27 novembre, 2011

Prédire la dangerosité ! Seconde partie

Robert Hare

J'ai beau jeu ici de hurler, de dire que c'est inadmissible, que cela n'aurait pas du arriver puisque je ne suis pas expert et que je ne sais pas ce que j'aurais fait à la place des quatre personnes qui ont vu Mathieu après son premier viol.

Disons que masquant mal mon immense orgueil derrière une humilité de façade, j'ai l'impression que je ne me serais pas laissé avoir. Déjà, à l'instar de ces adolescents boutonneux dont je parlais dans la partie précédente, j'ai lu Ressler et Douglas. Simplement, notamment s'agissant du premier, je trouvais sa démarche intéressante et n'oublions pas qu'il fut celui qui créa le terme de serial-killer.

Je suppose que plus que des diplômes, je préfère le talent, celui qui s'observe chez ceux qui font bien même si parfois ils ne savent même pas pourquoi ils font bien. Et manifestement, Ressler fut un flic doué comme le prouve son tableau de chasse. Il avait compris (il ne fut pas le seul) comment fonctionnaient certains criminels. Finalement le vrai talent de l'expert à ce sujet, plus que de collationner des tas d'indices, c'est de les trier et les classer afin de se trouver dans la tête du prédateur qu'il recherche.

Je n'ai pas une grande expérience des psychopathes parce que je n'en reçois pour ainsi dire pas. Le psychopathe n'a pas besoin de mes services. Dénué de tout sens moral, à quoi bon tenter de faire un travail sur soi qui repose justement sur le sens moral interne qu'un individu normal possède, quand on en est dépourvu ? De fait, le psychopathe consulte quand il y a un intérêt direct qui n'est pas le fait d'aller mieux. Il 'agira pour lui de voir un psy si cela lui permet d'accéder à quelque chose de plus important pour lui comme une liberté conditionnelle dans un cadre judiciaire.

J'ai le souvenir d'un jeune homme que j'appellerai A et qu'un médecin m'avait envoyé dans le cadre d'une prise en charge thérapeutique portant sur la fourniture de produits de substitution à l'héroïne. Je l'ai donc reçu dans ce cadre assez strict car je doute qu'il ne soit venu de lui-même pour tenter d'aller mieux. La thérapie n'était là que pour berner son médecin, coller à ses désirs, et pour obtenir quelque chose d'autre : métadone ou subutex.

Je l'ai immédiatement trouvé sympa. Il faut dire que les psychopathes ont souvent ce charme et cette faconde superficielle qui met en confiance et qui les rend sympathiques immédiatement. Il m'a donc raconté sa vie mais manque de pot pour lui, j'étais aussi un ancien juriste et j'ai relevé plusieurs erreurs dans son discours biographique quand il abordait ses petits démêlés judiciaires. Il faut dire que le DSM pointe d'ailleurs cet attribut, qui fait que la personnalité antisociale ne s’embarrasse pas de responsabilités : Absence de remords ou de culpabilité, indiquée par l'indifférence ou la recherche systématique d'excuses plausibles pour avoir blessé, maltraité, trompé ou volé autrui.

Âgé de moins de trente ans et ayant déjà deux années fermes au compteur, le jeune A en était presque à plaider l’erreur judiciaire dans mon cabinet ou du moins l'atténuation des faits. C'était je crois notre troisième rencontre. Il était à l'aise face à moi dans le fauteuil bleu, la clope à la main et la tasse de café dans l'autre. Je pense qu'il m'avait étiqueté brave mec sympa. Je pense que mon physique de bon nounours donne souvent à penser cela. En termes de profils, on imagine toujours que ce sont les grands secs qui sont vifs. Pourtant, on a coutume de dire que l'ours est le fauve le plus dangereux parce qu'il ne prévient pas et que justement de bon nounours il passe sur le mode colère et vous arrache la tête d'un coup de patte.

C'est ce que j'ai fait ce jour là, j'avais ferré mon bonhomme et j'ai tiré sec pour lui rentrer l'hameçon dans la gueule et le remonter à bord dans la sphère thérapeutique d'où il sortait gaillardement en me prenant pour un con. Sans me départir de mon calme ni de ma bonhommie naturelle, je lui ai justement demandé s'il me prenait pour un con. Il a évidemment nié avec force de "oh Philippe vous n'y pensez pas !". J'ai donc du lui expliquer qu'en tant qu'ancien juriste ayant de plus épousé une avocate, je ne croyais pas ce qu'il me disait et qu'à son âge pour avoir été condamné aussi lourdement c'est qu'il devait avoir un casier non pas long comme mon bras mais comme mes deux bras.

Il m'a souri et réduisant la voilure, il n'a pas contesté les faits. Il les a minimisés, m'a raconté ses arnaques et on a même fini par en rire parce que tant qu'on garde ses distances, ce genre d'escroc est amusant. C'est comme parler à un Rocancourt qui vous explique comment il a arnaqué ces crétins de comédiens hollywoodiens. On en viendrait presque à croire qu'on parle à Robin des Bois alors qu'il n'en est rien. On peut rigoler mais toujours garder ses distances parce que justement le psychopathe adorerait faire de vous son bon pote, vous endormir en diluant votre système moral tendant à considérer ses actes comme moins graves qu'ils ne sont.

On a fait une ou deux séances comme cela et puis j'ai décidé de lui remettre un gros coup de patte dans la figure. Je lui ai juste dit : bon A. je ne sais pas ce que vous foutez ici mais je suppose que cette démarche s'inscrit dans un cadre plus large. Alors comme je ne vais pas vous faire perdre de temps à parler de morale puisque vous n'avez aucun sens moral, on va agir différemment, on va parler de risques judiciaires. Comme cela vous ne ferez plus certaines choses non parce qu'elles sont mal d'un point de vue moral mais dangereuses pour vous si vous voulez rester libre".

Il a été un peu éberlué mais m'a souri et j'ai rajouté que je l'aimais bien ce qui était vrai parce que je n'ai aucune raison d'en vouloir à un barracuda d'avoir de grandes dents, c'est sa nature. D'ailleurs quelques semaines après, on se tutoyait et on se faisait la bise, c'est dire si on s'entendait bien. Finalement, je ne sais pas si ma méthode était la bonne mais elle a plutôt bien fonctionné. D'une part A et moi avons entretenu des rapport cordiaux. Il a voulu me tester une fois, en me proposant un ordinateur tout neuf à un prix défiant toute concurrence. J'ai évidemment refusé. Je n'ai évidemment jamais eu aucune confiance en lui même si je suis persuadé qu'il m'aimait bien.

Enfin, j'ai eu des nouvelles de lui par sa fille dix ans après. Lorsque sa mère l'eut récupérée elle me l'envoya pour quelques séances. Alors âgée de dix huit ans elle me donna des nouvelles de son père, ce cher vieux A. Elle m'expliqua que globalement, il avait toujours travaillé, même si parfois c'était épisodique et qu'il s'était à peu près correctement occupé d'elle bien qu'il ait oublié de payer la cantine à plusieurs reprises.

Ainsi, comme le dit le DSM, même si A s'était un peu maintenu dans l'irresponsabilité chronique, indiquée par l'incapacité à tenir des engagements soutenus ou d'honorer des obligations financières, il avait évité les pires écueils qui auraient pu le renvoyer en prison. J'ose espérer que son état s'est maintenu et qu'il est resté libre. Je n'ai jamais cru en sa guérison et encore moins à ses prises de conscience. En revanche je pense que notre collaboration aura pu le rendre plus méfiant et lui faire apprécier la liberté qu'il sait comment conserver.

C'est une bien mince victoire thérapeutique mais en revanche cela a été riche d'enseignement et cela m'a donné envie d'en savoir plus sur les psychopathes. Je crois avoir lu depuis bon nombre d'ouvrages sur ce sujet et finalement cela ne fait pas grand chose quand on met de côté les théories psychanalytiques qui font l'impasse sur la biologie. Ce que j'en ai retenu c'est que la psychopathie était d'essence biologique même si le milieu ambiant pouvait renforcer ces traits. J'ai aussi appris à affiner mon diagnostic et à les repérer où qu'ils soient et à les différencier des simples narcissiques, complexés et autres addictifs avec lesquels on pourrait les confondre parfois.

De fait, la plupart des psychopathes réussissent et on peut qualifier ceux que l'on retrouve en détention de psychopathes qui ont échoué. Comme Hare déclare, "Mentir, tromper, et manipuler sont des talents naturels pour les psychopathe. De fait, il existerait deux variétés de psychopathes, l'une côté cour est ce que nous connaissons de leur côté criminel, mais l'autre, les psychopathes côté jardin se fondent la masse d'une manière très efficace.

Je crois qu'avec mes faibles moyens et connaissances, grâce à A, j'ai peut être fait le chemin qu'a du faire Robert Hare et qui lui ont permis de dresser son échelle de psychopathie maintenant bien connue appelée échelle de psychopathie de Hare. Elle regroupe vingt items que l'on doit choisir en fonction de :
0 = ne vous caractérise pas
1= vous définit bien à certains égards, mais avec des réserves ou des doutes selon les observations
2= vous caractérise dans l’ensemble assez bien
Le résultat est simple à calculer et varie entre 0 et 40. On pose le diagnostic de psychopathie pour un score de 30 et plus, tandis qu’une absence de psychopathie est caractérisée par un résultat inférieur à 20. Entre 20 et 29, Hare parle d’une problématique dite mixte.
1. Loquacité et charme superficiel
2. Surestimation de soi
3. Besoin de stimulation et tendance à s’ennuyer
4. Tendance au mensonge pathologique
5. Duperie et manipulation
6. Absence de remords et culpabilité
7. Affect superficiel
8. Insensibilité et manque d’empathie
9. Tendance au parasitisme
10. Faible maîtrise de soi
11. Promiscuité sexuelle
12. Apparition précoce de problèmes de comportement
13. Incapacité de planifier à long terme et de façon réaliste
14. Impulsivité
15. Irresponsabilité
16. Incapacité d’assumer la responsabilités de ses faits et gestes
17. Nombreuses cohabitations de courte durée
18. Délinquance juvénile
19.Violations des conditions de mise en liberté conditionnelle
20. Diversité des types de délits commis par le sujet
Ce sont ces connaissances qui m'ont permises l'année passée de mettre en garde une amie contre une personne. Tandis que j'allais faire joujou à ces jeux idiots que l'on propose sur Facebook, je voyais les publications de certaines personnes sur son mur. L'un d'eux m'avait frappé. Quand j'en parlais avec mon amie, je lui expliquai de s'en méfier que je pensais qu'il avait des traits psychopathiques évidents. Elle pris mon avertissement en compte tout en me trouvant un peu alarmiste. Toutefois, à l'occasion d'un désaccord bénin, il menaça de frapper une femme, la terrorisant et mon amie appris par la suite qu'il battait sa propre femme et qu'il s'était rendu coupable de maints petits délits dont certains auraient du attirer l'attention des autorités tant ils contenaient un potentiel de violence.

Cette amie fut surprise que je puisse profiler à partir d'un simple mur ce genre de pathologie. Pourtant une fois que l'on connait bien le psychopathe, il n'est pas dur à détecter. Il y a tout d'abord cette image qu'il se donne, ce charme, cette faconde naturelle et superficielle qui le fait se montrer si sur de lui. Et puis, à partir de là, il suffit de creuser pour traquer les incohérences, les différences fond/forme. On s'aperçoit alors bien vite que sous son apparente bonhommie, se dissimule un être amoral, avide de pouvoir, et prompt à transgresser les droits d'autrui. On perçoit le côté vantard et bien entendu sa tendance à manipuler et tromper autrui, cet atavisme pour le mensonge.

Je ne sais pas ce que j'aurais fait à la place de mes confrères face au jeune Mathieu. Simplement, au vu de ce que rapporte le Figaro, eu égard aux circonstances de ce premier viol, je pense que j'aurais compris face à qui j'étais. Ce type de seulement quatorze ans capable de préparer son kit de viol (baillon et lien) pour s'en aller perpétrer son horrible forfait a absolument tout du serial killer que l'on rencontre dans les écrits spécialisés. Nous ne sommes plus dans le passage à l'acte atroce mais violent et irrépressible mais plutôt dans une traque minutieusement préparée. Ce n'est plus le stress violent qui provoque cela mais justement cette absence totale de stress qui caractérise les grands psychopathes tels que les décrit Hervey Cleckley dans The mask of sanity.

De fait une véritable enquête n'aurait pas du se borner à l'individu que l'expert a face à lui, il aurait fallu interroger sa famille et je suppose que cela fut fait mais aussi ses amis et de manière générale, les personnes qu'il côtoyait tous les jours et notamment les camarades de classe. Et je suis persuadé que là, un témoignagne aurait attiré l'attention de l'expert. J'imagine bien un ami qu'il aurait pu prendre pour confident, des garçons de la classe qui auraient tout de même remarqué des choses étranges. Parce qu'aussi discret qu'il soit, le psychopathe ne peut s'empêcher de se vanter et de se vautrer dans l'insanité. Et ce genre de comportement laisse forcément des traces.

C'est toujours amusant de mener des entretiens cliniques, de poser des questions. Souvent au début les gens répondent globalement, puis après une fois la confiance établie, ils vous livrent des choses qui sont utiles au diagnostic. Il arrive souvent que ces éléments ne viennent pas en premier parce que face au choc moral que peut provoquer le comportement du psychopathe, les gens on tendance à rester dans le déni et à minorer inconsciemment les faits pour ne pas avoir à en affronter l'horrible gravité. Ca commence toujours par "c'était un homme si gentil" pour finalement finir par "bon c'est sûr qu'un jour on a été étonnés quand il a dit ou fait cela mais on s'est dit que ce n'était pas grave".

Ainsi récemment une femme venue me consulter dans un moment de crise terrible a fini par admettre qu'elle avait passé dix ans de sa vie avec ce que la littérature nomme un pervers-narcissique mais que l'on devrait appeler simplement un psychopathe. Au départ, tout en admettant que son conjoint n'avait pas été très clair, elle ne reconnaissait pas le caractère proprement monstrueux de sa conduite. Puis, chemin faisant, se remémorant tous les comportements odieux qu’il avait eu, elle a du admettre qu'elle avait passé dix ans de sa vie avec un monstre et que chaque fois qu'elle l'avait deviné, elle s'était empressée de l'oublier. Cette jolie femme s'était simplement entichée d'un psychopathe charismatique, sans doute l'espèce la plus dangereuse.

Bref il me semble que tant côté expertise, que côté justice, ce ne fut qu'une longue suite d'erreurs incroyables. Lorsqu'il fut arrêté l'an dernier, ce n'était que son parcours criminel qui commençait. Après, une fois le processus enclenché, les barrières dépassées, ce n'est qu'une question de montée en puissance. Il n'avait pas encore tué, il l'a maintenant fait.

Prédire la dangerosité ! Première partie



Le meurtre récent d'Agnès a mis en relief la difficulté qu'il y avait à prédire la dangerosité d'un individu et peut être plus encore plus la difficulté pour ceux qui sont chargés de ces expertises la difficulté d'accepter leurs responsabilités en cas d'erreur d'appréciation manifeste.

Qu'il s'agisse du juge s'appuyant sur l'expert pour rendre justice, ou de ce dernier qui nous explique qu'il n'offre qu'un soutien à la décision mais qu'elle n'appartient qu'au juge, personne n'endosse aujourd'hui la responsabilité de ce qui aurait pu être évité si on avait su prévoir la récidive chez Mathieu, le jeune violeur et assassin d'Agnès.

La définition de ce qu'est un criminel « dangereux » est simple puisqu'il s'agit d'une personne ayant une forte probabilité de commettre à nouveau un acte de violence ou de destruction. C'est la dangerosité qui retient notre attention plus que le crime en lui même. Car si la peine peut sanctionner le crime, elle doit aussi prévenir la dangerosité de la personne emprisonnée en prenant en compte sa propension à perpétrer de nouveau un acte de violence.

En effet, condamner un criminel dangereux à cinq, dix, quinze, ou vingt années d'emprisonnement n'aurait aucun sens si une fois libéré, nous sommes sûrs que cette personne recommencera ce pourquoi elle fut emprisonnée. Et bien entendu, cette notion de probabilité de la récidive est à prendre particulièrement en compte chez les criminels sexuels dans la mesure où leurs actions ne sont pas mues par des motifs d'enrichissement comme chez un braqueur mais plutôt par un système pulsionnel qui les fera tôt ou tard repasser à l'acte. Il s'agit donc pour prédire la dangerosité d'un individu, de savoir quel est "le risque que cette personne adopte un comportement violent au cours d'une période définie, dans un contexte défini"

Comme l'écrit le psychiatre Michel Bénezech :dans le domaine de la psychiatrie et de la criminologie, on pourrait définir la " dangerosité " comme la capacité d'un individu ou d'un groupe à présenter un risque de violence et de transgression, physique ou psychologique, ou encore comme une disposition, dans un contexte donné, à passer à l'acte d'une manière violente et transgressive. En effet, s'il existe des troubles exposants, il existe aussi des situations à risque ou des représentations sociales qui génèrent des comportements de violence ou en activent la disposition chez les individus. Or, l'identification d'un risque implique de l'évaluer, d'en analyser les déterminants et de le prévenir.

Il existe deux grandes catégories de méthodes d’évaluation de la dangerosité, les méthodes cliniques et les méthodes actuarielles. Tandis que les premières utilisent des notions psychopathologiques pour dresser un profil de la personne et donc un diagnostic, les seconds s'appuient sur des statistiques de manière à mesurer de manière dynamique la probabilité que la personne aura ou pas de perpétrer d'autres violences.

Parmi les évaluations cliniques, seuls les entretiens semi-structurés, c'est-à-dire guidés par des outils validés internationalement, ont un certain succès prédictif. En revanche, les entretiens cliniques seuls peuvent manquer de validité dans la mesure où sans méthode, il est probable qu'un lien se tisse entre l'expert évaluateur et l'évalué et que l'entretien se mue en pseudo-thérapie où l'on cherche plus à comprendre qu'à évaluer le risque. Je ne doute aucunement de la probité des experts mais uniquement de la capacité humaine à ne pas faire preuve d'empathie pour se transformer en "entomologiste" froid uniquement axé sur l'étude de la personne.

Les outils d'analyses sont nombreux : PCL-R, HCR-20, SVR-20, etc. Pour soutenir le jugement clinique, divers instruments ont été développés depuis le début des années 1980. Dans le champs du comportement criminel, l'échelle de psychopathie de Hare (PCL-R) s'avère particulièrement utile. Il s'agit d'une grille d'analyse développée pour cerner les des traits de personnalité (facteur 1) mais aussi les comportements antisociaux ou les comportements associés au comportement antisocial, tel par exemple l'impulsivité (facteur 2).

On a pu constater que les psychopathes, diagnostiqués sur la base de cet instrument, récidivent davantage, plus rapidement et sous une forme violente en comparaison des non psychopathes. L'évaluation de la psychopathie demeure un aspect important dans l'évaluation des risques posés par un individu atteint d'un trouble mental sévère et persistant. Car c'est bien la psychopathie qui pose le plus souvent problème dans la mesure où ces individus dénués d'empathie ne seront jamais capables d'apprécier les conséquences morales de leurs actes. Dès lors, vivant sous la seule règle du "je veux/je prends", il y a fort à parier qu'ils récidivent.

L’outil le plus utilisé en Europe dans le cadre de du diagnostic de psychopathie est l’échelle HCR-20, qui permet de récolter des informations sur le passé, le présent et le futur de la personne que l'on cherche à évaluer. C'est l'analyse du présent qui fait l'objet d'entretiens cliniques, l'expert étant guidé par la méthode.


Ces méthodes sont utiles mais restent toutefois sujettes à caution dans la mesure où il s'agit d'une observation effectuée par un être humain avec toute la subjectivité que cela provoque. Et puis, il n'est pas interdit au sujet subissant cet examen de mentir pour se concilier les bonnes grâces de l'évaluateur. Et l'on sait que le psychopathe est un menteur et un manipulateur patenté.

On a donc coutume d'estimer que les méthodes les plus prédictives en termes de fiabilité restent toutefois les calculs actuariels, car uniquement basés sur des statistiques. Elles nécessitent toutefois d'être complétées par une évaluation dans la mesure ou aucun taux de corrélation fourni ne permet d'établir une prédiction absolue proche de la certitude. S'agissant de justice et de réinsertion possible, il s'agit de laisser "une chance" à la personne qui subit l'entretien. En effet, l'engagement de la personne dans un traitement thérapeutique mais aussi la prise de médicaments ou la prise en compte d'autres éléments biographiques tels que le soutien social (amis famille) ou des modifications de son environnement (travail) permettent aussi d'analyser plus finement ces prédictions statistiques.

Le VRAG (Violence Risk Appraisal Guide) est un des outils actuariels les plus utilisés en matière de prédiction d’actes de violence avec une variante spécifiquement élaborée pour les violences sexuelles (S.O.R.A.G.) . Comme le montre le tableau ci-dessous, il comprend « des variables diagnostiques (trouble de la personnalité, schizophrénie, score de psychopathie) à côté de variables de type démographique (statut conjugal, âge lors du dernier délit) ou criminologique (antécédents de délits non violents, victimes de sexe féminin) »



Tout instrument, quel qu'il soit, ne peut évidemment faire abstraction de l'analyse du clinicien. Un risque important serait de se reposer totalement sur la technique psychométrique pour pallier le déficit d'analyse personnelle. Parce que justement, l'analyse personnelle, cette activité clinique nécessaire, doit permettre de prendre en compte des éléments contextuels comme l’état émotionnel du patient, son implication dans un traitement, ainsi que sa situation future (retour dans la communauté, possibilité de traitement, etc.). Ces outils ne sont que des outils.

Enfin, l’intérêt des évaluations cliniques est qu’elles permettent aussi de gérer (et non pas seulement de prédire) le risque en définissant un traitement adapté. Ainsi, malgré leur extrême dangerosité lorsqu’ils sont laissés sans soins, les schizophrènes paranoïaques ne le sont plus une fois sous neuroleptiques. Ainsi, en fonction des pathologies, l'internement ou la prison à vie ne représentent pas la panacée parce que parfois seule une surveillance suffit. Le vrai problème vient en fait des psychopathes et des criminels sexuels et globalement de ces personnes capables de s'intégrer superficiellement, capables même de fournir le discours qu'un psy chargé de les évaluer attend d'elles, dont on ne sait pas s'ils passeront à l'acte ou non.

On voit bien que loin de remplacer l'expertise clinique, l'ensemble de ces instruments extrêmement utiles ne sont que des moyens de standardiser la démarche d'évaluation et aussi des guides permettant à l'expert de se référer à un cadre. Ils ne constituent que des outils d'aide à la décision. La faculté de jugement reste donc au centre de la démarche consistant à prédire la dangerosité d'un individu. Dans l'affaire du meurtre abominable d'Agnès force est de constater que l'ENM et le doctorat de médecine ne fournissent parfois que des connaissances mais aucune faculté de jugement.

En ce qui concerne Mathieu l''assassin d'Agnès, et au regard des renseignements que l'on a pu lire dans la presse (et sous réserve qu'ils soient vrais), on ne peut que regretter non pas un concours de circonstances comme ont tendance à l'affirmer magistrats, psychiatres et élus fuyant leurs responsabilités mais un véritable scandale. Mathieu avait déjà violé avec une sauvagerie inouïe une adolescente de quinze ans l'année précedente.

Ainsi, un article du Figaro, nous révèle que : De façon plus sourde, ce petit fumeur de joints est tenaillé par des perversions sexuelles longtemps inassouvies. En août 2010, il est accusé du viol d'une adolescente de 15 ans de son village. L'agression, d'une violence inouïe, a déjà été orchestrée à l'avance. Mathieu avait notamment préparé les liens pour l'entraver et la bâillonner. Mis en examen pour viol avec violences, le lycéen purge quatre mois de détention provisoire avant d'être libéré en novembre. Pendant sa première incarcération, quatre experts diligentés par la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), dont un psychologue, l'ont visité en cellule avant de pondre un rapport d'investigation et d'orientation éducative (IOE). Bien qu'assez fouillé et destiné à éclairer les magistrats dans leur décision, ce document épais de plusieurs dizaines de pages n'a, à aucun moment, décelé la venimosité latente du personnage. Dans leurs conclusions, les experts psychiatriques avaient jugé le garçon «réadaptable, réinsérable et ne présentant pas de dangerosité ».

On constate donc que l'on n'a manifestement pas à faire une "banale affaire de mœurs", une sorte de flirt qui aurait "mal tourné", d'un "problème de jalousie" mais à la mise en oeuvre d'une vraie préméditation de la part d'un prédateur dangereux. De plus, au fur et à mesure que les langues se délient on constate que le chérubin, ainsi libéré par un magistrat soucieux de sa réinsertion, n'était pas le petit ange que l'on pensait comme l'affirment ses camarades qui l'ont fréquenté au quotidien et qui livrent leurs réflexions aux journalistes.

On est en droit de se demander de quel acte criminel abject on doit se rendre coupable pour bénéficier d'un diagnostic de psychopathe de la part de ces quatre experts, puisque préméditer un viol sauvage comme le ferait n'importe quel serial-killer ne suffit pas. Quant aux magistrats qui ont rendu leur décision, gageons que s'ils ne donnent que quatre mois de prison préventive pour un viol aussi monstrueux en permettant au coupable de retourner à l'école comme si de rien n'était (dans un établissement mixte), ils seraient par contre sans pitié pour un dépassement de limitation de vitesse !

N'importe quel adolescent boutonneux se passionnant pour le phénomène des tueurs en série depuis la sortie du Silence des agneaux et ayant lu les ouvrages de Robert Ressler, de John Douglas, voire même ceux du médiocre Stéphane Bourgoin auraient compris qu'il se trouvait face à un dangereux personnage.

Et puis, au-delà de toutes ces réflexions et de ces débats d'expert, c'est avant tout un problème de morale. On ne peut pas moralement, il doit être impossible de relâcher un tel criminel avant qu'il ne soit jugé aux assises et ce quelque soit son âge. Penser à la réinsertion du criminel à ce stade, c'est mettre la charrue avant les bœufs et finalement nier la souffrance de sa victime : on marche sur la tête. Un juge n'est pas lié aux conclusions de l'expert et quelle que soit le résultat de l'expertise, il m'aurait semblé normal que ce jeune homme reste incarcéré simplement parce que moralement, c'était normal qu'il le soit vu la gravité des faits !

Je plains d'autant plus les parents d'Agnès qu'il me semble que cela n'aurait jamais du arriver. Cette affaire est purement monstrueuse.


(sources : Gilles Côté, Xavier Bébin, Michel Bénézech)

25 novembre, 2011

La théorie GCM sur les clubs !

 Un destination où se rendre pour s'emmerder dans un club !

Comme tous les jeudis soir, GCM est venu me chercher au cabinet pour notre soirée Mc Do et film con. Tandis que nous rentrions, il m'a dit que Lapinou lui avait expliqué quel déplorable dimanche il avait passé lors de ce rallye en voiture ancienne. J'ai répondu qu'effectivement, le dimanche matin était vraiment le moment où tous les cons se retrouvaient en vallée de Chevreuse pour rouler en groupe, que ce soit en vélo ou en voiture. Et j'ai rajouté qu'ayant vu passer bon nombre de Lotus, il y avait vraisemblablement un club dans lequel il pourrait lui aussi aller s'ennuyer avec sa belle Elise.

Et comme nous parlions de ce phénomène curieux des clubs, GCM a développé une théorie intéressante à ce sujet. Doctement, il commença par me dire qu'il fallait être un con pour adhérer à un club. Puis, tentant d'affiner son propos, il précisa que plus qu'être un con, il fallait être un pauvre type. Concentré sur sa conduite, il m'expliqua que le terme de pauvre type était exagéré et qu'il entendait par là, qu'une club était uniquement fait pour réunir des gens tellement introvertis que s'ils n'avaient pas un sujet en comment pour se retrouver, ils seraient perdus et ne trouveraient rien à se dire. 

Handicapés relationnels aux habiletés sociales limitées, il leur est impossible se se socialiser normalement. Ce sont des personnes qui dans tout groupe informel se retrouveraient en marge. Ceux que l'on retrouvent immanquablement seuls le verre à la main lors de n'importe quel rassemblement alors que des petits groupes se sont constitués naturellement. Pour GCM tandis que n'importe quel individu tend à s'assembler en fonction de ce qu'il pense, parce que s'exprimer est un acte naturel, ces grands introvertis en sont incapables. Alors, ils se rassemblent autour de ce qu'ils ont parce que c'est plus simple et moins engageant émotionnellement. Pour certains ce sera le sport, pour d'autre la voiture ancienne ou la philatélie. 

Ôtez leur ce trait commun, cet avoir, et le groupe se dissout incapable de se refonder sur l'être et les affinités électives. De là vient le fait que pour tout être humain normal, un club ne peut être qu’ennuyeux et sclérosant. Comme me l'explique ensuite GCM, il aime le foot et a tenté de discuter de cela sur un forum spécialisé qu'il a quitté rapidement tellement les échanges étaient pauvres émotionnellement.

Dans les faits, poursuit GCM cramponné à son volant mais très en verve, un club est un vivier de grands solitaires qui n'échangent pas vraiment mais miment la vie réelle. Le club reste donc un palliatif de la vie, le degré zéro de la sociabilité et donc tout le contraire d'un simple café. Inteligemment, GCM m'explique que parler de voitures dans un club d'autos anciennes est aussi bête que de discuter d'alcool et de cigarette dans un café-tabac.

On va justement au café-tabac pour rencontrer et parler de vraies choses et il devrait en être de même dans un club de voitures anciennes si les gens étaient de vraies gens et non des handicapés sociaux en mal de rencontres qui n'existeront jamais. Les liens du club s'organisent autour de la vie du club, de réunion en réunions, mimant ainsi une sorte de rythme qui peut donner à ce groupe artificiel une semblant de vie réelle. De fait, on se bornera à refaire inlassablement la même chose qu'on réorganise tout le temps. 

Le club est une sorte de mouvement perpétuel dont les carburants sont l'ennui, le manque d’habileté sociale, le retrait autistique et le complexe. Le club tourne en rond sur lui-même et n'affirme rien dans le réel. Qu'il s'agisse de sportifs ou d'amateurs de véhicules anciens, l'adhérent tourne inlassablement sur lui-même en ne rencontrant que des clones de lui-même lui renvoyant par effet miroir sa propre vacuité,  en utilisant une sorte de métalangage technique masquant la pauvreté de ses affects et de sa communication. Les plus ambitieux trouveront parfois une identité sociale plus marquée en prenant des responsabilités dans leurs clubs c'est alors que ne maitrisant pas leur vie, ils tenteront de présider celle des autres.

Le club c'est ce que l'on propose à l'enfant solitaire afin qu'il se socialise et apprenne la vie  en groupe en pratiquant par exemple une activité sportive. Il y apprendra une forme de discipline et de règles de vie en société. C'est la première marche qui permet d'affronter les autres dans la vraie vie. Passer sa vie dans un club, c'est admettre qu'en dehors des règles associatives et d'un kit de prêt-à -partager, on ne partage rien avec les autres qui nous restent à jamais étrangers. Ou encore qu'en dehors d'une praxis nécessitant persévérance et répétition, on ne pourra jamais partager d'idées. Rester dans un club, c'est être forcé d'admettre qu'on est limité à ne fréquenter que des gens qui nous ressemblent, ternes miroirs de nos désespoirs et de nos lacunes, la fréquentation des autres nous est interdite. Le club, quelle qu'en soit l'objet social (sport ou tricot), c'est aussi ce que l'on propose à l'adulte solitaire et dépressif pour rompre l'ennui, ou à l'alexithymique tentant d'exprimer des émotions basiques. Le club fait presque partie de l'arsenal thérapeutique destiné aux laissés pour compte et consorts.

Le club est fait pour tous ces désespérés qui ne savent pas communiquer. Ces gens que l'on rencontre et qui aussitôt après avoir parlé de leur travail vous demande immédiatement quelles sont vos passions, en espérant que l'une d'elles correspondra au catalogue des connaissances qu'ils possèdent en stock afin d'échanger malgré tout autour d'un avoir à défaut de savoir être.

Bref, le club est un endroit socialement vidé de toute énergie psychique et à peu près aussi avenant qu'une boîte de nuit au petit matin quand la lumière se rallume et qu'on vient y faire le ménage.Si vous êtes vivants n'adhérez pas à un club. Si vous aspirez à la vraie vie, quittez votre club.

A la lumière des réflexions de GCM, je doute qu'un jour le club Lotus le compte parmi ses membres. Personne ne sera étonné que je puisse partager la plupart de ses réflexions et ainsi les étayer pour les mettre sous forme de texte. 

Qui se ressemble s'assemble. Peut-être qu'un jour GCM et moi fonderons le club de ceux qui n'aiment pas les clubs. Cela nous permettra de parler de tas de choses et de partager des tas d'idées sans pratiquer d'activité commune.

24 novembre, 2011

Jour de gloire !


J'ai beau me rouler dans la fange, vivre chichement, hurler ma simplicité, mettre en avant mes failles,  avouer que je roule Citroën Visa (Club tout de même), consentir des rabais sur mes honoraires, rien n'y fait, quelqu'un m'a démasqué et a clairement vu en moi le personnage d'exception que dissimulait sans doute fort mal mon humilité de façade pourtant sincère. Qui donc me demanderez-vous ?

Et bien il s'agit d'une jeune scénariste venu me voir voici quelques temps avec un projet de série dont le personnage serait basé sur ... moi ! Oui vous avez bien lu, un scénariste a décidé de présenter à des sociétés de production une série télévisée reprenant les aventures haletantes de votre serviteur.  Tous ceux qui me connaissent, imaginent déjà l'intrigue insoutenable, les scènes de cascades, de poursuites en voiture, les palaces luxueux, les douilles s’éjectant d'un Beretta crachant la mort et bien sur des créatures languides pour émailler les histoires parce que le cul, ça fait toujours vendre ! J'essaierai de faire passer le Gringeot comme conseiller technique pour caster les gonzesses. Je l'imagine déjà gueuler "bon alors les 105 E ici les autres vous pouvez rentrer chez vous".

Non, plus prosaïquement, j'ai reçu la bible ce soir et le projet m'a eu l'air de tenir la route. Alors pour les néophytes, la bible c'est le document qui réunit une note d'intention, (le message que l'on veut transmettre), le synopsis (ben l'histoire quoi), la typologie des personnages et bien sur le scénario du premier épisode (dit aussi pilote) que le scénariste envoie aux boites de production. Si je n'ai rien trouvé à redire aux deux premiers documents, en revanche le scénario du pilote me laisse un peu perplexe. Bon ça reste nettement mieux qu'une série française de base mais il y a trop d'éléments peu réalistes.

Et puis, je parle, je parle, et si cela se trouve j'ai à faire à un mytho ou pire à une caméra cachée. J'imagine déjà les techniciens planqués dans une camionnette dans la rue en train de se foutre de moi en me regardant sur leurs écrans de contrôle. Je vois déjà l'ingé son dire "haha mais écoute moi ce gros con, qui y croit, c'est pas Dieu possible d'être si crédule". Et son pote aux manettes de répondre "putain, ils sont tous pareils, ils ne pensent qu'à la gloire, c'est vraiment des dingues ces psys". Et le producteur derrière de surenchérir : "celui-là c'est du lourd, on l'a bien casté. Le mec roule en Visa Club et joue les cadors sur un blog, c'est la version psy des mecs qui font du tuning". 

Et moi dans le cabinet, pontifiant, marchant de long en large avec force mouvements, faisant la roue pire qu'un paon et expliquant en jargonnant au jeune acteur jouant le rôle du scénariste ce qu'il faut changer à son scénario ne me doutant pas qu'en fait de série je passerai dans Strip Tease !


Dans tous les cas, je décidé d'y croire. Je sais que même si je trouvais le projet plutôt amusant, après, il y a les étapes de la société de production, puis de la chaine, etc. Et je ne suis pas assez naïf pour m'imaginer l'an prochain déjà à Cannes, le nez dans un saladier de cocaïne avec une pute de luxe à chaque bras (désolé mais c'est un destin de star et difficile d'y échapper). Ou alors encore pire, en train de gesticuler parlant de tout et n'importe quoi comme savent si bien le faire les médecins qui pensent que parce qu'ils ont appris à soigner le corps cela leur donne la prétention de soigner la société, le cul dans un canapé chez Taddeï ! Je pourrai même aller à des chouettes vernissages où planté devant une croûte d'un jeune artiste contemporain où  je pourrais dire "qu'il déstructure la couleur" avec un air sérieux et pénétré suscitant des cris admiratifs de mon entourage.

Mais plus sérieusement, c'était plutôt amusant cette idée et bien plus encore de lire la caractérologie du personnage telle que le scénariste la décrit dans sa fameuse bible. Plutôt rigolo de se retrouver analysé et décortiqué par un type ayant décidé de s'inspirer de vous pour sa série. Ça donne une sorte de mix entre House, Fitzgerald (photo du haut) et un peu de moi, un personnage assez irrévérencieux et improbable, idéal dans une série, mais en tout cas assez loin de moi tout de même.

Enfin, j'attends la suite. Je verrai bien. Mais pour le moment, bien sur, si je crois Hugh Laurie en vacances à Paris dans mon quartier, je ne le regarderai même pas. Normal le docteur House est une fiction ; moi non.

On ne boxe pas dans la même catégorie !!!

22 novembre, 2011

Mars en balance !


 Vous savez que je suis sujet aux lubies et aux petites marottes et que l'une d'entre elle est l'astrologie. Ça peut sembler être un passe-temps de shampouineuse mais je l'accepte sans problème. Et une fois, un psychiatre m'ayant expliqué qu'Eysenck avait démontré que l'astrologie était une arnaque, je lui ai répondu que malgré sa célébrité et son talent,  ce brave Hans n'avait rien compris à ce sujet parce qu'il avait travaillé avec un gros biais négatif. Demander à Eysenck d'être juste en ce qui concerne l'astrologie, était aussi impropbable que d'exiger de Staline qu'il fasse l'apologie de la libre entreprise.

Toujours est-il que voici quelques mois j'ai reçu un astrologue. Oh, un curieux astrologue puisqu'après avoir exercé la profession, il a décidé de changer de voie pour embrasser une carrière plus classique. Le type âgé d'une trentaine d'années était très sympa. Tout en nous occupant de ce qui le tracassait dans sa vie, nous avons évidemment parlé d'astrologie.

Sans sombrer dans une rivalité de mauvais aloi j'ai un peu commencé les hostilités en lui déclarant qu'il était capricorne. Il a semblé étonné que j'aie touché juste. Il s'agissait aussi pour moi de lui faire comprendre que quoiqu'il lise en moi, j'en avais autant à son service. C'est stupide mais je pense que c'était une manière de marquer mon territoire et de montrer des défenses.

Ceci étant posé, nous nous sommes très bien entendus. Pour nous amuser, nous avons échangé nos cartes du ciel afin que l'un et l'autre nous puissions exploiter ces renseignements. A la mesure de mes connaissances qui n'égalaient pas les siennes, j'ai tout de même pu noter certains traits saillants et lui en ai fait part. Il a fait de même à mon égard, c'était le jeu.

Je l'ai vu esquisser un sourire et j'ai su qu'il venait de noter mon "mars en balance". Rassurez-vous, même si je n'y pense pas tous les jours, la position de Mars en Balance est la pire chose qui me soit arrivée. Imaginez vous pire place pour le Dieu de la guerre que celle consistant à se trouver en Balance, le signe de l'harmonie, de la justice, de l'esthétisme, etc. Avoir Mars en balance c'est un peu comme inviter le pire soudard à un thé dansant, le pire bourrin à venir écouter un quatuor à cordes ! Mars c'est l'action et la balance c'est l'indolence, le charme, la légèreté, l'écoute, la temporisation, l'harmonie, etc. Bref tout ce qu'on imagine paralyser l'action.

J'ai tout lu à ce sujet et je me suis fait une raison. C'est sans doute pour cela que lorsque parfois effrayé par mon indolence et mon inaction, je m'apaise en me disant de m'accepter. Puisqu'un destin funeste a mis Mars en balance à l’heure de ma naissance, je ne m'attends plus à m'éclater sur un stade de rugby. Et puis si par mégarde, je me sens d'humeur belliqueuse et batailleuse, il me suffit de taper sur Google "mars en balance" pour tomber sur des liens anéantissent en moi tout esprit de conquête comme celui-ci. Étonnez-vous après cela que je n'aie pas le sens de la compétition qui aurait pu me pousser à faire un sport quelconque ou à retaper une voiture ancienne pour qu'elle soit plus belle que celle de mon voisin ! Avec Mars en balance, j'aurais eu de bonnes perspectives pour devenir styliste ou danseur mondain mais aucune pour pratiquer le free fight. Quand on a la même position de mars dans son thème que Freddy Mercury, on la ramène moins ! On est jsute content d'avoir échappé aux boîtes de nuit tendance cuir et mosutaches !

J'en était là de mes considérations, perdu dans mes regrets, lorsque mon cher patient a justement touché du doigt ce que j'aurais voulu qu'il évite de remarquer. Il m'a dit que c'était amusant que j'aie Mars en balance. Moi je n'ai pas moufté le laissant venir. Dans le pire des cas, j'étais prêt à lui dire que j'avais peut-être mars en balance mais que mon ascendant bélier compensait cela et que c'était mieux que son ascendant cancer qui donnait de la sensibilité mais aussi beaucoup de mollesse.

C'est assez amusant que dès qu'un homme se sente menacé dans sa masculinité, il se prépare à réagir. Je n'y échappe pas, et bien que j'aie Mars en balance, un truc bien pourri, si je pressens que l'on m'attaque, j'ai aussitôt la main sur la garde de mon épée, prêt à la sortir. Mettez deux mâles ensemble et le combat de bites n'est jamais loin. Que voulez-vous l'évolution en a décidé ainsi, c'est ce que l'on nomme la compétition sexuelle, notre manière à nous de faire valoir notre patrimoine génétique. Mais bon, je sais aujourd'hui que Mars en balance, ce n'est pas que Freddy Mercury mais aussi Surcouf et pas si négatif que cela comme en atteste ce lien.

Je m'attendais donc au pire quand mon patient m'a juste expliqué que les côtés négatifs de Mars en balance étaient selon lui totalement erronés. Je me suis senti revivre et j'ai lâché la garde de mon épée. Selon lui, la planète de l'activité se trouve ici dans le signe des rapports humains. L'action ou l'activité martiennes seront donc dirigées vers autrui et cette position permet de mobiliser autrui pour trouver un modus vivendi.  J'écoutais et je trouvais cela pas mal. Puis il a m'a expliqué que la balance avait besoin d'une altérité avec qui se lier et que toute personne ayant mars en balance fonctionne généralement en binôme pour agir car c'est de la relation qu’il aura créée qu’il tirera sa force ! C'était assez juste. Puis, il a poursuivi en me disant qu'en tant que capricorne j'étais ambitieux mais que ma position de mars m'amenait nécessairement à avoir besoin d'autrui pour agir. Puis il a conclu par le fait que je n'aurais pas pu trouver meilleur métier que le mien, ce qui je dois le dire m'a flatté et m'a amené à le considérer comme le meilleur astrologue de tous les temps.

J'ai tendance à considérer que Eysenck s'était trompé sur l'astrologie quand il disait que tout le monde se retrouvait finalement dans des portraits suffisamment vagues et flatteurs. Mais finalement n'avait-il pas raison ?

Ayant Mars en balance, je me devais de trouver un juste milieu. Alors je dirai que j'aime Eysenck pour certains de ces travaux et que j'adore les astrologues quand ils disent du bien de moi.

Bref, je ne sais quoi penser. En revanche je suis comme tout le monde, je suis sensible aux compliments.

21 novembre, 2011

Anders, c'est qui ce mec en fait ?!?


Régulièrement l'actualité nous offre les portraits saisissants d'individus pas comme les autres. Au moment où j'écris cet article, on vient d'arrêter l'assassin de la jeune Agnès. Deux semaines auparavant, c'était la celui de la petite Océane qui défrayait la chronique. Pourtant, puisque je suis en retard sur l'actualité, je ne vous parlerai pas de ces deux sinistres individus. Je suppose qu'ils appartiennent à des catégories plutôt bien connues des service de police.

Celui qui m'a passionné dernièrement, c'est ce cher Anders Breivik parce qu'un mass murder aussi efficace c'est assez rare. Au delà du drame que cela représente pour les familles des disparus, le plus amusant a été la manière dont l'événement a été traité par les médias. Tous les gauchistes que la terre compte se sont jetés sur l'affaire pour l'exploiter jusqu'à la trame. Tous ont vu chez Anders Breivik, le prototype du vilain fasciste qu'ils attendaient, celui qui serait à même de réactiver tous leurs fantasmes concernant "le bête immonde" dont chacun le sait, le ventre est encore fécond. Mais bon, ils tenaient enfin un événement leur permettant de rendre réels leurs fantasmes alors ils ont stigmatisé, discriminé et exploité sans vergogne. Si Breivik n’avait pas existé, il aurait fallu l'inventer. Mais fi de la politique, je ne suis pas ici pour cela !

Parce que, et j'en mettrais ma main à couper, il n'y a aucune motivation politique derrière l'acte odieux de ce cher Anders. Breivik, comme tous les mass murder est un blaireau, un pauvre type dont la vie a été contrebalancée entre deux extrêmes : être le géant de ses rêves ou le nain de ses cauchemars.

Qu'il s'agisse du petit gros binoclard qui revient un jour dans son université US avec un Uzi dans chaque main pour flinguer ses camarades, du mari jaloux qui tue sa femme et ses enfants avant de mettre fin à ses jours ou de l'improbable Anders Breivik, il y a toujours à la base un narcissisme défaillant et blessé. Le narcissisme du médiocre qui s'est rêvé au dessus de tous mais n'y est jamais parvenu. Le mass murder en général, c'est le pauvre mec qui vous lance à la face un atroce "alors vous voyez que vous aviez tort de me prendre pour un con, regardez de quoi je suis capable ?!?" pour vous faire regretter de ne pas lui avoir donné l'importance qu'il aurait voulu avoir. C'est le sale mec qui chouine que personne ne l'aime pas s'en donnera à cœur joie pour humilier la pauvre nana qui lui dirait oui. C'est le nain qui s'est toujours rêvé géant sans prendre le temps de s'en donner la peine, le type qui lorsqu'il est face à sa médiocrité décompense brutalement.

A la base, comment peut fonctionner un type comme cela . Bof, comme tout explosif, il faut de la poudre et un détonateur, un terrain prédisposant et un facteur précipitant. Généralement, on a à faire à ce que l'on nomme une personnalité schizoïde. Dit comme cela, le terme fait peur. Pourtant les personnalités schizoïdes font de bons héros dans les romans ou dans les films. 

Le genre de héros qu'adorent les petits garçons. Il s'agira soit de tueurs froids et méthodiques, soient qu'ils soient dans la légalité et interviennent en tant que justicier solitaire comme l'inspecteur Harry, soit qu'il s'agisse de tueurs à gages, soit encore de savants lunaires contre lesquels le sort s'acharne mais qui finissent par triompher de tout le monde en prouvant qu'ils avaient raison. Le problème est que si la réserve et la discrétion ne sont pas des tares, il se peut qu'une trop grande froideur soit en fait une sorte d'émoussement affectif plus proche de l'alexithymie dont la présence fasse justement soupçonner une personnalité pathologique.

Le trouble de la personnalité schizoïde est un trouble de la personnalité caractérisé par un manque d'intérêt pour les relations sociales. L'individu éprouve des difficultés à nouer des liens sociaux ; ses loisirs, son activité professionnelle, est solitaire et indépendant. Elle n'est en apparence pas touchée par les marques de sympathie ou d'affection et n'exprime pas ses émotions, d'où une image de froideur et d'apathie. 

La description psychologique commença avec les observations d’Eugen Bleuler en 1924 puis en 1940, Ronald Fairbairn présenta son travail sur la personnalité schizoïde dans lequel figurent la plupart des phénomènes schizoïde connus actuellement. Il esquissa 4 thèmes centraux : un besoin de régler une distance relationnelle ; une capacité à mobiliser ses défenses personnelles et la confiance en soi même ; une tension entre le besoin d‘attachement et le besoin de distance défensive, qui s’observe de façon manifeste par de l'indifférence et enfin une surévaluation du monde intérieur et l’exclusion du monde extérieur. 

Enfin, même si le DSM et la CIM 10 s'accordent à peu près sur les traits diagnostiques de cette personnalité pathologique, les dix critères énoncés par Harry Guntrip, précisent encore mieux les caractéristiques de ce type de personnalité : introversion, retrait/autarcisme, narcissisme, indépendance, sentiment de supériorité, manque d'émotions, solitude, dépersonnalisation et régression

Voilà, à mon sens en lisant cela, on peut à peu près profiler un individu comme Breivik. Tout colle, cadre et fonctionne parfaitement, le genre de type qu'on jugera un peu spé sans s'inquiéter outre mesure parce qu'à priori il parait suffisamment adapté. Il ne hurle pas, n'explique pas qu'il a vu des martiens, et ne coupe pas des animaux en rondelles,  alors pourquoi s'inquiéter ?

Le problème des personnalités schizoïdes c'est que l'on ne sait jamais ce que cela peut masquer. Parfois rien, parfois de grave problèmes. Si la mer semble étale, cela ne veut pas dire qu'il n'y ait pas une vie riche en profondeur, pour le pire ou le meilleur. Dans son ouvrage "Amour sexualité et personnalité pathologique", Quentin Debray rapporte ainsi que les enquêtes psychologiques pratiquées à propos des agresseurs sexuels tels qu'ils ont été étudiés en milieu carcéral montrent que ces sujets présentent volontiers une personnalité schizoïde. Solitaires, frustrés, souffrant d'un complexe d’infériorité, ayant l'impression d'être rejetés par les autres, socialement peu habiles, ils développent à la fois des sentiments de vengeance et des fantasmes sexuels atypiques

Flatteurs comme héros froids et déterminés et vivant dans leur monde, les personnalité schizoïdes sont donc loin d'être uniquement des gens bizarres ou un "peu largués" quand on les observe dans la vraie vie. Comme dit le proverbe il faut se méfier de l'eau qui dort. On sait que les experts se méfient de la sagesse populaire mais elle a parfois du bon.

En revanche, tous ceux qui sont affectés de ce trouble ne commettent pas d’attentats ni ne massacrent pas plus de soixante-dix personnes. Il faut avoir de sacrées motivations pour en arriver là et elles ne sont pas politiques. Il y a dans ces actes une recherche d'absolu, je dirais même la recherche d'un exploit, la volonté d'être le meilleur. Alors, pourquoi en arriver là ? A ce stade, on peut dire que s'il en avait les moyens psychologiques du fait de sa pathologie lui donnant le calme, la méthode et le retrait nécessaire, il n'avait pas de mobile.

Sans doute que l'on pourrait rechercher son mobile dans sa relation au père. Abandonné à l'âge de un an, il n'aura plus que des contacts sporadiques avec lui jusqu'à ses seize ans, après quoi le père et le fils en se reverront pas. D'après ce qu'explique la biographie de Breivik, son père refusera de le revoir parvenu à l'âge adulte. Sans doute que l'abandon seul ne suffirait pas à expliquer l'acte fou de Breivik, mais avec pour toile de fond une telle personnalité pathologique, on peut imaginer qu'il ait voulu prouver à son père qu'il avait eu tort de ne pas lui faire confiance. Il y a sans doute dans cet acte fou et horrible autant d'amour que de haine, comme si Breivik voulait à la fois prouver à son père qu'il est meilleur et plus intelligent que ce dernier ne le croyait, mais tout autant lui démontrer ce qu'a occasionné son abandon en faisant de lui le père du plus grand criminel que la Norvège ait jamais connu.

C'est à la fois monstrueux et pathétique. D'ailleurs le parcours, du moins ce que j'ai pu en connaitre de Breivik montre toute son ambition à devenir quelqu'un ! Passé de droite à gauche en faisant une escapade dans la maçonnerie, on voit bien que le parcours de Breivik n'est pas lié à un quelconque engagement politique mais à la volonté farouche de devenir quelqu'un, de trouver un groupe dans lequel on l'acceptera. Sans doute que la maçonnerie avec ses rites secrets et son initiation a plus flatter le schizoïde qu'il est mais las, elle l'a rejeté comme tous les groupes qu'il aura pu fréquenter.Sans doute que c'est sa pathologie et ses fantasmes de toute puissance qui le guideront vers l’étude d'autres doctrines tout aussi confidentielles.

Faute de trouver une issue favorable à sa névrose et à sa volonté de puissance, Breivik choisit alors une forme de suicide en faisant le plus de morts possibles. La Norvège n'étant pas les USA où n'importe quel type du SWAT l'aurait sans doute battu, il n'aura pas eu l'issue qu'il espérait.  A moins qu'il n'ait vraiment voulu s'en sortir pour obtenir une surmédiatisation et jouer au mec tout-puissant capable de donner la mort. Au pire haï, au mieux méprisé ou étudié par des psys qui voudront tout connaitre de sa pathologie, Breivik sera juste un monstre de plus.

Un monstre qui une fois étudié ne laissera rien d'original. Parce qu'une fois mis sous la lumière, Breivik na rien de fascinant, c'est juste un paumé, un malade, une personnalité schizoïde non détectée. Un de ces faux gentils qui ne trouvent pas leur place, mais que l'on imagine fort bien se muer en vrais salauds si le monde leur donnait une once de pouvoir. Un de ces faux calmes chez qui on sent bouillonner une énergie malsaine qu'ils n'arrivent pas à canaliser.

Et pour tenter de finir en beauté, il se livre encore à des pantomimes grotesques en exigeant d'être étudié par un psychiatre japonais. Sans doute que dans son cerveau malade, le japonais reste pour lui le samouraï impassible. Après Breivik gentil garçon, Breivik militaire, Breivik franc-maçon, Breivik tueur de masse, voici venir un énième avatar de ce cerveau malade : Breivik samouraï obéissant à un quelconque code du Bushido.



Il se rêvait géant, il n'aura été qu'un nain et cela même dans sa pathologie des plus communes.

20 novembre, 2011

Rallye touristique !

Avec un con au volant, toutes les belles choses deviennent assommantes !

Depuis que la pratique religieuse est en baisse, j'ai l'impression qu'il n'y a plus que les crétins pour se lever le dimanche matin : les sportifs, les cyclistes et les amateurs de véhicules anciens ! Aujourd'hui dimanche, j'ai fait partie des troisièmes.

Alors qu'habituellement, j'aurais fait une grasse matinée bien mérités, je me suis levé à 8h00. Pour vous, j'imagine que ce n'est rien mais pour moi, couche-tard par habitude, goût et constitution physiologique sans doute, me lever aussi tôt est un exploit que vous devriez applaudir !

L'ami qui m'avait accompagné acheter ma chère Visa en avait en effet parlé à une relation trempant dans le VEC (véhicules d'époque et de collection). Aussi ai-je été invité à participer à un rallye touristique en vallée de Chevreuse puisque c'est dans cet endroit bucolique que tous les cyclistes, motards ou automobilistes forcenés se donnent rendez-vous le dimanche matin pour organiser leurs pauvres processions d'obsessionnels du jarret musclé, de la Harley suréquipée ou de la bagnole d'époque en état-concours.

J'ai eu beau dire que ma pauvre Visa, bien qu'elle soit administrativement âgée de trente et un ans et puisse donc prétendre à la catégorie collection, elle n'était somme toute qu'une pauvre daube que plus personne ne voulait utiliser même au fin fond de la Meurthe-et-Moselle ou de l'Indre, rien n'y a fait, j'ai été sommé de participer. Et puis, comme j'aime bien le type qui me le proposait, j'ai cédé et j'ai accepté pour lui faire plaisir : le syndrome du chic type m'avait frappé !

Ayant peur de m'ennuyer dans ce genre de manifestation, je me suis adjoint les services de Lapinou comme copilote lui mentant éhontément en lui faisant croire que ce serait le plus beau jour de sa vie. Convaincu par mes mensonges, Lapinou est venu dans la galère avec moi. Quant à mon pote Olive, celui qui est riche et roule en Ferrari, je n'ai pas eu besoin de mentir puisque l'idée de passer une journée en bagnole à faire feuler son V8 l'a immédiatement enthousiasmé. C'est ainsi qu'au volant de nos voitures de 1980, une Visa club et une 308 GTS, nous nous sommes fondus dans un cortège de véhicules anciens.

Après avoir galéré une heure et demie à rouler à 70km/h, nous sommes arrivés à une première halte. Et là, il a fallu exposer sa voiture. Lapinou a saisi que la passion des gens présents était surtout de contempler des moteurs et de vérifier si le boulon de 12 monté sur la MG A était bien le même que celui indiqué par la revue technique d'époque. Le fin du fin étant d'avoir le boulon de douze optionnel n'étant apparu que sur une infime quantité de modèles. Bref bien qu'il y ait eu de fort belles voitures, c'était aussi chiant qu'une réunion de philatélistes. J'ai du expliquer à Lapinou qu'à partir d'aujourd'hui, nous devenions frères d'armes puisqu'il avait accepté cette galère pour me faire plaisir.

Pour faire plaisir, j'y susi tout de même allé de mon petit commentaire autorisé sur deux ou trois moteurs. Bon, ils étaient propres et refait à neuf mais un quatre-cylindres fut-il coiffé d'un double carburateur SU reste modérément passionnant. On regarde quelques minutes, on fait "oooh la belle durit", puis "ahhh la belle peinture" ou encore "wow super le chromage" puis on s'en va. Et puis c'est chiant parce que personne n'est venu admirer ma belle Visa pourtant "dans son jus" comme on dit dans le milieu de la bagnole ancienne ais elle était sans doute trop acratopège pour eux.. Heureusement, après avoir avalé un gobelet de café, nous sommes partis.

Encore une heure et demie après s'être trainé la bite sur de petites routes bucoliques à la queue-leu-leu, on a eu le droit à un second arrêt. Bis repetita placent ! On a encore exposé nos voiture et moi pour m'amuser j'ai collé ma pauvre voiture entre deux Ferraris. Là, on a bu un coup, même qu'il a fallu que je prouve que j'étais exposant véhicule ancien à une vieille rombière pour avoir le droit à un malheureux gobelet de rosé !

J'ai alors sorti mon porte-clefs Citroën d'époque pour la convaincre et j'ai pu boire pour oublier que je m'étais levé si tôt pour cela. Elle m'a dit que j'aurais du demandé à boire avec le sourire. J'ai juste répondu qu'avec le soleil rasant dans la gueule j'étais plus occupé à plisser les yeux qu'à me marrer sans préciser qu'en plus la situation n'avait rien de drôle parce que se lever tôt pour boire du rosé sur un parking n'était forcément l'éclate la plus totale. Non que je sois bégueule et que je ne sache pas m'amuser mais que faire ce genre de choses en compagnie de sexagénaires obsessionnels devient ennuyeux.

Il y avait là des gens manifestement très riches et qui l'assumaient sans complexe, certains affichant une pédanterie assez comique au volant de leur bolide à deux-cent-mille euros. C'est ainsi qu'une Jaguar de toute beauté est partie à fond dans le rugissement de son six en ligne. Je n'ai pas pu me retenir de faire pareil en lançant mon bicylindre à air pour finir avec un virage au frein à main. Séguéla avait raison : la Visa ça décoiffe !

D'autres étaient beaucoup moins riches comme ce possesseur du moins cher des modèles de Ferrari d'occasion qui s'obstinait à saouler mon pote Olive en lui expliquant que sa pauvre voiture était bourrée de pièces de F355. Je suis resté gentil et n'ai rien dit. Je suis persuadé que le pauvre s'était saigné aux quatre veines pour s'offrir la voiture de ses rêves, persuadé que si on n'avait pas de Ferrari avant cinquante ans on était un raté. J'ai admiré le calme de mon pote Olive parvenant à répondre "oui" en feignant de se montrer intéressé par le babil de ce fâcheux personnage.

Lapinou me faisait un cirque infernal, exigeant que je lui remette les clés de ma Visa pour rentrer chez lui en m’expliquant que je n'aurais qu'à rentrer avec Olive, le cul collé dans le baquet de la belle italienne. Ce n'est pas que j'aie manqué de confiance en ses capacités de jeune conducteur mais j'ai refusé tout net. D'une part, il devait m'accompagner dans cette galère jusqu’au bout, sous peine d'être un déserteur. Enfin, venu pour la première fois à une concentration de voitures anciennes, je n'allais pas me séparer aussi rapidement de mon véhicule d'époque.

On a un peu trainé sur ce maudit parking durant encore une heure, lorsqu'on nous a annoncé qu'on filait déjeuner et que les tables étaient réservées. Encore des petits virolos à soixante à l'heure et nous voici parvenus dans un trou. Le restaurant nous avait aimablement réservé une arrière salle sordide où l'on était censé s'entasser à quarante. Dehors un joli soleil d'automne dardait ses rayons tièdes et j'aurais bien mangé en terrasse moi.

Prétextant un manque de place, Olive, Lapinou et moi nous sommes barrés à l'anglaise dans nos voitures pour aller déjeuner à une terrasse que nous avions croisées à deux kilomètres de là. Le filet de bœuf Rossini était excellent et le vin aussi. Durant près de deux heures, on n'a pas parlé de bagnoles et c'était vraiment reposant.

Je regrette sincèrement d'avoir dit du mal des sportifs parce que sincèrement ils n'ont pas le monopole de la connerie. Je crois que tout ceux qui s'engagent dans une activité sans aucun recul m'ennuient profondément.  Ils sont pénibles, lourdauds, maladroits, obsessionnels, productivistes, inélégants au possible et tout ce qu'ils touchent devient assommant.  En revanche, je leurs reconnais le droit de penser du mal de moi, je suis beau joueur. Mais muré dans mon orgueil, je doute que leurs attaques puissent m'atteindre.

Finalement,  bien que je n'en aie pas le physique, un dandy doit sommeiller en moi. Peut être que rouler en Visa dans une concentration de véhicules ancien où le plus nul vaut au bas mot trente-mille euros est le comble du dandysme ?

« Le dandysme est un soleil couchant; comme l’astre qui décline, il est superbe, sans chaleur et plein de mélancolie. Mais, hélas! la marée montante de la démocratie, qui envahit tout et qui nivelle tout, noie jour à jour ces derniers représentants de l’orgueil humain et verse des flots d’oubli sur les traces de ces prodigieux myrmidons. »
Charles Baudelaire


« Aucun crime n'est vulgaire, mais la vulgarité est un crime. La vulgarité, c'est ce que font les autres. »
Oscar Wilde

07 novembre, 2011

Achat de luxe !

 Matez moi ce petit groin mutin !

Chers lecteurs, vous vous demandez sans doute ce que je peux bien foutre dans la mesure où je crois vous avoir promis de beaux messages. Et bien, si j'ai commencé à les rédiger, je n'en pour autant pas fini un seul. Non, qu'ils ne m'intéressent pas mais simplement que j'aie été occupé ailleurs. Un jour, je serai comme H16 et je me fendrai moi aussi d'un article par jour. Ce jour là, je serai ingénieur ou expert-comptable et je prendrai mon RER tous les matins à 7h43. Bref, ce n'est pas demain la veille que je produirai un article par jour. Et croyez moi que je le regrette. Ceci dit comme tout vient à point à qui sait attendre, vous aurez mes articles prochainement. Il suffit que je me bouge le cul.

Pour tout vous raconter et vous expliquez quelle est mon excuse valable pour ne pas avoir écrit ici, il se trouve que mon véhicule de tous les jours, que j'ai acquis pour 400€ voici déjà plusieurs années commence à vieillir. Alors je me suis dit que plutôt que d'avoir des frais dessus, je ferais bien d'en changer. C'est dommage je l'aime bien ma voiture mais elle commence à faire grise mine. Viendra un jour, pas si lointain, où on me filera une pièce tellement elle fait clodo. 

Vu qu'elle ne parcourt que 4kms 4 jours par semaine, je n'ai jamais imaginé qu'il m'en faudrait une neuve. Alors j'ai adapté le concept de voiture jetable. Je cherche toujours une daube pas chère sur laquelle je ne fais aucun frais. Je crois d'ailleurs que le budget du livreur de pizza sur son Peugeot Fox est plus élevé que le mien sur ma voiture. De l'essence, parfois un peu d'huile et zou c'est parti. 

Mais toutes les bonnes choses ayant une fin, je crois que l'heure de la retraite a sonné pour ma voiture. Il était temps que je m'en offre une autre. Je me suis donc plongé dans les petites annonces pour trouver une grande soeur à ma RJ49. Ce ne fut pas une mince affaire.

Que pouvais je m'offrir pour quelques centaines d'euros, qui puisse démarrer par tous les temps, qui ne nécessite aucun entretien, et ne soit pas au bout du rouleau ? Autant vous dire que c'était l'équation difficile à résoudre. Parce que toutes les petites voitures économiques valent la peau des fesses. Aucune Twingo en bon état à ce prix là, quant à une modeste 4L, n'y songez pas puisqu'on commence à les collectionner.

Ne me restaient que les voitures de vieux, les voitures sans grâce, les laborieuses qui furent achetées à l'époque par raison sans jouir d'aucun capital de sympathie. Celles que Mamie ou Papy ne peuvent même pas offrir au petit-fils qui vient de passer son permis sous peine de passer pour des monstres sans coeur !

Replongeant dans mon adolescence, j'ai repensé aux véhicules que l'on voyait à cette époque, les plus moches, ceux que l'on n'aurait voulu conduire pour rien au monde de peur d'être vu au volant par ses copains ou pire par des gonzesses de son âge ! Et dans cette catégorie, Citroën, voiture de vieux par essence ne s'est jamais loupé. Tous leurs milieux de gamme se sont avéré de prodigieux engins moches et confortables, une sorte d’antichambre avant le fauteuil roulant.

Après avoir éliminé la GS et la BX, très laides et bon marché mais dont le système hydraulique me semblait source d'emmerdes, ne me restait que la Visa, un véhicule très laid dont personne ou presque ne se souvient. Il en roule pourtant encore quelques unes, mais c'est le genre de voiture que l'on ne voit même pas. 

Tiens si je devais verser dans la délinquance, je ferais mes coups en Visa. Je suis sur que par un témoin ne pourrait citer le modèle. Tous parleraient d'une voiture moyenne, un peu cubique, ni petite, mais pas grande non plus. Quant aux couleurs, elles sont si mal définies que ces éventuels témoins parleraient de blanc-jaune, de rouge tirant vers le orange ou encore de bleu délavé. Je suis sur que si Mersrine avait fait ses coups en Visa, il serait encore en vie et la préfecture de Police totalement perdue en conjectures. Broussard en serait pour ses frais et aurait été rétrogradé à la circulation.

J'ai donc durant les dix jours passés écumé les petites annonces pour trouver la Visa de mes rêves. Bien sur, comme chaque fois que je m'intéresse à quelque chose, il a fallu que je lise tout. C'est ainsi que j'ai perdu du temps sur les topics traitant du sujet, cherchant à connaitre toutes les séries et toutes leurs caractéristiques.

Mon dévolu s'est alors porté sur une Visa 1 qui fut un échec commercial avant son reliftage, tellement son style apparait comme ...  Comme quoi d'ailleurs ? Comme je ne sais pas quoi, vu qu'elle ne ressemble à rien. Le styliste, sans doute sous acide, ayant sous-traité le dessins à son gamin de sept ans ou ayant démarré un Alzheimer, ayant en plus de rater le dessin, décidé de lui greffer une sorte de petit groin en guise de calandre.

Je suis donc propriétaire depuis aujourd'hui d'une Citroën Visa série 1 (dite "à groin") de 1980 que j'ai acquise pour une somme dont l'énoncé vous ferait rire. Affichant seulement dix-mille kilomètres, je pense finir mes jours avec elle et peut être même que je me ferais enterrer dedans comme une sorte de guerrier de l'asphalte. Comme je suis un peu rat par plaisir, j'ai même fait baisser le tarif de cinquante euros. Non que je sois à cinquante euros près mais parce que cela me faisait plaisir. J'ai fait comme si j'étais riche et que j'aille chez le concessionnaire et que j'exige une remise. Pas de raison pour qu'un pauvre hère comme moi ne se la raconte pas en jouant la négociation commerciale comme un mec qui aurait son BTS Tech de Co !

Quel beau cul !

J'ai déjà parcouru une quinzaine de kilomètres à bord. Pépé (repose en paix Pépé) l'a bien entretenue et je suis parvenu à exploiter les trente-cinq chevaux rageurs de son moteur bicylindre (celui de la 2cv). J'ai roulé en regardant droit devant moi pour ne pas affronter les regards des jaloux. Quand on roule en voiture de collection, on sait que l'on s'expose à l'envie.

A peine rentré chez moi, je l'ai garée à côté de ma RJ49 et je dois dire que ma collection de voitures d'exception a fière allure. Tout cela prend tournure. Bien sur, je n'ai pas pu m'empêcher de la prendre en photo pour envoyer des MMS à toutes mes collections. C'est d'un narcissisme éhonté mais bon, je n'ai pas résisté à leur jeter ma réussite à la face. Olive s'est défendu mollement en me renvoyant une photo d'une Mercedes SL300 garée dans le garage qui entretient sa Ferrari.

Mais bien sur Olive n'a pas su quoi rétorquer quand je lui ai assené que la Visa était la première voiture au monde à avoir été dotée d'un allumage électronique intégral. D'ailleurs même si je ne sais pas ce que cela signifie exactement, je trouve cela topissime et même qu'il y a encore l'autocollant d'époque sur la lunette arrière qui le proclame ! Putain, c'est pas sur sa daube de Maranello qu'on montait des allumages électroniques intégraux en 1980 !

En plus sa Ferrari elle est même pas Club alors que ma Visa, c'est une club ce qui donne une image un peu british toute de ronces de noyer et de cuir. Même si c'est plutôt plastique et skaï dans les faits. Mais bon avec un peu d'imagination, on s'en sort. Et puis on ne peut pas avoir un allumage électronique intégral et du cuir et de la ronce de noyer. Soit on choisi la haute technologie, soit le confort, c'est tout !

En ces heures de crise où l'on ne sait plus dans quoi investir, moi j'ai choisi la Visa série 1 Club. Ça ne vaut pas plus cher qu'une poignée d'actions de la SG ou de la BNP mais cela ne peut pas descendre !

Wow vous êtes sur le cul face à une telle débauche de luxe !