calme. A l’inverse, en cas de carence, on a tendance à perdre notre sang-froid et à nous énerver facilement.

Bref, en lui communiquant certains articles traitant de ce sujet, à savoir l'amour vu par les éprouvettes, je lui ai juste montré qu'un amoureux transi éconduit devenit de facto un toxico en manque, en manque de tout un tas d'hormones. 

Dès lors, il ne suffit plus de comprendre intellectuellement une situation mais aussi de se souvenir que nous sommes aussi un amas de cellules lesquelles sont soumises ou non à un bombardement d'hormones. On peut donc comprendre une situation et continuer à en souffrir notamment en amour. Ne plus être aimé, c'est perdre la sécurité, les câlins, les petits mots, les compliments,l'activité sexuelle. C'est devenir comme un gros cocaïnomane qui vient d'apprendre que son dealer vient d'être mis en garde à vue et qu'il n'aura pas son produit !

Je lui ai donc dit, soit de voir son médecin qui lui prescrira des ISRS, soit de se mettre au sport afin de sécréter par lui même ces hormones dont il est en manque. Et bien sur, la prochaine fois, il fera plus attention. Elle était belle mais tout ce qui est beau n'est pas forcément comestible. C'est en faisant qu'on apprend. Il finira par en rire.



Limites de l'animus !


On nous bassine toujours avec le monde des femmes en oubliant que les hommes ont aussi leur monde à eux. Si les femmes, au travers de la maternité, du fait qu'elles portent l'enfant, peuvent à moindre frais se construire leur petit royaume avec leurs valeurs propres, c'est plus compliqué pour les hommes. Du moins en apparence.

Parce qu'à défaut d'utérus, on a ce qu'elle n'ont pas, de la putain de testostérone qui pourrait peut-être expliquer notre curieuse manière de fonctionner et de ce fait signer sans ambiguité qu'on a aussi notre monde à nous, sauf qu'il n'est pas aussi feutré que celui des femmes, mais bien au contraire constitué de combats incessants parce qu'il est tourné vers le monde !

Le mâle aura toujours, à l'instar de la plupart des mammifères, un instinct de territorialité. Et même chez le plus gentil des hommes, venez lui casser les couilles sur un sujet qu'il maitrise et considère comme important, et vous aurez la preuve que même le geek le plus neuneu reste un mâle quand il s'agit de défendre son territoire !

Moi qui suis dans la vie généralement une sorte de gros nounours débonnaire, je ne déroge pas à la règle. Je me souviens qu'une fois que je discutais avec des amis, mon épouse qui nous observait à la dérobée, s'était étonnée et amusée de ma véhémence et du fait que je sois finalement aussi bourrin que les autres. 

Sans doute aurait elle imaginé que je sois philosophe et que j'appelle mes amis à la prudence, la tempérance et la modération, mais que dalle ! Le sujet était trop important et je n'allais pas laisser dire n'importe quoi non ? Il y a des choses pour lesquelles on doit risquer sa vie sous peine de ne plus être un mâle ! Je crois qu'on parlait de motos, c'est vous dire si c'est important. Il faut vraiment être une gonzesse pour ne pas saisir l'importance vitale de certains débats !

Jung avait vu juste en parlant de pôles féminin et masculin, qu'il appelait respectivement l'anima et l'animus. Je n'ai d'ailleurs jamais refoulé mon anima puisque j'en ai fait un métier si l'on considère que psy est un boulot de gonzesse par rapport à soudeur, mécanicien ou fort des halles par exemple. En revanche je la canalise parce que même si la sensibilité peut être un atout, elle devient cependant un handicap si l'on se vautre dedans comme un goret dans sa soue. Je peux donc être violent dans mes propos, bourrin dans mes habitudes et finalement très masculin. 

L'animus fonctionne un peu différemment et sans doute plus encore aujourd'hui que l'on considère que les femmes soient nos égales. S'il s'agit de droits, pourquoi pas ! Cependant, cette égalité ne sera jamais réelle dans la mesure où l'animus, aussi puissant soit-il, ne sera pas pour autant l'équivalent de la masculinité. Sans doute que les femmes dotées d'un fort animus secrètent plus de testostérone que la moyenne des femmes mais en tout cas bien moins qu'un homme.

Et cette putain d'hormone qui nous pousse toujours à jouer les durs, les forts et les beaux est bien le secret de tout. Une altercation entre hommes risque de finir mal parce que justement les hommes, comme tous les mâles mammifères risquent de s'affronter avec violence. Les hommes ne se tirent pas les cheveux, ils se mettent des pains dans la gueule. De même lorsque l'on épouse la carrière de tueur en série, si l'on est un mec, on utilise des guns ou des trucs tranchants tandis que les femmes, ces fausses, feront plus dans le poison.

C'est pour cela que cela m'a toujours fait rire quand une nana explique que son mec s'est laissé faire en voiture alors qu'elle, elle aurait gueulé ! Ben oui ma chérie, sauf que si tu gueules au pire tu te feras traiter de pute, le tout assorti d'un doigt d'honneur, tandis qu'un mâle qui gueule après un autre court le risque de se faire frapper. Ça fait une différence qui se calcule parfois en ITT

Et puis, seriez-vous agacé par une de ces donzelles présumant trop de son animus et que vous auriez la mauvaise idée de la corriger en lui lattant la face, que la justice vous tomberait à bras raccourcis dessus. Bref, elles et nous ne jouons pas dans la même cour et quand elles font des pieds et des mains pour venir dans la nôtre, elle exigent des règles particulières.

Dernièrement, comme je l'expliquais dans le post précédent, un jeune patient m'avait donné le lien d'un blog assez odieux mais particulièrement rigolo qui ferait passer le CGB pour une assemblée de chaisières. Bien sur, pour tester, je l'ai refilé à certains de mes patients et à mon filleul Lapinou. Tous l'ont trouvé hilarant et ma foi, je crois que sa lecture a agi comme une thérapeutique. Aucun d'eux n'a cru que les rédacteurs pensaient ce qu'ils écrivaient, mais tous on trouvé rassérénant de lire cette prose bourrine et outrée, un peu comme si on leur avait rappelé qu'ils avaient des couilles. Comme la parturiente chargée d’ocytocine, ils ont été l'espace de leur lecture bourrés de testostérone.

Samedi, Lapinou et sa copine Lison passent à la maison. Je l'attendais un peu au tournant parce qu'il est jeune et naïf et ne se doutait pas que je le transformerais en rat de laboratoire ! Et voici que je lui adresse un lien de ce blog dans lequel on explique que Thomas est un prénom de merde. Lui a du recul et comprend la blague. Les mots grossiers et outranciers glissent sur lui comme sur les plumes d'un canard.

Et voici que le jeune Lapinou pensant partager cette expérience typiquement masculine faite de blagues grasses et de mots grossiers avec sa dulcinée, il lui envoie le lien sur son Iphone, qu'elle s'empresse de lire. Et Lapinou de guetter une réaction faite de connivence du type "ah tu as raison qu'est ce qu'on se marre à lire ces conneries". Mais la réaction est différente de celle qu'il attend. Lison pourtant diplômée d'une école d'ingénieurs (comme un mec), n'hésitant pas à se saouler à la bière (comme un mec), sortant seule avec ses copines (comme un mec), ne semble pas goûter l'article qu'il lui a fait lire. A vrai dire, elle ne rit pas beaucoup ou elle rit jaune. D'elle-même elle avoue que c'est too much et vraiment trop ordurier. Pov' choupette va !

Lapinou est tout décontenancé et c'est à moi de lui expliquer que dans le monde, il y a les femmes et les hommes et que, quoi que l'on veuille nous faire gober, les mêmes choses ne nous plaisent pas forcément, surtout en matière d'humour. L'aspect graveleux, outrancier, macho et vulgaire des propos n'a pas eu l'heur de plaire à Lison dont l'animus marque ses limites de manière évidente. De la même manière que ma grande anima ne fera jamais de moi une jeune accouchée, son animus pourtant puissant ne la prédispose pas forcément à rire grassement comme un mec.

Bref, les femmes ne sont pas des mecs et vive-versa. Personnellement, je trouve cela très bien. Le drame est que l'égalité à tout prix, que dis-je l'égalitarisme, se fera forcément en se basant sur le plus petit commun dénominateur et que les femmes seront grandes gagantes de cette pseudo-égalité.

Nous on a cette putain de testostérine, et on n'y peut rien. On fait en sorte que la culture transcende la culture et on sublime notre violence innée au travers d'activités socialement plus acceptables. Mais c'est tout ce qu'on peut faire.

Et encore parfois, ça a du bon d'être un homme !


Ah les jeunes !


Mercredi soir, voici deux semaines, je prends le métro avec ma dernière patiente. On papote de tout et de rien. La sachant de gauche, je n'ai jamais abordé de sujets politiques avec elle, bien que l'on s'entende très bien.

C'est elle qui me parle de politique et semble abattue par les résultats du front national aux élections européennes. Moi, j'avoue que je m'en fous un peu voire totalement. D'ailleurs tout le monde semble s'en foutre vu que les émissions politiques n'ont pas duré plus d'une heure.

Comme elle est en vaine de confidences, je lui explique que j'ai noté que mes jeunes patients, les moins de trente ans, se radicalisent beaucoup. C'est ainsi que je lui apprends qu'un bon nombre a voté FN. Elle n'en reviens pas et ce d'autant plus que je lui parle de gens émanant de CSP+ ultra-diplômés. 

Elle semble bouche-bée. Alors je lui explique qu'effectivement, beaucoup ont lu et apprécié Alain Soral ou Alain de Benoist, applaudi aux sketches de Dieudonné, soutiennent Poutine tout en n'étant pas pour autant rigides comme on pourrait l'imaginer. Ils en ont marre, attendent que cela craque et finalement font tout pour précipiter la chute.

La pauvre n'en revient pas et me demande ce que j'en pense. Je lui explique que, quadra comme elle, il m'est difficile de me placer dans la tête d'un jeune de vingt-cinq ans et que je suppose que leur vie n'est plus la même que la nôtre. J'ai fumé dans les cafés, j'ai roulé vite sur les autoroutes sans rien risquer, j'ai aussi roulé modérément bourré, j'ai hurlé au voleur quand on me vendait un Coca pour dix-huit francs (2,80 euros), autant dire que je viens d'une autre époque. Et puis mon boulot, c'est de comprendre et non de juger les gens.

La pauvrette semble abasourdie. Certes, elle est assez intelligente pour comprendre que rien ne va, que l'on est au bord de la faillite mais rien n'y fera, elle restera socialiste jusqu'à la mort. Qu'on puisse emprunter d'autres voies, la fait frémir. Sans doute que déjà pour elle, voter UMP est le comble du fascisme !  Et encore, je tais le fait qu'un de mes petits patients, avocat de profession, m'ait donné l'url d'un blog dénommé sobrement FDP de la mode, ce matin même en me disant que c'était super drôle. Je crois que lire cette prose outrancière l'aurait achevée. Alors je me suis tu.

Elle semblait pensive et m'a demandé ce que nous allions devenir. Moi je n'ai pas pris parti. Je me suis contenté de lui dire qu'ayant un petit bout de terrain, en cas de problèmes majeurs, je ferai de la patate parce que ça vient tout seul et puis des poules pour les œufs et aussi du lapin parce que ça baise tout le temps et que c'est d'un bon rapport. Au pire on en reviendra à l'économie du troc et avec la bouffe je suis mieux placé que bien d'autres.

Elle m'a juste dit que c'était fou, complètement fou en se demandant comment on avait pu en arriver là. J'ai fait l'économie de lui expliquer quelques principes libéraux de base pour tenter de relancer la machine. De toute manière, elle ne croit qu'à l'intervention de l'état alors ce n'est pas le genre à lire Bastiat. Elle m'aurait forcément parlé de renard libre dans un poulailler libre ! Comme je l'aime bien tout de même, je n'ai rien dit, j'ai partagé sa douleur. Je n'ai même pas dit : ben oui ma chérie tu vois où nous entrainent quarante ans de socialismes et d'intervention de l'état ! Non, j'ai été mutique !

En tout cas, je n'ai pas dit que personnellement je rêvais d'un coup d'état à la manière de celui du 18 brumaire ! Parce que sur ce coup là, on ne peut pas dire que Bonaparte se soit soucié des partenaires sociaux ni de la société civile. Et ça c'est vraiment très mal !

Où j'angoisse comme un nourrisson face aux as-if !


Lundi dernier, rendez-vous au cabinet jusqu'à 14h00 puis sur skype en fin d'après-midi. Entre temps, je file faire le plein de ma super Honda XLS de 1980. Le temps est beau, tout va bien, j'arrive à la station service de la petite ville friquée que j'habite. Et là, je fais la queue tranquillement. Vient alors mon tour, je béquille la bête, j'ouvre le réservoir et comme un gros rat, je mets ma carte bleue dans la fente, je fais mon code et je sélectionne le super 95 parce que c'est le moins cher.

Et là, je jette un coup d'oeil aux alentours et me voici pris de panique, non d'angoisse et encore. Il s'agit plus d'une angoisse sourde, un sentiment diffus de mal-être dont je tente immédiatement d'analyser l'origine. Pourquoi, alors que tout va bien, suis je ainsi tandis que je me livre à une activité des plus prosaïques : faire le plein de ma moto !

Aucun prédateur dans les environs, qu'il s'agisse d'une bête sauvage ou d'un sniper planqué dans le coin dont j'aurais instinctivement senti la présence. Le danger n'est pas mortel, c'est déjà ça. Alors quoi ? Dès que l'angoisse survient, c'est que votre système d'alarme interne a ressenti une menace et qu'il vous enjoint de vous adapter. Puisque danger il y a, quel-est-il ?

Tel un soldat aguerri en missiosn de reconnaissance en milieu hostile, j'analyse mon environnement et je les vois ! Ils sont là, tout autour de moi, discrets mais menaçants. Qu'ils roulent en Peugeot 5008, en Citroën Picasso ou encore en Renault Espace, ils sont là à l'affut, occupés l'air de rien à remplir les réservoir de leurs monospaces. Ils ont tous la même tête, la même dégaine, le même air propre sur eux !

Où que je tourne la tête, je suis entouré de gens bien-comme-il faut, comme si j'étais immergé dans un congrès de l'UMP. Tout autour, où que mes yeux portent, je suis entouré de Valérieprécresses et de Brunolemaires ! Je n'ai même pas le loisir de me dire que s'ils sont comme ça, c'est parce qu'ils sont plus vieux que moi. Non, ils ont tous mon âge. Et on les sent tous accablés par les responsabilités. Rien qu'en les regardant, on comprend que la vie n'est pas un jeux et qu'il faut être sérieux. Pas le genre à faire des séances de caffing avec moi !

Ils doivent être parents d'adolescents qui se destinent à des carrières d'ingénieurs, occuper des postes à responsabilités avec des titres ronflants, avoir des avis autorisés sur tout et n'importe quoi, se départir de tout ce qui est passionnel et dire des phrases lourdes de sens comme "oh c'est plus compliqué qu'il n'y parait" ou encore "tout cela est très politique". 

Et moi au milieu d'eux, je fais tâche. Même pas un costume cravate pour rattraper l'allure détestable de ma Honda de 1980, je n'ai même pas mis ma Rolex, j'ai ma Casio achetée moins de trente euros sur Amazon. Je vis ce que peux vivre le jardinier mexicain qui ferait le plein de son pauvre pick-up dans un quartier friqué de Beverly Hills. Je pourrais tenter un sourire pour tenter de créer un lien mais ce serait peine perdue. Ils ont le visage fermé et sont concentré sur ce qu'ils sont en train de faire : le plein du réservoir. Sans doute qu'en tâche de fond, ils sont accaparés par tous les soucis du monde, vu les postes prestigieux qu'ils doivent avoir. 

Je les regarde un peu et un doute m'assaille. Et si j'avais continué dans la voie du droit. Putain j'avais de beaux diplômes moi aussi aujourd'hui, j'aurais une secrétaire à qui dire "qu'on ne me dérange pas" et j'aurais sans doute une BMW X5 ! Putain, j'ai raté ma vie, je ne suis rien d'autre qu'un clodo en XLS de 1980. Voilà ce que c'est que de vouloir poursuivre des rêves de pacotille, de vouloir vivre sa vie comme si la société n'existait pas.

Alors, une fois le plein fait, je mets un coup de kick (même pas de démarreur electrique) et je pars plein gaz. Et là, à deux-cent mètres à peine, voici que je croise mon pote Jeff, qui tel un clodo moyen marche sur le trottoir en peinant, les mains pleines de sacs plastiques du Carrefour Market. Je m'arrête et je le charge sans casque derrière moi. J'apprends qu'il a pété la distribution de sa voiture et qu'en attendant, il arpente les rues à pieds. Comme c'est une sorte de paria, ça me va.

On s'arrête chez lui, grande bâtisse à l'abandon sur un grand terrain rempli de vieilles voitures américaines et de motos anglaises et on papote en buvant un café médiocre servi dans des tasses douteuses. Je me sens mieux. C'est fou ce que dans ma débine, c'est sécurisant de rencontrer quelqu'un un peu comme moi, vivant normalement mais en marge de la société. Je lui raconte mon expérience, le fait que j'aie été entouré comme ça de ces gens as if. 

La personnalité as if (comme si) est une personnalité qui réalise une normalité de façade, voire une hypernormalité, contrastant avec une certaine pauvreté de la vie émotionnelle et avec des défenses dominées par l'intellectualisation des affects. Les processus défensifs font appel en particulier à des des compromis étayés sur le groupe, avec une extrême soumission et imitation. Décris par D.W. Winnicott sous le nom de "faux self", ils permettent un meilleur contrôle de la menace dépressive mais peuvent  aussi représenter une des modalités d'aménagement des états limite.

C'est rigolo parce que je parle de cela avec un type qui "souffre" d'un syndrome de Diogène mais qui m'apparait tout à coup d'une normalité banale et reposante après ma confrontation avec les zombies de la station service. Au moins, ses affects sont réels, sa sincérité jamais feinte et son authenticité poussée à l'extrême finalement rassurante.

Heureusement que je peux toujours compter sur un copain bizarre pour me remettre de mes rencontres avec tous ces gens en carton-pâte !


Putain de famille !


Parfois, on a beau avoir une famille pourrie, un père absent, une mère alcoolique, une sœur qui tapine et un frère en tôle, ce n'est pas grave, ça reste la famille et on l'aime comme ça ou du moins, on s'y fait. On a appris à se construire envers et contre tout. Au grand dam des spécialistes de l'aide sociale en tout genre, la famille c'est sacré, on n'en a qu'une. Parfois on décide de la larguer, de partir loin et de s'en recréer une autre. Parfois, bien qu'on soit lucide quant à ses manques, on décide de la garder et de faire avec.

Récemment, un patient qui n'a pas forcément eu le père et la mère dont on rêve, me disait qu'il avait été extrêmement choqué par la réflexion d'une de ses amies œuvrant à l'Aide Sociale à l'Enfance. Alors qu'il s'ouvrait de ce qu'il avait connu étant jeune, cette dernière lui avait expliqué qu'aujourd'hui, si l'ASE avait été avertie, il aurait été immédiatement mis en foyer et ses parents condamnés.Extrêmement lucide sur ce qu'il avait vécu, il ne reconnaissait pas le droit à autrui, et particulièrement à une administration aveugle, le droit de juger ses parents à sa place.

Bien entendu, il ne s'agit pas dans mes propos d'excuser ou de relativiser des comportements graves de la part des parents mais simplement d'admettre que c'est avant tout aux victimes ou considérées comme telles de savoir ce qu'elles doivent penser des liens parfois pathologiques qu'elles ont pu lier dans le passé. Quel qu'ait été leur environnement familial, c'est avant tout à ces personnes d'estimer quel lien, quel jugement, elles doivent réserver à leur famille.

Et si des institutions ou des thérapeutes peuvent leur venir en aide, il faut œuvrer avec circonspection. On a tout a fait le droit d'expliquer à quelqu'un qu'il a été victime de mauvais traitements sans pour autant juger à sa place ses bourreaux. Le patient n'est aucunement notre débiteur, il n'a pas à s'inscrire dans un schéma que l'on aurait préparé pour lui et dans lequel il aurait sa place de victime avec le devoir de se comporter comme telle. En psychologie, l'action paulienne n'a pas sa place, on n'a pas à  nous en prendre nous-même à la victime simplement parce qu'elle ne désigne pas ceux qui nous apparaissent comme ses bourreaux comme tels. Chacun fait ce qu'il peut avec le fardeau qui est le sien.

De la même manière, il ne sert à rien de victimiser à outrance. Rien n'est écrit à l'avance et l'esprit humain a énormément de ressources pour palier aux traumatismes subis. La résilience, qui distingue en physique la capacité d'un matériau à reprendre sa forme après avoir subi une contrainte, n'est pas un vain mot. S'il est intéressant d'analyser le traumatisme, il faut faire attention à ne pas assigner le patient à résidence dans une posture de victime. Après avoir constaté que ce qu'il a vécu était parfois terrible que fait-on ?

Parfois on peut réparer, parfois c'est impossible. Alors quoi ? Est-ce que l'on se lamente semaine après semaine en le plaignant et lui faisant miroiter combien agréable aurait été sa vie si il n'avait pas subi ce traumatisme ? De toute manière, à trop fixer le traumatisme, on n'avance plus, on s'encroute et la vie continue sans nous. Stagner ou avancer à marche forcée parfois, il n'y a pas d'autre alternative.

On nettoie la plaie du mieux que l'on peut et on avance, on se dit qu'il reste des tas de choses intéressantes à vivre. Et surtout, on comprend qu'avancer coute que coute est sans doute la meilleure manière d'envoyer se faire voir l'agresseur, de lui prouver qu'on était plus fort que ça. On a connu ce que l'on a connu et puis voilà. La surenchère de soins, d'écoute et d'empathie ne sont pas toujours utiles et même parfois nuisibles au rétablissement. De toute manière, bien malin celui qui saurait exactement ce qu'aurait été la vie de la victime si elle n'avait pas subi ce traumatisme !

Voici quelques années, une série anglaise nommée Shameless était diffusée. Elle parlait de la vie dans une famille du lumpen prolétariat. L'intérêt était justement de ne pas s'appesantir comme on l'aurait fait en France en victimisant cette famille mais en montrant que malgré tout, chacun des membres était capable de faire œuvre de stratégies de défense efficaces pour s'assurer sa place au soleil. La vie est une jungle ? Ok, alors chacun se débrouille en fonction de ses capacités pour s'en sortir du mieux possible.

Ces abrutis d'américains ayant de grandes difficultés à regarder quelque chose qui ne se passe pas chez eux, la série anglaise a été adaptée aux États-Unis sous le même titre. Réalisée avec plus de moyens, il faut avouer qu'elle est encore meilleure, le casting étant parfait. On s'aperçoit donc que bien que le père de famille, Frank Gallagher, soit un parasite social intévétér, mentuer pathologique et alcoolique, que la mère souffrant d'un trouble bipolaire, se soit barrée quand les enfants étaient jeunes, d'autres réseaux se crèent pour faire avancer la famille et faire en sorte que chacun des membres trouvent leur bonheur.

Il n'y pas qu'une manière d'être heureux. Et même si c'est une lapalissade que de dire que mieux vaut des parents aimants et riches que des parents pauvres et maltraitants, l'important est de se souvenir qu'il existe presque toujours des stratégies permettant de s'en sortir. Et si les services sociaux ou les psys sont parfois nécessaires, ne serait-ce qu'en cas de danger létal, ils ne sont pas la panacée.

Un individu a des ressources insoupçonnées. Toute aide extérieure efficace devrait être en mesure de lui faire réaliser ce potentiel et non de l'enfermer dans un statut victimaire. C'est avoir la décence d'admettre qu'une personne peut compter sur ses ressources propres et qu'elle n'est pas condamnée ad vitam aeternam à mendier l'aide d'autrui. C'est avoir le respect pour une personne en lui faisant la grâce de l'accepter comme personne à part entière et non comme une sorte de mutilé de la vie à surprotéger.

L'important finalement ce sont les liens que l'on peut tisser par ailleurs.


09 juin, 2014

Je suis en vie !


Ah la la c'est l'époque du jardinage alors c'est vêtu comme un gros goret, d'un bas de survêtement décathlon, d'un vieux t-shirt qui me laisse la bedaine à l'air et pas rasé que j'arpente mon jardin pour y faire des plantations ! Parfois je renifle aussi ou alors je me mouche dans mes doigts et je les essuie sur le survêt'. De toute manière ça finit par sécher.

Je me fais engueuler par mon épouse quand je rentre avec mes pompes dégueulasses dans la maison alors je grogne. Je m'assieds et je mange avec les doigts. Je projette d'arracher moi-même des bambous immenses.

Je cours les jardineries, j'achète des plantes, des outils. On m'a même vu aller chez Leroy-Merlin pour y acquérir un pot de peinture noire pour ma grille. Je m'y suis rendu vêtu d'un vieux t-shirt troué à l'effigie de l'IAE de Paris qui me boudinait un peu vu que j'ai un peu forci depuis mes vingt-trois ans. 

J'avais l'air d'un maçon tchétchène mais c'était cool je pouvais me fourrer les doigts dans le nez sans subir de regards outrés. Il me semble bien que je sois allé jusqu'à me gratter le cul dans dans le rayon brosses et pinceaux sans faire attention. Que voulez-vous l'habit fait le moine et quand vous êtes habillé en loqueteux personne ne s'offusque que vous ayez des manières de clodo.

Bref la vie est belle même si c'est un peu roots. Mais rassurez-vous, j'ai plein d'articles en brouillon que je publierai tout bientôt.